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Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

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Chapitre 3<br />

Ce qui est intéressant, c’est que ces stades ne sont que vaguement liés à la quantité d’alcool consommée<br />

par <strong>les</strong> participants. Kenmitzer va jusqu’à émettre l’idée que certains changements de l’affect n’ont<br />

absolument aucun rapport avec <strong>les</strong> propriétés biochimiques de l’alcool étant donné qu’ils se pro<strong>du</strong>isent<br />

bien avant que l’alcool soit absorbé, comme dans le cas où des personnes dans un groupe sont déjà dans<br />

une « disposition ou un état d’esprit à la fête » (Kenmitzer, 1972 dans O’Nell et Mitchell, 1996).<br />

O’Nell et Mitchell évoquent l’idée que le modèle « sujet en détresse » est également problématique « en<br />

raison <strong>du</strong> niveau d’examen auquel <strong>les</strong> ethnographes ont été en mesure de cerner une concordance entre<br />

le style de la consommation d’alcool et le rôle social; autrement dit, selon <strong>les</strong> témoignages ethnographiques,<br />

<strong>les</strong> habitudes de consommation d’alcool semblent en général en dévoiler davantage sur l’endroit ou la<br />

provenance sociale <strong>du</strong> sujet, à l’intérieur d’un contexte culturellement bien défini, que révéler <strong>chez</strong> le<br />

sujet <strong>les</strong> motivations psychologiques l’amenant à boire » (1996 : 566). A titre d’exemple, Maynard<br />

explique que la personne change souvent de style de consommation d’alcool pour l’adapter à la situation<br />

dans laquelle elle se trouve, indiquant ainsi qu’elle boit selon <strong>les</strong> normes socia<strong>les</strong> de la situation et que,<br />

par conséquent, la détresse psychologique n’influe pas sur sa « décision ou préférence » quant au style de<br />

consommation d’alcool (Maynard, 1969 dans O’Nell et Mitchell, 1996; Hill, 1974; Topper, 1980).<br />

D’après O’Nell et Mitchell (1996) la représentation qui ressort des témoignages ethnographiques<br />

permet de mieux saisir que la connaissance des comportements en matière de consommation alcoolique<br />

émane plutôt de l’analyse des normes culturel<strong>les</strong> que de l’exploration restrictive, stricte, de caractéristiques<br />

indivi<strong>du</strong>el<strong>les</strong>. Voici ce qu’ils affirment :<br />

[TRADUCTION] Au point de départ, <strong>les</strong> concepts « normal » et « pathologique »<br />

doivent être compris comme des concepts liés à une échelle de valeurs, plutôt que rattachés<br />

à une réalité « objective ». En effet, la normalité et le pathologique, au lieu d’être des<br />

réactions au stress provoquées par des impératifs biochimiques ou involontaires comme<br />

un réflexe rotulien, sont encadrés par des définitions à caractère culturel <strong>du</strong> type « mener<br />

une vie saine, une vie rangée ». Une personne ou sa famille percevra une consommation<br />

alcoolique pathologique dans le cas où il y a un changement, une dégradation de ce qui<br />

est normal, selon une échelle de valeurs établissant <strong>les</strong> caractéristiques dites importantes<br />

dans son milieu culturel ... Il appert donc qu’à moins d’examiner de façon ethnographique<br />

le contexte culturel <strong>du</strong> comportement de consommation alcoolique normatif et de<br />

sobriété (non-consommation d’alcool), la consommation dite pathologique restera une<br />

quantité méconnue (O’Nell et Mitchell, 1996 : 567).<br />

O’Nell et Mitchell ajoutent que le « normal » et le « pathologique » doivent aussi être considérés comme<br />

des concepts politiques, « inextricablement liés aux rapports de pouvoir ou de force, étant donné que<br />

certains acteurs sociaux sont soumis à l’autorité définissant des comportements comme<br />

problématiques » (1996 : 567). Ces réflexions indiquent que des questions concernant <strong>les</strong> rapports de<br />

pouvoir – notamment : Quel est « le problème »? A qui en revient la responsabilité? Et, qui en retire des<br />

avantages? Ainsi que différentes perspectives à considérer pour le définir – doivent être posées pour que<br />

<strong>les</strong> chercheurs ne tombent dans le panneau de la propagation de valeurs et de définitions de problèmes<br />

dictées par le bloc hégémonique euroaméricain dans des collectivités moins puissantes. La pathologisation<br />

injustifiée des ado<strong>les</strong>cents amérindiens, ainsi que de leur société en général, d’après O’Nell et Mitchell,<br />

constitue un danger potentiel intrinsèque à cette application naïve des appréciations ou jugements<br />

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