Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ... Syndrome d'alcoolisation foetale chez les peuples autochtones du ...

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Chapitre 6 Gill (2002) ont découvert lors de leur étude parmi les Autochtones de Montréal, (dont la plupart étaient des jeunes femmes inuites célibataires) qu’un tiers de cet échantillon avait rapporté avoir un problème actuel de drogue ou d’alcool, et une forte proportion (85 %) avait eu des problèmes médicaux durant l’année précédant l’entrevue. Il est intéressant de noter que ceux qui abusent de substances psychoactives pouvaient moins facilement que les autres avoir une bonne identification qui leur permettait d’avoir accès aux services sociaux et médicaux. Jacobs et Gill écrivent : [TRADUCTION] Les comparaisons entre ceux qui abusent de substances psychoactives et les autres ont révélé que ceux qui en abusent vivent le plus souvent avec une personne qui avait elle même des problèmes de drogue ou d’alcool. Un grand nombre de personnes qui abusent d’alcool, de drogues ou autres substances ont rapporté qu’elles avaient des problèmes relationnels avec leurs amis et avec tous ceux qui n’abusaient pas. On a aussi trouvé dans l’échantillon un niveau assez élevé de problèmes parentaux causés par la drogue et l’alcool. De plus, le taux de problèmes de drogues et d’alcool pendant la maternité chez ceux qui abusent était nettement plus élevé (73, 7 %) que chez les autres (36, 7 %). Il n’y a pas eu de collecte de données dans le cadre de la présente étude qui permette de savoir si les sujets avaient été exposés à l’alcool dans l’utérus – et de ce fait, avaient été potentiellement exposés au syndrome d’alcoolisation foetale (SAF) ou aux effets de l’alcoolisation foetale (EAF). Les lacunes en matière de données sur les antécédents d’abus de substances psychoactives pendant la maternité peuvent tenir du fait que très peu de femmes déclarent ces abus. En général, celles qui abusaient de substances psychoactives estimaient que la thérapie était extrêmement importante pour leur vie familiale et leur comportement social (2002 : 11). Jacobs et Gill ajoutent que l’abus de substances psychoactives chez les Autochtones des centres-villes peut être décrit comme « une carrière ou un style de vie, » car la dépendance devient rapidement un « style de vie, et des réseaux sociaux d’abuseurs de substances psychoactives deviennent une stratégie de survie dans la ville » (2002 : 11). La force qui réside dans ces relations sociales peut entraîner certains individus à refuser des programmes de traitement culturellement pertinents. Jacobs et Gill soulignent que les données sur les fréquences d’abus de substances psychoactives parmi les populations autochtones urbaines, en comparaison avec les Autochtones vivant sur les réserves ou le reste de la population urbaine en général, ne sont pas disponibles. Il faut donc continuer à effectuer des études si l’on veut mieux comprendre les risques et les facteurs de protection des populations autochtones qui vivent dans les régions urbaines. On a défini les anciens élèves de pensionnats comme un sous-groupe qui a connu des taux d’abus d’alcool élevés étant adultes, bien que les statistiques nationales à ce sujet soient inexistantes. Pourtant, tout comme pour les autres problèmes de comportement et de santé, on constate une amélioration, particulièrement dans les cas où les Autochtones ont pu concevoir et contrôler eux-mêmes les services d’aide ciblant leur propre population (Royal Commission on Aboriginal Peoples [Commission royale sur les peuples autochtones], 1996b). Les approches holistiques de traitement de la drogue et de l’alcool, utilisées dans les services autochtones luttant contre la dépendance aux substances psychoactives, soulignent combien il est important de traiter la dépendance d’une personne dans un cadre de bien-être plus large, plutôt que de se concentrer uniquement sur le problème de la dépendance. Malgré le succès de plusieurs programmes autochtones de traitement, l’abus de substances psychoactives reste un problème 100

