Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ... Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

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Chapitre 4 suivies et surveillées de beaucoup plus près que des familles mieux nanties, par les organismes de protection à l’enfance à l’affût des manifestations de mauvais traitements et de négligence à l’égard des enfants. Cette surveillance plus attentive concourt à répandre largement la perception que la violence physique et la négligence envers les enfants sont plus fréquentes chez les familles autochtones pauvres (Swift, 1995). Selon la perspective de la recherche, il est difficile d’étudier le taux de fréquence de mauvais traitements faits aux enfants, étant donné les nombreux problèmes méthodologiques. Citons par exemple la spécificité quant aux définitions d’abus (p. ex. l’inclusion d’un plus large spectre d’activités résulterait en un taux plus élevé) et des problèmes concernant la déclaration par la personne elle-même (problème de sur ou de sous-déclaration, du rappel de mémoire). Les comptes rendus de recherche font état d’une grande variation dans les taux de fréquence de mauvais traitements faits aux enfants, allant d’un taux de 5 % à un taux aussi élevé que 34 % au sein de certaines sous-populations (Langeland et Hartgers, 1998). On cite, parmi les répercussions possibles de longue durée liées à la violence envers un enfant, on a établi des comportements autodestructeurs, de l’anxiété, de la dépression, de la dévalorisation, de la méfiance envers les autres, de la colère et de l’hostilité ainsi que des troubles liés à l’utilisation des substances toxiques et psychoactives (Langeland et Hartgers, 1998; se reporter aux études de Beitchman, Zucker, Hood, DaCosta, Akman et Cassavia, 1992; Herman, 1992; Wyatt et Powell, 1988). Pour ce qui est de l’abus des substances psychoactives, voici la mise en garde de Langeland et Hartgers : [TRADUCTION] Même si l’association entre la violence à l’égard d’un enfant et des problèmes ultérieurs liés à la consommation d’alcool ou de drogues s’avère très plausible, pour un grand nombre de diagnostics de l’Axis 1 – d’après le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-III-R) (American Psychiatric Association 1987) – on a constaté une fréquence plus élevée d’abus sexuel durant l’enfance [ASE] et de violence physique faite aux enfants [VPE]. Par conséquent, on considère que l’abus ou les mauvais traitements envers les enfants peuvent être un facteur général, non spécifique, qui entraîne une psychopathologie, entre autres des troubles liés à la consommation de substances psychoactives. Une importante question est de savoir s’il y a d’autres facteurs, notamment le dysfonctionnement familial, la négligence durant l’enfance ou des problèmes de consommation excessive de substances psychoactives chez les parents, plutôt que l’abus en soi, qui sont à l’origine de troubles psychiatriques ultérieurs (Beitchman, Zucker, Hood, DaCosta, Akman et Cassavia, 1992; Cicchetti et Carlson, 1989; ... 1990; Herman, 1992; Wyatt et Powell, 1988). Les troubles à l’âge adulte et la violence ou l’abus durant l’enfance peuvent prendre naissance dans un environnement familial perturbé qui néglige de protéger et d’entourer de soins et d’amour l’enfant qui se développe. La violence faite à l’enfant ne serait pas un facteur déterminant dans ce cas-là, mais elle s’avérerait une cause d’origine commune avec les troubles liés à la consommation de substances psychoactives (1998 : 336-337). Dans le cas de certaines familles autochtones, les mauvais traitements et la négligence envers les enfants font partie de la situation plus générale du dysfonctionnement et de la violence familiale (Jacobs et Gill, 2002). La Commission royale sur les peuples autochtones souligne que la violence familiale dans les communautés autochtones est différente, « le déséquilibre des rapports de force qui structure la vie des Autochtones ne touche pas seulement les relations entre hommes et femmes. Ce déséquilibre découle 50

