Le Rôle des femmes dans la reconstruction et le ... - IOM Publications

LE RÔLE
DES FEMMES
DANS LA RECONSTRUCTION ET LE
DÉVELOPPEMENT EN RÉPUBLIQUE
DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Les opinions exprimées dans la présente publication sont celles des oratrices et
ne reflètent pas nécessairement les positions de l’Organisation internationale
pour les migrations.
_______________
L’OIM est attachée au principe selon lequel les migrations qui s’effectuent en
bon ordre et dans le respect de la dignité humaine sont bénéfiques aux migrants
et à la société. En tant qu’institution intergouvernementale, l’OIM agit avec ses
partenaires de la communauté internationale en vue de : contribuer à relever les
défis de la migration sur le plan pratique ; favoriser la compréhension des questions
de migration ; promouvoir le développement économique et social par le
biais de la migration ; et veiller au respect de la dignité humaine et au bien-être
des migrants.
Editeur : Organisation internationale pour les migrations
17 route des Morillons
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© 2003 Organisation internationale pour les migrations (OIM)
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écrit préalable de l'éditeur, être reproduite, stockée dans un système de
recherche d'informations ou transmise d'une quelconque façon, que ce soit par
des moyens électroniques, mécaniques, de photocopie, d'enregistrement ou
autres.

Le renforcement du rôle des femmes
dans la reconstruction nationale et
le développement économique en
République démocratique
du Congo
Rapport du séminaire organisé par
Le Ministère des Affaires Sociales et de la Famille
Le Ministère du Travail et de la Prévoyance sociale
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM)
Ce projet a été financé par le Gouvernement belge

Table des Matières
Préface
Madame Marie-Ange Lukiana MUFWANKOLO, Ministre
du Travail et de la Prévoyance Sociale 5
Préface
Madame Laurette ONKELINX, Vice-Premier Ministre
du Royaume de Belgique et Ministre de l’Emploi 6
Introduction
Madame Ndioro NDIAYE, Directeur général adjoint de l’OIM 8
Glossaire 10
Résumé des Actes
Chapitre I: Introduction et Séance d’Ouverture
Discours d’ouverture
Madame Ndioro NDIAYE, Directeur général adjoint de l’OIM 15
Discours d’ouverture
Madame Jeanne EBAMBA BOBOTO, Ministre des
Affaires Sociales 19
Chapitre II: Thèmes et Discussions
Thème 1 : Rôle des femmes dans la reconstruction nationale,
la résolution et la prévention des conflits
Bonne gouvernance et genre
Madame Marie-Thérèse MODUA, Ministère des
Affaires sociales et de la Famille 24
Prévention des conflits et développement économique
Madame Marie-Noëlle NYANGWILE, conseillère juridique
à la REGIDESO 30
Influence des femmes dans la prévention des conflits à travers
les activités créatrices d’emploi et génératrices de revenus
Madame Augustine MAVUELA, coordinatrice nationale
du projet PNUD/Femmes 40
Débats et interventions de la salle 46
Vers une participation accrue des femmes aux mécanismes
de règlement des conflits en Afrique
En RDC : Madame NZUZI WA MBOMBO, présidente du MPR 48
Perspectives de la diaspora : Madame Suzanne MONKASSA,
co-fondatrice du CCAE/B35 57
Quelle place, quel rôle pour la femme dans la transition ?
Madame Marie-Madeleine KALALA, présidente de l’AFEJUCO 67
Débats 73
3

Thème 2 : Le rôle de la femme dans la reconstruction nationale
et la prévention des conflits à travers les activités créatrices
d’emploi et génératrices de revenus
Problématique de la génération des revenus et de l’épargne
chez la femme congolaise
Madame Godée RASHIDI, expert-comptable à la BCC 76
L’accès au micro-crédit : modalités et systèmes adaptés
aux réalités du pays
Madame Antoinette MPUTELA, Projet PNUD-Congo 88
Expérience de la diaspora dans le mouvement associatif
des femmes de la diaspora et la problématique du développement
Madame Dora ILUNGA, conseillère au Ministre belge du
Travail en matière d’Emploi et de Formation 96
Débats 107
Le nouveau « Code du Travail », vers l’égalité des chances ?
Madame Henriette MINCHIABO, directeur des études
au Ministère du Travail et de la Prévoyance sociale 110
Femmes et médias : la place de l’information pour la promotion
du genre
Madame Madeleine LEMAITRE, éditrice de la revue Africa B 116
Débats 125
Chapitre III: Conclusions et Recommandations
Thème 3 : Travaux en groupes:
GROUPE I
Thème : Que devons-nous faire aujourd’hui pour que la femme
congolaise soit vraiment actrice dans la reconstruction nationale ? 131
GROUPE II
Thème : Que faire pour que les femmes démunies aient
plus d’accès aux micro-crédits ? 135
GROUPE III
Thème : Le rôle de la femme est indispensable à une bonne
gouvernance. Quelle stratégie utiliser pour obtenir au moins 30 %
de femmes dans tous les domaines et à tous les échelons ? 137
Discours de clôture
Madame Ndioro NDIAYE, Directeur général adjoint de l’OIM 140
Mot de clôture
Madame Marie-Ange Lukiana MUFWANKOLO,
Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale 143
Annexes
Annexe I : Programme 147
Annexe II : Liste des participants 151
Annexe III : Document de référence (OIM) 155
Annexe IV : Synthèse des interventions et des débats 161
4

Préface
Le séminaire sur le rôle des femmes dans la reconstruction nationale et le
développement économique a été une très grande opportunité pour les femmes
de la République démocratique du Congo. Leur participation active a fourni la
preuve de la pertinence de cette activité dont l’objectif spécifique a été surtout
celui d’accompagner et d’aider les femmes congolaises dans l’assainissement
des mentalités rétrogrades, de renforcer la culture de la Paix, et d’exploiter
judicieusement les capacités des femmes en leur donnant la possibilité de
développer des activités à haute intensité intégrative.
Ces femmes congolaises qui, avec les enfants et autres groupes vulnérables
constituent le maillon le plus affecté de la communauté nationale après des
déchirements innommables consécutifs à la guerre, ne pouvaient rester insensibles
à ce signal fort en provenance de la communauté internationale grâce à
l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), en coopération avec
le gouvernement belge.
Elles ont désormais la conviction que la solidarité internationale est enclenchée
et qu’elles doivent se mettre à disposition pour effacer les préjugés stéréotypés,
en opérant rationnellement et intégralement dans les activités hautement
porteuses. Le lancement de l’opération micro-crédit aux associations féminines
présente, à nos yeux, une valeur symbolique qu’il convient de préserver,
d’entretenir et de promouvoir.
Le rapport général de ce séminaire montre en effet la richesse et la profondeur
des réflexions faites par les femmes provenant d’horizons divers. Les conclusions
ou résolutions finales démontrent à suffisance l’intérêt qu’elles affichent
dans toutes les activités menant à l’échafaudage et à la mise en œuvre des
stratégies pour le renforcement des capacités des femmes, qu’il s’agisse de la
reconstruction nationale, des activités génératrices des revenus ou de l’apport
significatif et méthodique dans la résolution et la prévention des conflits.
L’occasion m’est ainsi offerte de remercier tous ceux qui, de près ou de loin,
ont contribué à la réalisation de cette activité. Je pense notamment au gouvernement
belge, à l’OIM à travers sa Directrice générale adjoint Madame Ndiaye
qui s’est complètement investie, à toute l’équipe du MIDA y compris la Coordination
nationale MIDA-RDC, à toutes les femmes congolaises et celles de la
diaspora venues apporter un appui technique considérable et dont la disponibilité
et la ferveur ont été à la mesure des attentes.
Madame Marie-Ange Lukiana MUFWANKOLO
Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale
5

Préface
Des morts. Des mortes. Par milliers. Par dizaines, par centaines de milliers.
L’horreur qui appelle l’horreur. La violence qui s’embrase. Et la misère, individuelle
et collective.
Puis le souvenir des disparus. La peur omniprésente. Le cauchemar qui se
répète de nuit en nuit. Le silence de l’angoisse. Et la vie.
La vie qui continue, qui doit continuer. Le lendemain qui s’annonce et qui
doit peu à peu restaurer sinon l’espoir du moins la conviction que le soleil se
lèvera les jours d’après. Avec à jamais la mémoire gravée de pleurs, revient
cependant l’envie de repartir, de reconstruire. Parce que la vie continue et
va continuer.
Dans ce travail de reconstruction, les femmes ont le rôle central. Parce qu’elles
portent la vie qui renaît même si c’est pour cela qu’elles furent les premières
victimes. Parce qu’elles élèvent et éduquent. Parce que, quand les hommes
étaient partis, c’est elles qui assumaient, seules souvent, la survie de la famille
et parce qu’elles continuent à la faire. Parce que, habituées à guérir, elles
savent sans doute mieux prévenir.
Pour toutes ces raisons et pour bien d’autres encores, les femmes doivent
saisir à bras le corps leur destin et celui de leurs collectivités, elles doivent
prendre conscience de leur importance pour relever la vie.
Elles sont les ambassadrices de la prévention des conflits. Qui mieux qu’elles
peuvent nourrir les enfants des valeurs humanistes universelle et leur apprendre,
dès le plus jeune âge, le sens du partage, du respect de l’autre, de la convivialité,
de l’entraide ? Par l’éducation à la paix, à laquelle l’école se doit évidemment
de contribuer elle aussi, les femmes ont aujourd’hui la possibilité et la
responsibilité de retisser la lien social et de prévenir les conflits de demain.
Les femmes occupent aussie une place active dans le domaine économique. Il
convient de renforcer ce rôle. D’abord en lui donnant la reconnaissance qu’il
mérite. Ensuite en permettant aux femmes de développer leurs activités économiques
et en les aidant à accéder aux responsabilités auxquelles elles aspirent
légitimement.
Le séminaire qui s’est tenu sur l’initiative de l’Organisation internationale pour
les migrations (OIM) a été une occasion de dresser un bilan du travail déjà
accompli, d’en relever les points faibles et de tirer des conclusions pour
l’avenir. Cet espace alimenté par des échanges interpersonnels et la contribution
des intervenants fut très enrichissant. Je ne doute pas qu’il soit aussi un
terreau fertile.
L’objectif que nous poursuivons est de favoriser les conditions permettant
aux femmes d’avoir une vue d’ensemble du contexte dans lequel elles opèrent
6

et de créer des instruments susceptibles de les aider à mettre sur pied de
nouvelles stratégies d’action.
C’est uniqument dans ces conditions-là qu’il leur sera possible d’accéder à
des lieux de prise de décisions, dans l’espoir qu’elles pourront infléchir ces
décisions pour qu’elles contribuent au développement harmonieux de leur
societés.
« De la femme vient la lumière », ecrivit Aragon. C’est, me fondant sur vos
travaux, tout ce que je nous souhaite.
Madame Laurette ONKELINX
Vice-Première Ministre du Royaume de Belgique
et Ministre de l’Emploi
7

Introduction
La République Démocratique du Congo a connu, ces dernières années, de
nombreuses difficultés qui ont entravé son processus de développement et
qui ont parfois retardé le dialogue en cours.
Les sociétés africaines sont encore trop souvent marquées par les clivages
ethniques et les comportements guerriers, dont on sait à quel point ils obèrent
les chances de réussite des efforts entrepris par les politiques pour parvenir à
un accord durable.
Dans ce contexte, la part prise par les femmes dans les situations de reconstruction
et de post-conflit s’avère particulièrement importante, bien qu’encore
insuffisamment reconnue. Elles ont de plus en plus souvent la responsabilité
du foyer, devenu dans de nombreux cas monoparental, et leur fonction motrice
dans le progrès social est évidente.
Il est donc essentiel de leur donner les moyens de mieux connaître les instruments
de droit auxquels elles peuvent se référer, les modalités de gestion des
entreprises, formelles ou non, et des micro-crédits et d’appuyer leur structuration
en réseau, garante de l’impact de leur action auprès des décideurs dans
leur pays comme au niveau des différents partenaires.
Convaincue que les migrations peuvent jouer un rôle dans le développement
des pays d’origine, l’OIM a lancé le programme MIDA Grands lacs que le
Gouvernement belge a accepté de soutenir dès le début : les diasporas peuvent,
sans renoncer à leur statut dans le pays d’accueil, utiliser la mobilité
professionnelle pour apporter une contribution au développement de leur
pays.
Dans cette dynamique, j’ai souhaité mettre un accent particulier sur la mobilisation
des femmes, tant dans le pays d’origine que dans la diaspora, car il est
évident que de tels projets ne peuvent fonctionner sans une interface particulièrement
efficace entre les différents acteurs.
C’est ainsi que l’idée de ce séminaire a germé : conçu pour être un réel point
de départ vers des actions concrètes, puisqu’il a permis de mettre en place un
véritable programme de micro-crédits au bénéfice des femmes entrepreneurs,
il a aussi permis la confrontation, au sens positif et moteur du terme, entre des
expériences très différentes.
Le Gouvernement de la République démocratique du Congo et les principales
structures de la société civile se sont associées à l’OIM dans la préparation
comme dans la mise en œuvre de cette action, et je me réjouis de constater
que l’appropriation est totale, puisque nous avons contracté avec deux structures
locales, auxquelles a été confiée, en liaison avec nous, la gestion de la
phase opérationnelle sur le terrain.
8

Sans une implication au quotidien des femmes, le processus de reconstruction
ne pourra qu’être ralenti, voir empêché, tant leur part dans la cellule
familiale comme dans la mise en pratique des idées de paix et de stabilité est
évidente et nécessaire.
Je ne peux que me réjouir de constater que le Gouvernement belge a d’entrée
de jeu accordé son plein soutien à cette initiative, qu’il a financée pour la RDC
et le Rwanda voisin.
Je voudrais adresser mes remerciements particuliers à deux femmes, si vous
me le permettez : Madame Marie-Ange LUKIANA MUFWANKOLO et Madame
Laurette ONKELINX, toutes deux Ministres dans leur pays, et incarnations
de ce que la volonté peut faire lorsqu’elle se conjugue avec l’action concrète.
Par leur implication, ce sont elles qui ont permis que se mette en place ce
séminaire et la phase actuelle de mise en pratique sur le terrain.
Mais ces remerciements seraient incomplets s’ils n’englobaient aussi toutes
les femmes de RDC qui se sont mobilisées pour que cette rencontre puisse
avoir lieu, leurs compatriotes de la diaspora en Belgique et toute l’équipe de
l’OIM.
Pour ma part, je voudrais rappeler que ma participation effective à ce séminaire
se voulait un signal fort, que je tenais à donner en tant que femme,
qu’Africaine et que Directeur général adjoint de l’OIM, afin que les pays membres
sachent que nous cherchons à promouvoir de plus en plus le lien étroit
entre migrations et développement et que nous attachons une importance particulière
à la promotion du rôle des femmes dans les processus de
développement et aussi à la protection des migrantes vulnérables, dont la situation
doit être à tout prix améliorée et qui doivent prendre pleinement part à la
vie de leur pays.
Je resterai attentive à ces aspects et m’engage à travailler à vos côtés pour que
se poursuive ce processus et pour que les partenaires au développement en
comprennent l’importance.
Madame Ndioro NDIAYE
Directeur général adjoint de
l’Organisation internationale pour les migrations
9

Glossaire
ACCCO Association des conducteurs des chariots du Congo
ACP Afrique, Caraïbes et Pacifique
AFDL Alliance des forces démocratiques pour la libération du
Congo-Zaïre
AFIP Association des femmes pour les initiatives de paix
AFEJUCO Association des femmes juristes du Congo
ANOFECO Association des Femmes du Congo
AGOA African Growth and Opportunity Act
ASSOFE Association des femmes entrepreneurs chefs
d’entreprises
BCC Banque centrale du Congo
BIT Bureau international du Travail
CADECO Caisse d’épargne du Congo
CCAE/B Conseil des communautés africaines en Europe/Belgique
CDT Confédération démocratique de travail
CEDEAO Communauté Economique des Etats de l’Afrique de
l’Ouest
CEDEF Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination l’égard des femmes
CEDAW Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination à l’égard des femmes
CNF Conseil national des femmes
CONAFED Comité national femme et développement
COOCEC/CEAC Coopérative centrale d’épargne et de crédit de la
communauté évangélique de l’Alliance du Congo
COOPEC Coopérative d’épargne et de crédit
COSEC Companhia de seguros de créditos
CREP Caisse régionale d’épargne et prêt
CRSH Centre de recherches en sciences humaines
CSC Confédération syndicale du Congo
CTP Conscience des travailleurs et des paysans du Congo
DIRAF Diretoria administrativa e financeira
DJFC Dynamique de la jeunesse féminine congolaise
DYNAFEP La Dynamique des femmes politiques au Congo
démocratique
ECOSOC Conseil économique et social du système des Nations
Unies
FAO Food and Agriculture Organization
FEC Fédération des enterprises du Congo
FGED Federal Government External Debt
FIKIN Foire internationale de Kinshasa
FOLECO Fédération des ONG laïques à vocation économique
du Congo
10

