Examen des contacts des services de renseignement suisses avec l ...

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africains et séjourné en Afrique du Sud en compagnie de son épouse du 26 au 31 mars 1988. Durant la même période, le secrétaire général du DMF – et membre de l’état-major de direction du DMF – «était en vacances et voyageait à titre privé» («private Ferienreise») en Afrique du Sud. Le caractère privé de son séjour ne l’a de toute évidence pas empêché de se rendre sur le front en Angola. Il a déclaré à la DCG que cette visite était «extrêmement intéressante et lui avait pour la première fois permis de sentir l’odeur de la poudre.» [Traduction] Le soir de son arrivée, lui et son épouse ont été invités pour le repas du soir par l’ancien attaché de défense sudafricain avec qui il avait entretenu de bonnes relations. À sa grande surprise, il y a également rencontré Peter Regli et son épouse. Il n’a pas été question des raisons de la présence de ce dernier en Afrique du Sud, mais le secrétaire général du DMF a supposé qu’il s’y trouvait en qualité de chef de la SRADCA. 6.3.3.5 Intervention de la Direction du DMF La visite d’une délégation de généraux sud-africains de haut rang devait manifestement avoir lieu en automne 1993. Il n’a pas été possible de retrouver les buts précis de ce projet de visite. En revanche, le chef de l’Etat-major général de l’époque avait répondu de la manière suivante à la demande correspondante présentée le 13 octobre 1993 par le chef d’état-major de l’instruction opérative: 2146 «Décision de la Direction du 25.10.93 concernant la délégation sud-africaine: – plus cette année – grande retenue, reporter – pas de relations publiques – règle: pas de contact tant qu’il y a embargo sur les armes» [Traduction] Il était donc notoire que le chef de l’Etat-major général et la Direction du DMF partaient du principe qu’il ne pouvait pas y avoir de contacts avec l’Afrique du Sud à l’échelon militaire tant que l’embargo sur l’exportation d’armes serait en vigueur. 6.3.3.6 Consultation du DFAE sciemment évitée Des documents du DDPS conservés par hasard et les dossiers du DFAE ont permis de constater que si le GRS ne se rendait pas compte des problèmes que les contacts avec l’Afrique du Sud suscitaient du point de vue de la politique extérieure, le Protocole militaire en était pour le moins tout à fait conscient. Ainsi, sur une demande concernant une visite du chef du commandement militaire médical du Transvaal du Sud les 26 et 27 juin 1980, le Protocole militaire avait noté: «Le DFAE (ambassadeur Brunner) n’a aucune objection au sujet de cette visite.» [Traduction] Par la suite, le chef de l’Etat-major général a consenti à cette visite avec une réserve: «ne pas accepter d’invitation de réciprocité!» [Traduction] Le 3 avril 1982, juste après la première visite officielle du SCEM RS en Afrique du Sud (du 10 au 18 mars 1982), l’attaché de défense sud-africain s’adressait au Protocole militaire au sujet de la visite prévue de la Fabrique fédérale d’avions à Emmen par une délégation sud-africaine. Le 26 avril, le Protocole militaire communiquait au chef de l’Etat-major général (par la voie de service, c’est-à-dire en passant par le SCEM RS) qu’une telle visite ne pouvait avoir lieu que «sous le couvert des services

de renseignement […] Dans le cas contraire, il serait nécessaire de consulter le DFAE et il est peu probable que celui-ci donne son accord.» [Traduction] Il est intéressant de constater que la demande correspondante de l’attaché de défense sud-africain du 3 avril 1982 comporte une note dactylographiée ajoutée par le Protocole militaire à l’attention de la Section maintien du secret et demandant si la conclusion d’une convention de protection réciproque des informations confidentielles échangées avec l’Afrique du Sud ne s’imposerait pas. Une note manuscrite ajoutée à la suite, précisait que «selon téléphone du 15.04.82 avec M. Stoll» [traduction] une telle convention était en cours de rédaction. Voir le ch. 6.6.2 pour plus de détails au sujet de cette convention de protection des informations. L’absence de documents ne permet plus de savoir si cette visite a bien eu lieu ni quand elle a eu lieu. Il y a cependant plutôt lieu de croire qu’elle a finalement eu lieu. En tout cas, certains documents attestent que le chef de l’armement était intervenu avant une autre visite en octobre 1982. Il critiquait le fait que le Groupement de l’armement avait déjà reçu une délégation sud-africaine à deux reprises à la Fabrique fédérale d’avions d’Emmen et que le Groupement de l’armement n’avait tiré aucun profit des contacts avec les Sud-Africains. Il avait également indiqué que, politiquement, de tels contacts étaient sujets à réserve et qu’il fallait le feu vert du chef de l’Etat-major général. Les documents existants prouvent qu’une délégation des forces aériennes sud-africaines a été reçue sur l’aérodrome militaire de Dübendorf le 16 octobre 1982. L’attitude pour le moins méfiante du GRS envers le DFAE ressort nettement du fait qu’ils ne l’ont pas consulté avant des décisions aussi importantes que l’instauration de contacts réguliers avec l’Afrique du Sud, l’organisation d’échanges de pilotes ou la conclusion de la convention de protection des informations. En revanche, la demande plutôt insignifiante de l’attaché de défense d’Afrique du Sud du 23 septembre 1991 portant sur la participation en uniforme de militaires sud-africains à la Marche des deux jours de Berne a été soumise pour avis au DFAE. Cette demande a été approuvée le 5 novembre 1991 par le Protocole militaire. Certaines explications figurant dans les procès-verbaux de rencontres et entretiens témoignent de la résistance délibérée envers la conduite politique du renseignement militaire par le DMF et en particulier envers le DFAE. Ainsi, dans un procès-verbal portant sur une rencontre à l’échelon des chefs des services de renseignement qui a eu lieu au printemps 1994 en Afrique du Sud, Peter Regli a écrit que, en automne 1993, le DFAE et le DMF avaient «tué» («gekillt») le projet de visite en Suisse de représentants de haut rang de représentants des forces armées sud-africaines pour des motifs politiques (voir ch. 6.3.3.5). Il avait recommandé à ces interlocuteurs sudafricains de «venir après les élections, accompagnés de représentants de l’ANC, car ils seraient certainement les bienvenus dans ces conditions-là!» [Traduction] La résistance contre la direction du département, contre le chef de l’Etat-major général et contre le DFAE découlait manifestement d’une orientation diamétralement opposée de la conception politique du monde. Alors que, dix ans après la chute du mur de Berlin, le Gr rens en était resté à la logique de la guerre froide, le DFAE suivait l’évolution du monde avec intérêt et en faisant preuve d’une ouverture d’esprit. En définitive, le Gr rens n’a jamais été en mesure d’accepter une appréciation différenciée telle que celle du DFAE. Au contraire, il s’en tenait mordicus à sa vision des choses et n’était pas prêt à tenir compte d’autres opinions dans le cadre de 2147

