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Bons baisers de Nantes - Éditions D'Orbestier

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Stéphane Pajot,<br />

journaliste,<br />

est auteur <strong>de</strong> nombreux<br />

livres sur <strong>Nantes</strong> et<br />

sa région et <strong>de</strong> plusieurs<br />

essais et romans.<br />

Collectionneur <strong>de</strong> photos et <strong>de</strong> cartes<br />

postales, il se passionne pour l’histoire<br />

et la petite histoire.<br />

Du même auteur aux <strong>Éditions</strong> d’Orbestier<br />

Les Nantais<br />

Des hommes, <strong>de</strong>s événements, une mémoire<br />

PRIX DE L’ACADÉMIE DE BRETAGNE<br />

<strong>Nantes</strong> fascinante<br />

Trésors photographiques <strong>de</strong> la mémoire d’une ville<br />

<strong>Nantes</strong> la Jolie,<br />

Photographies inédites <strong>de</strong> la mémoire d’une ville<br />

LA TRILOGIE NANTAISE<br />

Personnages pittoresques <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> et <strong>de</strong> Loire-Atlantique<br />

<strong>Nantes</strong> étonnante<br />

Mystères <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> et <strong>de</strong> Loire-Atlantique<br />

Histoires extraordinaires <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> et <strong>de</strong> Loire-Atlantique<br />

<strong>Nantes</strong>-sur-Mer Histoires d’eau <strong>de</strong> la Loire à l’Atlantique<br />

De la femme à barbe à l’homme-canon<br />

Phénomènes <strong>de</strong> cirque et <strong>de</strong> baraque foraine<br />

Les Jours <strong>de</strong> fête <strong>de</strong> Jacques Tati<br />

De Sainte-Sévère-sur-Indre à Saint-Marc-sur-Mer<br />

Les Vacances <strong>de</strong> Monsieur Tati<br />

Hulot à Saint-Marc-sur-Mer<br />

La Mort <strong>de</strong> Jacques Vaché<br />

Histoire d’un fait divers surréaliste<br />

Le Livre est meilleur que le film - Roman<br />

adapté au théâtre sous le titre Que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le peuple ?<br />

Tout ce temps perdu avant <strong>de</strong> grandir - Roman<br />

ISBN 978-2-84238-106-6 (99-1-30) Dépôt légal 4 e trimestre 2008<br />

©ÉDITIONS D’ORBESTIER 2008<br />

41, avenue <strong>de</strong> la Vendée 85180 Le Château d’Olonne<br />

Tél. (33) 02 51 21 51 38 Fax (33) 02 51 21 14 10 contact@dorbestier.com<br />

www.dorbestier.com<br />

Tous droits <strong>de</strong> reproduction, traduction et adaptation réservés. Reproduction<br />

intégrale ou partielle par tout moyen, interdite sans l’autorisation écrite <strong>de</strong> l’éditeur.<br />

STÉPHANE PAJOT<br />

<strong>Bons</strong> <strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

LES NANTAIS<br />

TOME II


« Dimanche 28 novembre 1926,<br />

<strong>Bons</strong> <strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> <strong>de</strong>puis le café Le Toulouse, place du Commerce. Sous une bruine bien<br />

<strong>de</strong> chez nous, on n’attend plus que le top départ avant <strong>de</strong> s’élancer pour un tour <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong><br />

17,5 kilomètres. Au long <strong>de</strong>s rues, au bord <strong>de</strong> l’eau, du quai <strong>de</strong> la Fosse au jardin <strong>de</strong>s Plantes,<br />

la jeunesse nantaise court, la ville se dévoile sous ses yeux et bientôt sous les nôtres, nous qui<br />

allons emprunter leurs foulées et vous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> la cité. »


Contrairement au bon vin, les photos anciennes vieillissent souvent mal. Les artistes qui les ont créées auraient certainement souhaité qu’elles conservent une<br />

jeunesse éternelle. Nous avons donc choisi le plus souvent <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à une longue et délicate restauration <strong>de</strong>s clichés présentés dans cet ouvrage. Nous en<br />

avons gardé quelques-uns qui portent les ri<strong>de</strong>s expressives <strong>de</strong> leur âge, lorsqu’elles confèrent à l’image le charme supplémentaire du temps qui passe.<br />

Quand les Nantais<br />

correspondaient<br />

sur <strong>de</strong>s cartes postales<br />

QUE SONT NOS CARTES POSTALES DEVENUES, CES COURRIERS BREFS,<br />

AMICAUX OU AMOUREUX, QUE L’ON S’ÉCHANGEAIT À LA FIN DU XIX e<br />

PUIS AU DÉBUT DU XX e SIÈCLE ? CES MISSIVES OUBLIÉES À L’ÉCRITURE<br />

DOUCE, SACCADÉE, RONDE OU CISELÉE? DE BONS BAISERS ET AUTRES<br />

CORDIALES POIGNÉES DE MAIN PONCTUAIENT CES CORRESPONDANCES<br />

QUE LE TEMPS A SOUVENT ÉGARÉES À L’ARRIVÉE DE NOUVELLES<br />

GÉNÉRATIONS.<br />

DANS «BONS BAISERS DE NANTES », NOUS AVONS VOULU PLACER<br />

AUPRÈS DE PHOTOGRAPHIES INÉDITES, D’UNE ICONOGRAPHIE TOU-<br />

JOURS AUSSI RICHE ET RARE, SOUVENT EXCEPTIONNELLE, CES BRÈVES<br />

CORRESPONDANCES QUI RETROUVENT UNE NOUVELLE VIE, UN SECOND<br />

SOUFFLE POUR NOUS FAIRE VIVRE, PAR L’IMAGE, LES TRANSFORMA-<br />

TIONS DE LA CITÉ DES DUCS. CES TEXTES, SOUVENT SIMPLES, PARFOIS<br />

NAÏFS, MONTRENT QUE NOTRE MANIÈRE D’ÉCRIRE ET DE COMMUNI-<br />

QUER N’A PAS FONDAMENTALEMENT CHANGÉ.<br />

CE FIL CONDUCTEUR REND HOMMAGE À TOUS LES NANTAIS ET AUTRES<br />

VISITEURS QUI, UN JOUR, ONT JETÉ QUELQUES MOTS SUR UNE CARTE<br />

POSTALE ILLUSTRÉE, L’ONT TIMBRÉE ET L’ONT ENVOYÉE QUELQUE<br />

PART… PASSEURS DE MÉMOIRE POUR LA POSTÉRITÉ.


C’EST UN EMPLOYÉ DE COMMERCE MARSEILLAIS,<br />

DOMINIQUE PIAZZA, (1860-1941) QUI EST À L’ORIGINE<br />

DE LA CARTE POSTALE ILLUSTRÉE PHOTOGRAPHIQUE.<br />

AFIN D’ÉCONOMISER SES ENVOIS DE PHOTOS À UN AMI<br />

EN ARGENTINE, IL FERA TENIR TROIS CLICHÉS PHOTO-<br />

GRAPHIQUES SUR UN FORMAT DE CARTE POSTALE.<br />

QUANT À LA PREMIÈRE CARTE POSTALE, NON ILLUSTRÉE,<br />

ELLE EST OFFICIELLEMENT NÉE LE 1ER OCTOBRE 1869 EN<br />

AUTRICHE-HONGRIE.<br />

Je vous écris <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>…<br />

où tout bouge<br />

tout<br />

le temps<br />

Bonjour Julien<br />

Je vous écris <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, jolie ville au bord <strong>de</strong> l’eau, où l’on mange <strong>de</strong>s<br />

sardines fraîches <strong>de</strong> La Turballe, arrosées d’un petit verre <strong>de</strong> musca<strong>de</strong>t,<br />

<strong>de</strong> la butte Sainte-Anne jusqu’à la Cigale.<br />

Je vous écris <strong>de</strong>puis la place du Commerce, envahie ce jour par<br />

les coureurs du Tour <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> et toute la population. Ici tout<br />

bouge tout le temps, la ville est un long mouvement<br />

que nul ne peut freiner. Les Nantais sont <strong>de</strong>s<br />

gens charmants qui aiment leur cité, dite<br />

<strong>de</strong>s Ducs <strong>de</strong> Bretagne. J’espère vous<br />

convaincre <strong>de</strong> <strong>de</strong>scendre me voir par l’envoi<br />

<strong>de</strong> plusieurs photographies <strong>de</strong> cette gran<strong>de</strong><br />

métropole qui ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qu’à être connue.<br />

À vous lire.<br />

Valentine


12 <strong>Bons</strong><br />

Déja collectionneur !<br />

« <strong>Nantes</strong>, le 27 juin 1898 »<br />

« Chère Anna,<br />

Je n’ai pas encore eu l’occasion d’acheter <strong>de</strong>s cartes noires et comme je t’avais dit que je t’écrirai<br />

toujours le mardi je me trouve donc obligé aujourd’hui <strong>de</strong> t’écrire sur une carte en couleur<br />

et comme j’en ai encore une autre je serai obligé <strong>de</strong> te l’envoyer la prochaine fois mais si<br />

par hasard tu ne les trouvais pas à ton goût je ferai l’échange à un camara<strong>de</strong> <strong>de</strong> celle qui me<br />

reste. Dès que je saurai où l’on peut acheter toute la collection <strong>de</strong>s noires je l’achèterai.<br />

Rien <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong>puis vendredi. Bien le bonjour chez toi.<br />

Ton cousin.<br />

Guiheneuf ».<br />

Jusqu’à l’arrêté du 18 novembre 1903, la poste interdisait que l’on écrive au<br />

dos <strong>de</strong> la carte postale, celui-ci étant réservé uniquement à l’adresse. Cet<br />

arrêté autorisera donc l’adresse sur la partie droite et la correspondance sur<br />

la partie gauche. Ce n’est qu’en décembre 1903 que l’on pourra trouver cette<br />

nouvelle disposition.<br />

On notera que la taxe <strong>de</strong> dix centimes du timbre ne changera pas <strong>de</strong> 1878 à<br />

1917. Mieux, si vous affranchissiez à cinq centimes, il fallait barrer le terme<br />

« carte postale » au verso <strong>de</strong> la carte et écrire à la main celui d'«imprimé ». En<br />

revanche, la correspondance personnelle était interdite, seules les formules<br />

telles que « Meilleurs souhaits » ou « <strong>Bons</strong> <strong>baisers</strong> » (<strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> !) étaient<br />

autorisés.<br />

Jusqu’en 1964, il y eut même un tarif spécial pour la correspondance <strong>de</strong> cinq<br />

mots maximum.<br />

En attendant le mois <strong>de</strong> décembre 1903, pour écrire une missive sur une carte<br />

postale, il fallait alors jongler avec les espaces blancs, comme on le voit ici.<br />

Sur cette carte vivement colorée, où l’on distingue quatre vues <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> (la<br />

Bourse et les quais, la Préfecture, le château et le palais <strong>de</strong> Justice), une surface<br />

libre a été prévue.<br />

Dans ce premier courrier, on voit déjà tout l’intérêt suscité par ces cartes postales<br />

et l’envie <strong>de</strong> les collectionner. Un siècle plus tard, ils sont encore nombreux<br />

à arpenter brocantes et vi<strong>de</strong>-greniers à la recherche <strong>de</strong> la carte manquante.<br />