IDH Indicateur du développement humain
INPP Institut national de préparation professionnelle
INSS Institut national de la sécurité sociale
ISAM Institut supérieur des arts et métiers
MIDA Migration for development in Africa
MONUC UN mission to the Congo
MPR Mouvement populaire de la révolution
MSF Médecins sans frontière
NEPAD New Partnership for Africa’s Development
OIT Organisation internationale du Travail
OTUC Organisation des travailleurs unis du Congo
PMEA Petites et moyennes exploitations agricoles
PMI Petites et moyennes industries
PNPFC Programme national pour la promotion de la femme
congolaise
PNUD Programme des Nations Unies pour le développement
RAF Réseau Action Femmes
RDC République démocratique du Congo
REGIDESO Régie congolaise de distribution d’eau
RIFONGA Réseau pour l’intégration des femmes des organisations
non gouvernementales et des associations africaines
SNEL Société nationale d’électricité
SOFIDE Société financière de développement
SPF Emploi Service public fédéral Emploi
STL Syndicats des travailleurs libres
UNAF Union nationale des femmes
UNIFEM Women’s fund of the United Nations
UNDESA United Nations Department of economic and social
affairs
UNTC Union nationale des travailleurs du Congo
WOPPA Women as Partners for Peace in Africa
11

Chapitre I
INTRODUCTION ET SEANCE
D’OUVERTURE
13

Résumé
Le séminaire sur le renforcement du rôle des femmes dans la reconstruction nationale
et le développement économique en République démocratique du Congo
s’est tenu à l’hôtel Memling à Kinshasa du 27 au 29 juin 2003. Le séminaire a
porté sur le rôle des femmes dans la reconstruction nationale et le développement
économique en République démocratique du Congo. Ce séminaire était organisé
par le Ministère des Affaires sociales et de la Famille et le Ministère du Travail et
de la Prévoyance sociale, avec l’appui de l’OIM.Entre 8 h 30 et 9 h 30, les participants
ont été accueillis et enregistrés avant que ne commence la séance d’ouverture.
Les travaux de la première journée se sont déroulés en deux séances, sur le
thème du « Rôle des femmes dans la reconstruction nationale, la résolution et la
prévention des conflits ». Madame le représentant de l’OIM, Madame le Ministre
du Travail et de la Prévoyance sociale, et Madame le Ministre des Affaires sociales
et de la Famille ont successivement prononcé un discours d’ouverture entre 9 h 30
et 11h 00.
DISCOURS D’OUVERTURE
DU DIRECTEUR GENERAL ADJOINT
DE L’OIM
Madame Ndioro NDIAYE, présenté par Madame
Margaret KABAMBA, représentante de l’OIM,
Coordonnatrice du projet MIDA-Grands Lacs
Madame le Ministre des Affaires sociales et Famille,
Madame le Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale,
Monsieur le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération
internationale,
Monsieur le représentant du Gouvernement de Belgique,
Mesdames, Messieurs,
Chers invités,
C’est un agréable plaisir pour nous de nous retrouver ici ce matin en terre
congolaise pour l’ouverture du séminaire sur le renforcement du rôle des
femmes dans la reconstruction nationale et le développement économique en
République démocratique du Congo. Au-delà du plaisir que nous éprouvons,
c’est aussi un réel sentiment de satisfaction qui nous anime profondément
15

car, comme vous le savez, l’OIM, et non seulement elle mais encore la communauté
internationale dans son ensemble, accorde une grande importance au
rôle des femmes dans les processus de paix et de réconciliation et à la participation
effective des femmes à toutes les questions qui liées au bien-être de
l’humanité.
Qu’il me soit permis avant tout de remercier Son Excellence Monsieur le
Président de la République et les autorités congolaises pour leur disponibilité,
leur assistance et toutes les infrastructures qu’ils ont gracieusement mises à
disposition pour la préparation de ce séminaire.
Je voudrais particulièrement saluer en cet instant le noble engagement de la
Belgique pour son appui financier fort apprécié, et exprimer aussi ma reconnaissance
à Madame Laurette ONKELINX, Vice-Premier ministre belge et
Ministre de l’Emploi pour sa détermination constante à œuvrer pour faire
avancer la cause de la femme en général et celle de la femme africaine en
particulier.
Nul n’ignore les effets des conflits armés qui sévissent en RDC depuis 1996
et les conséquences multiformes dans la vie des hommes, des femmes et des
enfants en République démocratique du Congo. D’une manière générale, la
situation des femmes pendant les moments de crise mérite qu’on y prête
beaucoup d’attention. Elles sont les premières victimes des conflits dans la
mesure ou elles doivent faire face, lorsque leurs époux sont au front, aux
bombardements, aux exactions, et aux violences de diverses natures de la part
de ces combattants et de personnes civiles peu scrupuleuses. C’est encore
elles qui doivent assumer les responsabilités les plus contraignantes de la famille
et dans le pire des cas, gérer le problème des enfants nés de viols, source de
traumatisme psychologique grave.
Toutefois, si au cours des décennies passées elles sont restées en dehors des
circuits traditionnels et en marge des processus habituels touchant d’une part
la prise des décisions consécutives à l’entrée en conflit et d’autre part, la
reconstruction dans les périodes consécutives aux conflits, les femmes
deviennent aujourd’hui de plus en plus des partenaires fiables et indispensables
dans la recherche de solutions durables aux problèmes liés à la sécurité,
à la paix, et à la reconstruction nationale.
Force est de constater que leur statut a beaucoup évolué et ne se définit plus
exclusivement sous l’angle de victimes nécessitant de l’assistance et de la
protection mais bien plus, sous celui d’agents actifs, de citoyennes dotées de
capacités managériales soutenues et de facultés considérables devant concourir
à la mise en place d’un environnement favorable à la paix, à la stabilité, à la
cohésion et à l’unité nationales, facteurs essentiels du développement
économique.
L’OIM, quant à elle, s’efforce depuis plusieurs années de mettre de plus en
plus l’accent sur les femmes en tant que sources de développement pour ses
16

programmes de retour et de réintégration. Elle a ainsi mobilisé dans nombre de
pays, notamment en Somalie, au Kosovo, en Afghanistan, au Guatemala, au
Mozambique, et en Angola, le potentiel des femmes en vue de les préparer à
leur rôle d’actrices en faveur de la paix.
Forte de sa longue expérience, riche et diversifiée, en matière d’intervention
post-conflit, et consciente des potentialités dont regorgent les femmes congolaises,
de la volonté dont elles sont animées et de la détermination dont elles
font preuve à participer pleinement et de manière active au processus de paix
et de reconstruction de leur pays, elle a entrepris de développer ce projet, qui
devra avoir pour effet de leur permettre de s’intégrer parfaitement dans ce
processus et de contribuer à le consolider et à le parachever. C’est là le but
ultime visé par ce projet.
Pour ce faire, il sera nécessaire de former des réseaux, de constituer des
alliances stratégiques et de promouvoir une coopération véritable entre les
femmes congolaises tant de l’intérieur que de l’extérieur. C’est en cela que la
dimension du développement économique met en relief toute son importance
dans le contexte de la migration.
Mesdames, Messieurs,
L’OIM reste convaincue que le soutien en faveur du dialogue et de la communication
entre les femmes congolaises devra aboutir non seulement à la
promotion de l’emploi, à la génération de revenus et au développement économique
mais aussi à la prévention de l’exode des cerveaux et des conflits. C’est
pourquoi, durant trois jours, le présent séminaire va tourner autour des thèmes
tels que
• La reconstruction, la réconciliation et la promotion d’une culture de paix ;
• La paix et la prévention des conflits ;
• Les mécanismes traditionnels de règlement et de prévention des conflits ;
• La démocratie, la diversité, l’autonomie ;
• L’intégration des femmes ;
• La création des réseaux et l’amélioration des compétences ;
• Le développement des entreprises à partir des micro-crédits ;
• Le rôle des femmes dans le développement économique :
A travers ces précieux outils, la formation permettra sans doute d’affiner les
compétences des femmes afin de mieux les préparer à leurs responsabilités
futures au sein de la société congolaise. Elle devra en outre déboucher sur le
lancement d’un projet de micro-crédits destiné à accompagner les femmes
dans ce processus et à les assister à identifier et à mettre sur pied dans les
secteurs de l’agriculture, de l’artisanat et des PME, des micro-entreprises,
génératrices d’emploi et de revenus.
17

Il existe un lien dynamique inévitable entre la pauvreté et les conflits, entre la
richesse et la stabilité mais mieux encore, entre le développement économique,
la réhabilitation, la réconciliation et la promotion de la paix. En offrant aux
femmes les conditions de promotion de leur développement, elles peuvent
jouer un rôle économique de premier plan dans le bien-être de leurs familles,
de leurs communautés, de leur pays et même de leur région. Au-delà du soutien
économique, le rôle des femmes peut revêtir un caractère vital dans la
promotion de la stabilité, dans le respect des droits humains et dans le rétablissement
d’une paix durable.
Au regard de tout ce qui précède, l’OIM mettra en place un mécanisme de
suivi pour accompagner les femmes durant tout le processus afin de garantir
les répercussions possibles du projet sur la vie des femmes elles-mêmes, celle
de leurs familles, de leurs communautés, et de tout le pays.
Par ailleurs, l’OIM toujours fidèle à ses relations traditionnelles de coopération
très positive avec la République démocratique du Congo, se fera le devoir
de maintenir étroitement le contact avec les autorités, notamment le Ministre
des Affaires sociales et Famille, le Ministre des Affaires étrangères et le Ministre
du Travail et de la Prévoyance sociale dans le cadre de ce projet pour sa mise
en œuvre et sa réussite.
Je voudrais, pour terminer, encourager les formatrices et les encadreurs à
offrir le meilleur d’elles-mêmes, à investir leurs connaissances dans ce séminaire.
Je voudrais aussi inviter les participantes à mettre en œuvre toute leur
disponibilité, à faire montre de toute leur volonté et leur désir d’apprendre.
Au reste, je formule le vœu que ce projet soit un modèle de réussite pour la
région des Grands Lacs, pour l’Afrique et pour le monde entier.
Je vous remercie.
18

Résumé
Madame Jeanne EBAMBA BOBOTO, Ministre des Affaires sociales, s’est réjouie
de l’entrée de la République démocratique du Congo à l’OIM et a souhaité que la
coopération qui existe déjà entre le gouvernement congolais et l’OIM gagne encore
davantage en intensité. En effet, cette coopération jouera un rôle crucial dans
l’action que mènent les femmes congolaises pour un développement économique
durable en RDC.
DISCOURS D’OUVERTURE
DU MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES
Madame Jeanne EBAMBA BOBOTO
Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement,
Madame le Directeur général adjoint de l’Organisation internationale pour les
migrations,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Chefs des Missions
diplomatiques,
Madame la Coordinatrice du programme MIDA Grands Lacs,
Mesdames et Messieurs,
Distingués invités,
Avant toute chose, je voudrais souhaiter au nom du Gouvernement de la
République démocratique du Congo, la bienvenue en terre congolaise à toute
la délégation de l’Organisation internationale pour les migrations que conduit
Madame Ndioro NDIAYE à qui j’adresse mes remerciements sincères pour
tant d’efforts fournis afin de non seulement donner à l’OIM une plus grande
visibilité aux yeux des Africains en général et des Congolais en particulier,
mais aussi et surtout en raison de ses activités très porteuses orientées vers
notre pays.
En effet, depuis l’admission de la République démocratique du Congo à
l’Organisation internationale pour les migrations intervenue fin juin 2001, les
rapports faits au Gouvernement sur les activités de cette organisation ont
toujours forcé l’admiration de plus d’un et procuré la preuve que la coopération
OIM-RDC était qualitativement bonne, en ce sens qu’elle s’adresse à des
points sensibles de notre société.
19

Du programme MIDA qui jouit en ce moment d’un écho très favorable grâce
aux transferts de compétences, au présent séminaire sur la paix et le
renforcement des capacités des femmes, en passant par d’autres activités en
chantier comme la démobilisation des ex-Faz et la prise en charge des déplacés
internes, tout démontre que cette organisation présente de sérieuses capacités
gestionnaires dans le domaine des migrations et ses aspects connexes.
Notre souhait est de voir cette coopération s’intensifier pour le plus grand
bien de toute notre communauté nationale. La République démocratique du
Congo n’hésitera jamais à exprimer haut et fort cette intention auprès de tous
les partenaires et bailleurs de fonds de l’OIM pour qu’ils responsabilisent
davantage cette organisation dans les divers aspects qu’elle est appelée à gérer
et qui cadrent parfaitement avec les grandes préoccupations de nos pays.
C’est dans ce cadre précis que je voudrais, au nom du Gouvernement congolais,
saluer et remercier le Gouvernement belge qui se montre, à juste titre par
ailleurs, très enthousiaste pour enclencher un développement véritable dans
notre pays. Le fait que seule la Belgique ait accepté de financer le programme
MIDA et qu’elle finance encore ce séminaire est une preuve éloquente
supplémentaire.
Quant au présent séminaire, les trois grands axes sur lesquels nous allons
nous focaliser durant ces trois jours cadrent parfaitement avec quelques-unes
des plus grandes préoccupations nationales du moment, à savoir la paix et la
prise de conscience que les femmes sont capables de se prendre en charge et
de surmonter les difficultés multiples qu’elles endurent dans un environnement
toujours trouble où elles payent le plus lourd tribut des conflits multiformes.
La RDC traverse actuellement l’une des périodes les plus sombres de son
histoire ; il est donc impérieux que chaque fille et fils du pays participe à la
reconstruction nationale et à son développement économique.
La femme congolaise, qui constitue actuellement le pivot de la famille et le
socle de la société congolaise, doit jouer pleinement son rôle. Or, comment le
fera-t-elle si elle n’est pas assistée de diverses manières ? Ses capacités
économiques, politiques, sociales et autres doivent être renforcées. La femme
elle-même doit ainsi s’organiser pour amener les acteurs sociaux, c’est-à-dire
gouvernements, ONG, syndicats et organisation des Nations Unies à assurer
ce renforcement.
C’est la raison d’être de ce séminaire de trois jours pendant lequel nous allons
chercher des voies et moyens qui permettent à la femme de prendre une part
active au développement durable du pays en passant par la résolution pacifique
des conflits.
Je souhaite que toutes les participantes prennent part, de manière effective et
efficace, à ces travaux. Ainsi, je déclare ouvert le séminaire sur la paix et le
renforcement des capacités de la femme congolaise.
Je vous remercie.
20

Chapitre II
THEMES ET DISCUSSIONS
21

Thème 1:
Rôle des femmes dans la reconstruction nationale,
la résolution et la prévention des conflits
Résumé
Les travaux de la première journée ont commencé à partir de 11 h 30, sous
la présidence de Madame Jeanne EMAMBA BOBOTO, Ministre des Affaires
sociales.
Madame Marie-Ange Lukiana MUFWANKOLO, Ministre du Travail et de la Prévoyance
sociale, et Madame Marie-Josée MIKABA, Secrétaire générale à l’Information,
étaient chargées de la modération, et Madame Pélagie EBEKA, avocate,
du rapport.
La première oratrice, Madame Angélique INZUN, a présenté un exposé sur le
thème de « Bonne gouvernance et genre » pour Madame Marie-Thérèse MODUA,
Directeur de Cabinet au Ministère des Affaires sociales et de la Famille.
Elle a d’abord constaté, avec l’UNIFEM, qu’il n’existe aucun pays au monde où
les femmes jouissent du même statut politique que les hommes. Elle a ensuite
donné les définitions de termes « gouvernance », « bonne gouvernance » ou
« guerre », avant de poser le diagnostic du genre en RDC.
Elle a fini par conclure que malgré la ratification par la République démocratique
du Congo de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination
à l’égard des femmes, malgré la Constitution actuelle et enfin, malgré le
fait que la République démocratique du Congo applique l’approche genre depuis
des décennies, celle-ci n’est pas encore intégrée dans tous les domaines (juridique,
politique, social, économique), et encore moins dans les organes de prise de
décisions.
Essayant de comprendre les raisons de la non-intégration de cet aspect genre,
elle s’est rendue compte qu’il existe plusieurs facteurs qui limitent cette intégration
et a, par conséquent, proposé comme voie de sortie pour la RDC : le respect
du principe de genre dans la bonne gouvernance, pour un développement national
harmonieux.
23

