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Réconciliation - Fondation autochtone de guérison

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mouvement qui, à <strong>de</strong> nombreux égards, a été mené par la volonté <strong>de</strong> guérir les<br />

blessures d’un passé hanté par le traumatisme inavoué <strong>de</strong> l’internement.<br />

Il n’est pas étonnant qu’au début, <strong>de</strong> nombreux CJ aient évité <strong>de</strong> participer aux<br />

réunions publiques sur le redressement. Cela s’expliquait par la peur d’être<br />

visible, d’être perçu comme l’étranger, et même par la crainte d’une forte réaction<br />

xénophobe. Le redressement a permis <strong>de</strong> faire émerger les souvenirs d’un passé<br />

dont le sort n’a jamais été scellé. Quand bien même le passé était enfoui dans les<br />

profon<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> leur mémoire, même à l’occasion <strong>de</strong> conversations ordinaires,<br />

les gens revivaient ces scènes <strong>de</strong> déracinement, <strong>de</strong> confinement et <strong>de</strong> souffrance;<br />

<strong>de</strong> nouveau, les blessures qu’ils avaient endurées étaient impossibles à guérir.<br />

Ils avaient appris qu’être CJ signifiait vivre avec une conscience divisée par une<br />

contradiction interne : tandis que « Canadien » désignait la sécurité <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong><br />

citoyenneté, le sentiment d’appartenance nationale et <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> gouvernance<br />

démocratique, « Japonais » était synonyme du spectre du « sujet d’un pays<br />

ennemi », d’une i<strong>de</strong>ntité qui les a condamnés à errer du côté obscur <strong>de</strong> la nation<br />

— où ils ont été privés <strong>de</strong> la parole et du pouvoir <strong>de</strong> se défendre.<br />

Bien que les autorités gouvernementales, notamment la GRC et le corps militaire,<br />

savaient à l’évi<strong>de</strong>nce que les déracinements <strong>de</strong> masse n’étaient pas une mesure<br />

sécuritaire nécessaire, et qu’ils reflétaient une capitulation face aux pressions<br />

racistes en Colombie-Britannique, <strong>de</strong>s décennies se sont écoulées sans qu’aucune<br />

mesure officielle n’ait été prise en vue <strong>de</strong> reconnaître les injustices. L’absence d’une<br />

telle reconnaissance publique a perpétué le lourd far<strong>de</strong>au qui associait les CJ aux<br />

« sujets d’un pays ennemi ». Après avoir subi <strong>de</strong>s pressions pour s’assimiler — pour<br />

<strong>de</strong>venir la minorité modèle — ils portaient toujours au plus profond d’eux la hantise<br />

psychologique et émotionnelle <strong>de</strong> l’internement. Comment passer d’ici à là? — d’un<br />

état <strong>de</strong> hantise à la Chambre <strong>de</strong>s communes, le cœur même du pouvoir <strong>de</strong> la nation?<br />

En utilisant la Loi sur les mesures <strong>de</strong> guerre pour interner les CJ, le gouvernement<br />

pouvait justifier son action, tout comme l’ont fait les administrateurs et les politiciens,<br />

en évoquant sa parfaite légalité. De fait, lorsque l’Association nationale <strong>de</strong>s<br />

Canadiens japonais (NAJC) a amorcé le redressement sous la forme d’un mouvement<br />

politique, leur appel pour la justice s’est basé sur les abus commis au nom <strong>de</strong> la Loi<br />

sur les mesures <strong>de</strong> guerre. En d’autres termes, même si les politiques du gouvernement<br />

revêtaient sans doute un caractère légal, les effets qui en ont découlé — déracinement<br />

<strong>de</strong> masse, expropriation, éloignement forcé et déportation — ont largement dépassé<br />

les normes d’équité et <strong>de</strong> régularité <strong>de</strong>s procédures dictées par la loi. La violation<br />

<strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> citoyenneté au nom d’une origine raciale attribuée — catégorisée sous<br />

l’appellation « <strong>de</strong> race japonaise » — ne pouvait pas prétendre relever d’une mesure<br />

sécuritaire nécessaire.<br />

Concevoir l’appel pour le redressement soulevait <strong>de</strong>s questions pressantes<br />

liées à la narration, à la voix et à la position, à tous ces éléments qui exigent<br />

322 | Roy Miki

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