Juste timbrée !<br />

La Poste principale <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

Une institution respectée aux<br />

colonnes solennelles, quand le Service<br />

public n’était pas concurrentiel et<br />

se contentait d’être performant.<br />

Quand cartes et lettres parvenaient<br />

à leur <strong>de</strong>stinataire du jour au<br />

len<strong>de</strong>main… pour 5 centimes.<br />

Cette carte postale date <strong>de</strong> 1906,<br />

époque bénie où la Loire coule<br />

aux pieds du temple <strong>de</strong>s facteurs,<br />

à l’emplacement actuel du square<br />

Fleuriot, près <strong>de</strong> la place du<br />

Commerce. À ses pieds, une charrette<br />

à bras témoigne <strong>de</strong> nos<br />

ancêtres les transports. On peut<br />

lire sur le bâtiment « Entrée à la salle du Guichet, rue<br />

Lapérouse et rue du Couëdic ». L’expéditeur <strong>de</strong> ce courrier<br />

s’est contenté <strong>de</strong> timbrer la carte au tarif réduit, il<br />

n’a pas pris la peine d’écrire un petit mot, tout juste<br />

a-t-il signé et précisé le jour, un 24 juillet 1906.<br />

Au bon beurre blanc<br />

<strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Au dos, le cachet <strong>de</strong> la<br />

Poste indique 1903,<br />

<strong>de</strong>rnière année avant le<br />

changement <strong>de</strong> métho<strong>de</strong><br />

d’écriture. L’expéditeur<br />

a choisi cette vue pour<br />

le joli minois <strong>de</strong> la cuisinière<br />

qui présente une<br />

« spécialité <strong>de</strong> pays »,<br />

à base du légendaire<br />

« beurre blanc » créé<br />

par Clémence Lefeuvre<br />

du côté <strong>de</strong> la Divatte.<br />

« Il y a un siècle que<br />

j’attends <strong>de</strong> tes nouvelles »,<br />

écrit l’expéditeur au<br />

milieu <strong>de</strong> cette missive,<br />

que l’on peut lire<br />

aujourd’hui plus d’un<br />

siècle après son envoi par<br />

le miracle <strong>de</strong> la Poste !<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> 13


14 <strong>Bons</strong><br />

Démolition sur l’île <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

« Démolition record <strong>de</strong> l’ex-transport Drôme », dit la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette photographie. Autrement dit, la mort programmée d’un bateau qui<br />

n’était plus en état <strong>de</strong> naviguer. Sur la gauche, une grue d’un autre âge semble croiser le fer avec le pont Transbor<strong>de</strong>ur. Au premier plan,<br />

la silhouette d’un ouvrier dit adieu à ce « Drôme » démantelé.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Quai <strong>de</strong> la Fosse<br />

et Notre-Dame-<strong>de</strong>-Bon-Port<br />

Cette vue imprenable a été réalisée <strong>de</strong>puis<br />

le haut du pont Transbor<strong>de</strong>ur. Le peu <strong>de</strong><br />

ciel a néanmoins permis à l’expéditeur d’y<br />

glisser ces quelques phrases d’une<br />

écriture fine et ciselée. On découvre le<br />

quartier <strong>de</strong> l’église Notre-Dame-<strong>de</strong>-Bon-<br />

Port et sur la gauche l’ancienne tour à<br />

plomb, dite tour Launay.<br />

« 14-03-07 Mon cher Guillaume,<br />

Comme tu l’as sans doute appris par une lettre <strong>de</strong><br />

chez nous je suis arrivée à <strong>Nantes</strong> <strong>de</strong>puis<br />

dimanche midi. J’aurais bien voulu te voir à Dol<br />

en passant à 8 h et <strong>de</strong>mi du matin mais je<br />

n’aurais pas eu le temps <strong>de</strong> te prévenir.<br />

Je t’envoie cette carte car je prendrai mon temps<br />

pour l’achever afin <strong>de</strong> la faire plus longue.<br />

Le Saint-Mathurin doit partir pour Carjesse à la<br />

fin du mois, mais le départ sera je crois retardé<br />

par la grève qui a commencé aujourd’hui.<br />

En attendant que tu reçoives une plus longue<br />

lettre, reçois les <strong>baisers</strong> affectueux <strong>de</strong> ta femme<br />

qui t’aime.<br />

Arthur te souhaite le bonjour ».<br />

Mais qui est Arthur ? Fils, frère, amant…<br />

Promena<strong>de</strong> sur la Loire<br />

Promena<strong>de</strong> familiale sur la Loire le<br />

13 septembre 1962. Papa tient le Brownie<br />

flash. Les grues sont encore là et prouvent<br />

que le port est toujours actif. Il le sera<br />

jusqu’au milieu <strong>de</strong>s années quatre-vingts.<br />

Le Saint-Christophe <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Qui sont-ils ? Ses promeneurs, Nantais à<br />

n’en pas douter, qui profitent <strong>de</strong> cet<br />

instant <strong>de</strong> détente et <strong>de</strong> plaisir que<br />

constitue une bala<strong>de</strong> en mer.<br />

Sur la bouée, à droite, on distingue ce<br />

mot : Saint-Christophe, <strong>Nantes</strong>.<br />

Seront-ils du voyage le 18 juin 1931 quand<br />

le bateau sera englouti par la tempête*?<br />

*Lire Les Nantais, Tome I, p. 77 (Éd. D’Orbestier)<br />

15


16<br />

Le baptême<br />

d’un navire<br />

Le cargo<br />

Paul-Héroult qui se<br />

dresse fièrement<br />

aux chantiers<br />

navals <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

«… ne veut pas aller<br />

dans l’eau… »<br />

dit une légen<strong>de</strong><br />

au verso.<br />

Son baptême, prévu<br />

le 13 janvier 1959,<br />

a été reporté au<br />

29 janvier en raison<br />

<strong>de</strong> la crue <strong>de</strong> la<br />

Loire. Les Nantais,<br />

comme à leur<br />

habitu<strong>de</strong>, seront là<br />

pour le lancement.<br />

Un rite apprécié<br />

<strong>de</strong> tous.<br />

Dans ses mémoires,<br />

le capitaine<br />

Georges Aubin<br />

raconte qu’enfant,<br />

« c’était à qui verrait<br />

le premier<br />

“bouger” le navire<br />

en même temps<br />

que monterait à la<br />

poupe le pavillon<br />

français. Mais il<br />

fallait également<br />

“parer au grain”<br />

en évitant les<br />

grosses vagues qui<br />

déferlaient sur le<br />

rivage, provoquées<br />

par la poussée<br />

du navire entrant<br />

brutalement dans<br />

l’eau ».<br />

Quand la sardine s’envole<br />

En date du 17 octobre 1935, une agence<br />

anglaise, en reportage en pays nantais, titre<br />

ainsi sa dépêche: « La pêche aux sardines à<br />

<strong>Nantes</strong> ». En effet, <strong>de</strong>puis peu <strong>de</strong> temps, un<br />

service rapi<strong>de</strong> par avion transporte à Paris<br />

<strong>de</strong>s sardines fraîches. Avec ce nouveau système,<br />

les sardines sont mises en vente dans<br />

la capitale moins <strong>de</strong> trois heures après avoir<br />

été pêchées. Elles sont déchargées directement<br />

du bateau <strong>de</strong> pêche dans le fourgon<br />

qui les transporte au terrain d’aviation.<br />

Un peu d’histoire…<br />

Avec ses <strong>de</strong>ux mâts <strong>de</strong> sapin <strong>de</strong> pays gréés<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux voiles, le sardinier breton se présentait<br />

comme une forte barque non pontée<br />

<strong>de</strong> dix à treize mètres <strong>de</strong> long. Son<br />

étrave, perpendiculaire à la quille, lui donnait<br />

l’impression d’être penché en arrière<br />

quand le bateau était dans les lignes d’eau.<br />

La pêche se faisait dès le matin avec un jeu<br />

<strong>de</strong> filets <strong>de</strong> mailles différentes <strong>de</strong> 20 à<br />

25 mm suivant la grosseur <strong>de</strong> la sardine qui<br />

se prenait par les ouïes. On lançait le filet<br />

à l’eau ; le patron appâtait à pleines mains<br />

en jetant <strong>de</strong> la « rogue » (farine <strong>de</strong> débris<br />

<strong>de</strong> poisson et œufs <strong>de</strong> morue) pour faire<br />

lever le poisson. En remplacement <strong>de</strong> la<br />

« rogue » existait un autre appât nommé<br />

« gueldre » ou « guildive » qui se préparait<br />

avec <strong>de</strong>s crevettes, <strong>de</strong>s crabes, le fretin <strong>de</strong><br />

soles, <strong>de</strong> maquereaux ou <strong>de</strong> merlans.<br />

L’o<strong>de</strong>ur était épouvantable. Cet appât fut<br />

interdit car il faisait fermenter la sardine.<br />

En 1757, il y avait au Croisic trente bateaux<br />

se livrant à la pêche à la sardine. Le port <strong>de</strong><br />

La Turballe, futur centre important <strong>de</strong> cette<br />

pêche industrielle, n’existait pas encore.<br />

Cette pêche se pratiquait du mois <strong>de</strong> juin à<br />

fin octobre. On appelait les sardines « en<br />

vert » celles vendues au sortir du bateau aux<br />

consommateurs du coin ou aux marchands.<br />

Les sardines étaient transportées à dos <strong>de</strong><br />

mulet à l’intérieur <strong>de</strong>s évêchés <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> et<br />

<strong>de</strong> Rennes, elles arrivaient à <strong>Nantes</strong> 24 ou 30 heures après avoir été pêchées. La boîte <strong>de</strong> conserve, le procédé Collin, n’ayant pas encore fait<br />

son apparition sur le marché au XVIIIe siècle, les autres sardines étaient <strong>de</strong>stinées « à la presse ». Il s’agissait d’une opération <strong>de</strong> conserve.<br />

Lavées à l’eau <strong>de</strong> mer, salées, les sardines étaient enfilées par la tête sur <strong>de</strong> petites baguettes (une douzaine <strong>de</strong> poissons par baguettes) puis<br />

disposées par rang dans <strong>de</strong>s barils ouverts par un bout d’où s’écoulait l’huile extraite par pressurage. Les sardines pouvaient alors être expédiées<br />

à l’étranger et l’huile servait notamment au calfatage <strong>de</strong>s navires.<br />

C’est d’abord par le train, après la Première Guerre mondiale qu’arrivaient les sardines du Croisic à la gare <strong>de</strong> Chantenay. Les poissonnières<br />

venaient ensuite les récupérer afin <strong>de</strong> les vendre dans la rue au cri <strong>de</strong> « À la fraîche, à la fraîche ! ».<br />

Héritiers <strong>de</strong> cette activité, les pêcheurs <strong>de</strong> civelles travaillent toujours à récupérer ce que l’on nomme aujourd’hui « l’or blanc » du fleuve,<br />

qui fut le plat du pauvre : ces bébés anguilles, venus <strong>de</strong> la mer <strong>de</strong>s Sargasses qui, après <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong> voyage, remontent la Loire. Les<br />

civelles vivantes s’envolent aussi en avion <strong>de</strong> nos jours, certaines pour <strong>de</strong> riches clients japonais, vendues à <strong>de</strong>s prix (g)astronomiques !<br />

Elles sont souvent élevées là-bas en bassins avant que, <strong>de</strong>venues anguilles fumées, nous les dégustions avec <strong>de</strong>s baguettes dans les restaurants<br />

japonais.<br />

Il est bien loin le temps où l’on utilisait les surplus <strong>de</strong> civelles comme engrais dans les jardins <strong>de</strong> Saint-Sébastien-sur-Loire.<br />