Chapitre 4 de l’impuissance des Autochtones face à la société en général et aux institutions sociales qui régissent tous les aspects de leur vie, depuis la façon dont ils sont instruits jusqu’à la façon dont ils sont dirigés, en passant par la façon dont ils gagnent leur vie » (Royal Commission on Aboriginal Peoples, 1996b : 73). La Commission poursuit en ajoutant que ce n’est pas excuser la violence familiale que de dire qu’elle découle du déséquilibre des forces. Les personnes doivent accepter la responsabilité de leurs actes (Royal Commission on Aboriginal Peoples [Commission royale sur les peuples autochtones], 1996b; LaRocque, 1993). La Commission écrit : [TRADUCTION]Avant de rechercher des solutions, il faut d’abord souligner l’origine structurale de la violence dans les rapports entre les sociétés autochtone et non autochtone. Si ces rapports de force ne sont pas modifiés et si la pauvreté et l’impuissance ne sont pas corrigées, toutes les mesures visant à réduire la violence familiale seront, au mieux, des solutions temporaires. Les solutions fondées sur la thérapie individuelle peuvent même être destructrices si le climat d’oppression politique, économique et sociale n’est pas modifié, parce qu’elles pourraient renforcer le sentiment de faiblesse et d’infériorité morale des Autochtones (1996b : 74). La Commission (1996b) poursuit en faisant remarquer que certaines collectivités autochtones ont perdu leur cohésion à un tel point que l’on peut parler de traumatisme collectif. Certaines familles ont perdu toute confiance en leurs compétences parentales. En milieu urbain, le défi ne consiste pas tant à restaurer les liens communautaires qu’à les tisser, à rapprocher les membres de diverses nations autochtones ayant des expériences variées de la culture et de la collectivité (Royal Commission on Aboriginal Peoples [Commission royale sur les peuples autochtones], 1996b). Sans un sentiment de cohésion communautaire, les familles autochtones en milieux urbains aux prises avec des problèmes de violence et d’abus des substances psychoactives peuvent être isolées de la plupart des réseaux de soutien nécessaires pouvant les aider à recouvrer leur capacité de prendre soin des membres de leur famille (Royal Commission on Aboriginal Peoples [Commission royale sur les peuples autochtones], 1996b; Jacobs et Gill, 2002). Agression sexuelle contre les enfants L’agression sexuelle contre les enfants est devenue dans les pays occidentaux à la fin du dix-neuvième siècle un sujet de recherche, par suite des travaux de Sigmund Freud (1890). Celui-ci a constaté que bon nombre de ses patients adultes avaient été victimes d’abus sexuel ou avaient été maltraités par des adultes ou d’autres membres de leur famille. Grâce à cette nouvelle méthode de traitement psychoanalytique, Freud a démontré de quelle façon l’origine des symptômes hystériques et névrotiques de ses patients pouvait remonter à des expériences sexuelles traumatisantes pendant l’enfance (Green, 1993). Au cours des années 1940-1950, à la suite de nombreuses enquêtes auprès d’adultes, on a constaté une prévalence marquée de cas d’abus sexuel pendant l’enfance; par ailleurs, ces cas d’agression sexuelle contre les enfants sont restés à peu près inexplorés par les chercheurs médicaux jusqu’en 1962, moment où Kempe et ses collaborateurs ont publié une étude intitulée Battered Child Syndrome [le syndrome de l’enfant maltraité] (Kempe, Silverman, Steele, Droegemuller et Silver, 1962). Cette étude traitait surtout de la violence physique faite aux enfants par les parents, et elle est à l’origine de l’adoption de lois obligeant à signaler les cas d’enfants victimes d’abus aux États-Unis et dans d’autres pays occidentaux, 51

Chapitre 4<br />

de l’impuissance des Autochtones face à la société en général et aux institutions socia<strong>les</strong> qui régissent<br />

tous <strong>les</strong> aspects de leur vie, depuis la façon dont ils sont instruits jusqu’à la façon dont ils sont dirigés, en<br />

passant par la façon dont ils gagnent leur vie » (Royal Commission on Aboriginal Peop<strong>les</strong>, 1996b : 73).<br />

La Commission poursuit en ajoutant que ce n’est pas excuser la violence familiale que de dire qu’elle<br />

découle <strong>du</strong> déséquilibre des forces. Les personnes doivent accepter la responsabilité de leurs actes (Royal<br />

Commission on Aboriginal Peop<strong>les</strong> [Commission royale sur <strong>les</strong> peup<strong>les</strong> <strong>autochtones</strong>], 1996b; LaRocque,<br />