BONNE GOUVERNANCE ET GENRE
Madame Marie-Thérèse MODUA
1. Introduction
« Il n’existe pas de pays au monde où les femmes jouissent des mêmes statuts
politiques que les hommes, ni des mêmes possibilités d’influencer la direction
de la société. Les femmes n’occupent que 12 % des sièges parlementaires et
5 % des postes ministériels de la planète. » 1
Cette affirmation résume à merveille l’objet de notre exposé et justifie le combat
que doit mener la femme pour sa participation effective à la gouvernance
au même titre que l’homme.
Après la définition de deux termes clés, « gouvernance » et « genre », nous
allons faire le diagnostic du genre dans quelques domaines (juridique, politique,
social, économique) et surtout dans les postes de prise des décisions.
Nous allons ensuite tenter de donner les facteurs qui empêchent l’application
de la parité dans ces domaines et enfin, nous donnerons quelques propositions
en guise de conclusion.
2. Définitions de la gouvernance et du genre
2.1. Définition de la gouvernance
On peut définir la gouvernance comme « un ensemble de règles, d’institutions
et de valeurs qui servent à diriger la société, l’Etat et les institutions sociales
en général. » 2
La gouvernance est donc un mode d’exercice du pouvoir politique, juridique,
social et économique dans le but d’assurer la cohésion sociale, l’intégration et
le bien-être de toute la population.
Elle exige par conséquent la mobilisation de tous les acteurs et l’instauration
d’un partenariat fructueux entre ces différents acteurs.
1 UNIFEM, Rapport annuel 1996.
2 PNUD/UNDESA, Evaluation de l’intégration d’une perspective sexospécifique
en Afrique subsaharienne, 2000.
24

La bonne gouvernance implique la mise en place d’institutions qui doivent
garantir l’équité, en attribuant et en redistribuant les ressources équitablement
et selon les besoins des différents groupes, spécialement les groupes des
femmes et des jeunes.
2.2. Définition du genre
Le genre est défini comme un processus qui l’implication des femmes et des
hommes à toute action planifiée, y compris la législation, les politiques ou les
programmes, dans tous les domaines et à tous les niveaux. Le genre est une
stratégie servant à faire des préoccupations et des expériences des femmes et
des hommes une dimension intégrale de l’identification, l’exécution, la supervision
et l’évaluation des politiques et programmes dans toutes les sphères
politiques, sociales et économiques, de façon à ce que les femmes et les hommes
bénéficient d’une manière égalitaire et que l’inégalité ne soit pas perpétuée3 . Le
concept de genre transcende celui de sexe qui est une variable biologique et
donc statique car il met l’accent sur les relations et les rôles sociaux entre les
hommes et les femmes. Ces rôles sociaux sont transmis et évoluent avec le
temps ; ils varient en fonction de la culture. C’est donc une approche dynamique
des relations entre les hommes et les femmes pour la reconstruction du
pays.
3. Diagnostic du « genre » en RDC
Le Gouvernement congolais a ratifié depuis le 6 octobre 1985 par ordonnanceloi
n° 85/040 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination
à l’égard des femmes (CEDEF).
Suite à des décisions politiques, l’article 51 vient d’être inscrit dans la Constitution
de transition promulguée le 4 avril 2003. Il dit ceci : « L’Etat a le devoir
de veiller à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la
femme et d’assurer le respect et la promotion de ses droits. »
Appliquée en RDC depuis plus d’une décennie, l’approche genre n’est pas
encore intégrée dans les domaines juridique, politique, social, économique et
surtout dans les organes de prise des décisions.
3.1. Domaine juridique
Le principe de l’égalité de droit entre l’homme et la femme a toujours été
inscrit dans toutes les constitutions de la RDC.
3 ECOSOC : Le Conseil Economique et Social du système des Nations Unies.
25

Cependant, les articles 448 et 450 du Code de la famille traitent de l’exigence
de l’autorisation maritale pour la femme pour tous les actes juridiques dans
lesquels elle s’oblige. De plus, seulement 10 % des membres du Parlement
actuel sont des femmes.
Dans la magistrature, les nominations aux postes de direction sont en majorité
masculines. Actuellement 85 femmes sur un total de 1215 ont choisi la magistrature,
mais sur un total de plus ou moins 206 postes de direction, les femmes
n’en occupent que 11, soit le 5 %.
3.2. Domaine politique
Quant aux gouverneurs de provinces, les 11 femmes nommées sont des vicegouverneurs
: il semble que les femmes ne peuvent pas être gouverneurs en
charge de la politique des provinces en RDC ! Un effort avait été fourni au
niveau ministériel : 5 femmes ministres et vice-ministres contre 37 hommes,
mais ce chiffre reste insignifiant car la représentation de la femme n’est que
de 10 %.
Sur le plan du leadership politique, 8 femmes seulement (soit 2 %) sont
fondateurs de partis politiques contre 392 hommes. Le seuil de la proportion
de 30 % fixé par le Conseil économique et social depuis 1995 est loin d’être
atteint.
3.3. Domaine social
En RDC, le droit à l’éducation est offert à tous les enfants, mais les inégalités
sont observées entre garçons et filles : le taux d’analphabétisme des filles âgées
de 15 à 24 ans est de 36 % contre 22 % pour les garçons.
Les taux d’abandon, légèrement plus élevés chez les filles que chez les garçons,
sont valables pour toutes les années : en 5ème année primaire, le taux
d’abandon pour les filles est de 10 % contre 5 % pour les garçons ; si l’on
ajoute le critère de virginité pour le passage au niveau secondaire de l’éducation,
le taux de scolarité des filles est encore plus faible en comparaison avec
celui des garçons.
Dans le domaine de la santé et de la reproduction, la proportion des femmes
qui utilisent un moyen de contraception a été estimée à 27 %, contre seulement
4,4 % chez les hommes.
3.4. Dans le domaine économique
L’homme seul ne peut assurer le développement du pays ; la femme congolaise
est par contre la principale pourvoyeuse de la subsistance des nombreuses
familles quoiqu’elle évolue dans l’informel.
26

La proportion des hommes et des femmes impliqués dans les activités agricoles
pour assurer la sécurité alimentaire en RDC est résumé dans ces
pourcentages :
En matière d’accès aux ressources, la proportion des femmes qui sont
incapables d’accéder aux emplois et à leur revenu est estimée à 44 % sur
l’ensemble des femmes contre seulement 22 % pour les hommes.
La proportion de femmes gestionnaires d’entreprise privée est estimée au faible
taux de 5 % contre 95 % d’hommes.
Le rapport national sur le développement humain affirme que le taux des
femmes occupant des positions de responsabilité dans l’économie ne dépasse
pas 3 %.
3.5. Dans les organes de prise des décisions
Selon l’étude menée par le Ministère des Affaires sociales intitulée « Guide
biographique des femmes cadres », les femmes cadres ne représentent en
moyenne que 5 % de tous les cadres.
Malgré la qualification et l’expérience professionnelle, la majorité des femmes
(61 %) assument des fonctions subalternes.
4. Les facteurs limitant l’application du genre
dans la gouvernance
L’application du « genre » en R.D.C. dans les différents domaines et dans
toutes les institutions est limitée par plusieurs facteurs, notamment :
• les dispositions légales discriminatoires et la non-application des textes
favorables à la femme ;
27
Hommes % Femmes %
Abattage des arbres 100 -
Nettoyage et labour 34 66
Semis (plantation) 29 71
Transformation 21 79
Stockage et conservation 20 80
Transport de la récolte 10 90
Vente de produits 25 75

• l’analphabétisme des femmes ;
• les relations hommes-femmes basées sur un système biologique et le statut
social ;
• le patriarcat ;
• les pratiques traditionnelles de division du travail selon le sexe ;
• sur le plan de la religion, la soumission de la femme mal interprétée ;
• le poids des coutumes et traditions qui marginalisent la femme ;
• l’insuffisance des données statistiques actuelles désagrégées par sexe ;
• la pauvreté généralisée et renforcée par des guerres interminables.
Ces facteurs privent les femmes congolaises de leurs capacités de devenir des
agents actifs et bénéficiaires de la reconstruction du pays.
5. Le genre dans la bonne gouvernance comme l’unique
voie de sortie pour la RDC
Nous venons de conclure que la participation de la femme à la gouvernance au
même titre que l’homme est essentielle pour un développement durable.
La femme s’est révélée comme l’actrice économique incontournable en RDC
et dans le monde. Le cas, cité plus haut, des mères des familles qui dans
l’informel pourvoient seules et totalement aux besoins de tous les membres de
la famille en est la preuve.
Sur le plan politique, dans la gestion de la chose publique, elle est plus intègre
que son collègue masculin par sa transparence dans la gestion. Les conflits
d’intérêts qui souvent accompagnent la gestion par les hommes font presque
défaut chez les femmes. D’où la faible participation de la femme aux postes à
responsabilités dans la gouvernance au niveau national, qui prive le pays de
compétences indispensables au développement national.
Cela étant, les gouvernants ont du mal à intégrer le renforcement de la capacité
de la femme dans l’élaboration des politiques, car ils n’en ressentent pas
le besoin.
Et pourtant, le programme d’action de Beijing recommande la répartition équitable
du pouvoir et des responsabilités à tous les niveaux par des gouvernements
et d’autres acteurs qui doivent établir une analyse statistique des sexospécificités
et intégrer la problématique hommes-femmes dans l’élaboration des politiques
et l’exécution des programmes.
L’égalité dans le processus décisionnel que soutient ce programme est essentielle
à l’émancipation de la femme.
28

Conclusion
L’amélioration de l’équilibre des genres au niveau des organes de prise de
décisions dans toutes les institutions politiques, légales, sociales et économiques
assurera la visibilité des compétences des femmes pour la reconstruction
nationale.
Je vous remercie.
29

Résumé
La deuxième intervenante a présenté un exposé intitulé « Prévention des conflits
et développement économique ». Madame Marie-Noëlle NYANGWILE, conseillère
juridique à la REGIDESO est partie du constat suivant : au cours des années 90,
plusieurs pays de l’Afrique sub-saharienne ont été secoués par des guerres civiles
et des crises politiques. Elle a démontré qu’il existe un lien étroit entre la notion
de conflit et celle de développement. Ainsi, elle s’est tout d’abord penchée sur les
notions de développement et de conflit pour ensuite proposer quelques moyens de
relever le défi du développement.
Elle a tenu à souligner la difficulté de définir le mot « développement » et a ensuite
adopté la définition la plus large, proposée par le Professeur D’HAESE, qui conçoit
le développement comme un processus résultant de plusieurs facteurs :
démographique, socio-politique, économique et culturel.
A propos des conflits, Madame NYANGWILE s’est d’abord arrêtée sur les différentes
sortes de conflits existants : conflits relatifs aux intérêts (politiques et économiques),
conflits sur les moyens/les buts, conflits sur les valeurs, conflits d’identité
collective, pour aboutir aux conséquences diverses des conflits.
Après cet examen, l’intervenante est arrivée à la conclusion qu’il est impérieux de
prévenir les conflits pour permettre un développement harmonieux.
PREVENTION DES CONFLITS
ET DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Madame Marie-Noëlle NYANGWILE
Dans le climat d’optimisme qui a suivi la chute du mur de Berlin, on a pu
croire pendant un moment qu’en unissant ses forces, la Communauté internationale
serait capable de contenir les explosions de violence dans plusieurs
parties du monde. Les initiatives et stratégies mises sur pied par les organisations
humanitaires, l’Union européenne, le Conseil de Sécurité, l’Assemblée
générale et le Secrétariat général de l’ONU n’ont rencontré que peu de succès
face aux multiples causes des conflits.
Au cours des dernières décennies, la quasi-totalité des 20 pays les plus pauvres
du monde ont été déchirés par un conflit violent et dans les années 90, on a
constaté que le nombre de conflits et de guerres civiles fratricides a augmenté
30

de façon flagrante. En effet, de nombreuses régions sont en proie à des conflits
ouverts et la violence reste le lot des populations civiles, particulièrement en
Afrique, où 18 pays sur 45 connaissent la guerre civile et 11 pays traversent
des crises politiques plus ou moins graves (en Sierra Leone, Somalie, Liberia,
Rwanda, etc.) ; quelquefois, les conflits peuvent s’internationaliser et entraîner
l’inertie de la communauté internationale (c’est le cas de la RDC).
La résurgence de conflits violents dans le monde avec ses conséquences sur
la sécurité humaine, ses flots de réfugiés et de déplacés, l’éclatement des
structures nationales, le recrutement d’enfants, les mines anti-personnels a
conduit plusieurs personnes à reconnaître l’importance de résoudre les conflits
et d’encourager la culture de leur prévention en vue de maintenir la paix.
D’ailleurs, on dit que lorsque les conflits menacent, il faut protéger la paix ;
lorsqu’ils font rage, il faut conclure la paix ; et lorsqu’ils ont cessé, il faut
maintenir la paix !
S’il est vrai que la stabilité et la paix sont des conditions préalables à la réduction
de la pauvreté et contribuent au développement, s’il est vrai que la
prévention des conflits va de pair avec le développement alimentaire, agricole,
environnemental et économique, il faut souligner que le maintien de la paix,
s’il se limite à la prévention des conflits, ne suffit pas : il doit être accompagné
par la promotion, la justice sociale, la protection des droits de l’homme, la
bonne gouvernance et le processus démocratique.
En ce 3ème millénaire, nous vivons dans un monde où les économies sont
désormais inter-dépendantes et où l’environnement multiculturel, certes riche
en promesses, est également porteur de conflits !
Pour aborder ce sujet, nous allons suivre la démarche ci-après :
• Nous parlerons du développement en général étant entendu que le développement
économique y est inclus.
• Ensuite, nous nous pencherons sur la question des conflits et de leur impact
négatif sur le développement.
• Enfin, nous conclurons en évoquant quelques voies et moyens ainsi que la
nécessité évidente de prévenir ces conflits pour favoriser le développement.
A. Le développement
Quelle est la définition du développement ?
Comment peut-on déterminer le degré de développement d’un Etat, d’une
nation, d’une population ? Quels sont les moyens ou les facteurs de
développement ?
Tout d’abord, il nous faut noter que le mot développement est assez ambigu et
que son contenu dépend de la personne qui l’utilise.
31

Pour certains matérialistes, le développement se limite à un pur développement
économique et à la réalisation d’un bien-être matériel dans lequel des
termes tels que pauvreté, inégalité, chômage… sont à utiliser avec grande
modération ou même à bannir! Il faut noter que le développement économique
inégal et injuste, s’il perdure, contribue à l’éclatement de conflits.
On peut analyser le développement pris dans son seul aspect économique au
moyen des éléments suivants :
• La croissance économique
• L’évolution et la gestion optimale des ressources humaines (taux de scolarité
et d’alphabétisation élevé, bonne politique éducative, par exemple)
• La conservation des ressources naturelles (protection de l’environnement,
gestion des populations animales et végétales)
• La bonne gestion des ressources financières capables de satisfaire les besoins
de la communauté.
Mais la réflexion ne s’arrête pas là, car les spécialistes des sciences de développement,
divisés quant au choix du modèle, à la définition et à l’espace
prioritaire de développement, pensent pour les uns que le développement commence
par l’agriculture et le commerce. Pour d’autres, la priorité doit être
accordée à l’industrie et à la technologie, tandis que d’autres encore voient le
développement dans la science et la formation des cadres qualifiés.
Les techniciens de l’ONU ont inventé « l’indicateur de développement humain
» (IDH) pour mesurer le niveau de bien-être et le degré de développement
d’un pays.
Ces opinions, aussi multiples qu’originales, ont conduit Monsieur Christian
Roux à constater que toutes les approches conçues jusqu’à ce jour en matière
de développement ont échoué. Nous pensons quant à nous que ces opinions
constituent une invitation à réfléchir sur de nouveaux modèles de développement
mieux adaptés aux entités auxquelles ils se rapportent.
Le terme développement ne pouvant rester vague, nous avons adopté pour les
besoins de notre exposé la définition du Professeur L. D’HAESE des Universités
de Gand et d’Anvers selon laquelle le développement est un processus
multidimensionnel qui implique des changements importants dans les structures
sociales, les institutions nationales et la mentalité en général, ainsi qu’une
accélération de la croissance économique, une réduction des inégalités, et
l’élimination de la pauvreté.
Dans cette définition, le développement est pris dans son sens le plus large et
le plus complet comme synonyme de « promotion intégrale de tout homme et
de tout l’homme ».
32