17


18 <strong>Bons</strong><br />

Encore <strong>de</strong>s caresses…<br />

À <strong>de</strong>ux pas du théâtre Graslin et <strong>de</strong> ses cafés à la mo<strong>de</strong>, on vient se promener et se faire voir au cours Cambronne. Près du kiosque à<br />

musique, les gouvernantes <strong>de</strong>s beaux quartiers y promènent les enfants et leurs chiens qui ont besoin <strong>de</strong> bon air, sous le regard vigilant<br />

du général. Cette promena<strong>de</strong> semble inspirer le petit ami Jeannot qui envoie « ses plus jolies caresses ».<br />

L’indéboulonnable théâtre Graslin<br />

Le voilà « en vrai » ce théâtre Graslin.<br />

Petite photo <strong>de</strong> collection, réalisée par la<br />

maison Artaud et vendue sous enveloppe<br />

avec une dizaine <strong>de</strong> vues <strong>de</strong> célèbres lieux<br />

nantais.<br />

On <strong>de</strong>vine <strong>de</strong>s habitants en attente du<br />

prochain tramway (l’un d’eux remonte la<br />

rue Racine) qui passait sur cette belle<br />

place jusqu’à la fin <strong>de</strong>s années cinquante.<br />

Le café Le Molière fait face au Grand Café<br />

<strong>de</strong> France et son hôtel du même nom.<br />

Cet étroit goulot dans la ville a longtemps<br />

été réputé pour accueillir d’incroyables<br />

batailles d’oranges au moment <strong>de</strong>s<br />

festivités du carnaval.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Près <strong>de</strong> la Cigale, cours <strong>de</strong> la République<br />

En 1908, la fête <strong>de</strong> la Mutualité réunit quelques<br />

notables en ville. Sur cette image <strong>de</strong> reporter, une<br />

belle brochette d’élus s’apprête à entrer dans le<br />

cours <strong>de</strong> la République, qui <strong>de</strong>viendra plus tard le<br />

cours Cambronne.<br />

De gauche à droite, M. Sébille, le maire <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Gabriel Guist’hau (<strong>de</strong> 1908 à 1910), Casimir Périer,<br />

M. Dubochet <strong>de</strong> la Porte, M. Bachelier et M. Delafoy,<br />

avec la barbe, précise la légen<strong>de</strong>.<br />

On ne sait rien <strong>de</strong> la jeune femme pour qui on<br />

semble marquer beaucoup <strong>de</strong> déférence. Sur ce<br />

document rare, on <strong>de</strong>vine la brasserie La Cigale, le<br />

côté qui longe l’actuelle rue <strong>de</strong> Lattre-<strong>de</strong>-Tassigny.<br />

La Cigale<br />

« C’était fête hier soir à la Cigale, où l’on pendait la crémaillère. Réunion très intime à laquelle on avait convié toute la presse nantaise et tout ce que <strong>Nantes</strong><br />

compte d’entrepreneurs <strong>de</strong> travaux artistiques et d’artistes professionnels. C’est que tous ont collaboré à La Cigale qui sera <strong>de</strong>main le premier établissement <strong>de</strong><br />

<strong>Nantes</strong>, tant au point <strong>de</strong> vue du confort que <strong>de</strong> la richesse <strong>de</strong> la décoration ». Le Populaire,<br />

19


20 <strong>Bons</strong><br />

Le Temple du goût, les Floralies<br />

Cette jolie enveloppe, qui représente le<br />

Temple du goût, endroit charmant <strong>de</strong> la<br />

rue Kervégan, a été <strong>de</strong>ssinée par le<br />

Nantais Armand Ève. Ce 9 février 1963,<br />

elle sera envoyée à <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> personnes<br />

à l’occasion <strong>de</strong>s troisièmes<br />

Floralies internationales <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

La porte Saint-Pierre, Les Floralies<br />

Émission d’une secon<strong>de</strong> enveloppe, cette<br />

fois avec la colonne Louis XVI et la porte<br />

Saint-Pierre, est une création <strong>de</strong> Legault.<br />

Avec un joli cachet commémoratif.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Le jardin botanique et les serres du Jardin <strong>de</strong>s plantes<br />

<strong>Nantes</strong> a toujours eu une tradition et un grand savoir-faire en horticulture.<br />

Depuis le XVII e siècle, les serres du Jardin <strong>de</strong>s plantes étaient très renommées. Il était<br />

logique que <strong>de</strong>s Floralies soient régulièrement organisées dans la ville, créant un événement<br />

international.<br />

Ce petit mot a été adressé à Eugène Tessier, réserviste au 136 e <strong>de</strong> ligne, 10 e compagnie,<br />

manœuvre <strong>de</strong> l’Ouest, le 6 septembre 1905.<br />

« Mon cher Eugène, A l’heure où tu recevras cette carte il y aura du nouveau pour Henriette. Nous attendons<br />

l’arrivée du bébé aujourd’hui. Du courage et bonne santé. Nous t’embrassons tous.<br />

Ton frère qui t’aime. »<br />

Le champ <strong>de</strong> Mars, les Floralies <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Dites-le avec <strong>de</strong>s fleurs. <strong>Nantes</strong>, ville fleurie ? Mieux que cela. <strong>Nantes</strong>, ville <strong>de</strong>s Floralies<br />

internationales qui naquirent un beau jour <strong>de</strong> 1956 et s’épanouirent cette année-là du<br />

28 avril au 8 mai. Ici, un parterre <strong>de</strong> fleurs <strong>de</strong>vant l’ancienne salle du Champ <strong>de</strong> mars, premier<br />

lieu <strong>de</strong> cette manifestation avant le complexe <strong>de</strong> la Beaujoire.<br />

Pourquoi <strong>Nantes</strong> ? écrit alors Joseph Bouyer, le prési<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong>s Floralies Internationales. « Son passé horticole et<br />

botanique n’est pas sans gloire. Les serres <strong>de</strong> nos premiers<br />

jardins servirent d’infirmerie aux nombreuses<br />

plantes importées par nos navires, <strong>de</strong> tous les continents.<br />

Fatiguées par un long voyage, elles se réconfortaient<br />

avant <strong>de</strong> poursuivre leur voyage vers nos établissements<br />

nationaux.<br />

Les Floralies internationales <strong>de</strong> 1956 coïnci<strong>de</strong>ront avec<br />

un autre événement important : la commémoration du<br />

2e centenaire <strong>de</strong> la mort d’un grand botaniste nantais,<br />

l’amiral Bardin <strong>de</strong> la Galissonnière, introducteur du<br />

magnolia qui porte son nom. La production du camélia<br />

est une spécialité horticole nantaise universellement<br />

connue ; c’est aussi chez un horticulteur <strong>de</strong> la<br />

rue <strong>de</strong>s Chalâtres qu’est née l’anémone double à fleur<br />

<strong>de</strong> chrysanthème ».<br />

À <strong>Nantes</strong>, le syndicat <strong>de</strong>s horticulteurs fut fondé par le<br />

prési<strong>de</strong>nt Bahaud en 1912.<br />

<strong>Bons</strong> <strong>baisers</strong> à tous<br />

Au recto, on découvre le beffroi <strong>de</strong> l’église<br />

Sainte-Croix sur cette carte postale postée<br />

en 1934. Au verso un petit mot enfantin…<br />

« Jeudi 19 avril<br />

Ma chère Marthe, Merci beaucoup <strong>de</strong>s dragées du<br />

baptême <strong>de</strong> Mélaine. Nous nous promenons avec<br />

maman et Geneviève. Maman est en commission<br />

ailleurs et nous avons ren<strong>de</strong>z-vous à Prisunic où<br />

nous irons tout à l’heure. Il faut faire Geneviève<br />

rester très longtemps à <strong>Nantes</strong>. C’est si agréable <strong>de</strong><br />

l’avoir à la maison.<br />

<strong>Bons</strong> <strong>baisers</strong> à tous.<br />

Jean-Yves, Geneviève, Maurice ».<br />

Sonnez trompettes !<br />

Le beffroi encore, sous un angle pictural<br />

« mitraillé » <strong>de</strong> nombreuses fois par les<br />

photographes. Les premières cartes postales,<br />

dont cette carte nuage, ne s’y sont<br />

pas trompées.<br />

Ici Charlotte, maman <strong>de</strong> trois jeunes<br />

enfants, écrit à un certain Joseph qu’elle a<br />

attendu, en vain, avec ses parents le<br />

dimanche précé<strong>de</strong>nt…<br />

21


22 <strong>Bons</strong><br />

Tableaux d’une exposition<br />

C’est une tradition en pays nantais. L’exposition, qu’elle soit locale ou<br />

internationale, draine toujours <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> chalands et ça continue <strong>de</strong><br />

nos jours. Les photographes s’activaient. Des centaines <strong>de</strong> cartes postales,<br />

représentant les stands, commémoraient chaque année ces événements.<br />

Chaque exposant, fier <strong>de</strong> son stand, en profitait pour l’immortaliser.<br />

C’est chose faite ici pour ces « fon<strong>de</strong>ries Aubert et fils », spécialistes <strong>de</strong><br />

la mécanique et détenteurs d’une Médaille d’or…<br />

Au pays du musca<strong>de</strong>t, les Nantais boivent du lait…<br />

Ici, la « coopérative laitière <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> banlieue » qui propose <strong>de</strong>s<br />

produits mo<strong>de</strong>rnes : du lait pasteurisé, <strong>de</strong> la crème, du beurre centrifuge.<br />

Au fond le « Palais du tourisme », rien que ça !<br />

La libération<br />

<strong>de</strong> la ménagère…<br />

Les machines à repasser d’hier<br />

et d’aujourd’hui se ressemblent.<br />

En voici en démonstration à<br />

l’exposition <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> dans les<br />

années 1920. Les représentants<br />

prennent la pose tandis que le<br />

photographe, Arthur Lefièvre,<br />

domicilié au 49 rue Châteaulin<br />

dans le quartier <strong>de</strong> l’île <strong>de</strong><br />

Versailles, réalise son cliché.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Roulez jeunesse !<br />

Tous en voiture. Allez, roulez<br />

jeunesse ! En 1924, à l’occasion<br />

<strong>de</strong> l’exposition <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, c’est<br />

la photo à ne pas louper.<br />

— Un jour peut-être on aura<br />

une automobile… Les hommes<br />

adorent conduire.<br />

— Et pourquoi pas les<br />

femmes ?<br />

— Une femme au volant, c’est<br />

une catastrophe ! Et puis tu<br />

aurais l’air <strong>de</strong> quoi ?<br />

Le photographe Tissoco a pris<br />

ce cliché le 16 août. Mieux que<br />

le numérique, un souvenir<br />

durable, idéal pour envoyer un<br />

petit mot à la famille !<br />

On n’arrête pas le progrès !<br />

Le verre « Pyrex » ne date pas d’hier ! Cette carte en fait la preuve.<br />

Elle date <strong>de</strong> l’exposition <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> 1924. La fabrique du verre incassable<br />

nous fait l’article pour <strong>de</strong> la verrerie culinaire allant au four. Une<br />

révolution.<br />

Instants d’expos<br />

Les expositions <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> sont aussi professionnelles et l’occasion,<br />

pour les fabricants <strong>de</strong> l’Hexagone et au-<strong>de</strong>là, <strong>de</strong> présenter leurs productions<br />

aux industriels <strong>de</strong> la région et <strong>de</strong> prouver la vitalité et<br />

l’inventivité <strong>de</strong> la France. Ici, en direct <strong>de</strong> Roubaix, la capitale <strong>de</strong>s<br />

filatures, voici <strong>de</strong>s machines à teindre et <strong>de</strong>s dégraisseuses à la<br />

foire-exposition <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> en 1924.<br />

