Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ... Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

28.08.2013 Views

Chapitre 4 entre 8 % et 26 %, des abus commis dans le milieu familial auprès de jeunes filles âgées de moins de 18 ans (Robin, Chester et coll., 1997; Boney-McCoy et Finkelhor, 1995; Bushnell, Wells et Oakley-Browne, 1992; Fink, Bernstein, Handelsman, Foote et Lovejoy, 1995; Russell, 1983). Robin et ses collaborateurs indiquent : [TRADUCTION] Dans la collectivité que nous avons étudiée, la coutume voulant que les membres de la famille élargie (grands-parents, tantes et oncles, cousins) résident dans des habitats entassés peut expliquer l’augmentation du risque d’agression sexuelle contre les enfants commise dans le milieu de vie de l’enfant. La pauvreté contribue aussi à ce que la surveillance quotidienne des enfants d’une mère au travail soit réduite. Par moments, les responsabilités de gardiennage sont confiées à des hommes sans travail, dont plusieurs sont alcooliques (1997 : 782). Robin et ses collaborateurs (1997) ont constaté que les hommes ayant été victimes d’abus sexuel rapportaient plus fréquemment que les autres avoir éprouvé des problèmes comportementaux à un âge précoce. En effet, ces hommes ont rapporté avoir été expulsés de l’école, avoir enfreint les règlements, avoir été arrêtés, avoir comparu au tribunal de la jeunesse, avoir menti, volé, brisé et détruit la propriété, fugué et avoir eu des rapports sexuels consentants à un jeune âge. Les femmes ayant été victimes d’abus sexuel pendant l’enfance ont manifesté des comportements semblables à ceux des hommes victimes d’abus, plus susceptibles d’avoir fait l’école buissonnière et d’avoir bu à l’excès. Robin et ses collaborateurs ont constaté que les hommes et les femmes victimes d’abus sexuel pendant l’enfance ont continué à éprouver des problèmes de comportement après l’âge de 15 ans. Comparativement aux personnes qui n’ont pas été agressées sexuellement dans leur enfance, ils étaient plus enclins à faire des tentatives de suicide, à avoir des difficultés à payer leurs dettes et à être incapables d’avoir des relations intimes. Les femmes victimes d’abus sexuel ont aussi rapporté une fréquence plus élevée d’ivresse que celles n’ayant pas été agressées. Il n’y avait pas de différences significatives entre les deux groupes en ce qui a trait à l’emploi, aux arrestations entraînées par des actes délictueux graves, aux bagarres ou conflits, au divorce et à la séparation (Robin, Chester et coll., 1997). Chez les hommes victimes d’abus sexuel dans leur enfance, on constatait comme troubles psychiatriques les plus fréquemment diagnostiqués : une personnalité antisociale, des troubles durant toute leur vie liés à l’usage de drogues et des troubles affectifs permanents. Les femmes victimes d’agression présentaient plus souvent que les autres une personnalité antisociale, des troubles liés à la consommation d’alcool tout au long de leur vie, des troubles durant toute leur vie liés à l’usage de drogues, des troubles affectifs permanents, des troubles de l’anxiété durant toute leur vie et un trouble de stress post-traumatique (SSPT) chronique. Après vérification de l’alcoolisme parental et de l’âge, un diagnostic de 3 troubles psychiatriques ou plus (y compris la dépendance à l’alcool ou la consommation excessive d’alcool) était plus courant pour les hommes et les femmes ayant rapporté des antécédents d’abus sexuel dans leur enfance, que pour ceux et celles qui n’avaient pas souffert d’abus. Les hommes victimes d’abus sexuel étaient plus de deux fois plus susceptibles d’avoir au moins un parent alcoolique que les hommes non victimes d’abus. L’alcoolisme parental était aussi associé à une augmentation de la probabilité du SSPT chez les femmes victimes d’abus, même après la vérification de l’abus sexuel dans l’enfance (Robin, Chester et coll., 1997). 54

