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Revue internationale d'écologie méditerranéenne International ...

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DIVERSITÉ GÉNÉTIQUE DE POPULATIONS NATURELLES DE ROSMARINUS OFFICINALIS L. EN TUNISIE ◆<br />

ces populations, l’irrégularité de la floraison et l’absence<br />

d’individus régénérées à partir de semences.<br />

Une différenciation substantielle entre les populations<br />

est observée. La valeur du F ST calculée pour l’ensemble<br />

des loci polymorphes et pour l’ensemble des populations<br />

est de 0,113. Les populations appartenant à un même<br />

étage bioclimatique manifestent des degrés de différenciation<br />

variables. Les valeurs de F ST entre les populations<br />

de l’aride supérieur et du semi aride supérieur sont<br />

respectivement de 0,051 et 0,042. La différenciation<br />

des populations de l’étage sub-humide est relativement<br />

plus importante (F ST = 0,144). Le romarin, au niveau<br />

de cet étage, se développe souvent sous des forêts de pin<br />

d’Alep séparées par des Djebels à végétation dégradée.<br />

Les populations appartenant à des étages séparés (populations<br />

du sub-humide et de l’aride supérieur) présentent<br />

une différenciation génétique plus importante que celle<br />

observée entre étages bioclimatiques contigus et proches<br />

géographiquement.<br />

De nombreux facteurs, tels que des variations climatiques,<br />

les pressions anthropiques influencent la différenciation<br />

génétique des populations (Karron, 1987 ; Hamrick<br />

& Godt, 1989 ; Holsinger & Gottlieb, 1991 ; Ellstrand &<br />

Elan, 1993 ; Gitzendanner & Soltis, 2000). Chez le romarin,<br />

la structuration des populations ne résulte pas uniquement<br />

de leur éloignement géographique (limitant les flux<br />

des gènes) dû à la destruction des habitats intermédiaires<br />

sous l’influence des fluctuations climatiques anciennes<br />

qui ont affecté la disparition de forêts abritant le romarin<br />

(Le Houérou, 1969 ; Le Floc’h, 1995 ; Le Houérou & Le<br />

Floc’h, 1995) ou des activités humaines (sur exploitation<br />

des nappes) amorcées depuis des centaines d’années. Elle<br />

devrait être également attribuée aux facteurs écologiques,<br />

corrélées aux distances géographiques, définissant les différents<br />

sites (proches ou distants) et influençant le développement<br />

des individus. En effet, la nature asynchrone<br />

de la floraison qui s’opère plus ou moins précocement<br />

selon les étages bioclimatiques (et/ou son absence durant<br />

de longues périodes de sécheresse pour les populations de<br />

l’aride supérieur et du semi aride supérieur) limite les flux<br />

géniques entre les populations. Toutefois, les facteurs écologiques<br />

utilisés dans notre étude (pluviométrie annuelle<br />

et écarts entre température maximale et minimale) ne peuvent<br />

définir à eux seuls les conditions réelles régissant le<br />

développement des individus. D’autres facteurs physiques<br />

(évapotranspiration potentielle, répartition saisonnière et<br />

régime de la pluviosité…) et édaphiques en relation avec<br />

l’isolement géographique des populations devraient être<br />

pris en considération pour mieux appréhender cette différenciation.<br />

ecologia mediterranea, tome 29, fascicule 2, 2003, p. 199-216<br />

Les distances génétiques de Nei (1972) sont faibles<br />

(0,005 à 0,232) ; elles restent dans la gamme des<br />

valeurs rapportées pour des populations conspécifiques<br />

(Hamrick & Godt, 1989 ; Bartlett et al., 2002). La distance<br />

moyenne est de 0,039, ce qui témoignerait d’une<br />

faible hétérogénéité génétique entre les populations. Les<br />

distances les plus faibles ont été observées entre les populations<br />

proches géographiquement et souvent situées dans<br />

le même étage climatique<br />

La forte structuration des populations de romarin et<br />

leur faible divergence génétique témoigneraient de leur<br />

isolation récente sous l’influence des pressions anthropiques<br />

et des facteurs climatiques (et/ou édaphiques)<br />

caractérisant les sites. La conservation in situ ou ex situ<br />

de l’espèce devrait tenir compte de facteurs biologiques<br />

(potentialités de la reproduction sexuée et végétative de<br />

l’espèce, taille des populations) et environnementaux (climatiques,<br />

édaphiques et activités humaines) caractérisant<br />

chaque groupe. La situation de nombreuses populations,<br />

celles de l’aride supérieur notamment, est précaire car les<br />

habitats de ces populations sont très dégradés. La multiplication<br />

végétative du romarin est faible dans ce cas,<br />

et la floraison est épisodique. La conservation in situ de<br />

ces populations, à allèles rares, est prioritaire. Le reboisement<br />

à l’aide d’essences forestières (Pinus halepensis et<br />

Juniperus phoenicea) et la limitation des collectes contribueraient<br />

à la réhabilitation des sites. La transplantation<br />

d’individus, issus de boutures prélevés sur des plantes au<br />

sein de ces populations, devrait contribuer au maintien<br />

de ces dernières.<br />

La conservation ex situ de l’espèce devrait passer par<br />

la collecte d’un maximum d’individus à l’intérieur des<br />

populations et leur multiplication à partir de boutures<br />

dans des « parcs à clones ». La conservation à partir des<br />

semences ne peut être envisagée pour le moment, vu le<br />

faible taux de production de semence viables. Des analyses<br />

supplémentaires (sauvetage d’embryons par culture<br />

in vitro, allo et autopollinisation artificielle, fertilité du<br />

gamétophyte femelle) devraient amener à des informations<br />

dans ce domaine.<br />

Le polymorphisme isoenzymatique révélé par cette<br />

étude peut masquer des variations génétiques et/ou<br />

physiologiques qui correspondraient à des adaptations<br />

particulières. Des analyses du polymorphisme moléculaire<br />

(RAPD, AFLP, microsatellites,…) combinées à<br />

des analyses sur la biologie florale, le comportement des<br />

pollinisateurs et l’installation des individus à partir de<br />

semences à l’intérieur des populations affineraient nos<br />

conclusions sur la diversité génétique du romarin et les<br />

possibilités d’une conservation durable de l’espèce.<br />

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