23


24 <strong>Bons</strong><br />

Fous <strong>de</strong> foot !<br />

On le savait déjà et ça ne s’arrange pas dans France Football du<br />

28 novembre 1972, avec cette « une » magnifique !<br />

« Marcos, Michel Blanchet <strong>de</strong> gauche à droite, c’est <strong>Nantes</strong> déchaîné roi<br />

du petit écran. »<br />

Jeunes espoirs ?<br />

Jolie carte photo <strong>de</strong> ces trois garçons réunis avec à leurs<br />

pieds le ballon <strong>de</strong> football. « En souvenir d’un bon copain,<br />

le 17 novembre 1919. Signé Arnaud ». On n’en saura pas<br />

beaucoup plus… Le cliché a été réalisé au studio<br />

« Express Photo », alors situé 11, rue <strong>de</strong> la Marne.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

La Saint-Pierre <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> 1938-1939.<br />

C’était avant la Secon<strong>de</strong> Guerre mondiale<br />

et avant la création du Football-Club<br />

Atlantique. Ces « champions <strong>de</strong> l’Ouest,<br />

promotion d’honneur » avaient pour nom<br />

Raab, Bernard, Demontmarin, Schindler,<br />

Jacotin et Kielka (en haut) et Buton,<br />

Garrec, Guerry, le Carlate, et Rivu en bas.<br />

Certains entreront dans la future équipe<br />

<strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> fondée entre 1943 et 1944.<br />

Ce principal club amateur <strong>de</strong> la ville, la<br />

Saint-Pierre, présidé par Marcel Braud, qui<br />

évolue en division d’honneur, est à l’origine<br />

du nom « Football-Club <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> ».<br />

Trois ans après la naissance du FCN<br />

C’est au café <strong>de</strong>s Alliés (l’actuel Trianon), place <strong>de</strong> la Bourse, face au square<br />

Villebois-Mareuil, dans son arrière-salle, que fut pensé et fondé le club sous la<br />

houlette <strong>de</strong> Marcel Saupin, alors prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Mellinet. Jean Le Guillou (entrepreneur<br />

en bâtiment, c’est lui qui construira le sta<strong>de</strong> Malakoff), en sera le premier<br />

prési<strong>de</strong>nt.<br />

La date officielle <strong>de</strong> la création du club est celle du 21 avril 1943.<br />

L’image ci-<strong>de</strong>ssous date <strong>de</strong> la saison 1946-1947. Elle a été prise au sta<strong>de</strong><br />

Malakoff, qui <strong>de</strong>viendra le sta<strong>de</strong> Marcel-Saupin. Le Football-Club <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> était né trois ans<br />

plus tôt <strong>de</strong> la fusion <strong>de</strong> cinq clubs : la Saint-Pierre <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, la Mellinet, SS Batignolles, Aso<br />

Nantaise, ACB Loire. Le FCN remporta la coupe <strong>de</strong> l’Ouest dès sa première saison.<br />

De 1960 à 1976, l’homme du FCN aura pour nom José Arribas. Cet immigré basque révolutionne<br />

le jeu à la nantaise, offensif et rapi<strong>de</strong>.<br />

Grâce à <strong>de</strong>s joueurs comme Boukhalfa et Guillot, Sochaux est battu le 1 er juin 1963, <strong>Nantes</strong><br />

accè<strong>de</strong> à la première division. Quarante-quatre ans <strong>de</strong> première division plus tard, l’équipe<br />

est retombée en ligue 2 durant un an.<br />

Les supporters nantais étaient toujours là à remplir le sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Beaujoire pour soutenir<br />

leurs joueurs et, en 2008, le FCN retrouvait la ligue 1.<br />

José Arribas est décédé en 1989.<br />

Accroupis, <strong>de</strong> gauche à droite: Le Floch, Antoine Raab (entraîneur), Jacky Scuiller, Maestroni, Crépin. Debout, <strong>de</strong> gauche<br />

à droite: Ribero, Robert Garrec, Eugène Abautret, Martial Gergotich, Le Maître, Charles Drummer (gardien <strong>de</strong> but).<br />

Mémoire <strong>de</strong> collégien du Locquidy<br />

« Chaque année, le collège du Loquidy<br />

publiait un palmarès avec la photo <strong>de</strong><br />

chaque classe et parfois celle <strong>de</strong>s<br />

équipes <strong>de</strong> foot », explique le Nantais<br />

Jean Delcroix. « Le frère qui s’occupait <strong>de</strong><br />

nous était Anglais, Maurice Macklusky. À<br />

la récréation, chaque classe avait un petit<br />

terrain goudronné avec <strong>de</strong>ux buts et un<br />

ballon en mousse. Ce ballon était tout <strong>de</strong><br />

même assez ferme car j’ai cassé un jour<br />

un carreau du réfectoire au grand dam <strong>de</strong><br />

mes parents! »<br />

25


26 <strong>Bons</strong><br />

Gon<strong>de</strong>t, un joueur mythique !<br />

Le voilà, le fameux Philippe Gon<strong>de</strong>t qui<br />

incarna si bien l’expression nantaise<br />

« Gon<strong>de</strong>t, ton but ! ».<br />

Il sera consacré meilleur buteur du<br />

championnat <strong>de</strong> France en 1966 avec<br />

39 buts et remportera pour la <strong>de</strong>uxième<br />

année consécutive le titre <strong>de</strong> champion<br />

<strong>de</strong> France.<br />

Sélectionné quatorze fois en équipe <strong>de</strong><br />

France, il jouera successivement à Paris<br />

(1971), au Red Star puis à Caen avant<br />

d’achever sa carrière en 1973.<br />

Le Snuc ou la belle aventure<br />

<strong>de</strong>s rois du rugby nantais<br />

Je vous écris en compagnie <strong>de</strong>s fous du ballon<br />

ovale. C’est en 1904 qu’a été créée la<br />

première version du Snuc (Sta<strong>de</strong> Nantais<br />

Université Club), imaginée un an plus tôt,<br />

par <strong>de</strong>s étudiants. Son premier prési<strong>de</strong>nt,<br />

élu le 17 février 1904, se nommait Marcel<br />

Pionneau, le siège social se tenait à l’école<br />

du Chêne-d’Aron. Trois ans plus tard,<br />

l’équipe brille déjà avec les exploits d’un<br />

grand joueur nommé Pascal Laporte, plusieurs<br />

fois champion <strong>de</strong> France avec le<br />

Sta<strong>de</strong> bor<strong>de</strong>lais, tandis que les couleurs<br />

rouge, blanc et vert sont définitivement<br />

adoptées. C’est au Petit-Port, sur un terrain<br />

caillouteux, que les premiers sportifs vont<br />

s’entraîner tandis qu’un bistrot du coin est<br />

réquisitionné comme vestiaire. Un an plus<br />

tard, le Rugby club <strong>de</strong> Basse-Indre Couëron<br />

fusionne à son tour avec le Snuc, qui gar<strong>de</strong><br />

son nom. Le nouveau prési<strong>de</strong>nt a pour nom<br />

Charles Bernard puis Louis Éluere.<br />

Percy Bush, le Zidane du rugby<br />

Le meilleur <strong>de</strong>mi d’ouverture du mon<strong>de</strong> va<br />

jouer au Snuc ! Vrai. La scène se passe en<br />

1910. Percy Bush est un joueur du Pays <strong>de</strong><br />

Galles, un caïd et une star. Tous les Nantais,<br />

qui suivent les matchs, sont éblouis par ses<br />

performances. Comment une équipe comme<br />

<strong>Nantes</strong> a-t-elle pu, en 1910, s’acheter un tel<br />

rugbyman ? « C’est difficile à dire », précise<br />

Hervé Padioleau, un amoureux <strong>de</strong> l’histoire<br />

<strong>de</strong>s sports nantais, « ça reste une énigme ».<br />

Ce qui est sûr, c’est que les autres clubs <strong>de</strong><br />

rugby français étaient très jaloux. Percy était<br />

le capitaine <strong>de</strong> Cardiff, l’équipe galloise,<br />

mais aussi <strong>de</strong>s Lions, composée <strong>de</strong>s meilleurs<br />

joueurs britanniques<br />

(Irlan<strong>de</strong>, Pays <strong>de</strong><br />

Galles, Écosse et<br />

Angleterre). « Avant<br />

son arrivée à <strong>Nantes</strong>,<br />

avec les Lions, il<br />

venait <strong>de</strong> battre les<br />

All Blacks sur leur<br />

propre terrain. C’était<br />

quelqu’un <strong>de</strong><br />

vraiment très emblématique,<br />

une sorte<br />

<strong>de</strong> Zidane du ballon<br />

ovale. Aujourd’hui,<br />

j’ai lu dans le gui<strong>de</strong><br />

du « World rugby »<br />

<strong>de</strong>s meilleurs<br />

joueurs du XX e siè-<br />

cle que Percy Bush était placé en 5 e<br />

position ».<br />

Parmi les autres joueurs du Snuc en 1910,<br />

on retiendra Alfred Éluere, un <strong>de</strong>s fils d’une<br />

famille d’industriels du bâtiment, premier<br />

« gros sponsor » du club, Helier, Thil,<br />

Hacker (mé<strong>de</strong>cin, Hervoche <strong>de</strong> vrai nom),<br />

Auzanet et aussi Laccassagne.<br />

Champion <strong>de</strong> France en 1917<br />

Le club nantais décroche le titre <strong>de</strong> champion<br />

<strong>de</strong> France en 1917. « Quelle journée<br />

inoubliable », peut-on lire dans le journal<br />

Le Phare du 1 er mai 1917. « Le Snuc, dont la<br />

science s’affirmera au cours <strong>de</strong> toute la partie,<br />

répondra en effet avec une assimilation<br />

<strong>de</strong> jeu à toutes les attaques <strong>de</strong> Toulouse par<br />

les mêmes attaques. Il tournera et défoncera<br />

la mêlée adverse. Toulouse attaquera par ses<br />

<strong>de</strong>mis et ses trois quarts. <strong>Nantes</strong>, immédiatement,<br />

étouffera ces <strong>de</strong>rniers et partira en<br />

passes. Toute la science <strong>de</strong> Toulouse est<br />

annihilée. <strong>Nantes</strong> toujours, <strong>Nantes</strong> encore et<br />

toujours, Snuc, Snuc. C’est formidable! Le<br />

Sta<strong>de</strong> Nantais Université Club l’emportera 8<br />

à 3 contre Toulouse à Bor<strong>de</strong>aux ».<br />

Hervé Padioleau rappelle néanmoins que ce<br />

titre « était en fait la coupe <strong>de</strong> l’Espérance.<br />

Même si les sports n’ont jamais arrêté<br />

durant la Première Guerre mondiale, <strong>de</strong><br />

nombreux grands joueurs <strong>de</strong> clubs français<br />

étaient sur le front et y sont morts ».<br />

Destruction <strong>de</strong>s archives<br />

Lors <strong>de</strong>s bombar<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> le<br />

16 septembre 1943, une partie <strong>de</strong>s installations<br />

sportives, ainsi que leur siège social<br />

<strong>de</strong> la rue Santeuil, seront détruits, précise<br />

Hervé Padioleau.<br />

« Toutes leurs archives, qui se trouvaient à<br />

l’angle <strong>de</strong> la rue Santeuil et <strong>de</strong> la rue<br />

Crébillon, avaient disparu. Il n’y avait rien<br />

aux archives municipales et départementales<br />

alors j’ai entrepris <strong>de</strong> lire toutes les<br />

collections <strong>de</strong> la presse locale ».<br />

Le club renaîtra <strong>de</strong> ses cendres sous l’autorité<br />

<strong>de</strong> Marcel Pedron tandis que le sta<strong>de</strong><br />

prendra le nom <strong>de</strong> Pascal Laporte en hommage<br />

au premier grand joueur. Aujourd’hui,<br />

le Snuc accueille près <strong>de</strong> 450 licenciés et<br />

organise chaque année un tournoi international,<br />

le challenge Michel Lecointre, ancien<br />

joueur nantais et <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> France,<br />

mort à trente ans en 1956. On notera qu’une<br />

rue <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> rend hommage à Henri<br />

