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Réconciliation - Fondation autochtone de guérison

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questions sur notre famille. Il m’était arrivé une fois auparavant <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une<br />

photo <strong>de</strong> mon oncle, décédé quand j’avais douze ans, et elle m’avait envoyé une photo<br />

(photocopie) <strong>de</strong> lui revêtu <strong>de</strong> l’uniforme du Corps <strong>de</strong>s Marines <strong>de</strong>s États-Unis, mais<br />

elle m’avait rien écrit à son sujet. Ces photos <strong>de</strong> membres masculins <strong>de</strong> ma famille en<br />

uniforme militaire restaient enveloppées <strong>de</strong> mystère (ou <strong>de</strong> secret), les <strong>de</strong>ux ayant l’air<br />

jeune, frais et dispos, alors qu’ils partaient pour la guerre. Je reconnaissais à quel point<br />

il <strong>de</strong>vait être pénible pour elle <strong>de</strong> parler du passé et <strong>de</strong> notre famille.<br />

J’ai rangé la photo <strong>de</strong> mon grand-père et je l’ai oubliée jusqu’à ce que je la revois reproduite<br />

encore une fois dans une notice nécrologique que ma mère m’a remise <strong>de</strong>s années plus tard.<br />

En lisant cette nécrologie dans The Eastern Door, j’ai appris que la photo avait été prise en<br />

1943 alors que mon grand-père avait dix-huit ans et avant qu’il ne soit envoyé pour participer<br />

à l’offensive <strong>de</strong> Dieppe.<br />

Septembre 1947<br />

C’est une soirée chau<strong>de</strong> d’été au milieu <strong>de</strong>s années 1990 quand ma soeur me raconte une<br />

partie <strong>de</strong> cette histoire. Nous fumons dans l’appartement que nous partageons rue Bay. Il n’y<br />

avait pas loin à marcher passé la rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Marshall McLuhan pour se rendre à l’université<br />

où nous étudions toutes les <strong>de</strong>ux.<br />

« Sais-tu qui était notre grand-père? » me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>-t-elle.<br />

« Non, » lui répondis-je.<br />

« Il s’appelait Styres. »<br />

Ce nom me semblait familier et je lui ai <strong>de</strong>mandé, « Est-ce lui qui vivait à Montréal et qui a<br />

envoyé une lettre à maman lui disant <strong>de</strong> ne plus communiquer avec lui? »<br />

« Oui, c’est lui. C’est le père <strong>de</strong> maman. »<br />

Comme ma soeur, j’avais calculé les mois avant la naissance <strong>de</strong> ma mère et avais conclu<br />

qu’elle avait été conçue en septembre 1947. Les parents <strong>de</strong> mes grands-parents étaient <strong>de</strong>s<br />

amis et ils voulaient qu’ils se marient, mais ils ont refusé.<br />

Nous avons hoché la tête en même temps en signe <strong>de</strong> frustration à la pensée <strong>de</strong>s efforts<br />

communs <strong>de</strong> notre mère et <strong>de</strong> sa famille pour que son père absent ne soit jamais mentionné.<br />

Ils ont tous donné <strong>de</strong>s réponses évasives dès qu’une conversation abordait ce sujet. Nous<br />

savions tous qu’il ne fallait pas parler <strong>de</strong> lui.<br />

En grandissant, je me suis souvent <strong>de</strong>mandée s’il était en prison, comme quelques-uns <strong>de</strong>s<br />

membres <strong>de</strong> ma parenté qui périodiquement réapparaissaient, sortis <strong>de</strong> nulle part. La famille<br />

les serrait dans leurs bras, les embrassait, et puis ils disparaissaient pendant <strong>de</strong>s années,<br />

oubliés, sans nouvelles comme dans une prison silencieuse.<br />

1952<br />

Plusieurs années se sont écoulées à fouiller à travers <strong>de</strong>s dossiers sur microfiches, <strong>de</strong>s archives<br />

et <strong>de</strong>s cahiers-in<strong>de</strong>x <strong>de</strong> recenseurs; j’ai finalement trouvé la confirmation <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong><br />

mon grand-père : une carte <strong>de</strong> passage à la frontière <strong>de</strong> Peace Bridge datée <strong>de</strong> 1952. Ce<br />

n’était pas son premier voyage à Buffalo. Il s’était i<strong>de</strong>ntifié comme monteur <strong>de</strong> charpentes en<br />

acier. L’adresse qu’il indique pour sa rési<strong>de</strong>nce est la rue College à Buffalo, New York. Mon<br />

grand-père habitait chez George Johnson, l’oncle <strong>de</strong> sa mère.<br />

Cultiver le Canada | 155

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