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Revue internationale d'écologie méditerranéenne International ...

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Résumés de thèses<br />

ment confirmerait ainsi l’hypothèse de Devaux et al. (1983)<br />

identifiant la végétation de Crau comme un « sub-climax »,<br />

où le pâturage ovin ne serait pas le principal facteur pour<br />

expliquer le maintien de la végétation herbacée. Cette<br />

dynamique pourrait alors expliquer la permanence de la<br />

végétation pseudo-steppique même en l’absence de pâturage<br />

pendant certaines périodes historiques (grandes invasions,<br />

Moyen Âge). Cependant, cette absence de colonisation<br />

arborée doit aussi être reliée à la disposition spatiale<br />

des exclos, tous situés très loin des bordures arborées de<br />

La Crau (Coustières) ainsi qu’à la fenêtre temporelle, trop<br />

peu importante pour observer d’éventuelles colonisations<br />

de ligneux à l’échelle du paysage de la plaine.<br />

Compte tenu de la lenteur des processus de colonisation<br />

spontanée dans les exclos et des biais méthodologiques<br />

inhérents à ce dispositif expérimental, nous avons donc réalisé<br />

des expérimentations de transplantation de ligneux, suivies<br />

entre 2007 et 2009, pour discriminer la part du régime<br />

de perturbations (pâturage ovin traditionnel) de celle de<br />

certaines composantes du climat local (faible pluviométrie)<br />

dans l’absence de colonisation arbustive et arborée de la<br />

végétation pseudo-steppique. Notre protocole expérimental<br />

combine l’expression alternative de ces deux variables<br />

(avec et sans pâturage, avec et sans irrigation), appliqué à<br />

trois espèces ligneuses susceptibles de coloniser la plaine<br />

(Cistus monspeliensis, Pinus halepensis, Quercus ilex) et<br />

dont les graines ont été récoltées en bordure de La Crau.<br />

Nos résultats concernent les taux de survie et les mesures<br />

morphométriques (hauteur, diamètre au collet, recouvrement)<br />

des 1 920 arbustes transplantés sur quatre sites répartis<br />

dans la plaine. Ils montrent une prépondérance du facteur<br />

climatique la première année après la transplantation,<br />

mais des variabilités spécifiques ont pu aussi être mesurées.<br />

En 2007, l’impact du pâturage est prépondérant pour<br />

le ciste (46 % de mortalité pour ceux soumis au pâturage<br />

seul) et peu conséquent pour le chêne (6 %). En revanche,<br />

le chêne est le plus sensible à la sécheresse (93 % de mortalité<br />

au terme du premier été pour la modalité non arrosée<br />

protégée du pâturage). Les conditions météorologiques de<br />

2008 et 2009 tempèrent ces résultats et montrent la nécessité<br />

de pouvoir suivre cette expérimentation sur le long<br />

terme afin d’intégrer les cycles climatiques propres au climat<br />

régional de la plaine de La Crau (une sécheresse plus<br />

prononcée toutes les cinq années). La colonisation des<br />

ligneux est donc fortement limitée selon les espèces du fait<br />

du pâturage ovin ou de la très faible pluviosité. Malgré la<br />

survie de quelques ligneux, la possibilité de l’existence<br />

d’un couvert forestier permanent en lieu et place de la<br />

végétation pseudo-steppique aux conditions climatiques<br />

actuelles et sans pâturage ovin ne peut cependant être définitivement<br />

établie.<br />

Les résultats obtenus dans la première partie de ce travail<br />

ont montré l’importance de la temporalité dans le déroulement<br />

des processus étudiés, qu’il s’agisse de la dynamique<br />

des communautés végétales herbacées en l’absence de<br />

pâturage ovin ou de la survie et de la croissance des ligneux<br />

transplantés. Afin d’augmenter la fenêtre temporelle d’observation<br />

limitée respectivement à 23 et 3 ans dans cette<br />