Pichery (1898-1956), représentant en laine<br />

qui fut secrétaire général du Snuc et qui<br />

s’occupa <strong>de</strong>s relations franco-galloises.<br />

Snuc 1910. Les joueurs prennent la pose, et ceux qui bougent seront flous pour la postérité. Une main, amoureuse peut-être, n’a pas<br />

résisté à ajouter ses « bons <strong>baisers</strong> » sportifs.<br />

Un sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> légen<strong>de</strong><br />

Avant <strong>de</strong> quitter les ballons ronds et<br />

ovales, un <strong>de</strong>rnier regard sur une scène<br />

bien nantaise, celles <strong>de</strong>s soirs <strong>de</strong><br />

matchs quand la foule déambulait au<br />

pied <strong>de</strong> l’imposant sta<strong>de</strong> Malakoff.<br />

Construit en 1937, il sera équipé d’un<br />

système d’éclairage en 1957 et <strong>de</strong>viendra<br />

Marcel Saupin, en 1963.<br />

Les canaris quitteront ce sta<strong>de</strong> pour<br />

celui <strong>de</strong> la Beaujoire le 28 avril 1984.<br />

Aujourd’hui seule la tribune nord a été<br />

conservée, le reste <strong>de</strong> l’espace accueillera<br />

un centre <strong>de</strong> recherches et <strong>de</strong>s<br />

entreprises à partir <strong>de</strong> 2011.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> 27


28 <strong>Bons</strong><br />

Le tour <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> en 1924<br />

Une belle image du départ sur les pavés nantais où l’on discerne aussi les rails du vieux tramway. La course s’achèvera par le résultat<br />

suivant : 1er Cario, 2e ex æquo Jacques Rousset, 1er SOC.<br />

« J’ai bien reçu ta carte »<br />

Qui sont ces cinq coureurs ? Une partie du mystère<br />

se lève grâce à la correspondance que l’on peut lire<br />

au dos <strong>de</strong> cette carte photo.<br />

« <strong>Nantes</strong>, le 18 juillet 1926<br />

Cher Paul, J’ai bien reçu ta carte du 2 juillet et suis bien heureux<br />

<strong>de</strong> te savoir arrivé sans encombres et que tu te trouves en<br />

bonne santé. Vraiment je crois que tu vois du pays et que tu<br />

nous raconteras cela quand tu reviendras. Au SCN tout va<br />

pour le mieux, il n’y a que moi qui me suis fait amocher en<br />

moto au circuit <strong>de</strong> la Vallée <strong>de</strong> la Loire, je suis obligé <strong>de</strong> rester<br />

à la maison et ce n’est pas le rêve. C’est Leguillon qui a enlevé<br />

ça au sprint, ils étaient dix en peloton, 2e Lecomte, 3e Fraslin,<br />

4e Robin, 5e Crosnier, 6e Volant, 7e Huchet… Enfin, je te tiendrai<br />

au courant. Je termine en te serrant cordialement la<br />

main, ma femme se joint à moi et ne t’en fais pas prends le<br />

temps comme il vient et surtout bonne santé.<br />

Ton ami Ernest »<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

1922, les coureurs et leurs coaches<br />

Ils courent, ils courent, suivis par <strong>de</strong>ux hommes à vélo,<br />

leurs coaches certainement, avant la lettre. Cette fois, il<br />

s’agit du Tour <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> en 1922, une épique course sur<br />

dix-huit kilomètres. Le premier arrivé a pour nom Plançon<br />

et le second Étienne Rousset. Bravo à tous les <strong>de</strong>ux !<br />

La fin du tour <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Il pleut sur <strong>Nantes</strong>. Exténués mais ravis d’être arrivés, sur cette photo instantanée <strong>de</strong>s années 1920, les <strong>de</strong>ux gagnants du tour <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

sont saisis en pleine récupération et posent pour la postérité en attendant les concurrents moins chanceux.<br />

29


30 <strong>Bons</strong><br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

La petite reine attire les Nantais <strong>de</strong>puis ses débuts<br />

Nous voilà place Royale, juste <strong>de</strong>vant le café Le Continental, un<br />

lieu fréquenté chaque saison par <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> Nantais. En cette<br />

année 1908, en plein Tour <strong>de</strong> France, le photographe immortalise<br />

les cyclistes. Au dos <strong>de</strong> la carte, il précise : « Contrôle Galetti,<br />

Italien, François Faber (France) et Georges Passerieu (France) ».<br />

C’est Lucien « Petit-Breton » qui avait gagné l’étape à <strong>Nantes</strong> et il<br />

semble bien que ce soit lui, le plus à droite sur cette photo. Il<br />

s’agissait <strong>de</strong> la onzième étape, Bor<strong>de</strong>aux-<strong>Nantes</strong>, 391 kilomètres,<br />

qu’il gagnera d’ailleurs en 1907 et 1908.<br />

Il <strong>de</strong>vait également remporter le Tour 1908 <strong>de</strong>vant Faber, second, et<br />

Passerieu, troisième.<br />

« Petit Breton », <strong>de</strong> son vrai nom Lucien Mazan, est né le 18 octobre<br />

1882 à Plessé en Loire-Atlantique. Il s’était marié avec Marie-<br />

Ma<strong>de</strong>leine Macheteau, domiciliée à Vallet.<br />

Champion du Tour en 1907 et 1908, Petit-Breton, méticuleux au<br />

point d’emmener son vélo dans sa chambre d’hôtel, sera tué durant<br />

la Première Guerre mondiale en 1917 à Troyes.<br />

François Faber, vainqueur du tour 1909 et Octave Lapize, 1910,<br />

mourront eux aussi au front. Lucien Petit-Breton a été inhumé au<br />

cimetière <strong>de</strong> Pénestin en Loire-Atlantique.<br />

Le facteur sonne toujours <strong>de</strong>ux fois<br />

Ce jovial facteur, que l’on n’appelait pas encore<br />

préposé <strong>de</strong> la Poste, nous entraîne maintenant<br />

dans une ville en liesse. La foule se presse pour<br />

acclamer les reines, le roi carnaval et le veau gras,<br />

tandis que les grosses têtes amusent les plus<br />

grands et font un peu peur aux plus petits…<br />

En avant la musique !


Je vous écris <strong>de</strong>…<br />

<strong>Nantes</strong><br />

sous<br />

les confettis<br />

Bonjour Julien,<br />

Je vous écris <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, sous les confettis et le charme<br />

<strong>de</strong>s reines <strong>de</strong> la ville où l’on se déguise chaque année à<br />

la mi-carême, où l’on flâne sur les bords <strong>de</strong> l’Erdre un<br />

dimanche à la Jonelière.<br />

Je vous écris <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> auprès <strong>de</strong>s rois du rire, <strong>de</strong> l’illusion<br />

et du sourire. Avec ces satanées gouttes <strong>de</strong> pluie<br />

qui se sont donné le mot pour tomber à chacune <strong>de</strong>s<br />

para<strong>de</strong>s dans le centre-ville, j’ai l’impression<br />

que le ciel est <strong>de</strong> mèche. Ici on aime la fête et<br />

l’amitié, le bon vin et les nuits blanches.<br />

Quand viendrez-vous? Le temps est long à<br />

vous attendre. Je commence à bien connaître la<br />

ville et je ne manquerais pas <strong>de</strong> vous la faire<br />

visiter. À bientôt.<br />

Valentine


34 <strong>Bons</strong><br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

En attendant la cavalca<strong>de</strong>, en haut…<br />

Au balcon bien entendu avec vue imprenable et panoramique<br />

sur la place Royale. Au dos <strong>de</strong> cette image, on peut lire « Mardi<br />

gras <strong>de</strong> l’an 1926. Souvenir d’une bonne journée joyeuse ».<br />

On n’en saura pas plus. L’expéditeur(trice) est peut-être au balcon,<br />

souriant sous son chapeau cloche, déguisé(e) en princesse<br />

ou en noble vieillard, en train <strong>de</strong> lancer confettis et serpentins.<br />

… et en bas, au café d’Orléans<br />

Établissement à la mo<strong>de</strong>, le café d’Orléans était également très<br />

prisé les jours <strong>de</strong> carnaval. Le défilé passait par la place Royale,<br />

la rue d’Orléans et la rue Crébillon. Il fallait juste se lever <strong>de</strong><br />

bonne heure pour occuper une place. Les plus malins s’étaient<br />

fait inviter au-<strong>de</strong>ssus.<br />

Cette image, réalisée le 27 septembre 1910, est accompagnée<br />

d’un petit mot : « Une Nantaise, pour rire. Amitiés ».<br />

35


36 <strong>Bons</strong><br />

C’est parti ! Que la fête commence !<br />

Longtemps, la mi-carême a démarré par un coup <strong>de</strong> canon.<br />

Ici Raoul Tessier, figure nantaise, qui fut roi carnaval, s’apprête à<br />

le tirer. À sa droite, dans la gar<strong>de</strong> royale, le tambour-major James<br />

Herniou, petit prince du lancer <strong>de</strong> canne.<br />

La chronique <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> rapporte que les premières<br />

« mascara<strong>de</strong>s » du Carnaval, fêtées lors du mardi gras, remontent<br />

à l’année 1540. Une ordonnance du juge <strong>de</strong> police rappelle, en<br />

1722, que le port <strong>de</strong> l’épée est interdit à « ceux qui n’en ont point<br />

la faculté et notamment aux étudiants et aux personnes masquées<br />

pendant le carnaval ». On ne sait jamais.<br />

Le premier bal masqué eut lieu en février 1729 mais il faudra<br />

attendre 1840 pour que le carnaval connaisse un succès considérable.<br />

Des dizaines <strong>de</strong> Nantais se pressent alors sur le lieu le plus<br />

touristique du moment, soit la promena<strong>de</strong> ombragée par les<br />

ormes du quai <strong>de</strong> la Fosse. On y apprécie le cortège avec ses travestis<br />

et ses masques, chantant et dansant.<br />

3 000 oranges<br />

En 1858, le chemin <strong>de</strong> fer fait son apparition sur le quai <strong>de</strong> la<br />

Fosse. Ç’en est fini <strong>de</strong> la promena<strong>de</strong> préférée <strong>de</strong>s Nantais.<br />

À l’heure <strong>de</strong> la vapeur, la locomotive triomphe avec ses wagons<br />

qui filent vers la mer. Pas moins <strong>de</strong> 24 passages à niveaux sont<br />

construits <strong>de</strong>puis la gare d’Orléans jusqu’à la sortie <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

La mi-carême ne s’est pas pour autant arrêtée. Elle renoue avec<br />

le centre-ville tandis qu’une nouvelle mo<strong>de</strong> fait son apparition :<br />

le lancer d’oranges !<br />

Entre le café Molière et l’ancien Hôtel <strong>de</strong> France, qui se trouve<br />

alors juste en face, plus <strong>de</strong> trois mille oranges sont lancées pour<br />

la seule journée <strong>de</strong> la mi-carême <strong>de</strong> 1867.<br />

Cela, au préjudice <strong>de</strong> quelques vêtements tâchés mais au grand<br />

profit <strong>de</strong>s marchands d’oranges qui en font alors le commerce<br />

avec le Portugal… et <strong>de</strong>s vitriers.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Monique Créteur, première femme roi Carnaval<br />