Un tel développement résulte d’un grand nombre de facteurs qui interagissent
les uns avec les autres : facteurs démographiques, socio-politiques, économiques
et culturels.
1. Facteurs démographiques
La croissance économique est un facteur de développement, et la production
économique s’accroît d’autant plus vite que la population active est élevée. En
effet, une densité de population trop faible a pour conséquence l’incapacité à
maîtriser la nature, à exploiter ses ressources, à justifier les équipements et
infrastructures nécessaires au progrès. Cependant, l’effet bénéfique de la croissance
démographique n’apparaît que si celle-ci va de pair avec une possibilité
de croissance économique, c’est-à-dire si elle réalise un optimum de population,
ce qui est peu probable.
Dans les pays en voie de développement, l’explosion démographique peut
devenir un frein au développement et même une cause supplémentaire de
sous-développement (impossibilité de nourrir ses enfants, de les vêtir, de les
soigner, de leur procurer un enseignement valable, de trouver du travail, etc.)
Dans ces cas, l’application de certaines valeurs morales, le contrôle des naissances,
entre autres choses, sont nécessaires.
2. Facteurs socio-politiques
a. Facteurs sociaux
On trouve dans cette catégorie :
• la santé
• l’alimentation
• l’enseignement
• l’emploi
• la bonne santé d’un peuple est un facteur de développement évident ; au
contraire, la maladie est une cause de sous-développement du fait qu’elle
diminue le rendement économique.
• Une bonne politique alimentaire, une agriculture diversifiée, la lutte contre
la malnutrition sont des éléments favorables au développement.
• Le problème de l’enseignement est assez délicat dans le processus de
développement d’un pays. En effet, l’enseignement n’en sera un facteur
que s’il est intégré dans ce processus, et s’il répond aux besoins réels de
ce pays.
• L’emploi est souvent un problème crucial qui se pose dans tous les pays
mais souvent de manière différente. Dans les pays développés, le
33

emplacement de l’homme par la machine a provoqué une profonde crise
de l’emploi, tandis que dans les pays en voie de développement, on parle
plutôt de manque d’emploi, de chômage.
b. Facteurs politiques
La structure sociale, ainsi que le régime politique d’un peuple ont une influence
positive ou négative considérable sur le développement. En effet, le choix
judicieux d’un système de gouvernance favorisant à la fois l’épanouissement
de l’homme et celui de la société, le respect des droits des hommes et des
peuples, l’application du droit par les instances judiciaires, la garantie d’un
minimum de sécurité pour tout citoyen sont des indices fiables de développement.
3. Facteurs économiques
Ils sont nombreux et nous n’allons en relever que quelques-uns qui constituent
des atouts considérables pour le développement. Il s’agit :
• Des richesses naturelles du sol et du sous-sol, associées à une volonté de
développement ainsi qu’à l’esprit d’initiative de l’homme.
• Des techniques et technologies capables d’augmenter la production et la
productivité parce qu’adaptées aux besoins du pays.
• De l’encadrement et de la formation des cadres aux techniques nouvelles,
au service d’un authentique développement, c’est-à-dire celui qui répond
aux aspirations des peuples concernés.
• De l’aménagement énergétique du pays avec l’accès à l’eau potable et à
l’électricité pour la population, ainsi que de la conservation de l’environnement.
4. Facteurs culturels
Si l’enseignement a son importance dans le processus de développement, la
culture en a tout autant par le fait qu’elle permet à l’homme ou au peuple de
s’épanouir et de s’exprimer à travers divers moyens d’expression souvent
très riches (littérature, poésie, chant, musique, art, danses). Stimuler la culture,
c’est donner une qualité à la vie !
Que faut-il retenir du développement ?
Le développement doit être intégral et durable, c’est-à-dire répondre aux besoins
du présent tout en ne compromettant pas la capacité des générations futures.
Le développement doit promouvoir l’équité sociale, permettre la satisfaction
des besoins essentiels de la communauté humaine, améliorer la qualité de vie
par l’accès pour tous à l’éducation, l’emploi, un logement de qualité, aux
soins de santé et aux services sociaux.
34

Le développement doit promouvoir le respect des droits fondamentaux et des
libertés de la personne, et faire participer l’ensemble des groupes de la société
aux différents processus de prise de décision.
Enfin, le développement doit améliorer la gestion des ressources humaines,
naturelles et financières afin de satisfaire les besoins de la communauté. Il n’y
a pas de développement sans paix, et les conflits sont les pires ennemis du
développement !
Cette vérité nous amène à parler des causes et conséquences des conflits.
B. Les Les conflits conflits et et leurs leurs conséquences
conséquences
Le dictionnaire Larousse définit le conflit comme étant « une violente opposition
matérielle ou morale », ou comme « une opposition d’intérêts entre deux
ou plusieurs Etats. »
L’ONG « Médecins sans frontière » (MSF) définit quant à elle le conflit comme
étant « la conséquence d’une association négative de parties en conflit ».
En tout état de cause, le mot « conflit » vient du latin « confligere » qui signifie
heurter, ce qui en soi est déjà une définition.
Quels types de conflits rencontre-t-on généralement et quelles en sont les
causes ?
On trouve plusieurs classifications des conflits, mais celle de MSF a retenu
notre attention :
1. Conflit sur la définition de la situation
Les parties en présence envisagent et analysent une situation donnée de manière
différente, et ont une motivation, une perception de la situation et des intentions
opposées. Les conflits relatifs à la détention d’armes et à la course à
l’armement, ceux relatifs aux frontières (cas de la Libye et du Tchad, de la
Namibie et de l’Afrique du Sud) appartiennent à ce type de conflits.
2. Conflits relatifs aux intérêts
Ils se résument souvent à deux catégories : les conflits d’intérêt politique, et
les conflits d’intérêt économique.
a. Intérêts politiques
Les premiers conflits d’intérêt politique commencent en Afrique au lendemain
de la décolonisation. Il y eut d’abord la lutte pour le pouvoir, ensuite la lutte
pour l’indépendance, et enfin les luttes pour les territoires aux frontières mal
définies. Aujourd’hui encore, on retrouve à la base de tous ces conflits la
discrimination politique et l’accès insuffisant à des positions politiques au niveau
35

égional et national, la course au pouvoir (ceux qui le cherchent sont prêts
à utiliser tous les moyens, ceux qui l’ont ne veulent pas de l’alternance !),
l’exclusion des minorités qui veulent s’affirmer, l’injustice, le non-respect des
droits, etc.
b. Intérêts économiques
Il s’agit ici de la discrimination économique, de l’injustice au niveau de la
répartition des revenus, de l’accès inégal ou du non-accès à des positions
économiques avantageuses, de la lutte pour un enrichissement facile et rapide
(ceux qui veulent s’enrichir étant prêts à déclencher des conflits pour arriver
à leurs fins !)
3. Les conflits sur les moyens/les buts
Ces conflits sont relatifs à la manière, à la stratégie, aux moyens à utiliser pour
atteindre un objectif donné. Les parties divergent sur la manière d’intervenir
(approche passive ou active, avec ou sans violence) ou sur la position à adopter
(modérée ou radicale).
4. Les conflits sur les valeurs
Ils sont provoqués par l’existence d’un désaccord sur les principes, les valeurs,
ou les critères qui devraient déterminer ou légitimer les décisions des parties.
Qui décide de ce qui est bien ou mal ? Qu’est ce qui est important ?
La religion, la culture, les idéologies, sont souvent à la base des conflits de
valeur. En effet, les différences religieuses conduisent parfois à des conflits
violents : c’est le cas du Nigeria, du Soudan, de l’Ouganda, parmi d’autres
pays.
La culture, facteur de développement, peut pourtant, lorsqu’elle est détournée,
justifier des conflits inter-culturels et inter-religieux. Enfin, certains conflits
sont issus d’idéologies (cas de l’apartheid en Afrique du Sud).
5. Les conflits d’identité collective
Ces conflits surgissent lorsque « l’ego » collectif ou la dignité d’un peuple,
d’une ethnie, d’un groupe ou d’une nation est menacé. On retrouve ici les
conflits en rapport avec l’ethnicité, le nationalisme, le séparatisme, etc.
La classification des conflits selon leur origine dont nous venons de parler
nous apprend qu’il n’existe pas un mais plusieurs facteurs de déclenchement
des conflits, et que les conflits sont souvent déclenchés par différents groupes
de la société, insatisfaits ou en quête d’un quelconque pouvoir.
Tout ce qui précède nous conduit à nous poser la question de savoir quelles
sont les conséquences des conflits en général, ou quel est l’impact des conflits
sur la vie d’une population et sur le développement d’un pays.
36

Voici quelques-unes de ces conséquences :
• Les conflits sont les ennemis du développement, et lorsqu’ils sont armés,
ils tuent non seulement des êtres humains (pas de différence entre les
cibles civiles et militaires), mais aussi des infrastructures physiques. A
cause des conflits, la vie économique du pays est perturbée et même
détruite. En effet, il y a arrêt de la production ainsi que des structures de
base (usines de production d’eau potable, centrales électriques, écoles,
hôpitaux) et destruction des routes et de l’environnement.
• Les conflits ferment la porte aux échanges et aux investissements étrangers.
• Les conflits armés détruisent, appauvrissent, détournent les ressources
déjà peu abondantes dans les pays du tiers monde étant donné que ces
ressources sont affectées en priorité aux dépenses militaires et l’objectif
général des parties au conflit est tourné vers le conflit et partant détourné
de tout développement.
• Les conflits violents provoquent la famine par la réduction de la production
alimentaire et ralentissent la croissance économique. C’est le cas dans
47 pays en voie de développement de 1970 à 1990. En 1996, les conflits
armés (guerres civiles) ont laissé 80 millions de citoyens exposés à la
famine à travers le monde (dont 50 millions de réfugiés et personnes
déplacées) !
Du point de vue social, les conflits armés entraînent un profond déséquilibre
familial : les familles sont déplacées, dispersées, les enfants non-accompagnés
ou enrôlés dans les armées. D’autres conséquences des conflits armés :
massacres de civils, malnutrition, augmentation de certaines maladies (cas du
VIH), installation de l’insécurité, sans compter les effets psychologiques négatifs
des conflits sur la population, qui est souvent la première victime.
Favoriser l’harmonie sociale et promouvoir la culture de la paix permet de
prévenir les conflits qui ont généralement pour causes les iniquités entre les
groupes, institutions sociales, religieuses et politiques, les violations des droits
de la personne, un développement social et économique inégal, ainsi qu’une
mauvaise répartition des bénéfices.
Le conflit est partout dans la vie de l’homme et il est naturel. S’il n’est pas
possible de l’éliminer, on peut néanmoins le prévenir ou atténuer ses effets.
C’est ce sujet que nous allons aborder maintenant.
C. La La prévention prévention des des conflits conflits
conflits
Prévenir les conflits est une nécessité pour éviter les diverses conséquences
qui en découlent, tant pour les peuples que pour les pays. La volonté et les
efforts conjugués des gouvernants, de la population, de la communauté et des
institutions internationales sont indispensables pour arriver à des résultats.
37

Il existe plusieurs moyens de prévenir les conflits, et les politiques de prévention
doivent être adaptées aux circonstances propres à un pays, une région ;
elles doivent porter sur plusieurs aspects en même temps. Comme énoncé
plus haut, en règle générale il appartient au gouvernement et à la population du
pays concerné de s’attaquer aux problèmes pouvant être à l’origine des conflits
pour éviter qu’ils ne se transforment effectivement en conflits.
Nous devons souligner à ce propos l’importance du rôle de la société civile et
des secteurs privé et public. Les entreprises, les groupes religieux, les syndicats,
les milieux juridiques, tous doivent s’impliquer dans la recherche de la
paix et contribuer à former les communautés locales à la prévention et à la
gestion pacifique des conflits.
D’aucuns ont pensé que pour prévenir les conflits avec efficacité, il fallait
avoir la possibilité d’intervenir avant que les contradictions qui naissent ne
dégénèrent en conflits violents. Pour ce faire, ils proposent la surveillance des
zones ou milieux de conflits potentiels, l’élaboration de système d’information
et d’alerte rapide dans l’éventualité de conflits et l’utilisation d’un langage
commun en matière de prévention de conflits.
D’autres encore proposent ce qui suit pour prévenir les conflits :
• Améliorer la sécurité et réduire l’insécurité humaine, ce qui a pour effet de
diminuer les risques de conflits car la population se sent protégée, ellemême
et ses biens. A cela doit s’ajouter la démobilisation et la réintégration
des ex-combattants, la lutte contre la prolifération des armes légères.
• Encourager la démocratie et la bonne gouvernance qui permettent de
répondre aux besoins sociaux des populations et favorisent le développement
équitable.
• Instaurer ou renforcer le dialogue inter-culturel, y compris dans sa dimension
religieuse. En effet, la culture en tant qu’instrument de communication
privilégié est un facteur essentiel pour assurer une meilleure cohésion
sociale, une meilleure cohabitation.
• Promouvoir le développement intégral et inclusif de l’homme et de la société
par la lutte contre la pauvreté, qui est à la fois cause et conséquence de
conflit.
• Revoir et corriger la politique d’aide internationale au développement : elle
doit être mieux gérée, mieux adaptée aux besoins réels des pays ou des
régions concernées et doit viser à atténuer les inégalités. Pour être efficiente,
cette aide doit être axée sur la bonne gouvernance, le respect des
droits de la personne et le renforcement des capacités institutionnelles. Il
faut que l’aide au développement se fasse auprès des civils les plus vulnérables
en faisant collaborer les communautés et en développant les capacités
locales.
38

• Responsabiliser et sensibiliser les bailleurs de fonds quant à la meilleure
manière de fournir de l’aide. Dans les pays émergents de conflits, il faut
que l’aide soit orientée vers le soutien à la transition, à la paix, au rétablissement
économique et social par le biais des investissements et l’assistance
macro-économique. A titre d’exemple, en République démocratique du
Congo, la Banque mondiale soutient un programme de réhabilitation, de
reconstitution et de reconstruction, de l’ordre de 454 millions de dollars
américains. Ces fonds sont destinés à l’amélioration de la production agricole
et de la sécurité alimentaire, la restauration des infrastructures-clés,
des voies de communication rurales et des services sociaux essentiels ainsi
qu’au soutien au gouvernement.
Partant de cet exemple, nous pouvons conclure en disant que si les conflits
armés et leurs conséquences coûtent cher, s’ils alourdissent le fardeau de la
reconstruction, alors la prévention des conflits et la consolidation de la paix
doivent être les objectifs primordiaux de toute population, de tout dirigeant, de
tout pays qui veut se développer.
Nous terminons ici notre intervention en remerciant l’assemblée pour son
attention.
39

Résumé
Suite à la présentation de Madame NYANGWILE, Madame Augustine MAVUELA,
Coordinatrice nationale du projet PNUD / Femmes, a parlé de l’« influence des
femmes dans la prévention des conflits à travers les activités créatrices d’emploi et
génératrices de revenus ». Dès le départ, l’intervenante a constaté que, suite aux
multiples événements et crises qui ont marqué la vie politique et économique de la
RDC, la femme congolaise a appris à se prendre en charge et a développé en un
temps record plusieurs activités génératrices d’emplois et de revenus. Malheureusement,
la femme est freinée dans cet élan par plusieurs contraintes auxquelles elle
doit faire face.
Après avoir examiné la situation des foyers en ces temps de crise en RDC, l’oratrice
en est arrivée au constat que lorsque la femme exerce une activité économique,
elle est en mesure d’apaiser les tensions au sein de sa famille et d’éduquer
ses enfants dans de bonnes conditions. L’oratrice est allée plus loin en affirmant
que quand la femme était prospère dans ses activités économiques, elle était à
même de prévenir les conflits.
Madame MAVUELA a terminé son exposé en rappelant l’appui que fournit le
PNUD aux femmes dans le domaine de la lutte contre la pauvreté.
INFLUENCE DES FEMMES DANS LA
PREVENTION DES CONFLITS A TRAVERS
LES ACTIVITES CREATRICES D’EMPLOI
ET GENERATRICES DE REVENUS
Madame Augustine MAVUELA
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse de prendre la parole au cours de ce séminaire que l’Organisation
internationale pour les migrations organise au travers du projet MIDA
Grands Lacs sur le « Renforcement du rôle des femmes dans la reconstruction
nationale et le développement économique en République démocratique du
Congo ».
Aussi, je remercie les organisateurs pour l’initiative qu’ils ont prise et pour
l’attention qu’ils ont accordée à notre personne en nous associant à ces assises.
40