Chapitre 6 qui affecte le bien-être et la santé, particulièrement chez les jeunes autochtones. En effet, cette question est associée aux autres problèmes psychologiques comme le suicide, l’abus subi par les enfants et le dysfonctionnement familial. Fournier et Crey (1997) insistent sur le fait que pour la plupart des communautés autochtones, l’alcoolisme représente la première étape à franchir avant que d’autres réformes puissent être amorcées. Cependant, les témoignages recueillis par la Commission royale sur les peuples autochtones et auprès de travailleurs autochtones dans le domaine de la dépendance aux substances psychoactives suggèrent ce qui suit : « l’établissement de services de santé mentale traitant l’éventail complet des détresses psychosociales présentées par les clients des services de luttes contre les dépendances et bénéficiant d’un financement flexible » (Royal Commission on Aboriginal Peoples [Commission royale sur les peuples autochtones], 1996b : 162) représente exactement ce dont les communautés ont besoin pour pouvoir répondre complètement aux maladies mentales, à la dépendance et à tous les autres besoins. De plus en plus, la revue de littérature suggère que le niveau de problèmes de santé mentale, ainsi que d’autres aspects tels que les niveaux de dysfonctionnement familial, la violence et le crime sont directement liés à des facteurs sociaux. Par exemple, les taux d’abus d’alcool et de drogues sont directement liés à des facteurs : bas revenu, taux de chômage, isolement dans une communauté du Nord, importance du tourisme, taille des familles et niveau d’activité industrielle (MacMillan, MacMillan et coll., 1996; Adrian, Layne et Williams, 1990). Adrian et ses collègues (1990) suggèrent que des améliorations dans les circonstances économiques vont de pair avec une diminution de la consommation d’alcool. D’autres, comme Chandler et Lalonde (1998), ont déterminé l’existence de liens très précis entre des niveaux élevés d’autonomie et de contrôle communautaire et le faible taux de suicide, dans des communautés autochtones en Colombie-Britannique. Kirmayer et ses collègues (2000) précisent que le développement communautaire et le contrôle local des systèmes de soins médicaux sont des facteurs importants qui favorisent l’amélioration de la santé mentale. Ces facteurs, selon eux, sont primordiaux « non seulement pour assurer l’adéquation des services et des besoins locaux mais aussi pour promouvoir la fierté, l’efficacité collective et individuelle, deux aspects qui favorisent une meilleure santé mentale. Finalement, les efforts politiques pour restaurer les droits autochtones, régler les questions de terre et redistribuer le pouvoir par des formes variées d’auto gouvernement, sont des facteurs-clé pour établir une communauté saine » (Kirmayer, Brass et Tait, 2000 : 614; Warry, 1998). Aide à l’enfance, parentalité et dysfonctionnement familial [TRADUCTION] Pour moi, le pire résultat de mon expérience dans le pensionnat a été le fait qu’ils m’ont enlevé toute habileté de tenir mes enfants. Ils m’ont privé de la capacité d’élever mes enfants (cité dans Dieter, 1999 : 11). La plupart de nos clients – probablement 90 % d’entre eux – sont en fait eux-mêmes des victimes du système d’aide sociale. La majorité de notre clientèle est jeune; ce sont des mères célibataires qui, très souvent ont elles-mêmes été enlevées lorsqu’elles étaient enfants. Alors, nous nous adressons peut-être au produit final du système d’aide sociale qui existait dans les années 1960. En fait, les années 1960 ont duré jusqu’au milieu des 101

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Gill (2002) ont découvert lors de leur étude parmi <strong>les</strong> Autochtones de Montréal, (dont la plupart<br />

étaient des jeunes femmes inuites célibataires) qu’un tiers de cet échantillon avait rapporté avoir un<br />

problème actuel de drogue ou d’alcool, et une forte proportion (85 %) avait eu des problèmes médicaux<br />