première partie, nous avons eu ensuite recours à des pro-<br />

112<br />

tocoles d’investigation paléoécologique (pédoanthracologie)<br />

et d’écologie historique (banque de graines permanente)<br />

pour mieux discriminer les impacts de l’absence ou<br />

au contraire de l’excès du pâturage sur la dynamique de la<br />

végétation pseudo-steppique et de l’éventuelle existence au<br />

cours de l’Holocène de formations arbustives et arborées<br />

dans la plaine de La Crau.<br />

Les investigations pédoanthracologiques (analyse des charbons<br />

de bois dans les sols) ont l’avantage d’allier une<br />

échelle temporelle large à une résolution spatiale fine. De<br />

plus, l’échantillonnage et l’identification des charbons de<br />

bois peuvent être réalisés dans tous types de sol et notamment<br />

les sols très secs et peu profonds de la plaine de La<br />

Crau. Quatorze fosses ont été réalisées dans différents<br />

contextes : dans la pseudo-steppe, dans un site Néolithique<br />

et sous les fondations de bergeries datées de l’époque<br />

antique pour accroître les chances de recueillir des charbons<br />

plus vieux que les structures (fondations) qui les<br />

recouvrent. Sur 597 charbons extraits, 23 seulement ont pu<br />

être datés au C14. Les datations les plus anciennes remontent<br />

à l’époque Néolithique (vers 4 000 BP) et sembleraient<br />

indiquer l’existence d’une végétation de type garrigue<br />

(Lavandula sp. Prunus sp. Phillyrea angustifolia, Pinus<br />

halepensis/pinea) mais aucune espèce ligneuse de fin de<br />

série successionnelle (Quercus ilex, Q. pubescens) n’a pu<br />

être identifiée ni datée de cette époque. Les datations se<br />

répartissent ainsi en trois périodes (Néolithique, Antiquité,<br />

époque moderne) correspondant chacune à des occupations<br />

importantes de la plaine avec constructions de bergeries ou<br />

de cabanes pastorales. En conclusion, le faible nombre de<br />

charbons trouvés et leur probable utilisation en rapport avec<br />

l’occupation humaine (bois de construction, bois de chauffage)<br />

sembleraient indiquer l’existence au Néolithique<br />

d’une végétation ouverte constituée de garrigues et prébois.<br />

La forte persistance de la végétation pseudo-steppique<br />

associée aux faibles capacités de colonisation et de croissance<br />

des ligneux (cf. supra) expliqueraient la pérennité de<br />

cette végétation sur le très long terme au cours de l’âge du<br />

fer, des grandes invasions ou du Moyen Âge malgré des<br />

phases possibles d’abandon périodiques de pâturage.<br />

Si la végétation pseudo-steppique semble avoir pour origine<br />

le défrichement d’une végétation de type matorral au<br />

Néolithique, il reste à appréhender plus particulièrement<br />

l’évolution sur le long terme de sa composition floristique<br />

et de la structure de sa strate herbacée. Ainsi, dès l’Antiquité,<br />

la construction de bergeries et la concentration des<br />

troupeaux aux alentours dans des enclos accolés ont permis<br />

l’existence de communautés rudérales nitrophiles, dont<br />

les caractéristiques sont très différentes de celles de la<br />

végétation rencontrée dans la pseudo-steppe. Nous avons<br />

donc échantillonné la végétation et la banque de graines<br />

dans des enclos attenant des bergeries datées par des prospections<br />

archéologiques le long d’un gradient d’âge<br />

d’abandon allant de l’actuel à plus ou moins 2 000 ans. Nos<br />

résultats montrent que même après deux millénaires<br />

d’abandon, des différences persistent dans la composition<br />

physico-chimique des sols, ainsi que dans la composition<br />

et la richesse des communautés végétales, par rapport à<br />

celles échantillonnées dans la pseudo-steppe témoin,<br />

ecologia mediterranea – Vol. 36 (1) – 2010

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