« Influence des femmes dans la prévention des conflits à travers les activités
créatives d’emploi et génératrices de revenus », tel est le thème qui nous a été
proposé par les organisateurs de ce séminaire.
Ce thème vient à point nommé pour quatre raisons :
• Il prolonge la discussion sur les stratégies de lutte contre la pauvreté de la
femme, qui constitue un des aspects thématiques autour desquels se sont
déroulées les manifestations marquant la célébration de la Journée internationale
de la femme en RDC, le 8 mars dernier.
• Il s’inscrit de ce fait dans la logique de la vulgarisation d’un des objectifs
de développement du millénaire, à savoir la réduction de l’extrême pauvreté
et de la faim.
• Il valorise le rôle et l’importance de la femme dans la recherche et le maintien
de la paix.
• Enfin, il nous rappelle implicitement l’importance de la résolution 1325
prise par le Conseil de Sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix
et la sécurité.
Mais avant d’aborder le sujet de mon exposé, je voudrais rappeler brièvement
les préoccupations de la Communauté internationale.
Après le Programme d’action de Beijing en 1995 et la Déclaration politique et
Document final de Beijing + 5 de 2000, la Communauté internationale munie
de ces deux documents a réaffirmé son engagement envers un agenda commun
de développement placé sous le signe de l’égalité entre les sexes.
Aussi, après Beijing, le Gouvernement de la RDC a adopté le 28 septembre
1999, le Programme national pour la promotion de la femme congolaise
(PNPFC) qui est le cadre global de programmation, de suivi et d’évaluation
des activités en faveur des femmes.
Le PNPFC esquisse les stratégies et interventions prioritaires dans chacun des
douze domaines définis par la Conférence mondiale sur les femmes, tenue à
Beijing en 1995.
Le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) avait financé
la formulation du PNPFC et appuie la mise en œuvre de certains volets. Il
s’agit de renforcer :
• les capacités de mise en œuvre du PNPFC
• la disponibilité d’information sur la situation des femmes
• la participation effective des femmes dans la mise en œuvre des stratégies
locales de lutte contre la pauvreté.
41

Notre exposé s’articule autour de cinq axes principaux:
• Le premier porte sur l’émergence des activités économiques des femmes
créatrices d’emploi et génératrices de revenus.
• Le second axe décrit les contraintes auxquelles sont confrontées les
femmes dans la réalisation de leurs activités, et les conflits qui en
découlent.
• Le troisième porte sur la prévention des conflits familiaux avec les revenus
des femmes.
• Le quatrième est consacré à l’appui du PNUD pour la mise en œuvre des
stratégies locales des femmes en matière de lutte contre la pauvreté.
1. Emergence des activités féminines créatrices d’emploi
et génératrices de revenus
Avant toute chose, nous partageons les propos de notre consœur Odette Gema
de l’ASSOFE qui affirme qu’il y a quelques années, la femme congolaise
partageait son temps entre sa famille et son foyer. Les activités économiques
qu’elle exerçait constituaient un appoint au revenu de l’homme, considéré
comme premier pourvoyeur des ressources de la famille. Aujourd’hui, les
événements et les différentes crises qui ont marqué la vie politique et économique
de la RDC ont renversé la tendance. La femme congolaise a été obligée
de prendre ses responsabilités pour assurer la survie de sa famille et de la
communauté.
En un temps record, on a vu cette femme passer de l’activité de maraîchère à
celle de commerçante ou encore de promotrice des écoles. Actuellement, elle
amorce timidement mais sûrement la transformation de quelques produits
locaux.
Au plan du commerce international, on a vu cette femme congolaise sillonner
le monde. Elle a été aperçue au Togo, au Nigeria, en Afrique du Sud, en Arabie
saoudite, en Chine, en Malaisie, etc.
Dans le même ordre d’idées, notre amie Odette Bolie reconnaît qu’au fil de
ces années de crise, il y a un sursaut dans le milieu féminin : la femme qui
attendait le salaire mensuel du mari s’est réveillée de sa torpeur. Comme ce
salaire ne vient plus, elle a compris qu’elle aussi devrait mettre son imagination
et son savoir-faire à l’œuvre, sinon c’est la mort de toute la famille.
D’où toutes sortes d’initiatives pour la survie, notamment : le petit élevage, le
jardinage, la vente d’une panoplie de biens et produits, la salaison de poissons,
la petite confiserie ainsi que la création de quelques micro-entreprises.
Dans tous les domaines, on assiste donc à une émergence de beaucoup
d’activités féminines créatrices d’emploi et génératrices de revenus.
42

2. Contraintes
Dans notre pays, l’exercice de ces activités économiques n’est pas chose
aisée pour la femme. Elle doit continuellement faire face à plusieurs obstacles,
notamment :
• les mentalités et coutumes rétrogrades qui limitent et étouffent son esprit
d’initiative ;
• des connaissances en gestion insuffisantes du fait de son faible niveau
d’instruction ;
• l’absence d’une culture de l’entreprise et du goût du risque ;
• la lenteur des procédures et la connaissance limitée des documents administratifs
;
• le conflit entre plusieurs rôles qu’elle est obligée de jouer simultanément ;
• la confusion de son patrimoine avec celui de son mari et l’ingérence de ce
dernier dans la gestion de ses affaires ;
• le difficile accès aux crédits.
Ces contraintes constituent en elles-mêmes des conflits ou des sources de
conflits auxquelles les femmes sont régulièrement confrontées. Celles qui
réussissent dans leurs activités attestent par là qu’elles sont capables de les
prévenir sinon de les surmonter, en vue d’œuvrer pour la paix dans leurs
rapports avec leurs enfants, leurs maris, leurs familles et les agents de
l’administration publique.
3. Conflits familiaux et revenus des femmes
En ce temps de crise, imaginons l’état d’esprit d’une famille où l’homme est
au chômage et la femme n’entreprend aucune activité génératrice de revenus.
Nous nous apercevons d’emblée qu’un tel ménage est exposé à un climat
constant de tension, d’agressivité ou de conflit dont les principaux indicateurs
sont : les propos injurieux, les querelles, les bagarres, le refus, la méfiance…
bref, un champ de violences au niveau du couple, une confrontation entre les
parents et leurs enfants et entre les enfants eux-mêmes.
L’état de pauvreté qui accompagne ces formes de violences entraîne de graves
conséquences comme la prostitution de la mère et des enfants, le vagabondage
des enfants, l’abandon du toit conjugal, etc.
Bien des foyers sont pourtant épargnés par ces maux grâce au rôle de pourvoyeur
de biens que la femme exerce au moyen des revenus issus de ses
activités économiques. Elle arrive, en effet, à contenir tous les membres de la
sphère familiale. Elle apaise les tensions internes en répondant quotidiennement
à leurs besoins de survie.
43

C’est ici qu’il importe d’attirer l’attention des hommes sur la nécessité de
réexaminer l’état des rapports sociaux entretenus entre les époux. Les deux
partenaires doivent se mettre d’accord sur la nature, la gestion et le contrôle
de ces activités y compris sur l’utilisation des bénéfices qui en découlent.
Cette collaboration fondée sur l’égalité et l’équité constitue aussi un mécanisme
de prévention des conflits dans le foyer.
Les expériences vécues dans notre société révèlent que certains hommes
récupèrent, à leur propre profit, tous les petits revenus issus des activités
économiques entreprises par leurs épouses. D’autres arrivent à se débarrasser
de leurs responsabilités de chefs de ménage et deviennent indifférents aux
besoins de leur famille, laissant ainsi toute la charge à leur épouse, ce qui
constitue un facteur de régression et d’échec des initiatives des femmes.
Aujourd’hui mieux qu’hier, l’homme et la femme doivent se compléter dans
un esprit de partenariat pour l’instauration d’un climat de paix et de bonheur
conjugal.
C’est dans ce climat de paix que la femme, usant de son rôle d’éducatrice,
peut inculquer à ses enfants certaines valeurs vitales comme le respect des
autres, la résolution pacifique des problèmes, la non-violence, l’égalité, l’équité,
la tolérance, le sens de la justice… autant de qualités indispensables à la création
des vertus de non-violence et à la culture de la paix dans l’esprit des
enfants afin d’éviter des conflits.
IV. Femmes entrepreneurs et prévention des conflits
Plus la femme prospère dans ses activités économiques jusqu’à la maîtrise
des ressources et des moyens, plus son influence dans la prévention des conflits
augmente. En effet, la femme devenue entrepreneur et bâtisseur de richesses
peut adhérer à un parti politique. Elle peut payer ses cotisations et faire prévaloir
les principes de paix et de non-conflictualité au sein de son parti. Elle peut
également soutenir les partis ouverts à ces principes.
Forte de son pouvoir économique, elle peut s’associer à d’autres femmes et
hommes intéressés pour constituer des groupes d’opinions et d’actions susceptibles
de sensibiliser les masses et les dirigeants, les persuadant de
l’importance de la paix.
C’est ici l’occasion de rappeler le rôle ô combien noble et exaltant joué par les
femmes congolaises qui se sont organisées au sein du Caucus des femmes
pour négocier la paix au dialogue intercongolais.
44

V. Appui du PNUD aux stratégies locales de lutte contre la
pauvreté
En notre qualité de Coordonnatrice nationale du Projet d’appui au PNPFC,
nous ne pouvons manquer de profiter de cette occasion pour évoquer la position
du PNUD en matière d’appui aux femmes dans la lutte contre la pauvreté.
En effet, l’objectif global poursuivi à travers le projet consiste à accroître la
participation des femmes dans le développement en réduisant les disparités de
genre existantes dans la société congolaise. Pour atteindre cet objectif, un des
axes d’intervention retenu par le PNUD est l’amélioration de la participation
des femmes dans la mise en œuvre des stratégies locales de lutte contre la
pauvreté.
Le projet apportera un appui aux organisations à la base, afin de leur permettre
de lutter efficacement, au niveau local, contre les disparités de genre identifiées
en matière de ressources financières. Il facilitera leur accès à l’information
et initiera le processus de création d’une banque des femmes. Il est également
prévu de procéder à la vulgarisation des meilleures pratiques en matière de
lutte contre la pauvreté (meilleure insertion des activités informelles des femmes
dans le circuit économique normal, accès des femmes au système de crédit,
sessions de formation en gestion et en technologie, et bien d’autres activités).
Cet appui permettra de renforcer l’influence des femmes des micro-entreprises
dans la prévention des conflits au sein de leurs familles et de leurs groupements.
En conclusion, on peut déduire que les activités économiques réalisées par les
femmes sont porteuses de paix dans les familles et dans les organisations de la
société civile, jusqu’au niveau national.
Face à la crise qui sévit encore en RDC et au regard des besoins de mobilisation
des ressources humaines pour la reconstruction du pays, les femmes
congolaises doivent encore fournir des efforts pour développer davantage
leurs activités créatrices d’emploi et génératrices de revenus.
A cet effet, l’Etat, les organisations de la société civile et les femmes ellesmêmes
doivent conjuguer des efforts pour vaincre les obstacles qui jalonnent
le développement de leurs activités. Dans cette démarche, il est impérieux que
le Gouvernement et la communauté internationale respectent leurs engagements
pris lors des rencontres mondiales relatives à la promotion de la femme.
Je vous remercie.
* * * *
45

Ces trois présentations ont été suivies de trois quarts d’heure de débats. De
toutes les questions posées par les participantes se sont dégagées les préoccupations
suivantes :
• Les stratégies à adopter par les femmes pour faire accepter leur message
par les hommes (se faire accepter en tant qu’agents et abolir ainsi les
préjugés stéréotypés de leurs compétences, obtenir l’intégration de l’aspect
genre dans les secteurs dominés par l’homme).
• La nécessité pour les femmes ayant une expérience dans la vie politique ou
d’autres secteurs d’encadrer les autres femmes qui aspirent à émerger.
• La situation de « laissée pour compte » de la femme de l’arrière-pays qui
reste dans l’ignorance ou la sous-information.
• Le schéma à préconiser pour promouvoir le bien-être de l’homme et
résoudre les conflits fonciers qui semblent avoir un impact important dans
la crise congolaise.
Face à ces préoccupations, les intervenantes ont apporté leur contribution et
ont proposé les réponses suivantes :
• Pour vaincre la résistance des hommes au message de la femme, il convient
d’adopter trois stratégies, à savoir : veiller à l’éducation des enfants dès le
bas-âge, persévérer dans un comportement irréprochable en ce qui concerne
les compétences et l’intégrité morale, et enfin se regrouper pour moraliser
la vie politique.
• Il faudrait en outre, pour intégrer l’aspect genre, préparer déjà la jeune fille
à être plus ambitieuse et à choisir les activités jusque-là exercées par les
hommes. Il faudrait également que la femme s’affirme seulement par ses
compétences.
Le combat de la femme pour l’abolition des mesures discriminatoires trouvera
une solution dans l’adoption des projets proposés par le Ministre des Affaires
sociales avec l’aide des ONG et l’appui de la Coopération canadienne.
• Les femmes ayant de l’expérience devraient encadrer celles qui en ont
besoin pour les aider à émerger, comme cela se fait chez les hommes.
• La femme de l’arrière-pays, il est vrai, accuse un déficit d’information par
rapport à la femme de la ville. Elle mérite qu’on s’occupe d’elle.
• Le développement de l’homme relève d’un processus, qui doit se faire
dans un pays pacifié. Il importe donc avant tout d’imposer la paix afin de
pouvoir trouver une solution aux différents problèmes.
46

Thème Thème 2: 2: 2: 2: 2:
Le Le Le rôle rôle de de la la femme femme dans dans la la reconstruction
reconstruction
nationale nationale et et la la prévention prévention des des conflits conflits à à travers
travers
les les activités activités créatrices créatrices d’emploi d’emploi et et génératrices
génératrices
de de revenus
revenus
Résumé
La deuxième séance de travaux s’est ouverte le 28 juin 2003 sous la modération de
Madame PIKININI, Secrétaire générale de la Culture.
La première oratrice, Madame Catherine NZUZI WA MBOMBO, a fait une présentation
intitulée : « Vers une participation accrue des femmes aux mécanismes de
règlements des conflits en Afrique : cas de la RDC. »
Elle a d’abord fait le constat de la faible représentativité des femmes dans les
instances de décision et a relevé le maintien des pratiques discriminatoires à son
égard, avant de proposer des pistes. Elle a articulé son propos autour de quatre
axes :
Elle pense que la participation de la femme au développement de la RDC est
indispensable. En effet, la femme qui constitue la majorité sur le plan démographique
(52 % de la population) devrait participer activement au développement de la
RDC d’autant plus que beaucoup de femmes bénéficient de compétences solides
au point d’égaler ou parfois même de surpasser les hommes.
L’oratrice a illustré son propos par une citation de l’évêque de Bukabu (feu Mgr
MUZIHIRWA) : « la société humaine est un oiseau pourvu de deux ailes : l’une
masculine, l’autre féminine. Elle ne peut prendre son envol que lorsque les deux
ailes sont pareillement développées. »
L’oratrice a également maintenu que la femme devait participer au développement
et aux mécanismes de prévention des conflits et qu’elle pouvait y participer
grâce aux garanties d’égalité assurée par les textes constitutionnels et grâce aux
nombreux atouts qu’elle possède : le courage, le goût du travail, l’esprit de
conciliation, etc.
Madame NZUZI WA MBOMBO a souligné que la femme a un grand rôle à jouer
dans le règlement des conflits car il existe selon elle une interaction entre le
développement et la prévention des conflits. Or, la plupart des conflits surviennent
suite aux ambitions démesurées des hommes. Face à cela, il convient de
proposer le modèle féminin qui est fait de propension à l’écoute, de sens aigu de
l’intérêt général, de dialogue, et de la recherche de consensus.
47