Chapitre 4 Dans le cadre de l’étude menée par Robin et ses collaborateurs (1997), la gravité de l’abus sexuel a été évaluée en tenant compte notamment de rapports sexuels avec pénétration vaginale (55 %) et de multiples agresseurs par sujet (50 %). Il était plus fréquent que les hommes soient les agresseurs (96 %); par contre, la gravité de l’abus sexuel, à la différence d’autres études, n’était pas associée de manière significative à des problèmes vécus à l’adolescence et à l’âge adulte. Robin et ses collaborateurs ont conclu leur étude en affirmant que l’agression sexuelle contre les enfants chez les Amérindiens constituait un élément et un indice du dysfonctionnement familial et communautaire (Bechtold 1994; Piasecki, Manson, Biernoff, Hiat, Taylor et coll., 1989; Rodenhauser, 1988; Swanson, Bratrude et Brown, 1971) ainsi qu’un prédicteur de problèmes. Ils indiquent qu’une fréquence élevée d’agression sexuelle contre les enfants et de troubles psychiatriques peut aller de pair avec une détérioration accélérée de la structure sociale et des traditions culturelles constatées dans cette étude démographique (Robin, Chester et coll., 1997). Ces considérations corroborent des conclusions similaires se dégageant d’études auprès d’autres groupes culturels et amérindiens qui ont rapporté un lien entre l’urbanisation des collectivités rurales, le stress causé par l’acculturation, l’augmentation de la violence à l’égard des femmes et des enfants et l’accroissement de troubles psychiatriques (Kettle, 1993; Kirmayer, 1994). Robin et ses collaborateurs font ressortir le fait que, traditionnellement dans les collectivités autochtones, la famille a servi de véhicule pour la transmission culturelle, « assurant un environnement grâce auquel les traditions sont transmises d’une génération à l’autre, apportant stabilité, soutien, orientation et direction aux membres de la famille » (1997 : 783; McCubbin, Thompson, Thompson, McCubbin et Kaston, 1993; Red Horse, Red Horse, Neubeck et Decker, 1981). À l’opposé, la collectivité ou zone tribale au sein de laquelle ils ont mené leur recherche avait cessé d’organiser la plupart des cérémonies et des rituels traditionnels avant le début du 20e siècle et, par conséquent, la grande majorité des membres de la tribu ne connaissaient pas ces traditions. La génération des plus jeunes, de plus en plus absorbée par les influences et les comportements de la société dominante, faisait pour ainsi dire abstraction des traditions encore suivies et les méconnaissait (Robin, Chester et coll., 1997). Barker-Collo (1999) a étudié la symptomatologie déclarée se rapportant aux femmes autochtones et aux femme de race blanche canadiennes ayant été victimes d’abus sexuel dans leur enfance. L’étude précise que les deux groupes ont rapporté des niveaux et des types de symptomatologie sensiblement différents par suite de l’abus sexuel, les femmes autochtones indiquant globalement des niveaux supérieurs de symptomatologie. Les symptômes auxquels on attribue ces différences entre les niveaux entraient dans trois catégories générales, notamment des symptômes somatiques, des troubles de sommeil ainsi que des difficultés sexuelles. Les femmes autochtones ont aussi rapporté de façon notable une fréquence supérieure d’épisodes de pleurs non contrôlables. Barker-Collo écrit : [TRADUCTION] En fonction des rapports sur l’augmentation de la prévalence d’abus sexuel chez les populations autochtones du Canada (p. ex. LaRocque, 1994), ces résultats font converger l’attention sur l’existence d’un groupe culturel qui n’est pas seulement à risque plus élevé d’être victime d’abus sexuel, mais également qui est plus susceptible de souffrir d’une symptomatologie consécutive à l’abus encore plus négative que celle de la majorité culturelle ... Étant donné que les interventions dans le cadre du [traitement des séquelles de l’agression sexuelle durant l’enfance] s’appuient sur des travaux de recherche qui présument une homogénéité relative comme suites à l’abus, elles ne sont pas adaptées aux différences dans les réactions ou attitudes dans un cas d’agression sexuelle, des 55

Chapitre 4<br />

Dans le cadre de l’étude menée par Robin et ses collaborateurs (1997), la gravité de l’abus sexuel a été<br />

évaluée en tenant compte notamment de rapports sexuels avec pénétration vaginale (55 %) et de multip<strong>les</strong><br />

agresseurs par sujet (50 %). Il était plus fréquent que <strong>les</strong> hommes soient <strong>les</strong> agresseurs (96 %); par<br />

contre, la gravité de l’abus sexuel, à la différence d’autres études, n’était pas associée de manière significative<br />

à des problèmes vécus à l’ado<strong>les</strong>cence et à l’âge a<strong>du</strong>lte. Robin et ses collaborateurs ont conclu leur étude<br />

en affirmant que l’agression sexuelle contre <strong>les</strong> enfants <strong>chez</strong> <strong>les</strong> Amérindiens constituait un élément et<br />

un indice <strong>du</strong> dysfonctionnement familial et communautaire (Bechtold 1994; Piasecki, Manson, Biernoff,<br />

