Réconciliation - Fondation autochtone de guérison
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eaucoup moins convaincues des possibilités d’en faire autant avec les migrants chinois. Tout au long des témoignages, les allégations au sujet des Chinois et de leur implication dans le commerce illicite des liqueurs fortes ont fréquemment émergées. Les gens appelés à témoigner ont exprimé beaucoup plus de craintes à l’égard des migrants chinois et de leur implication dans le trafic des liqueurs qu’envers tout autre groupe racial. Les deux commissaires, le juge McDonald et le révérend J. McLeod qui ont interrogé des témoins systématiquement en Colombie-Britannique demandaient si les Chinois consommaient de l’alcool et s’ils en fournissaient aux Autochtones. Bien que certains aient attesté que les Chinois étaient une « race sobre », d’autres ont persisté à dire qu’ils étaient intempérants, mais qu’ils réussissaient à tromper les autorités du fait qu’[traduction] « une grande partie de leur consommation d’alcool se faisait chez eux. 92 En revanche, les avis des agents coloniaux étaient moins partagés sur ce rôle des migrants chinois dans le commerce de boissons alcoolisées. Beaucoup d’agents des Indiens et des missionnaires se sont plaints que les Chinois avaient une influence dévastatrice sur les collectivités autochtones en leur fournissant des substances intoxicantes. Comme l’agent des Indiens Phair le rapportait à ses supérieurs, il y a [traduction] « deux ou trois Chinois ici [Lillooet] qui je crois gagnent leur vie en vendant de l’alcool aux Indiens, mais ils sont tellement rusés que c’est [sic] presqu’une impossibilité de démontrer qu’ils sont coupables. » 93 Ce discours ponctué de « Indiens soûls » et de Chinois « fourbes/sournois » était tellement répandu, généralisé, que ces vérités raciales ont surenchéri des informations numériques (factuelles) présentées par le surintendant Henry Sheppard. Aux audiences de la Commission, le juge McDonald a questionné Sheppard sur son rapport annuel de la façon suivante : [traduction] J’observe qu’il y a eu 406 cas d’ivresse selon votre rapport? — Oui. J’observe [qu’il y avait] 231 cas chez les Indiens? — Oui. Et de ceux-là 175 pour être ivre? — Oui. Dans le cas des Indiens, avez-vous essayé de savoir où ils prenaient la boisson? — Oui. Les Chinois en général l’ont eue pour eux. Avez-vous réussi à trouver des arguments contre eux? — Dans quelques cas. Vous avez eu 29 condamnations? — Oui, pour leur en avoir fourni. Est-ce que les personnes déclarées coupables avaient une licence? — Non. Ils n’avaient pas de licence? — Oui. Des 175 cas chez les Indiens, il y a eu 29 condamnations pour une deuxième fois? — Oui.94 Cet échange est intéressant pour plusieurs raisons. Premièrement, une série particulière de présomptions raciales a inspiré les questions du juge McDonald. Manifestement, il ne s’est pas préoccupé de la répartition dûment consignée des infractions pour cause d’ivresse ou d’approvisionnement de boissons alcoolisées comme le montraient les deux tableaux, ce qui était des nombres principalement chez les Blancs qui étaient déclarés coupables de fournir de l’alcool aux Indiens 190 | Renisa Mawani
et d’être ivres. Au lieu de cela, ses questions semblaient orientées à partir de connaissances raciales persistantes au sujet d’Indiens « sous-évolués » qui ne pouvaient pas s’autoréguler et qui passaient leur temps à se soûler, de même qu’au sujet de ces Chinois « fourbes » qui étaient coupables de leur fournir de l’alcool. Sheppard a renforcé ces perceptions. De nouveau questionné, cette fois par le révérend McLeod, il a amené les commissaires à conclure que toutes les accusations pour approvisionnement de boissons alcoolisées aux Indiens avaient été faites contre les Chinois : [traduction] J’ai remarqué que lorsque vous avez mentionné les cas de vente de liqueurs aux Indiens, vous avez dit qu’il y avait eu 29 cas de vente et que les personnes avaient fait ces ventes de façon illicite? — Un Chinois rencontre un Indien et va s’acheter une bouteille d’alcool et il la donne à l’Indien. Donc, ils fournissent des Indiens par bouteille? — Oui.95 Pour les lecteurs du rapport de la Commission qui ne font pas référence aux tableaux, le témoignage de Sheppard à lui seul confirme les vérités raciales dominantes au sujet du danger que représentaient les Chinois pour les populations autochtones. Quand le juge McDonald a interrogé Wellington Dowler, un commis employé au service de police de Victoria, pour savoir si [traduction] « d’autres