<strong>de</strong> <strong>renseignement</strong> […] Dans le cas contraire, il serait nécessaire <strong>de</strong> consulter le<br />

DFAE et il est peu probable que celui-ci donne son accord.» [Traduction]<br />

Il est intéressant <strong>de</strong> constater que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> correspondante <strong>de</strong> l’attaché <strong>de</strong> défense<br />

sud-africain du 3 avril 1982 comporte une note dactylographiée ajoutée par le Protocole<br />

militaire à l’attention <strong>de</strong> la Section maintien du secret et <strong>de</strong>mandant si la<br />

conclusion d’une convention <strong>de</strong> protection réciproque <strong><strong>de</strong>s</strong> informations confi<strong>de</strong>ntielles<br />

échangées <strong>avec</strong> l’Afrique du Sud ne s’imposerait pas. Une note manuscrite<br />

ajoutée à la suite, précisait que «selon téléphone du 15.04.82 <strong>avec</strong> M. Stoll» [traduction]<br />

une telle convention était en cours <strong>de</strong> rédaction. Voir le ch. 6.6.2 pour plus <strong>de</strong><br />

détails au sujet <strong>de</strong> cette convention <strong>de</strong> protection <strong><strong>de</strong>s</strong> informations.<br />

L’absence <strong>de</strong> documents ne permet plus <strong>de</strong> savoir si cette visite a bien eu lieu ni<br />

quand elle a eu lieu. Il y a cependant plutôt lieu <strong>de</strong> croire qu’elle a finalement eu<br />

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avant une autre visite en octobre 1982. Il critiquait le fait que le Groupement<br />

<strong>de</strong> l’armement avait déjà reçu une délégation sud-africaine à <strong>de</strong>ux reprises à la<br />

Fabrique fédérale d’avions d’Emmen et que le Groupement <strong>de</strong> l’armement n’avait<br />

tiré aucun profit <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>contacts</strong> <strong>avec</strong> les Sud-Africains. Il avait également indiqué que,<br />

politiquement, <strong>de</strong> tels <strong>contacts</strong> étaient sujets à réserve et qu’il fallait le feu vert du<br />

chef <strong>de</strong> l’Etat-major général. Les documents existants prouvent qu’une délégation<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> forces aériennes sud-africaines a été reçue sur l’aérodrome militaire <strong>de</strong> Dübendorf<br />

le 16 octobre 1982.<br />

L’attitu<strong>de</strong> pour le moins méfiante du GRS envers le DFAE ressort nettement du fait<br />

qu’ils ne l’ont pas consulté avant <strong><strong>de</strong>s</strong> décisions aussi importantes que l’instauration<br />

<strong>de</strong> <strong>contacts</strong> réguliers <strong>avec</strong> l’Afrique du Sud, l’organisation d’échanges <strong>de</strong> pilotes ou<br />

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1991 portant sur la participation en uniforme <strong>de</strong> militaires sud-africains à la<br />

Marche <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux jours <strong>de</strong> Berne a été soumise pour avis au DFAE. Cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> a<br />

été approuvée le 5 novembre 1991 par le Protocole militaire.<br />

Certaines explications figurant dans les procès-verbaux <strong>de</strong> rencontres et entretiens<br />

témoignent <strong>de</strong> la résistance délibérée envers la conduite politique du <strong>renseignement</strong><br />

militaire par le DMF et en particulier envers le DFAE. Ainsi, dans un procès-verbal<br />

portant sur une rencontre à l’échelon <strong><strong>de</strong>s</strong> chefs <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>services</strong> <strong>de</strong> <strong>renseignement</strong> qui a<br />

eu lieu au printemps 1994 en Afrique du Sud, Peter Regli a écrit que, en automne<br />

1993, le DFAE et le DMF avaient «tué» («gekillt») le projet <strong>de</strong> visite en Suisse <strong>de</strong><br />

représentants <strong>de</strong> haut rang <strong>de</strong> représentants <strong><strong>de</strong>s</strong> forces armées sud-africaines pour<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> motifs politiques (voir ch. 6.3.3.5). Il avait recommandé à ces interlocuteurs sudafricains<br />

<strong>de</strong> «venir après les élections, accompagnés <strong>de</strong> représentants <strong>de</strong> l’ANC, car<br />

ils seraient certainement les bienvenus dans ces conditions-là!» [Traduction]<br />

La résistance contre la direction du département, contre le chef <strong>de</strong> l’Etat-major général<br />

et contre le DFAE découlait manifestement d’une orientation diamétralement<br />

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