Hiat, Taylor et coll., 1989; Rodenhauser, 1988; Swanson, Bratrude et Brown, 1971) ainsi qu’un prédicteur<br />

de problèmes. Ils indiquent qu’une fréquence élevée d’agression sexuelle contre <strong>les</strong> enfants et de troub<strong>les</strong><br />

psychiatriques peut aller de pair avec une détérioration accélérée de la structure sociale et des traditions<br />

culturel<strong>les</strong> constatées dans cette étude démographique (Robin, Chester et coll., 1997). Ces considérations<br />

corroborent des conclusions similaires se dégageant d’études auprès d’autres groupes culturels et<br />

amérindiens qui ont rapporté un lien entre l’urbanisation des collectivités rura<strong>les</strong>, le stress causé par<br />

l’acculturation, l’augmentation de la violence à l’égard des femmes et des enfants et l’accroissement de<br />

troub<strong>les</strong> psychiatriques (Kettle, 1993; Kirmayer, 1994).<br />

Robin et ses collaborateurs font ressortir le fait que, traditionnellement dans <strong>les</strong> collectivités <strong>autochtones</strong>,<br />

la famille a servi de véhicule pour la transmission culturelle, « assurant un environnement grâce auquel<br />

<strong>les</strong> traditions sont transmises d’une génération à l’autre, apportant stabilité, soutien, orientation et<br />

direction aux membres de la famille » (1997 : 783; McCubbin, Thompson, Thompson, McCubbin et<br />

Kaston, 1993; Red Horse, Red Horse, Neubeck et Decker, 1981). À l’opposé, la collectivité ou zone<br />

tribale au sein de laquelle ils ont mené leur recherche avait cessé d’organiser la plupart des cérémonies et<br />

des rituels traditionnels avant le début <strong>du</strong> 20e siècle et, par conséquent, la grande majorité des membres<br />

de la tribu ne connaissaient pas ces traditions. La génération des plus jeunes, de plus en plus absorbée<br />

par <strong>les</strong> influences et <strong>les</strong> comportements de la société dominante, faisait pour ainsi dire abstraction des<br />

traditions encore suivies et <strong>les</strong> méconnaissait (Robin, Chester et coll., 1997).<br />

Barker-Collo (1999) a étudié la symptomatologie déclarée se rapportant aux femmes <strong>autochtones</strong> et<br />

aux femme de race blanche canadiennes ayant été victimes d’abus sexuel dans leur enfance. L’étude<br />

précise que <strong>les</strong> deux groupes ont rapporté des niveaux et des types de symptomatologie sensiblement<br />

différents par suite de l’abus sexuel, <strong>les</strong> femmes <strong>autochtones</strong> indiquant globalement des niveaux supérieurs<br />

de symptomatologie. Les symptômes auxquels on attribue ces différences entre <strong>les</strong> niveaux entraient<br />

dans trois catégories généra<strong>les</strong>, notamment des symptômes somatiques, des troub<strong>les</strong> de sommeil ainsi<br />

que des difficultés sexuel<strong>les</strong>. Les femmes <strong>autochtones</strong> ont aussi rapporté de façon notable une fréquence<br />

supérieure d’épisodes de pleurs non contrôlab<strong>les</strong>. Barker-Collo écrit :<br />

[TRADUCTION] En fonction des rapports sur l’augmentation de la prévalence d’abus<br />

sexuel <strong>chez</strong> <strong>les</strong> populations <strong>autochtones</strong> <strong>du</strong> Canada (p. ex. LaRocque, 1994), ces résultats<br />

font converger l’attention sur l’existence d’un groupe culturel qui n’est pas seulement à<br />

risque plus élevé d’être victime d’abus sexuel, mais également qui est plus susceptible de<br />

souffrir d’une symptomatologie consécutive à l’abus encore plus négative que celle de la<br />

majorité culturelle ... Étant donné que <strong>les</strong> interventions dans le cadre <strong>du</strong> [traitement des<br />

séquel<strong>les</strong> de l’agression sexuelle <strong>du</strong>rant l’enfance] s’appuient sur des travaux de recherche<br />

qui présument une homogénéité relative comme suites à l’abus, el<strong>les</strong> ne sont pas adaptées<br />

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