personnes étaient envoyées dans des bars (saloons) chercher de l’alcool pour les Indiens », il a répondu comme suit : [traduction] « Oui, principalement des Chinois. Ce sont eux qui violent la loi. » 96 Même si les commissaires et les témoins ont généré toute une série de connaissances au sujet des populations raciales et sur le problème lié à la consommation d’alcool en Colombie-Britannique, ces vérités axées sur les « Indiens soûls » et les migrants chinois qui fonctionnaient comme des entrepreneurs immoraux avaient des racines épistémologiques beaucoup plus profondes. La production de subjectivités raciales que la Commission royale a faite a non seulement généré de nouvelles idées portant sur les différences raciales, mais elle a aussi puisé dans des vérités répandues d’un côté comme de l’autre des frontières et elle les a réactivées. Les migrants chinois qui menaçaient la main d’oeuvre ouvrière blanche et le fait de les considérer de façon putative inférieurs aux Afro-Américains au milieu du dix-neuvième siècle ont été ultérieurement diabolisés par les dangers biologiques que ceux-ci représentaient pour les Autochtones. Alors qu’on distinguait l’immoralité et la malhonnêteté foncières des Chinois par comparaison à l’ignorance des « Nègres » en Californie, ces caractéristiques propres aux Chinois en Colombie-Britannique s’appliquaient par rapport à la présumée vulnérabilité des Autochtones. Même si ces craintes soulevées par la main d’oeuvre chinoise ont continué à soutenir le racisme anti-chinois tout le long de la côte ouest du Canada, vers la fin du dix-neuvième siècle, les agents des Indiens et la police se plaignaient des Chinois pour d’autres motifs, notamment leur penchant à vendre de l’alcool aux Indiens. Selon ce que plusieurs ont indiqué, ces contaminations interraciales ont non seulement nuit au bien-être moral et physique des collectivités autochtones, mais aussi à la longévité du régime colonial de la Colombie-Britannique. Cultiver le Canada | 191
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Chinois consommaient <strong>de</strong> l’alcool et s’ils en fournissaient aux Autochtones. Bien que<br />
certains aient attesté que les Chinois étaient une « race sobre », d’autres ont persisté à<br />
dire qu’ils étaient intempérants, mais qu’ils réussissaient à tromper les autorités du fait<br />
qu’[traduction] « une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> leur consommation d’alcool se faisait chez<br />
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vendant <strong>de</strong> l’alcool aux Indiens, mais ils sont tellement rusés que c’est [sic] presqu’une<br />
impossibilité <strong>de</strong> démontrer qu’ils sont coupables. » 93 Ce discours ponctué <strong>de</strong> « Indiens<br />
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le surintendant Henry Sheppard.<br />
Aux audiences <strong>de</strong> la Commission, le juge McDonald a questionné Sheppard sur son<br />
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[traduction]<br />
J’observe qu’il y a eu 406 cas d’ivresse selon votre rapport? — Oui.<br />
J’observe [qu’il y avait] 231 cas chez les Indiens? — Oui.<br />
Et <strong>de</strong> ceux-là 175 pour être ivre? — Oui.<br />
Dans le cas <strong>de</strong>s Indiens, avez-vous essayé <strong>de</strong> savoir où ils prenaient la boisson? — Oui.<br />
Les Chinois en général l’ont eue pour eux.<br />
Avez-vous réussi à trouver <strong>de</strong>s arguments contre eux? — Dans quelques cas.<br />
Vous avez eu 29 condamnations? — Oui, pour leur en avoir fourni.<br />
Est-ce que les personnes déclarées coupables avaient une licence? — Non.<br />
Ils n’avaient pas <strong>de</strong> licence? — Oui.<br />
Des 175 cas chez les Indiens, il y a eu 29 condamnations pour une <strong>de</strong>uxième fois? — Oui.94<br />
Cet échange est intéressant pour plusieurs raisons. Premièrement, une série<br />
particulière <strong>de</strong> présomptions raciales a inspiré les questions du juge McDonald.<br />
Manifestement, il ne s’est pas préoccupé <strong>de</strong> la répartition dûment consignée <strong>de</strong>s<br />
infractions pour cause d’ivresse ou d’approvisionnement <strong>de</strong> boissons alcoolisées<br />
comme le montraient les <strong>de</strong>ux tableaux, ce qui était <strong>de</strong>s nombres principalement<br />
chez les Blancs qui étaient déclarés coupables <strong>de</strong> fournir <strong>de</strong> l’alcool aux Indiens<br />
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