<strong>du</strong>rant l’année précédant l’entrevue. Il est intéressant de noter que ceux qui abusent de substances<br />

psychoactives pouvaient moins facilement que <strong>les</strong> autres avoir une bonne identification qui leur permettait<br />

d’avoir accès aux services sociaux et médicaux. Jacobs et Gill écrivent :<br />

[TRADUCTION] Les comparaisons entre ceux qui abusent de substances psychoactives<br />

et <strong>les</strong> autres ont révélé que ceux qui en abusent vivent le plus souvent avec une personne<br />

qui avait elle même des problèmes de drogue ou d’alcool. Un grand nombre de personnes<br />

qui abusent d’alcool, de drogues ou autres substances ont rapporté qu’el<strong>les</strong> avaient des<br />

problèmes relationnels avec leurs amis et avec tous ceux qui n’abusaient pas. On a aussi<br />

trouvé dans l’échantillon un niveau assez élevé de problèmes parentaux causés par la<br />

drogue et l’alcool. De plus, le taux de problèmes de drogues et d’alcool pendant la<br />

maternité <strong>chez</strong> ceux qui abusent était nettement plus élevé (73, 7 %) que <strong>chez</strong> <strong>les</strong> autres<br />

(36, 7 %). Il n’y a pas eu de collecte de données dans le cadre de la présente étude qui<br />

permette de savoir si <strong>les</strong> sujets avaient été exposés à l’alcool dans l’utérus – et de ce fait,<br />

avaient été potentiellement exposés au syndrome d’alcoolisation <strong>foetale</strong> (SAF) ou aux<br />

effets de l’alcoolisation <strong>foetale</strong> (EAF). Les lacunes en matière de données sur <strong>les</strong><br />

antécédents d’abus de substances psychoactives pendant la maternité peuvent tenir <strong>du</strong><br />

fait que très peu de femmes déclarent ces abus. En général, cel<strong>les</strong> qui abusaient de<br />

substances psychoactives estimaient que la thérapie était extrêmement importante pour<br />

leur vie familiale et leur comportement social (2002 : 11).<br />

Jacobs et Gill ajoutent que l’abus de substances psychoactives <strong>chez</strong> <strong>les</strong> Autochtones des centres-vil<strong>les</strong><br />

peut être décrit comme « une carrière ou un style de vie, » car la dépendance devient rapidement un<br />

« style de vie, et des réseaux sociaux d’abuseurs de substances psychoactives deviennent une stratégie de<br />

survie dans la ville » (2002 : 11). La force qui réside dans ces relations socia<strong>les</strong> peut entraîner certains<br />

indivi<strong>du</strong>s à refuser des programmes de traitement culturellement pertinents. Jacobs et Gill soulignent<br />

que <strong>les</strong> données sur <strong>les</strong> fréquences d’abus de substances psychoactives parmi <strong>les</strong> populations <strong>autochtones</strong><br />

urbaines, en comparaison avec <strong>les</strong> Autochtones vivant sur <strong>les</strong> réserves ou le reste de la population urbaine<br />

en général, ne sont pas disponib<strong>les</strong>. Il faut donc continuer à effectuer des études si l’on veut mieux<br />

comprendre <strong>les</strong> risques et <strong>les</strong> facteurs de protection des populations <strong>autochtones</strong> qui vivent dans <strong>les</strong><br />

régions urbaines.<br />

On a défini <strong>les</strong> anciens élèves de pensionnats comme un sous-groupe qui a connu des taux d’abus<br />

d’alcool élevés étant a<strong>du</strong>ltes, bien que <strong>les</strong> statistiques nationa<strong>les</strong> à ce sujet soient inexistantes. Pourtant,<br />

tout comme pour <strong>les</strong> autres problèmes de comportement et de santé, on constate une amélioration,<br />

particulièrement dans <strong>les</strong> cas où <strong>les</strong> Autochtones ont pu concevoir et contrôler eux-mêmes <strong>les</strong> services<br />

d’aide ciblant leur propre population (Royal Commission on Aboriginal Peop<strong>les</strong> [Commission royale<br />

sur <strong>les</strong> peup<strong>les</strong> <strong>autochtones</strong>], 1996b). Les approches holistiques de traitement de la drogue et de l’alcool,<br />

utilisées dans <strong>les</strong> services <strong>autochtones</strong> luttant contre la dépendance aux substances psychoactives,<br />

soulignent combien il est important de traiter la dépendance d’une personne dans un cadre de bien-être<br />

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