Toutes ces considérations ont amené l’oratrice à conclure que la femme devait
accroître sa participation à condition qu’elle prenne conscience de ses atouts,
qu’elle soit solidaire et qu’elle arrête de combattre ses compatriotes, afin de
monter des stratégies communes et de s’inspirer de l’expérience d’autres pays.
VERS UNE PARTICIPATION ACCRUE
DES FEMMES AUX MECANISMES
DE REGLEMENT DES CONFLITS
EN AFRIQUE
Madame Catherine NZUZI WA MBOMBO
Mesdames, Messieurs,
C’est pour moi un honneur et un réel plaisir d’être associée aux réflexions de
ce séminaire portant sur le thème général : « renforcement du rôle des femmes
dans la reconstruction nationale et le développement économique en RDC. »
Je remercie les organisateurs pour la confiance qu’ils m’ont témoignée en
m’invitant à ces assises pour y développer le sous-thème intitulé : « Vers une
participation accrue des femmes aux mécanismes de règlement de conflits en
RDC. »
Ces réflexions tombent à propos, pour deux raisons : premièrement, elles
s’inscrivent dans la recherche des stratégies d’instauration d’une paix durable
en RDC, après tant d’années de guerre aux conséquences désastreuses sur le
pays et sur sa population. Deuxièmement, elles coïncident avec le début de
l’application de l’accord global et inclusif et de la Constitution de transition.
Or, ces deux textes, à l’instar de plusieurs instruments juridiques internationaux
dont la Résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU prônent la
participation appropriée des femmes dans toutes les instances de décision au
prorata d’au moins 30 %, particulièrement pour les pays qui sortent de la
guerre.
Tous ces textes témoignent de la volonté d’accroître la participation des femmes
au processus de développement et de reconstruction nationale ainsi qu’à la
gestion et à la prévention des conflits.
Cependant, le problème majeur réside dans leur mise en œuvre. En effet,
celle-ci se heurte à des obstacles socio-psychologiques tant au niveau des
48

hommes que des femmes, et tant sur le plan national qu’international. Par
conséquent, la représentativité des femmes dans les instances de décision
diminue et les pratiques discriminatoires subsistent.
A notre humble avis, ces deux éléments constituent les premiers indicateurs
dans la recherche des stratégies pour atteindre les objectifs poursuivis par ces
textes juridiques nationaux et internationaux contenant des règles favorables à
la femme.
Compte tenu du temps limité qui nous a été imparti pour développer notre
exposé, nous allons articuler celui-ci autour de quatre points :
Raisons qui militent en faveur de la participation
de la femme au développement
Les raisons sont si nombreuses qu’on ne peut les énumérer de manière exhaustive.
La première raison évidente de la participation de la femme, c’est la
prépondérance démographique de cette dernière : les femmes constituent
52 % de la population et constituent, de ce fait, une force productive et productrice
sans pareille. Ce sont elles qui donnent la vie, l’entretiennent et la
sauvegardent.
Toutes les sociétés du monde ont compris l’importance du rôle économique
de la femme ainsi que la nécessité de s’assurer de sa participation pour la
survie de la communauté ou pour sa construction, d’où la division du travail
en fonction des sexes.
Dans les sociétés traditionnelles africaines d’autosubsistance où l’on vivait
principalement de l’agriculture, le destin de la terre était lié à celui de la femme.
De nos jours, l’évolution de la société n’a certes pas changé les données sur
l’importance du rôle socio-économique de la femme ni sur la nécessité de sa
participation à la construction nationale. Toutefois, elle a révélé qu’en vertu
des préjugés sociaux prônant la supériorité de l’homme et l’infériorité de la
femme, il a été réservé à cette dernière une place inférieure dans la société.
Dans cette logique, un déséquilibre a été instauré dans la distribution des rôles
et des bénéfices du travail, et ce au détriment de la femme.
En effet, ses journées de travail sont non seulement longues mais également
pénibles, au regard des outils de travail rudimentaires dont elle dispose, de
la dureté et de la complexité de ses corvées domestiques, de son manque
d’instruction (la majorité des femmes sont analphabètes) et de l’insuffisance
de ses qualifications, etc.
De plus, son travail, si indispensable à la communauté, est malheureusement
mal apprécié et mal rémunéré, faisant de la femme l’éternelle dépendante ou
encore l’enfant le plus pauvre de la planète. Cela constitue une injustice grave
49

à réparer et un handicap sérieux à son éventuelle participation à la vie politique.
Cette participation implique, outre les critères de compétence, d’expérience et
de moralité, ceux de l’aisance matérielle et financière de la part de ceux qui
cherchent à accéder au pouvoir.
Il faut constater que l’évolution de la société a permis d’accroître le rôle
socio-économique des femmes, qui ont acquis de nouvelles connaissances et
compétences.
Nous observons les femmes compléter les hommes avec brio et parfois les
supplanter ; nombreuses sont les familles monoparentales dirigées par les
femmes.
Néanmoins, comme la plus belle fille du village ne donne que ce qu’elle a, il
convient de lui assurer l’éducation et la formation nécessaires, d’améliorer
ses conditions de vie et de travail pour la rendre plus compétitive et plus apte
à participer au développement. Et pour ce faire, la participation effective et
efficace de la majeure partie de la population, dont 52 % sont des femmes, est
indispensable.
C’est donc à juste titre que nous partageons le proverbe oriental rappelé par
Mzee Munzihirwa, prêtre jésuite devenu évêque du diocèse de Bukavu, et
lâchement abattu lors de la guerre de l’AFDL de 1996 à 1997, je cite : « La
société humaine est un oiseau pourvu de deux ailes : l’une masculine, l’autre
féminine. Elle ne peut prendre son envol que lorsque les deux ailes sont
pareillement développées. » (p.349)
Ceci nous amène à examiner le deuxième point de notre exposé.
Raisons qui militent en faveur de la participation de la
femme à la vie politique et aux mécanismes de prévention
Comme nous l’avons démontré précédemment en parlant du sujet de la participation
des femmes dans le développement et la reconstruction nationale,
plusieurs raisons militent en faveur de la participation des femmes à la vie
politique.
Certaines sont d’ordre constitutionnel et légal, par exemple les principes de
l’égalité de tous les citoyens et de leur égale protection par les lois sans aucune
discrimination, ni même celle fondée sur le sexe ; d’autres sont d’ordre pratique.
En effet, outre leurs atouts quantitatifs déjà évoqués (52 % de la population) et
leurs performances dans l’économie de substitution dite informelle, les femmes
possèdent de nombreux atouts qualitatifs : elles sont courageuses et travailleuses.
Il est clair que les résultats de leur travail se trouveraient renforcés, si elles
participaient activement à la vie politique où se font les choix qui ont un impact
sur leur destin et sur celui du pays tout entier.
50

Cependant, les conditionnements sociaux qui ont permis à beaucoup d’hommes
d’intérioriser leur supériorité et à beaucoup de femmes d’intérioriser leur
infériorité ont pour résultat que le monde politique se conjugue presque exclusivement
au masculin.
D’un côté, les hommes trouvent les femmes encombrantes, tandis que les
femmes, de leur côté, éprouvent la peur d’affronter ce monde inconnu, qui
leur réserve un accueil hostile.
Elles préfèrent se cantonner dans les sphères des secteurs qu’elles connaissent
mieux comme ceux du socioculturel et de l’économie informelle. Elles
excellent dans leur implication dans les organisations de la société civile pour
se rendre utile à la nation.
Si l’on admet que l’objectif fondamental d’un Etat est celui d’assurer le bienêtre
de sa population, sa sécurité, sa libre circulation et celle de ses biens, il est
donc tout indiqué de favoriser une large participation des femmes à la vie
politique, afin de faire bénéficier également au pays des atouts du modèle
féminin.
Celui-ci est forgé par leur tempérament de mère grâce auquel elles gèrent de
main de maître les querelles quotidiennes de leurs enfants, font face au
mauvais caractère des uns et des autres mais assurent aussi la survie de la
communauté dans tous les aspects essentiels de la vie. En effet, enfantant
dans la douleur, comme exprimé dans les Saintes Ecritures, les femmes
connaissent et apprécient la vie humaine à sa juste valeur. Elles sont modérées
dans tout ce qu’elles entreprennent et évitent tout ce qui peut porter
atteinte à la vie.
Par ailleurs, ceux qui sont conscients du mérite des femmes et de leur apport
à la société affirment sans risque d’être contredits qu’« un pays ne peut
résoudre aucun de ses problèmes sans la collaboration des femmes : qu’il
s’agisse de l’éducation, de la santé publique, de la formation du caractère
national ou de la structure de la société dans un Etat libre et indépendant. »
(Mzee Munzihirwa, op.cit. p.349)
Nécessité d’accroître le rôle de la femme dans les
mécanismes de règlement de conflits
L’expérience montre qu’il existe des interactions entre d’une part, le processus
de développement et de reconstruction nationale et d’autre part, entre ces
processus et ceux de la prévention et de la gestion de conflits.
Il suffit de chercher et de comprendre les raisons de l’embrasement du monde.
Le nombre croissant de foyers de tension et de violence sont une conséquence
des ambitions démesurées des hommes ou des conflits d’intérêts
personnels. En voulant les réaliser au mépris de ceux des autres, les hommes
51

se dressent les uns contre les autres, y associent leurs Etats et conduisent les
différents pays à la guerre.
Or, sans établir une règle absolue, les observateurs avisés constatent que
face au modèle masculin s’élève celui des femmes. Celles-ci expriment
raisonnablement leurs ambitions. Elles ont une propension à l’écoute et un
sens aigu de l’intérêt général.
Connaissant et appréciant à sa juste valeur la vie qu’elles donnent, entretiennent
et cherchent à sauvegarder, les femmes s’abstiennent d’entreprendre des
activités qui risquent d’ôter la vie.
Par ailleurs, étant les premières victimes de la guerre et des violences (viol,
contamination, perte des êtres chers, destruction du pays, de l’outil de travail
et des infrastructures vitales, etc.), les femmes, aidées par leur intuition, sentent
et voient venir les signes précurseurs de troubles. Elles font rapidement retentir
la sonnette d’alarme, dénoncent énergiquement et avec émotion les faits
avant et après leur survenance.
Cela explique notre combat contre l’arbitraire instauré par le régime depuis
mai 1997 jusqu’à ce jour, ainsi que nos différentes prises de position sous
l’ancien régime, par rapport au refoulement des peuples du Kasaï au Katanga,
par exemple. Nous sommes de celles et ceux qui croient que l’avenir d’un
pays se construit au présent, en s’inspirant du passé, et qu’il ne peut être
harmonieux que si l’on provoque l’avènement d’un Etat de droit, respectueux
des valeurs démocratiques et des libertés individuelles et publiques sans aucune
discrimination.
Aussi, la femme, éducatrice par excellence, paraît mieux apte à garder et à
perpétuer la mémoire historique collective pour les générations futures.
Nous sommes heureuses de constater qu’aujourd’hui la Communauté internationale
et l’opinion nationale reconnaissent que la contribution de
la femme est requise dans toutes les instances de décision et à tous les
niveaux de responsabilité de l’Etat pour une société de justice, de paix et
d’harmonie.
Mme Micheline Calmy-Rey, Ministre suisse des Affaires étrangères, a su trouver
les mots justes pour l’affirmer, je cite :
Les femmes apportent dans le monde professionnel et politique des comportements
différents liés à leur rôle de mères : le dialogue plutôt que
l’affrontement, l’écoute, la recherche du consensus (…)
Les femmes sont moins imbriquées dans le pouvoir économique, plus indépendantes
et plus prêtes à vouloir échanger les choses dans la mesure où
leur regard n’est pas voilé par des liens d’intérêts.
Les femmes et les hommes ont un autre regard sur le monde, de par leur rôle
et leur socialisation différents au cours des siècles. Et sans établir une règle
52

absolue, j’observe que les femmes ont une propension à l’écoute et un
sens élevé de l’intérêt général.
Réceptives, souples, elles sont ouvertes à l’innovation. Elles concilient
vision et pragmatisme. Elles ont le sens du travail en équipe et apprécient
de collaborer autour d’un projet, œuvrant de manière transversale, plutôt
que sectorisée et cloisonnée, pour trouver des solutions.
La reconnaissance du modèle féminin est un défi important. Parce que ce
modèle est efficace et porteur de changements.
Il est cependant triste de constater la carence de moyens susceptibles de faire
appliquer les textes juridiques internationaux, car le manque de sanctions
véritables à l’endroit des signataires qui violent ces règles font défaut. Il est
tout aussi triste de constater que bon nombre de femmes n’ont pas encore
intériorisé le fait que le changement réel de leur situation, sur tous les plans,
passe non seulement par la prise de conscience individuelle et collective de
leur existence, de leurs atouts et de leur mission dans le développement, mais
aussi par leur solidarité, condition sine qua non de leur intégration effective
dans les domaines politique, économique, social et culturel et également dans
les mécanismes de prévention et de règlement de conflits.
Le nombre de femmes qui ont réussi à s’imposer dans le monde sur les plans
politique et économique est malheureusement faible. Celles qui y sont parvenues,
en dépit des différents obstacles, sont certes celles qui ont pris
conscience de leur existence en tant que citoyennes à part entière, qui ont eu
confiance en elles-mêmes et qui ont osé. Leurs actions leur ont valu une petite
place dans le Dialogue intercongolais alors qu’elles avaient d’abord été oubliées
comme composante ou entité dans l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka, et
ensuite, sur les premières listes du Dialogue intercongolais.
Cependant, ces actions de participation méritent d’être soutenues sans relâche.
Elles requièrent assiduité, persévérance, solidarité et surtout des stratégies, en
vue d’atteindre les objectifs poursuivis tant dans le secteur public que privé.
En effet, la difficulté de faire appliquer les principes définis dans les textes
juridiques internationaux et nationaux, en général, et dans l’Accord global et
inclusif, en particulier, ainsi que l’absence de solidarité et de stratégies des
femmes ont pour conséquence l’absence des femmes constatée jusqu’ici dans
l’espace présidentiel et à la tête de toutes les institutions de la transition. Leur
représentativité demeure dérisoire dans les institutions où elles sont admises.
Elle ne satisfait pas aux exigences du minimum de 30 %, préconisées par la
Résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU, ni aux conditions de représentation
appropriée, énoncées par l’Accord global et inclusif et par la
Constitution de transition.
Lorsque vous examinez cela en profondeur, vous constatez qu’outre le défaut
de solidarité, la jalousie érige la femme en ennemi d’elle-même. Elle refuse de
soutenir une autre ou la combat ouvertement. Elle lui préfère, sans juste motif,
53

la candidature d’un homme. Par ce comportement, elle lutte inconsciemment
contre les textes juridiques nationaux et internationaux qui lui reconnaissent
des droits politiques, économiques, sociaux et culturels.
Elle veut donc une chose et son contraire. Sa représentativité demeure faible
dans les mécanismes de règlement de conflits. Pour obtenir l’accroissement
du rôle des femmes dans n’importe quel processus, il convient de
conscientiser les femmes sur leurs droits et sur la nécessité d’exprimer clairement
leurs ambitions et sur la nécessité de s’unir pour arracher ce à quoi
elles ont droit. C’est dans ce sens que devraient converger toutes les stratégies
possibles.
L’expérience des pays développés qui imposent le principe de la parité, de
« genre » ou de quota réservé aux femmes à tous les niveaux de responsabilité
(par exemple, le minimum de 30 % de femmes inscrites sur les listes électorales)
mérite d’être suivie et encouragée.
Nous souhaitons également que les instances internationales puissent s’efforcer
d’appliquer des sanctions aux pays membres qui n’exécutent pas les
résolutions favorables à la femme dont ils sont pourtant signataires. L’exécution
des sanctions est une condition pour l’application du principe « genre »
par les Etats, ce qui pourrait favoriser la participation effective des femmes à
tous les processus et mécanismes.
Cette politique de conditionnalité a fait tant soit peu ses preuves en ce qui
concerne le processus de démocratisation depuis la Conférence de la Baule.
Conclusion
En conclusion, nous demandons à toutes les participantes de tirer les leçons
de la situation qui prévaut en matière de mise en œuvre des textes juridiques à
chaque étape de notre histoire. Soit on les applique mal, soit pas du tout. De
plus, les femmes renforcent inconsciemment cette difficulté d’application, en
rejetant les autres pour des raisons subjectives ou sentimentales.
Certes, l’heure n’est donc pas aux lamentations ni aux incantations. Elle est
plutôt à l’action et à la participation aux institutions de transition aujourd’hui,
et à la préparation de celles de la 3ème République à la fin de cette transition.
Car si les femmes n’y sont pas suffisamment représentées, il ne faut pas se
leurrer sur la concrétisation de notre processus de paix, ni sur l’accroissement
du rôle des femmes dans les mécanismes de règlement de conflits, et encore
moins dans la vie politique. Actuellement, tous les mécanismes, tant publics
que privés, reproduisent le même modèle : celui de la sous-représentativité
des femmes.
Nous ne devons pas attendre de cadeaux de la part des hommes ou des pouvoirs
publics mais plutôt revendiquer nos droits, notamment ceux de participer
54