1993). La Commission écrit :<br />

[TRADUCTION]Avant de rechercher des solutions, il faut d’abord souligner l’origine<br />

structurale de la violence dans <strong>les</strong> rapports entre <strong>les</strong> sociétés autochtone et non autochtone.<br />

Si ces rapports de force ne sont pas modifiés et si la pauvreté et l’impuissance ne sont pas<br />

corrigées, toutes <strong>les</strong> mesures visant à ré<strong>du</strong>ire la violence familiale seront, au mieux, des<br />

solutions temporaires. Les solutions fondées sur la thérapie indivi<strong>du</strong>elle peuvent même<br />

être destructrices si le climat d’oppression politique, économique et sociale n’est pas<br />

modifié, parce qu’el<strong>les</strong> pourraient renforcer le sentiment de faib<strong>les</strong>se et d’infériorité<br />

morale des Autochtones (1996b : 74).<br />

La Commission (1996b) poursuit en faisant remarquer que certaines collectivités <strong>autochtones</strong> ont per<strong>du</strong><br />

leur cohésion à un tel point que l’on peut parler de traumatisme collectif. Certaines famil<strong>les</strong> ont per<strong>du</strong><br />

toute confiance en leurs compétences parenta<strong>les</strong>. En milieu urbain, le défi ne consiste pas tant à restaurer<br />

<strong>les</strong> liens communautaires qu’à <strong>les</strong> tisser, à rapprocher <strong>les</strong> membres de diverses nations <strong>autochtones</strong> ayant<br />

des expériences variées de la culture et de la collectivité (Royal Commission on Aboriginal Peop<strong>les</strong><br />

[Commission royale sur <strong>les</strong> peup<strong>les</strong> <strong>autochtones</strong>], 1996b).<br />

Sans un sentiment de cohésion communautaire, <strong>les</strong> famil<strong>les</strong> <strong>autochtones</strong> en milieux urbains aux prises<br />

avec des problèmes de violence et d’abus des substances psychoactives peuvent être isolées de la plupart<br />

des réseaux de soutien nécessaires pouvant <strong>les</strong> aider à recouvrer leur capacité de prendre soin des membres<br />

de leur famille (Royal Commission on Aboriginal Peop<strong>les</strong> [Commission royale sur <strong>les</strong> peup<strong>les</strong><br />

<strong>autochtones</strong>], 1996b; Jacobs et Gill, 2002).<br />

Agression sexuelle contre <strong>les</strong> enfants<br />

L’agression sexuelle contre <strong>les</strong> enfants est devenue dans <strong>les</strong> pays occidentaux à la fin <strong>du</strong> dix-neuvième<br />

siècle un sujet de recherche, par suite des travaux de Sigmund Freud (1890). Celui-ci a constaté que bon<br />

nombre de ses patients a<strong>du</strong>ltes avaient été victimes d’abus sexuel ou avaient été maltraités par des<br />

a<strong>du</strong>ltes ou d’autres membres de leur famille. Grâce à cette nouvelle méthode de traitement<br />

psychoanalytique, Freud a démontré de quelle façon l’origine des symptômes hystériques et névrotiques<br />

de ses patients pouvait remonter à des expériences sexuel<strong>les</strong> traumatisantes pendant l’enfance (Green,<br />

1993). Au cours des années 1940-1950, à la suite de nombreuses enquêtes auprès d’a<strong>du</strong>ltes, on a constaté<br />

une prévalence marquée de cas d’abus sexuel pendant l’enfance; par ailleurs, ces cas d’agression sexuelle<br />

contre <strong>les</strong> enfants sont restés à peu près inexplorés par <strong>les</strong> chercheurs médicaux jusqu’en 1962, moment<br />

où Kempe et ses collaborateurs ont publié une étude intitulée Battered Child <strong>Syndrome</strong> [le syndrome de<br />

l’enfant maltraité] (Kempe, Silverman, Steele, Droegemuller et Silver, 1962). Cette étude traitait surtout<br />

de la violence physique faite aux enfants par <strong>les</strong> parents, et elle est à l’origine de l’adoption de lois<br />

obligeant à signaler <strong>les</strong> cas d’enfants victimes d’abus aux États-Unis et dans d’autres pays occidentaux,<br />

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