En 1869, au « Grand Cercle <strong>de</strong> la place Graslin », il y a eu pour<br />

plus <strong>de</strong> 100 francs <strong>de</strong> vitres cassées, les pavés étaient jonchés <strong>de</strong><br />

débris, rapporte un chroniqueur nantais.<br />

Les <strong>de</strong>ux premiers chars, tirés par <strong>de</strong>s chevaux, ont été créés en<br />

1880. Le roi Carnaval fut longtemps un Nantais populaire, <strong>de</strong><br />

Joseph Peignon à Aimé Delrue, si l’on cite les plus connus <strong>de</strong><br />

l’après-guerre. Personnage symbolique, un char lui est consacré. En<br />

2007, Anne Roumanoff est l’exception qui confirme la règle comme<br />

le fut, en son temps, Tino Rossi, élu roi carnaval nantais. Il n’y eut<br />

qu’une seule autre femme à être élue roi Carnaval, Monique<br />

Créteur, qui dirige toujours la Maison <strong>de</strong>s marionnettes <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

Grosses têtes<br />

Les grosses têtes, piliers <strong>de</strong> cette fête (le comité <strong>de</strong>s Fêtes opte<br />

en 1985 pour le mot carnaval au lieu <strong>de</strong> mi-carême), trouveraient<br />

leurs origines du côté <strong>de</strong>s géants du Nord. Entre les <strong>de</strong>ux guerres,<br />

on trouve <strong>de</strong>s grosses têtes dans tous les défilés.<br />

Roger Maussion, 50 ans <strong>de</strong> carnaval<br />

Prési<strong>de</strong>nt d’honneur du comité <strong>de</strong>s fêtes, aujourd’hui disparu,<br />

Roger Maussion, né en 1914, témoignait dans Presse-Océan du mois<br />

<strong>de</strong> mars 2000, <strong>de</strong> ses cinquante années <strong>de</strong> carnaval. Il participe<br />

avec Aimé Delrue au retour du carnaval, interrompu par la guerre.<br />

« On avait du mal à trouver <strong>de</strong>s locaux, du papier, <strong>de</strong>s serpillières.<br />

Il n’y avait pas <strong>de</strong> plâtres, pas d’essence, il fallait courir partout<br />

pour trouver un jardinier, <strong>de</strong>s chevaux. On repartait <strong>de</strong> zéro ». Sans<br />

confettis ni serpentins, le défilé arpentera les rues d’une ville en<br />

ruine mais avec la paix retrouvée. Un carnaval qu’il aime toujours<br />

voir passer avec admiration mais qu’il n’entend pas comparer avec<br />

ceux du passé. « Les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie ont changé, les gens n’avaient<br />

pas la télé autrefois, n’étaient pas bien chauffés. Ils étaient<br />

contents <strong>de</strong> se retrouver pour chahuter et se lancer <strong>de</strong>s confettis ».<br />

Pierre Herniou et James<br />

les rois du lancer <strong>de</strong> canne !<br />

Pierre Herniou à gauche, et son fils James, le plus<br />

à droite, entourent un batteur <strong>de</strong> jazz.<br />

Figure nantaise <strong>de</strong>s années 1930 aux années 1960,<br />

Pierre Herniou était entré en 1946 au service<br />

publicité <strong>de</strong> Presse-Océan. Compagnon d’Aimé<br />

Delrue, il fut le roi carnaval 1964. Multiinstrumentiste<br />

- il passait <strong>de</strong> la batterie à la<br />

contrebasse-, Pierre Herniou jouait dans<br />

l’orchestre <strong>de</strong> la revue <strong>de</strong> la Cloche avec<br />

J’Aubernon et dans le Grand Orchestre du théâtre<br />

Graslin. Il était aussi le chef <strong>de</strong> la musique royale<br />

<strong>de</strong>s défilés <strong>de</strong> la mi-carême. « Qui ne connaît pas<br />

la silhouette trapue <strong>de</strong> Pierre Herniou, son éternel<br />

sourire, sa bonne humeur, son optimisme engageant<br />

? », se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le journaliste Guy Bertout à l’aube du défilé <strong>de</strong> 1964. « Et que <strong>de</strong> titres ne peut-il (faute <strong>de</strong> place) aligner sur sa<br />

carte <strong>de</strong> visite : ancien tambour-major <strong>de</strong> la musique du 65e Régiment d’Infanterie, titulaire du pupitre <strong>de</strong>s timbales à l’orchestre<br />

Graslin, membre <strong>de</strong> l’Association symphonique nantaise et <strong>de</strong> l’Union Philharmonique… »<br />

En 1955, quand cessa la tradition <strong>de</strong> promener un Nantais en effigie, on revint au processus <strong>de</strong>s rois anonymes.<br />

Pierre Herniou disparaîtra brutalement dans un acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> voiture en 1969. Son fils, James Herniou, <strong>de</strong>viendra tambour-major <strong>de</strong> la<br />

musique <strong>de</strong> la Gar<strong>de</strong> royale <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>. On le retrouvera régulièrement à l’ouverture du défilé avec le fameux lancer <strong>de</strong> canne qu’il avait<br />

hérité <strong>de</strong> son père.<br />

Cinq rois carnaval dans les années 1960<br />

De gauche à droite dans les années soixante, Albert Athimon qui fut longtemps maire du Bouffay, roi carnaval en 1966. Prince <strong>de</strong>s facéties,<br />

Albert Athimon, aujourd’hui disparu, fut le patron du restaurant « Le Coq Hardy » non loin <strong>de</strong> la place <strong>de</strong> la Duchesse-Anne, boulevard<br />

Charcot. Il eut l’idée amusante d’offrir à la reine son poids en oranges ; à la première <strong>de</strong>moiselle, son poids en mogettes <strong>de</strong><br />

Vendée et à la secon<strong>de</strong> <strong>de</strong>moiselle d’honneur, son poids en pommes <strong>de</strong> terre.<br />

Juste après, Raoul Tessier, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s commerçants et responsable du coup <strong>de</strong> canon du carnaval. Surnommé « Bouboule », il fut roi<br />

carnaval en 1965; Joseph Bouhier (maraîcher, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s Floralies), roi en 1963; Pierre Herniou, roi 1964 et Joseph Peignon, roi en 1947.<br />

« Une “Majesté” sort,<br />

bonhomme bedonnant,<br />

tenant tout juste sur le<br />

char qu’un Lafont, qu’un<br />

Chabas, qu’un Sarraméa,<br />

qu’un Éluère, qu’un Jumel<br />

a fait construire par un <strong>de</strong><br />

nos carnavalier », écrit<br />

Jean Belfond dans « Vieux<br />

carnavals nantais ».<br />

« Quel ogre que ce souverain<br />

! Il s’engraisse <strong>de</strong><br />

tous les confettis qui,<br />

tout au long du parcours,<br />

forment comme un autre<br />

brouillard nantais, un<br />

brouillard multicolore.<br />

Pourtant, le Sire hilare est<br />

mélancolique : il regrette<br />

<strong>de</strong> ne pouvoir engloutir,<br />

jusqu’à l’indigestion, ces<br />

belles oranges qu’on a<br />

interdites parce que ses<br />

sujets en avaient un peu<br />

trop abusé ».<br />

37


38 <strong>Bons</strong><br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Les gran<strong>de</strong>s dates <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s Reines.<br />

Des blanchisseuses à internet…<br />

1880 - On trouve mention du premier char carnavalesque <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

1881 - La pub fait son apparition. Le premier char réclame est arrivé.<br />

1886 - Lancement du concours du bœuf gras. Il finit ensuite à la rôtissoire.<br />

1890 - Première voiture fleurie.<br />

1891 - Première gran<strong>de</strong> cavalca<strong>de</strong> organisée par <strong>de</strong>s étudiants avec vingt-<strong>de</strong>ux chars.<br />

1896 - Première reine <strong>de</strong>s blanchisseuses. Marie Guilloteau.<br />

1899 - Une reine <strong>de</strong>s blanchisseuses et une reine <strong>de</strong>s lingères sont élues.<br />

1904 - Première reine <strong>de</strong> la mi-carême.<br />

1910 - Trois reines <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> et quatre reines <strong>de</strong>s blanchisseuses.<br />

1911 - Élection <strong>de</strong> la représentante <strong>de</strong>s midinettes (!) et <strong>de</strong> l’alimentation.<br />

1912 - Première reine <strong>de</strong> beauté. Pour la première fois, elle défile sur un char.<br />

1914 - Première reine du carnaval choisie par les ouvrières <strong>de</strong> la manufacture <strong>de</strong>s<br />

Tabacs. Cette année est aussi celle <strong>de</strong> tous les records <strong>de</strong> reines. On n’en compte pas<br />

moins d’une dizaine avec <strong>de</strong>s majestés qui représentent les blanchisseuses, les couturières,<br />

les bijoutières, les lingères…<br />

1920 - Cinq reines.<br />

1922 - Première réception <strong>de</strong>s reines à la mairie.<br />

1926 - Les reines <strong>de</strong> la mi-carême sont aussi reines <strong>de</strong> la biscuiterie. Cette année-là,<br />

le comité d’organisation avait décidé d’évincer les blanchisseuses. La corporation<br />

<strong>de</strong>s lavandières piqua une colère et décida d’envoyer défiler son propre roi. On ne<br />

badinait pas avec la royauté, fut-elle nantaise et précaire.<br />

1939 - Les reines sont élues par quinze célibataires <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 15 ans, tirés au sort<br />

parmi les danseurs du bal chez Mauduit, rue Arsène-Leloup à <strong>Nantes</strong>.<br />

1947 - C’est au cours <strong>de</strong> la revue d’Aimé Delrue que les reines <strong>de</strong> la mi-carême sont<br />

élues. Dans la foulée, les reines <strong>de</strong>s PTT, les reines <strong>de</strong>s cheminots et <strong>de</strong> Saint-<br />

Sébastien-sur-Loire font leur apparition. Cette année-là, le roi carnaval sera l’illustre<br />

Joseph Peignon.<br />

1949 - Les reines <strong>de</strong> la Nouveauté s’ajoutent aux reines classiques…<br />

1962 -… en compagnie <strong>de</strong>s reines <strong>de</strong> Doulon.<br />

1970 - C’est la <strong>de</strong>rnière année que l’élection <strong>de</strong>s reines a lieu au théâtre Apollo.<br />

1971 - Les reines <strong>de</strong> la mi-carême sont aussi reines <strong>de</strong>s Floralies.<br />

1972 - L’élection a lieu au cours d’un grand spectacle à la Beaujoire <strong>de</strong>vant cinq<br />

mille spectateurs.<br />

1984 - Les Reines sont ambassadrices <strong>de</strong>s Floralies <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

1987 - La commune <strong>de</strong> Saint-Herblain présente à son tour ses propres reines.<br />

1989 - L’élection a lieu pendant un spectacle au salon <strong>de</strong> l’horticulture. Le jury<br />

se compose <strong>de</strong> commerçants. Les reines se présentent en robes <strong>de</strong> soirée puis en<br />

maillots <strong>de</strong> bain.<br />

1991 - Le public <strong>de</strong> la revue La Cloche élit désormais les reines <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>.<br />

2007 - Les temps changent, le public nantais peut désormais voter pour les reines<br />

<strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> sur internet. Samantha, Armelle et Cindy, le nouveau trio, a été élu le<br />

20 janvier 2007 lors d’une soirée au Zénith au cours d’un show <strong>de</strong> Holiday on Ice.<br />

