approche pluridisciplinaire d'un système de production ... - IRD

la crue alors que dans le lac ils sont strictement zooplanctophages
(Lauzanne, 1976) comme dans le lac
Albert (Verbeke, 1959) et le lac Turkana (Hopson,
1975). Dans le Niger, cette espèce se nourrit de
graines, d’insectes et à un degré moindre, de végétaux
pendant la crue (Daget, 1952).
Le régime alimentaire des poissons est donc susceptible
de présenter une certaine adaptabilité mais les
meilleurs exemples de cette capacité d’ajustement des
paramètres biologiques aux conditions environnementales
est certainement donné par les caractéristiques
de reproduction.
Chaque espèce est susceptible de modifier une ou
plusieurs de ses caractéristiques de reproduction en
fonction du milieu dans lequel elle vit. Certains
Mormyridae présentent les années de faible crue une
seule ponte localisée en zone inondée et les années
de fortes crues deux ou trois pontes successives
(Bénech et Quensière, 1987). Des expériences effectuées
en laboratoire dans des conditions environnementales
proches de l’optimum montrent que ces
mêmes espèces peuvent se reproduire de façon ininterrompue
(Kirschbaum, 1975 ; 1984). La fécondité
peut également varier selon l’âge mais également
selon les facteurs biotiques (alimentation, densité de
population, compétition, . ..> et/ou les facteurs abiotiques
(espace vital, température, oxygène) que subissent
les individus (Ka,rtas et Quignard, 1984).
La stratégie adaptative doit donc être comprise
comme le bagage génétique acquis au cours de l’évolution
permettant des adaptations immédiates (ou
encore proximales) aux variations du milieu, L’expression
de cette stratégie, dans des conditions environnementales
données est appelée tactique adaptative
(Potts et Wotton, 1984)
L’amplitude de ces variations dépend des compromis
acceptables par l’organisme. Elle est donc variable
d’une espèce à l’autre. Certaines espèces de milieux
très stables peuvent n’avoir qu’une très faible marge
d’adaptabilité ce qui va habituellement de pair avec
une très forte spécialisation. En effet, dans ces conditions
la survie de l’espèce n’est plus menacée par
l’imprévisibilité de l’environnement mais par la compétition
qu’exercent sur elle les autres espèces ; il ne
s’agit plus de pouvoir faire face à toutes les situations
mais d’être le meilleur dans le domaine qui est le
sien.
l LE POLYMORPHISME
Généralement, une même adaptation proximale est
partagée par l’ensemble des individus d’une même
population vivant dans le même environnement. De
nombreux exemples peuvent être trouvés dans la lit-
térature. Par exemple : une population soumise à une
mortalité accrue (mortalité d’origine naturelle ou pro-
voquée par la pêche) voit son espérance de vie diminuer
et réagit habituellement par un abaissement de
l’âge de première reproduction. La taille de première
maturation des Alestes baremoze femelles du Tchad a
ainsi diiué de 25 % avec l’arrivée de la sécheresse
en 1972 (Durand, 1978). En consacrant moins de ressources
à la croissance et davantage à la production
de gamètes l’espèce assure sa survie,
Il existe également des cas, de plus en plus fréquemment
décrits, où, dans un contexte donné, la même
tactique n’est pas adoptée par l’ensemble des individus
de la population. Par exemple, il a été observé dans
l’Archipe1 Sud-Est du Tchad, au sein dune même espèce
d’Alestes bawmoze trois comportements distincts
(Durand, 1978) :
l maturation et migration de reproduction ;
l maturation et reproduction sans migration ;
l pas de maturation ni de migration.
Si l’on met de côté le dernier cas assez fréquent chez
les migrateurs (Welcomme, 19793, on constate qu’au
sein d’un même stock coexistent deux comportements,
l’un classique, basé sur la migration et la
reproduction en milieu fluvial, et l’autre, atypique,
conduisant à une reproduction lacustre,
D’autres exemples pourraient être cités qui concernent
non pas le comportement migrateur mais la taille
- ou l’âge - de première maturation. De tels cas de
polymorphismes semblent assez fréquents parmi les
migrateurs. 11 peuvent être interprétés comme une
diversification des modes d’exploitation des ressources
utilisables pour la reproduction, Stratégie
nécessairement gagnante puisqu’en cas de succès la
forme alternative permet l’accroissement de la population
par diversificdtion des ressources utilisées, alors
qu’en cas d’échec la survie de l’espèce, toujours assurée
par la forme initiale, n’est pas menacée. “Le
polymo@isme, ou toute autre sorte de diversité des
formes hympatriques, acc&t l’efficncité de l’exploitation
des ressowces de l’environnement pas la mati&e
vivante” (Mayr, 1974).
Des indices de stratégies alternatives ont dores et
déjà été repérés dans les populations actuelles du
Delta Central. Tout particulièrement pour les formes
démographiques. Ainsi deux groupes de reproducteurs
de tailles très différentes ont été observés pour
Auchenoglanis occidentalis, H~~drocyws brevis, etc.
(c& chap. 3.1). L’identification de tels phénomènes est
dune importance déterminante pour la compréhension
de l’adaptation des espèces et la dynamique des
stocks exploités par les pêcheurs.
I
Environnement deltaïque - 1.1