au processus de développement et de la reconstruction nationale, au même
titre que les hommes.
Il nous incombe de nous impliquer stratégiquement et d’avoir toujours à l’esprit
l’adage selon lequel « l’union fait la force » et le proverbe oriental qui enseigne
que « quiconque méconnaît son passé est condamné à le revivre sans cesse ».
Cela vaut autant pour les hommes que pour les femmes.
L’exhortation du Secrétaire général de l’ONU est encore plus éloquente ; dans
son allocution devant les chefs d’Etats et de Gouvernement réunis au Sommet
Afrique-France, tenu à Paris le 20 février 2003, il dit ceci :
Par-dessus tout, je vous exhorte à placer les femmes au centre du combat de
l’Afrique contre le sida. Sur ces trois fronts [agriculture, gouvernance et
SIDA], le rôle des femmes est absolument vital. Il n’y aura de Révolution
verte en Afrique que si c’est aussi une révolution pour les femmes. Il n’y
aura d’amélioration de la gouvernance que si les femmes se voient attribuer
une part effective du pouvoir. Et puisque le sida, en Afrique comme dans le
reste du monde, adopte un visage de plus en plus féminin, nous ne pourrons
contrôler cette pandémie que si nous plaçons les femmes au cœur
même de nos stratégies. En bref, si vous voulez sauver l’Afrique, vous
devez d’abord sauver les Africaines.
Il convient, cependant, de souligner que si le salut de la femme requiert la
collaboration des hommes, il ne peut s’opérer effectivement qu’au moyen
d’actions conscientes et volontaires des femmes elles-mêmes. Ne dit-on pas
« aide-toi et le ciel t’aidera » ?
Pour notre part, nous vous invitons à méditer sur tout ce qui précède.
Je vous remercie.
55

Résumé
Madame Suzanne MONKASSA, co-fondatrice du Conseil des communautés africaines
en Europe/Belgique a poursuivi la présentation de Madame Nzuji wa
MBOMBO en évoquant les perspectives de la diaspora.
L’intervenante a remarqué que la participation des femmes aux instances de décision
demeure faible en Afrique sub-saharienne (11,5 % dans les parlements),
alors qu’elle devrait y participer activement.
Elle a ensuite survolé les différents domaines de participation de la femme au
règlement des conflits :
• Au niveau familial, c’est la femme qui joue le rôle primordial dans le
climat de paix et d’harmonie dans la famille, et cela en veillant à l’éducation
des enfants.
• Au niveau des quartiers, c’est encore elle qui par sa médiation informelle,
règle les conflits.
• Au niveau communal, la femme devrait accroître sa participation au sein
des communes, en se présentant aux élections. L’oratrice a donné l’exemple
des élections municipales du Bénin en 2002.
• Au niveau national, la femme a toutes les raisons de s’impliquer car la
paix est la condition au développement et c’est la femme qui est la plus
touchée par les conflits.
• Au niveau sous-régional, il faudrait que les femmes créent des réseaux
pour mener des actions de lobbying.
• Au niveau international, l’intervenante suggère que la femme fasse sienne
la Résolution 1325 sur « les femmes, la paix et la sécurité » (Conseil de
sécurité 2000).
En conclusion, Madame MONKASSA a estimé que les femmes devaient s’approprier
les textes des instruments internationaux et qu’il est impérieux que les gouvernements
les aident à renforcer leurs capacités.
56

VERS UNE PARTICIPATION ACCRUE
DES FEMMES AUX MECANISMES DE
REGLEMENT DES CONFLITS EN AFRIQUE
Madame Suzanne MONKASA
Je tiens tout d’abord à remercier l’OIM de nous avoir offert cette occasion
d’échanges et de questionnements par rapport à notre rôle en tant que femmes
dans le règlement des conflits. Qu’il me soit permis de remercier tout particulièrement
Madame Ndioro Ndiaye qui, par son engagement et son combat en
faveur de la cause des femmes africaines, apporte une contribution précieuse
et efficace à cette initiative.
La tâche est assurément ambitieuse, et peut-être est-il périlleux, voire
impossible, d’aborder un tel sujet en 20 minutes. Je traiterai un sujet extrêmement
sensible et il convient sans doute de prendre quelques précautions
oratoires.
Tout d’abord, je suis consciente de n’avoir pas pu disposer de tous les éléments
nécessaires pour traiter ce sujet à fond (serait-ce d’ailleurs possible ?).
Je sais néanmoins que je dispose de suffisamment d’éléments pour en parler,
pour dénoncer ce qui doit l’être et pour mettre en lumière ce qui demande à
être souligné, précisé et/ou rectifié. Par ailleurs, je suis également consciente
qu’il s’agit d’un thème complexe, qui soulève des questions à la fois philosophiques,
morales, économiques, politiques et juridiques. Enfin, il est évident
que le fait de parler de la participation des femmes aux mécanismes de règlements
des conflits ne peut se faire que dans le cadre de la recherche des
conditions d’un développement structurel de l’Afrique, ce qui revient à traiter
de la question des interactions complexes entre l’économique, le politique et
les droits fondamentaux.
Mon propos s’articule autour de quatre axes : les femmes agissent au niveau
familial, national, sous-régional et international.
Préliminaire
« En réalité, la lutte des femmes est avant tout politique. A cet effet, elles
doivent donc évaluer utilement leur capacité à conquérir les pouvoirs tout en
consolidant leurs statuts et leurs fonctions, particulièrement dans les familles
et plus généralement dans la société. Ces propos constituent une extrapolation
57

des propos tenus par Gonesse, en rapportant les réflexions faites par des femmes
centrafricaines lors de la Journée internationale des femmes en l’an 2000. » 1
Avant même de traiter la question de cette participation au pouvoir politique, il
est opportun d’esquisser une vue d’ensemble de cette participation des femmes
au niveau des instances de décision.
En Afrique sub-saharienne, la représentation féminine moyenne dans les
parlements est de 11,5 %, et il faut encore préciser que beaucoup de ces
femmes sont nommées, donc ne sont pas élues. Jusqu’en mars 2000, trois
pays seulement – les Seychelles, le Mozambique et l’Afrique du Sud – avaient
une représentation de femmes parlementaires ou ministres élues supérieure à
25 % (site Web IUP). Ce chiffre s’approche du seuil minimum de représentation
de 30 % de femmes dans la prise de décisions, recommandé dans la
Plate-forme d’action de Pékin de 1995.
Bien que les stratégies et les programmes d’action destinés à encourager et
augmenter la participation des femmes dans les organes de décision varient
selon les pays, force est de constater que, d’une manière générale, les femmes
africaines sont traitées en parents pauvres dans ce domaine. Approfondissons
quelque peu ces considérations en passant en revue les différents niveaux
mentionnés plus haut.
1. L’action des femmes au niveau familial
De nos jours, on entend clamer un peu partout la nécessité d’une participation
de plus en plus forte et efficace des femmes dans le processus de règlement
de conflits. Vu l’écart considérable entre les discours en faveur de la paix et
les réalités quotidiennes où le processus de paix n’avance qu’au « rythme de
la tortue », on ne peut que donner raison à ceux qui défendent ce point de vue
et s’efforcent de le concrétiser.
Cependant, nous constatons également que les femmes n’ont pas attendu ces
voix qui s’élèvent un peu partout dans le monde pour s’impliquer dans le
processus de règlement des conflits et dans celui de l’éducation à la culture
de la paix.
Le travail d’évitement de conflits se réalise en amont de manière permanente,
dans le contexte de l éducation des enfants au sein de la famille. La famille –
est-il besoin de le répéter ? – est l’espace micro-social par excellence où, dès
son enfance, l’enfant organise et structure son identité. Elle constitue un espace
social dynamique, en transformation permanente. Le plus souvent, c’est la
femme qui apprend à l’enfant les notions de devoir, de respect d’autrui, d’évite-
1 Site Web www.femnet.or.ke/documents/
58

ment des « bagarres ». L’intervention des parents, et notamment celle de la
maman, joue un rôle fondamental dans l’orientation du comportement et des
attitudes de l’enfant par rapport aux autres.
Par la suite, dans le milieu scolaire, la confrontation avec un nouveau cadre et
avec des enfants issus d’autres familles et parfois d’autres milieux socioculturels
et socio-économiques, est susceptible de provoquer des sentiments allant de
l’acceptation au rejet ou à l’indifférence. Dans ce cas également, le rôle des
parents en général et de la maman en particulier, notamment dans des familles
monoparentales, est essentiel.
1.2. La participation des femmes au règlement des conflits au
niveau de la collectivité locale
1.2.1. Au niveau de la vie quotidienne dans les quartiers :
médiation informelle
La réalité de la vie quotidienne montre que la compréhension mutuelle entre
personnes appartenant à des groupes ou sous-groupes différents ne va pas
sans difficultés. Il faut insister sur ce fait. En effet, compte tenu des disparités,
plus ou moins prononcées, de nature socio-économique, socioculturelle,
et même ethnique et /ou idéologique, il n’est pas surprenant de voir naître des
conflits au niveau des quartiers.
Quelquefois, de tels conflits peuvent prendre des proportions insoupçonnées,
étant donné la nature de la vie dans un quartier où peuvent se mêler de manière
inextricable rumeurs et réalités, valeurs et intérêts, convictions personnelles
et pressions sociales, convoitise et jalousie, etc.
Comment, dans ces conditions, construire une relation non conflictuelle ?
Comment œuvrer à la promotion d’une culture de la paix et de la non-violence
verbale ?
Bien souvent, des femmes prennent des initiatives de règlement de conflits en
ayant recours à la méthode la plus courante et la plus efficace de la médiation
informelle. Celle-ci consiste à écouter et à s’entretenir avec les parties
concernées afin d’instaurer ou de rétablir la communication, de la solidifier ou
d’en améliorer la qualité. Il arrive également que les médiatrices soient amenées
à demander à la partie qui a tort de présenter des excuses en présence du
groupe, afin de réhabiliter l’image de la partie lésée, au cas où celle-ci aurait
précédemment été ternie par des accusations infondées.
Dans ce cas précis, la recomposition du groupe dépend de la prise en charge
par un ou plusieurs membres du groupe. Il s’agit donc, pour le moins, de
réduire les effets fâcheux et perturbateurs de la communication et de la cohabitation
et, au mieux, de faire profiter les uns et les autres des avantages de
cette cohabitation plus ou moins harmonieuse.
59

1.2.2. Au niveau municipal ou communal : instance politique
Que disent à ce sujet les instruments existants ? Sur ce point précis, je me
permets de rappeler la recommandation formulée dans les stratégies d’action
de Nairobi pour la promotion de la femme en 1985. Plus précisément, il s’agit
de la recommandation telle que formulée dans la section III, § 86, qui stipule
ce qui suit :
Equality in political participation and decision-making /86. At the local
level, strategies to ensure equality of women in political participation should
be pragmatic, should bear a close relationship to issues of concern to women
in the locality and should take into account the suitability of the proposed
measures to local needs and values.
Ce texte nous interpelle tous, et les questions les plus pertinentes sont celles
relatives aux types de mécanismes mis en place en vue de la concrétisation de
ces mesures et celles qui concernent le point de vue des femmes africaines
elles-mêmes, aujourd’hui.
Attardons-nous sur l’exemple du Bénin, qui présente un grand intérêt, de par
la méthodologie utilisée en vue d’accroître la participation des femmes. L’évolution
de la situation au Bénin telle que décrite dans un article signé Reine
Azifa2 illustre parfaitement toute la complexité de la réponse à cette interrogation.
En effet, en décembre 2002, le Bénin a organisé les premières élections
municipales et communales de son histoire. Sur 5 705 candidats, 482 femmes
se sont positionnées sur les listes pour 1 119 sièges de conseillers. Ces élections
sont intervenues dans le cadre de la décentralisation de l’administration.
Quelles sont les méthodologies utilisées ?
Pour atteindre ce taux de participation féminine, des organisations non-gouvernementales
(ONG) se sont mobilisées pour susciter la candidature des
femmes. A cet effet, des séances de sensibilisation de proximité, des sketches
et spots à la radio et à la télévision, des actions de plaidoyer en direction des
chefs de partis, ont été les principales stratégies utilisées pour inciter les femmes
à se présenter en nombre important à ce scrutin, et notamment à mieux se
positionner sur les listes. Outre ces actions, des femmes candidates ont été
initiées à la préparation et à la gestion de la cité. Elles ont également été informées
sur les enjeux de la décentralisation, sur le rôle de la femme, ainsi que
sur les différentes lois relatives à ce processus. Selon la présidente de
RIFONGA-Bénin, Pascaline Ahouilihoua, le combat que mène ce réseau
s’inscrit dans le cadre de l’une de ses missions : « œuvrer dans la solidarité à
l’élévation du taux de représentativité des femmes béninoises dans les sphères
de prise de décisions par l’éducation civique, le plaidoyer et le lobbying. »
Tout ce travail n’a cependant pas donné des résultats à la mesure des efforts
déployés.
2 Site Web : www.ipsnews.net/fr/interna.asp-
60

Parmi les obstacles rencontrés, il convient de souligner en premier lieu les
obstacles sociaux. Parmi les obstacles de type social, on cite notamment le
manque de volonté, voire le refus des partis politiques lorsqu’il s’agit de bien
positionner les femmes, la peur des échecs, la peur d’être envoûtées, la peur
d’être renvoyées au foyer ou d’être mal vues par l’entourage, le manque de
motivation des femmes à « voter femmes ».
Aux obstacles sociaux s’ajoute le manque de moyens financiers en vue du
financement de la campagne.
2. Participation des femmes au règlement de conflits
au niveau national
Deux remarques préliminaires relatives aux niveaux national,
régional et international
On ne peut réfléchir et discuter sur le règlement des conflits à tous ces niveaux
sans parler de la violence qui, bien souvent, accompagne les conflits armés.
Ce point de vue se fonde sur l’idée que les conflits et la violence qui les
accompagne, ne sont pas uniquement des phénomènes idéologiques ou politiques,
mais qu’ils doivent également être perçus et compris comme des
composantes des comportements et des attitudes entre les individus et entre
les groupes humains.
A ce niveau, l’expérience nous apprend que la question relative à la participation
des femmes au règlement des conflits et au mécanisme de construction
de la paix s’avère encore plus complexe. En effet, la femme, dans ces circonstances,
est susceptible d’être à la fois victime et combattante.
Autre élément qui mérite réflexion : les règles et les procédures jouent un rôle
primordial. La qualité de la communication interpersonnelle revêt une importance
capitale.
Ces précisions étant apportées, revenons-en au niveau national. La femme
a-t-elle des raisons de s’impliquer et/ou d’être impliquée dans le processus de
paix ?
Outre le fait que la paix est une des conditions sine qua non d’un développement
humain durable, la femme a d’autres raisons de s’impliquer dans les
règlements des conflits, car elle en est la victime la plus touchée. En effet, les
violences commises à l’égard des femmes, voire à l’égard des enfants et plus
spécifiquement à l’égard des filles, dans des situations de conflits armés en
Afrique présentent, à certains égards, des particularités quant aux victimes,
aux auteurs et aux types de violences commises et/ou subies.
L’évolution des situations en Angola, au Burundi, au Congo, en Côte d’Ivoire,
en Guinée Bissau, en Guinée Conakry, au Liberia, au Mozambique, en
61