Mireille Josephau, qui a inspiré le film « La Reine Blanche » était présente. À Saint-<br />

Herblain : Justine Pays, Mélissa Beldjiali et Samantha Crénéguy. À Doulon : Cécilia<br />

Lehéricy, Carine Eber et Delphine Fouré.<br />

2008 - <strong>Nantes</strong> a <strong>de</strong> nouvelles ambassadrices. Florence Meurice, Anne-Charlotte<br />

Gautier et Mélanie Pajot représentent la ville.<br />

Trois sourires royaux.<br />

Au milieu, Jocelyne Ponlot, reine <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> en 1964, tient<br />

aujourd’hui un tabac-presse route <strong>de</strong> Vannes. Ses clients<br />

ne savent pas qu’elle fut reine il y a plus d’une quarantaine<br />

d’années. « On était tout le temps dans le journal »,<br />

sourit-elle à l’évocation <strong>de</strong> cette belle année où elle inaugura<br />

notamment la foire-exposition avec Chaban Delmas,<br />

prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’assemblée nationale. « On nous reconnaissait<br />

dans la rue ! » A l’origine <strong>de</strong> cette élection, « c’était<br />

une amie <strong>de</strong> ma mère qui voulait que je me présente. Je<br />

travaillais alors dans un atelier <strong>de</strong> couture place Lechat.<br />

Elle m’a dit : je te paye la robe et la coiffure ! Alors, j’ai<br />

répondu, j’y vais. Je voulais faire un peu <strong>de</strong> mannequinat,<br />

ça tombait bien. Ce soir-là, il y avait Colette Deréal<br />

et Nancy Holloway qui chantait du blues. »<br />

La cérémonie s’est déroulée au théâtre <strong>de</strong> l’Apollo en<br />

compagnie d’Eugène Bourrasseau, l’animateur et célèbre<br />

figure <strong>de</strong> la revue La Cloche.<br />

Reines en danger !<br />

chance, les reines venaient <strong>de</strong> le quitter et s’étaient réfugiées dans<br />

En défilant, les reines prennent <strong>de</strong>s risques. En 1947, il fait un<br />

une voiture. On a échappé au drame !<br />

temps exécrable. « Mlle Bouyssonnie a attrapé une congestion pul- Les années cinquante et soixante verront leur lot <strong>de</strong> chanteurs<br />

monaire qui l’a handicapée très longtemps », se souvient une fes- accompagner les soirées d’élection. D’Alain Barrière à Johnny<br />

tivalière. Un temps si pourri que les brassards <strong>de</strong>s hommes du Hallyday, en 1962, dans la salle du Champ-<strong>de</strong>-Mars, puis à l’Apollo<br />

comité <strong>de</strong>s fêtes déteignent sur leurs vestes. Arrivé au Pont- qui fut l’une <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s salles <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> pour le music-hall. Les<br />

Morand, le char <strong>de</strong>s reines « offert par le café Hou<strong>de</strong>t », pris dans photographes <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> (studio Maurice Bourgeois, Gaston, studio<br />

les intempéries, se brise en <strong>de</strong>ux et s’effondre littéralement. Par Gil et Party) immortalisent tour à tour ces ambassadrices <strong>de</strong> charme.<br />

39


40 <strong>Bons</strong><br />

La belle et la bête<br />

En 1926, entre les <strong>de</strong>ux guerres mondiales, les festivités <strong>de</strong> la mi-carême ont repris. Les carnavaliers réalisent toujours d’étonnantes<br />

prouesses à l’image <strong>de</strong> cette « belle et la bête », une sorte <strong>de</strong> dragon sur lequel sont juchées les « belles » reines.<br />

Un dragon ambigu qui pourrait défiler aujourd’hui lors <strong>de</strong>s fêtes du Nouvel an chinois mais qui, dans les années folles, n’était pas encore<br />

d’actualité à <strong>Nantes</strong>.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

1931, Pierrot est triste<br />

Le souvenir <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière guerre s’éloigne mais la gran<strong>de</strong> dépression économique vient<br />

<strong>de</strong> frapper l’Europe et le Pierrot est triste.<br />

Qu’importe, tout le mon<strong>de</strong> a envie <strong>de</strong> vivre et <strong>de</strong> faire la fête, <strong>de</strong> s’étourdir sans trop<br />

s’inquiéter <strong>de</strong>s nouvelles menaces qui montent <strong>de</strong> l’Est…<br />

La mi-carême à l’aube<br />

<strong>de</strong> la Première Guerre mondiale<br />

1913… Ma<strong>de</strong>moiselle Germaine Basset,<br />

élue reine <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, resplendit sur son<br />

char avec un sceptre à la main, une couronne<br />

et un aigle au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la tête.<br />

Elle ne peut pas <strong>de</strong>viner que, moins d’une<br />

année plus tard, l’aigle impérial frappera à<br />

la porte <strong>de</strong> la ville, du pays et <strong>de</strong> l’Europe.<br />

Dix-huit millions <strong>de</strong> personnes seront<br />

tuées pendant quatre années terribles.<br />

41


42 <strong>Bons</strong><br />

Les grosses têtes<br />

Pas <strong>de</strong> mi-carême nantaise sans grosses<br />

têtes. Elles font partie du patrimoine <strong>de</strong><br />

tous les carnavals. On les retrouve dans <strong>de</strong><br />

nombreux endroits du mon<strong>de</strong>, à Nice bien<br />

sûr, et surtout dans le Nord <strong>de</strong> la France et<br />

en Belgique où, parfois énormes, ces<br />

géants sont manipulés par <strong>de</strong> nombreux<br />

porteurs.<br />

À <strong>Nantes</strong>, elles ont toujours repris les personnages<br />

<strong>de</strong> l’actualité, <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssinées<br />

et <strong>de</strong>s figures grotesques pour amuser<br />

les petits et les grands.<br />

Les chars tirés par <strong>de</strong>s chevaux<br />

Longtemps, les Nantais ont connu un<br />

carnaval dont les chars étaient tirés par<br />

<strong>de</strong>s chevaux. En 1890, la population a pu<br />

admirer une voiture dont les rayons <strong>de</strong><br />

roues ainsi que les harnais <strong>de</strong>s chevaux<br />

étaient décorés <strong>de</strong> camélias. C’est la première<br />

voiture fleurie mentionnée par la<br />

presse. Le 5 mars 1891, l’association <strong>de</strong>s<br />

étudiants nantais, qui vient <strong>de</strong> se fon<strong>de</strong>r,<br />

organise la cavalca<strong>de</strong> <strong>de</strong> la mi-carême.<br />

C’est une réussite complète. Deux chars<br />

font sensation, dont le char <strong>de</strong> La Cigale<br />

sur lequel est juché un orchestre.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

« Le Vase <strong>de</strong> Sèvres »<br />

Ce char, décoré d’assiettes, est un clin d’œil publicitaire au magasin<br />

« Le Vase <strong>de</strong> Sèvres », vénérable commerce nantais, place <strong>de</strong><br />

l’Écluse, en plein centre-ville <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, à l’emplacement <strong>de</strong> l’actuelle<br />

Maison <strong>de</strong> la presse. De 1902 à 1980, on est venu <strong>de</strong> loin pour<br />

s’y fournir en vaisselle, objets d’arts, bronzes. Ses vitrines étaient<br />

animées pour les fêtes, à l’image <strong>de</strong>s Grands Magasins Decré.<br />

René Maussion, qui tenait cette boutique avec son frère Roger (roi<br />

carnaval en 1981), réalisait <strong>de</strong> superbes vitrines, toujours très prisées<br />

<strong>de</strong>s Nantais. Le château <strong>de</strong>s Ducs <strong>de</strong> Bretagne fit partie <strong>de</strong> ses<br />

créations, pas moins <strong>de</strong> quatorze petits moteurs électriques s’activaient,<br />

faisaient tourner <strong>de</strong>s scieurs <strong>de</strong> pierres, <strong>de</strong>s maçons ou <strong>de</strong>s<br />

attaquants du château.<br />

Avant 1902, la boutique s’appelait « Au Prince Eugène », un spécialiste<br />

<strong>de</strong>s tissus. C’est Léon, artiste sculpteur et futur roi carnaval lui<br />

aussi, le père <strong>de</strong> Roger et René, qui sera le second propriétaire <strong>de</strong>s<br />

lieux en 1912. Léon fabriquera lui-même <strong>de</strong>s chars à l’enseigne <strong>de</strong><br />

son magasin. L’un d’eux, un superbe montage avec <strong>de</strong>s cartes à<br />

jouer, remportera le premier prix <strong>de</strong>s voitures transformées, le prix<br />

d’honneur du syndicat et le prix <strong>de</strong> l’originalité. C’était en 1922.<br />

Roquio, une figure locale<br />

Les roquios désignent ces petits bateaux<br />

atypiques, avec leur cheminée, qui emmenaient<br />

les Nantais s’encanailler à<br />

Trentemoult. D’où ce clin d’œil <strong>de</strong>s carnavaliers<br />

à ces bons vieux passeurs qui ont disparu<br />

à l’aube <strong>de</strong>s années soixante.<br />

Le nom <strong>de</strong> « Roquio » était en fait le<br />

surnom <strong>de</strong> Jean Moreau, un habitant <strong>de</strong><br />

Trentemoult, justement, véritable figure<br />

locale dans les années 1830-1840.<br />

Gardien <strong>de</strong> vaches et ramasseur <strong>de</strong> crottin,<br />

« Roquio » travaillait avec Mo<strong>de</strong>ste, une<br />

femme <strong>de</strong> son âge avec qui il se mariera.<br />

Cela donna lieu à une gran<strong>de</strong> fête.<br />

En 1887, un bateau, le numéro 8, fut<br />

baptisé « roquio » avant que le terme<br />

n’englobe le reste <strong>de</strong> la flotte.<br />

Avril 1921, un éléphant déjà traverse la ville !<br />

Il y a eu l’éléphant en bois, offert à la Duchesse Anne<br />

dans les années 1490, la belle brochette <strong>de</strong> pachy<strong>de</strong>rmes<br />

du cirque Barnum et Bailey en 1902 et, plus<br />

récent, celui <strong>de</strong> Royal <strong>de</strong> Luxe en 2004 puis <strong>de</strong><br />

François Delarozière en 2007.<br />

Celui-ci a été réalisé par l’artiste peintre Pierre<br />

Baudrier en 1921, il est baptisé « Hadja ».<br />

La photographie est prise place Saint-Pierre, à <strong>de</strong>ux<br />

pas <strong>de</strong> la colonne <strong>de</strong> Louis XVI. On découvre ce bel<br />

éléphant, sur lequel sont installés <strong>de</strong>s passagers,<br />

assurément les carnavaliers qui l’ont construit.<br />

Tiré par huit chevaux, c’est le clou <strong>de</strong> cette micarême.<br />

Il suscite l’enthousiasme <strong>de</strong>s foules.<br />

« C’est un char magnifique à la fois comme idée et<br />

comme réalisation. Sur tout le parcours, il a soulevé<br />

les applaudissements ».<br />

43


44 <strong>Bons</strong><br />

Le Nain jaune<br />

du costumier Peignon<br />

Ce déguisement pour le carnaval était<br />

signé <strong>de</strong> la maison Peignon. Gendre du<br />

costumier Peignon, Gabriel Jameaux<br />

avait créé ce Nain jaune pour le carnaval<br />

1907. Cette illustre enseigne,<br />

située rue d’Erlon, a habillé <strong>de</strong>s<br />

milliers <strong>de</strong> Nantais.<br />

Le comique Joseph Peignon,<br />

bien que portant le même<br />

nom et étant l’une <strong>de</strong>s<br />

figures <strong>de</strong> la mi-carême<br />

durant <strong>de</strong>s décennies, ne<br />

faisait pas partie <strong>de</strong> la<br />

famille.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Loup y es-tu…<br />

Attention, le petit<br />

oiseau va sortir.<br />

Clic clac Kodak !<br />

et bonne micarême<br />

1927.<br />

Mais qui se cachait<br />

<strong>de</strong>rrière tous<br />

ces masques<br />

impénétrables ?<br />

Louis-XVI, le char et les chevaux<br />

Les tracteurs n’existaient pas, on était aux<br />

prémisses <strong>de</strong>s voitures du marquis <strong>de</strong> Dion,<br />

mais <strong>de</strong> là à s’en servir pour tirer les chars, le<br />

pas ne fut pas encore franchi. Les chevaux,<br />

donc, la plus noble conquête <strong>de</strong> l’homme,<br />

et parfois les bœufs, participaient à tous les<br />

défilés et tiraient les chars du carnaval.<br />

L’o<strong>de</strong>ur du crottin faisait alors partie du<br />

folklore. Les attelages étaient fournis par<br />

l’entreprise Grandjouan, les Brasseries <strong>de</strong><br />

la Meuse, les maisons Delrue ou Renaud.<br />

Le premier tracteur automobile fera son<br />

apparition à <strong>Nantes</strong> en 1914.<br />

Le char <strong>de</strong> la reine <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong><br />

On <strong>de</strong>vine <strong>de</strong>rrière la foule, le restaurant « La Gerbe <strong>de</strong> Blé », alors amarré sur l’île<br />

Fey<strong>de</strong>au. Ce char <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong> a été l’une <strong>de</strong>s attractions <strong>de</strong> la mi-carême 1921.<br />

45


46 <strong>Bons</strong><br />

La famille Bigorno<br />

Si la photo n’est pas un chef-d’œuvre technique, elle a<br />

le mérite <strong>de</strong> l’instantanéité. Sous une pluie <strong>de</strong> serpentins<br />

et <strong>de</strong> confettis défile, en vieille voiture tirée par un<br />

mini-poney, « La Famille Bigorno en vacances ». On<br />

n’en saura pas plus sur ceux qui étaient peut-être les<br />

Bidochon <strong>de</strong> l’époque… Elle témoigne aussi sans doute<br />

d’une belle invention : les congés payés !<br />

La mi-carême a toujours reflété l’actualité par le petit<br />

bout <strong>de</strong> la lorgnette, prouvant le goût <strong>de</strong>s Nantais pour<br />

l’humour et la dérision.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

La coutume du bœuf gras<br />

« Je vous écris autour d’une bonne entrecôte <strong>de</strong> bœuf grillée… »<br />

Le défilé <strong>de</strong> la mi-carême a longtemps accueilli le char<br />

du bœuf gras. « Monté sur un char-plateau », écrit le<br />

Nantais Jean Bruneau, « les cornes et les sabots étaient<br />

ornés <strong>de</strong> fleurs artificielles. Il était montré à la foule<br />

comme l’héritier <strong>de</strong>s sacrifices traditionnels aux dieux<br />

païens ».<br />

L’animal portait le nom <strong>de</strong> « Loraton », « Kilégra »,<br />

« Férémuso », « Cornovan » mais aussi « Bonbouillon 1er »,<br />

« Gros Sel 1er », jeu <strong>de</strong> mots choisis par les carnavaliers.<br />

Ces bêtes <strong>de</strong> forte taille étaient gardées par <strong>de</strong>s<br />

personnes habillées en boucher durant le parcours.<br />

Elles symbolisaient la puissance <strong>de</strong> la corporation <strong>de</strong>s<br />

bouchers. Le bœuf gras <strong>de</strong>vait être tué, dépecé et<br />

vendu dans les jours suivant le carnaval.<br />

Correspondance <strong>de</strong> garçon boucher<br />

Au dos <strong>de</strong> la carte postale, quelques mots envoyés<br />

par un certain Pierre à Émile Legoff, garçon boucher<br />

rue Saint-Vincent à Vannes, dans le Morbihan :<br />

« <strong>Nantes</strong> 25 octobre,<br />

Je te rends réponse aussitôt pour le bœuf gras que tu m’avais<br />

<strong>de</strong>mandé et toi j’attends toujours ta réponse en attendant.<br />

Ton ami qui te serre cordialement la main.<br />

Pierre »<br />

Le premier prix en 1914<br />

Allons, vite, c’est « l’heure du bain », indique la pancarte<br />

<strong>de</strong> ce char burlesque qui remporta le premier prix du carnaval<br />

1914. Un souvenir, on s’en doute, qui fut balayé par<br />

le déferlement <strong>de</strong> violence quelques mois plus tard…<br />

Mais l’insouciance était encore <strong>de</strong> mise quelques mois<br />

pour ce <strong>de</strong>rnier carnaval avant longtemps.<br />

47


48 <strong>Bons</strong><br />

Dites-le<br />

avec <strong>de</strong>s fleurs<br />

Les chars fleuris -<br />

en fleurs naturelles<br />

- ont toujours été<br />

très appréciés <strong>de</strong>s<br />

Nantais. Les petits<br />

pages emperruqués<br />

ajoutaient au<br />

charme <strong>de</strong> cette<br />

jolie composition.<br />

Les Chinois<br />

s’invitent<br />

à la mi-carême !<br />

Et là ? Si, si, on vous<br />

assure que ce sont <strong>de</strong>s<br />

Chinois, ils ont <strong>de</strong>s<br />

chapeaux pointus !<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Une fabrique <strong>de</strong> confettis américains !<br />

Ils ont <strong>de</strong> l’imagination ces Nantais ! En 1912,<br />

l’Amérique, avant la Première Guerre, est déjà à l’honneur.<br />

Des carnavaliers ont fait <strong>de</strong> leur char une<br />

« American Confetty Fabric ». Ils remporteront le 3e prix <strong>de</strong><br />

la mi-carême 1912. La série <strong>de</strong> ces cartes postales <strong>de</strong> fête<br />

a été réalisée par la célèbre maison Artaud-<br />

Nozais.<br />

Quand les grosses légumes<br />

défilent en effigie<br />

Après les fleurs, voici <strong>de</strong>s légumes au<br />

naturel nommés « Demieux-<br />

Enmieux », un jeu <strong>de</strong> mots qui ne<br />

dissimule pas la célèbre marque<br />

nantaise Amieux, reine <strong>de</strong> la<br />

conserve.<br />

Ici on se moque - gentiment - <strong>de</strong>s<br />

puissants maîtres du commerce et<br />

<strong>de</strong> l’industrie nantaise. Le carnaval,<br />

à l’image <strong>de</strong>s revues <strong>de</strong> La Cloche,<br />

du Réveil Nantais ou <strong>de</strong> Bonne Gar<strong>de</strong>,<br />

a toujours reflété avec humour<br />

l’actualité locale.<br />

49


50 <strong>Bons</strong><br />

Une ban<strong>de</strong> d’amis<br />

<strong>de</strong> Doulon<br />

Que sont-ils et elles <strong>de</strong>venus ?<br />

Le temps est assassin et<br />

emporte avec lui le rire <strong>de</strong>s<br />

enfants. Au verso <strong>de</strong> cette<br />

carte photo, on apprend qu’il<br />

s’agit d’un groupe du quartier<br />

<strong>de</strong> Doulon. Au milieu se<br />

trouve Anna, à gauche Sunny,<br />

« à droite, moi. Les garçons je ne<br />

les connaissais pas ».<br />

Nous, non plus.<br />

1914. Mardi gras à <strong>Nantes</strong><br />

La Gran<strong>de</strong> Guerre approche<br />

à grands pas. En attendant,<br />

la coutume veut que chaque<br />

carnavalier et groupes se<br />

fassent prendre en photo<br />

avec, in fine, un concours<br />

du plus beau déguisement<br />

<strong>de</strong> l’année. Les photos<br />

étaient très soignées.<br />

Les photographes y<br />

jouaient leur réputation.<br />

Après la Première Guerre<br />

mondiale, les festivités <strong>de</strong> la<br />

mi-carême ne reprendront<br />

qu’en 1920. Les jets <strong>de</strong> confettis<br />

et <strong>de</strong> serpentins seront<br />

d’abord interdits par respect<br />

pour les familles en<strong>de</strong>uillées.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>


54 <strong>Bons</strong><br />

Un petit tour <strong>de</strong> manège !<br />

« Un coin du manège <strong>de</strong>s<br />

cochons », dit la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette<br />

attraction qui fit étape à <strong>Nantes</strong><br />

à l’occasion <strong>de</strong> la fête foraine<br />

<strong>de</strong> septembre.<br />

Gran<strong>de</strong> loterie <strong>de</strong> nougat<br />

cours Saint-Pierre<br />

Une confiserie en 1890 sur le cours<br />

Saint-Pierre avec sa loterie à cinq<br />

centimes. « Rouge et bleu sur les<br />

couleurs, on gagne un bâton <strong>de</strong><br />

nougat »; sur le « Japon et la<br />

Russie, trois bâtons <strong>de</strong> nougat ».<br />

On gagne aussi du chocolat Salavin.<br />

Une marque rendue célèbre par<br />

ses buvards publicitaires.<br />

<strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong><br />

Un masque signé Peignon<br />

Au premier plan, le musicien arbore un masque signé du costumier<br />

nantais Peignon. Au second, <strong>de</strong>s lutteurs - dont une<br />

femme - font saillir leurs muscles avant la représentation. Les<br />

petits garçons, épatés, rêvent <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir un jour aussi forts.<br />

Ces attractions occupaient une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> la fête foraine<br />

au début et durant le vingtième siècle sur le cours Saint-Pierre.<br />

Culotte à surprise<br />

Les baraques ont replié leurs tentes, la fête reviendra l’an prochain.<br />

Comme le bon petit diable <strong>de</strong> la comtesse <strong>de</strong> Ségur qui rembourrait sa<br />

culotte, dans celle du poulbot on découvre que <strong>Nantes</strong> est une ville<br />

pleine <strong>de</strong> merveilles. Au verso un petit mot plein <strong>de</strong> bons <strong>baisers</strong>.


Je vous écris <strong>de</strong>…<br />

<strong>Nantes</strong><br />

où l’on ne s’ennuie<br />

jamais<br />

Cher Julien,<br />

Je vous écris <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong>, d’une ville qui a connu bien<br />

<strong>de</strong>s malheurs et autant <strong>de</strong> bonheurs. Un pays où<br />

l’on sait faire la fête ; vous l’avez vu avec les carnavals<br />

endiablés où chacun peut admirer ou<br />

créer <strong>de</strong> véritables œuvres d’art.<br />

Une ville vivante, où l’on ne s’ennuie jamais,<br />

animée par <strong>de</strong>s hommes créatifs pleins d’esprit.<br />

Tout au long <strong>de</strong> son histoire, ils ont su amuser<br />

les habitants, les cultiver et leur redonner<br />

le moral dans les pério<strong>de</strong>s difficiles.<br />

Vous lirez combien ici il fait bon vivre et<br />

combien les Nantais sont <strong>de</strong>s gens passionnants.<br />

Avec mes bons <strong>baisers</strong>…<br />

Valentine


La suite ?<br />

Retrouvez-la dans:<br />

« <strong>Bons</strong> <strong>baisers</strong> <strong>de</strong> <strong>Nantes</strong> »<br />

<strong>de</strong> Stéphane Pajot.<br />

Un livre exceptionnel !

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