République démocratique du Congo, au Rwanda, en Sierra Leone, en Somalie,
au Soudan, au Tchad, et au Zimbabwe révèle de nombreuses disparités. Cette
litanie interminable des noms de pays nous amène à un constat ô combien
tragique : la plupart des pays en Afrique sub-saharienne sont touchés
par des guerres et des conflits armés.
Pourtant, cette litanie devrait attirer notre attention sur la prise en compte de la
diversité des situations selon les pays et les Etats. En effet, l’Afrique est plurielle
et les situations, les expériences, les espoirs, les luttes, les angoisses
profondes, les joies, les réussites, peuvent varier d’un pays à l’autre, d’un
Etat à l’autre. Cette donnée nous interdit dès lors de traiter la question des
femmes victimes des guerres de manière simpliste.
Cette précaution ayant été prise, je voudrais mettre les projecteurs sur deux
données.
Je voudrais d’abord souligner que les situations des conflits, bien que déterminées
essentiellement par un certain nombre d’événements actuels à caractère
politique et socio-économique, dépendent également de l’histoire des Etats en
question qui constituent le théâtre des atrocités commises à l’égard des femmes.
S’agissant de l’aspect historique, je voudrais faire observer qu’il existe plusieurs
manières de l’approcher. On peut en parler en se focalisant sur les
conséquences des éléments extérieurs du capitalisme ou en orientant les projecteurs
sur les structures et les dynamiques internes qui sont en place dans
la société.
Je pense, pour ma part, que la réalité va au-delà des antagonismes et clivages
« dominants-dominés », « exploitants-exploités », et que les êtres humains
devraient pouvoir être, ensemble, responsables de leur propre destin comme
du destin des autres êtres humains qui d’une façon ou d’une autre se trouvent
dans des situations de précarité, situations qui, bien souvent, leur ôtent toute
dignité humaine.
Je voudrais ensuite partir du concept de « violence structurelle » dont la
majeure partie des femmes sont victimes. La violence structurelle est le fait de
la conjonction des structures économiques, sociales, juridiques et culturelles
créant des différences considérables entre ceux qui détiennent le pouvoir de
déclencher une guerre et toute la masse des populations exclues de ces sphères
de pouvoir, avec tout ce que cela implique en terme de conséquences néfastes
et tragiques pour toute la société. Si je pouvais m’exprimer de manière un peu
caricaturale, je dirais : « en temps de conflits armés – mis à part quelques
exceptions – commerçante de grand standing ou petite marchande de trottoir,
quelle importance ? »
Je voudrais enfin terminer par l’épineuse question des violences physiques.
Pour illustrer cette problématique, je prends la liberté de me référer à Edith
Sizoo, auteur d’un livre intitulé Univers des femmes, et portant le sous-titre
suivant : « Le corps féminin : merveille ou champ de bataille ». Il s’agit en
62

effet du corps de la femme, et de ses misères qui prennent des proportions
énormes en situation de guerre. Est-il besoin de les énumérer ? Accouchement
dans des conditions d’hygiène incroyablement insalubres, menstruation dans
des situations de pénurie d’eau, viol, souffrances physiques et grossesses non
désirées suite à des viols (qui quelquefois s’avèrent être des viols commis par
plusieurs violeurs), etc. Cette réalité sous-jacente aux conflits armés explique
pourquoi les femmes devraient s’investir davantage dans le processus de paix
et pourquoi des instruments ont été mis en place en vue de l’éradication de ces
situations.
Certains de ces instruments méritent d’être rappelés. Il s’agit notamment de
la Déclaration universelle des droits de l’homme art. 21 (1948), la Convention
sur les droits politiques de la femme art.1-2-3 (1952), le Pacte international
relatif aux droits civils et politiques art. 3-25-26 (1966), la Convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes
(CEDAW) art. 2/a (1979), les stratégies prospectives d’action de Nairobi pour
la promotion de la femme, section III : égalité en matière de participation à la
vie politique et au processus de prise de décision § 88 (1985), la Déclaration et
Programme d’action de Vienne, la Conférence mondiale sur les droits de
l’homme, section B.3. : égalité de condition et droits fondamentaux de la femme,
art 36-41 (1993), la Déclaration et Programme d’action de Beijing (1995)
section G : participation des femmes à la vie politique et au processus de prise
de décision (1995), la Commission du statut de la femme : 41ème session
(1997), la Session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies
« les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix,
pour le XXe siècle » (New York, 5-9 juin 2000).
L’aspect le plus tragique est que les femmes, dans un passé assez récent et en
temps de conflits armés, ont presque toujours subi ces sévices mais que la
plupart d’entre elles n’ont jamais eu l’occasion ou la possibilité de protester
ou d’élever la voix au niveau structurel, où les mécanismes légaux pourraient
fonctionner. Faut-il, à partir de ce constat, conclure à l’inactivité et au fatalisme
des femmes dans ce domaine ? C’est précisément contre une telle
interprétation des choses que s’insurgent d’autres femmes telles que la Soudanaise
Fatima Ahmed Ibrahim ou Charlotte Lindsey - à l’époque -responsable
du projet de la Croix-Rouge britannique, dans un texte intitulé « Les femmes
et la guerre ».
Dans un certain nombre de cas, des femmes font preuve d’ingéniosité pour
mettre en place des stratégies de survie et des tentatives d’implication dans le
processus de pacification. C’est le cas des femmes du Congo-Brazzaville et
de Centrafrique, qui se sont réunies à cet effet. C’est également le cas des
femmes du Mali réunies au sein de l’association des femmes pour les initiatives
de paix (AFIP). Cette association a été créée en novembre 1998 à Bamako.
Parmi les objectifs et les domaines d’action, il convient de relever notamment
: le lien entre la paix et le développement, dégager les méthodes et outils
63

modernes de règlement des conflits, mettre en place un cadre d’échange et de
partenariat avec les femmes parlementaires sur les questions touchant à la
paix sociale, organiser des ateliers de formation des membres en culture de
paix, apprendre à rencontrer les autorités publiques en vue des actions de
lobbying.
L’importance de la formation et de l’information est à souligner dans ce cadre.
Car, comme le souligne le BIT dans L’heure de l’égalité au travail, il faut bien
se rendre compte également du fait que si les femmes n’ont pas encore acquis
le réflexe de brandir les textes et les instruments nationaux et internationaux,
et si ces textes sont mal appliqués, c’est notamment parce qu’ils sont insuffisamment
connus.
3. Participation des femmes au règlement des conflits au
niveau sous-régional
Un des aspects les plus importants est sans doute la mise en place des réseaux
de femmes au niveau régional et sous-régional en vue de renforcer leur capacité
à mener des actions de lobbying. Certaines actions pourraient être menées
au niveau régional et sous-régional, comme l’encourage à le faire l’Accord de
Cotonou (juin 2000) qui, dans son art.11 § 1 stipule : « la politique en faveur
de la paix, prévention et résolution des conflits se concentre notamment sur le
développement des capacités régionale, sous-régionale et nationale, et sur la
prévention des conflits violents à un stade précoce en agissant directement
sur les causes profondes et en combinant, de manière appropriée, tous les
instruments disponibles. »
Qu’en est-il de l’expérience des femmes sur le plan régional et sous-régional ?
A titre d’exemple, qu’en pensent les femmes de la Communauté économique
des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ? A en croire Nana Rosine
Ngangoue, Nathalie Somé et Pognéré Sobgo, « alors qu’un nombre important
des pays de la CEDEAO connaissent ou ont connu des conflits armés, et que
certains autres font face à des tensions socio-politiques internes inquiétantes,
les femmes de la sous-région ne figurent quasiment pas dans les instances de
résolution et de prévention des conflits ».
Pour sa part, Amy Smythe, ex-Ministre des questions genre et des enfants de
la Sierra Léone, confirme le constat en des termes on ne peut plus clairs : « le
rôle des femmes de la Sierra Leone en particulier, et de la CEDEAO en général,
dans le processus de paix et de prévention de conflits demeure encore très
faible. » 3
3 Site Web: www2.womensnet.org.za.
64

4. Participation des femmes au règlement des conflits au
niveau international
Lors de la conférence intitulée « Pékin + 5 », l’accent a été mis sur douze
sujets clés concernant les femmes : la pauvreté, l’éducation, la violence, la
santé, l’économie et les pouvoirs de décisions…
Par ailleurs, lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies, tenue
le 31 octobre 2000, les membres siégeant au Conseil ont adopté à l’unanimité
la résolution 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité. Cette résolution
constitue un des résultats concrets du travail continu, entrepris et réalisé par
un certain nombre d’ONG, de gouvernements et d’institutions des Nations
Unies.
Cette résolution, qui attire particulièrement l’attention sur la nécessité de la
mise en place de mécanismes susceptibles d’éviter des conflits et, le cas
échéant, de négocier et de consolider la paix, a le mérite d’être conçue exclusivement
pour les femmes, notamment confrontées à des situations de conflits
armés, qui, comme nous l’avons souligné plus haut, demeurent sans doute les
victimes les plus profondément meurtries, y compris dans leur chair, dans ce
qu’elles ont de plus intime.
Force est de constater que « des progrès sont sans doute enregistrés dans les
textes et les jurisprudences concernant les violences commises par les conjoints,
le trafic des femmes, le viol comme torture et crime de guerre, etc. Cependant,
ils ne suffisent pas à répondre aux questions cruciales posées à l’échelle
planétaire par l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre, par
les brutalités quotidiennes dont sont victimes les femmes et par l’impunité des
coupables. »
Les femmes, à quelque niveau que ce soit et quel que soit le métier qu’elles
exercent (écrivain, consultante internationale, artiste, marchande, etc.) poursuivent
leur combat ; c’est donc aux gouvernements respectifs qu’il incombe
de leur accorder les moyens nécessaires, susceptibles de renforcer leur capacité
de participation aux mécanismes de négociation en vue de construire la
paix.
65

Résumé
La dernière oratrice de cette journée, Madame Marie-Madeleine KALALA,
Présidente de l’AFEJUCO, a divisé son exposé en trois volets :
En premier lieu, s’agissant de la place de la femme en RDC, elle a soutenu que la
femme est plus visible qu’il y a dix ans dans la vie politique, professionnelle et
associative. Selon elle, cela est dû à la prise de conscience et à l’encouragement
provoqués par la Conférence de Beijing. Elle a ensuite indiqué que les femmes se
sont particulièrement mobilisées pour prendre une part active à la résolution de
la crise congolaise et qu’elles sont également parvenues à faire reconnaître leurs
droits à une représentation significative dans les institutions de la République. Il
leur appartient désormais de les revendiquer.
En second lieu, elle a examiné le rôle que doit jouer la femme dans la transition.
La femme doit s’impliquer dans tous les domaines de la vie dans la prise de décision
et cela en participant au parlement, au gouvernement et en s’engageant dans
les organes provinciaux et locaux. Pour ce faire, elle devra être solidaire et monter
des stratégies pour se faire sa place, en tenant compte des compétences et des
exigences de réconciliation. Elle devra en outre se préparer à participer aux
élections, sans oublier de créer des cadres de concertation.
En troisième lieu, l’oratrice a soutenu que la femme aura le loisir de penser des
programmes et des stratégies en sa faveur, ayant tiré les leçons des échecs du
passé récent.
En guise de conclusion, l’oratrice a formulé des recommandations aux femmes
elles-mêmes ainsi qu’aux ONG, aux institutions de la transition et aux partis politiques,
afin d’obtenir une grande participation des femmes.
66

QUELLE PLACE ET QUEL ROLE
POUR LA FEMME CONGOLAISE
DANS LA TRANSITION?
Madame Marie-Madeleine KALALA
Distingués invités,
Mesdames, Messieurs,
Nous voici réunis aujourd’hui pour réfléchir à la question du renforcement du
rôle des femmes dans la reconstruction nationale et le développement économique
en République démocratique du Congo.
Ce séminaire vient fort à propos car lorsqu’on voit comment les femmes se
sont battues pour s’impliquer totalement dans le processus de paix et lorsqu’on
prend la mesure du faible résultat auquel elles sont arrivées quant à leur
participation effective à la gestion de la transition au sein des institutions
publiques, il est impérieux qu’elles se réorganisent pour savoir comment elles
envisagent leur participation à la reconstruction du pays.
C’est donc un choix judicieux que d’organiser ce séminaire à un moment
crucial de l’histoire de notre pays, à savoir celui de la relance de sa politique.
C’est pourquoi je félicite les organisateurs pour cette initiative et les remercie
d’avoir bien voulu m’associer à la réflexion.
« Quelle place et quel rôle pour la femme congolaise pendant la
transition ? »
Ce sujet, nous l’avons souvent évoqué ensemble au cours des nombreux
séminaires organisés par les unes et les autres. Nous pensions en avoir fait le
tour. Et pourtant, il semble plus que jamais d’actualité.
La situation n’ayant pas beaucoup changé au cours de ces dernières années,
comment aborder un tel sujet ? Peut-on affirmer que la vision congolaise sur
le rôle de la femme congolaise a évolué ? Sa place dans la société a-t-elle été
modifiée ? Les mentalités ont-elles progressé ?
Je vais donc essayer de tracer une piste qui nous permette de répondre à
toutes ces interrogations. Toutefois, je suis convaincue que c’est ensemble
que nous cernerons mieux le problème.
Je me propose d’aborder :
1.la place de la femme aujourd’hui en République démocratique du Congo
67

2.son rôle pendant la transition
3.les recommandations.
Le cheminement de ma réflexion aura comme fondement la constitution de la
transition.
1. Place de la femme aujourd’hui en RDC
Objectivement, nous pouvons affirmer sans peur d’être contredites que la
femme est beaucoup plus visible en RDC que jadis, aussi bien dans la vie
politique que professionnelle ou associative. Que ce soit dans les institutions
publiques, dans les entreprises privées ou encore dans la vie associative, la
présence de la femme est plus marquée qu’il y a dix ans.
J’ai le sentiment que Beijing a été un coup de fouet pour l’implication de la
Congolaise.
Elle est revenue de cette conférence beaucoup plus engagée et consciente du
rôle qu’elle avait à jouer pour permettre à son pays de connaître un développement
durable. La femme congolaise est rentrée chez elle avec le désir de faire
tout ce qui était en son pouvoir pour participer de manière plus effective au
développement de son pays, quel que soit l’endroit où elle se trouvait.
Contrairement à l’idée selon laquelle « tout se passe dans la capitale », les
femmes se sont mobilisées partout à travers le Congo. Ainsi, que ce soit les
femmes de Goma, Lubumbashi, Kisangani, Mbuji-Mayi, Mbandaka ou de Bunia,
toutes participent au débat politique là où elles se trouvent, ou se chargent
d’actions en faveur du développement. La femme s’intéresse donc aux affaires
de la cité.
Les femmes se sont également mobilisées pour prendre une part active à la
résolution de la crise congolaise. Malheureusement, elles ont été peu
nombreuses à pouvoir participer effectivement au débat. Elles ont tout fait
pour influencer de l’extérieur les résolutions par un accompagnement sous
forme de caucus de femmes. Hélas, elles ont trouvé la machine politique déjà
en marche. C’est surtout au sein des composantes monolithiques et rebelles
qu’elles ont été peu nombreuses. Malgré cela, elles ont fait entendre leur
voix.
Même si la présence de la femme congolaise est encore peu significative au
sein du Gouvernement, du Parlement ou des institutions citoyennes, c’est-àdire
inférieure au seuil fixé par les recommandations internationales, la femme
est cependant parvenue à faire reconnaître son droit à une représentation
significative au sein des institutions nationales, provinciales, et locales en le
faisant inscrire sans ambages dans la Constitution. En effet, c’est le préambule
et l’article 51 de la Constitution de la transition qui consacre ce droit.
68

Il appartient aujourd’hui aux femmes de faire respecter ces dispositions
constitutionnelles afin d’assurer leur place dans le processus de reconstruction
du pays.
2. Rôle de la femme pendant la transition
Si la Constitution fait une place à la femme pendant la transition, il s’agit alors
de s’interroger pour quel rôle.
Là encore, la réponse se trouve dans l’article 51 lequel, dans son deuxième
alinéa, affirme que l’Etat a l’obligation de prendre dans tous les domaines,
notamment dans les domaines économique, social, et culturel, toutes les
mesures appropriées pour assurer la pleine participation de la femme au développement
de la nation. C’est-à-dire que la participation de la femme est exigée
dans tous les domaines tant politiques que de développement.
Si la femme s’est battue ces dernières années, alors que c’est elle qui faisait
bouillir la casserole dans bien des ménages, c’est surtout pour participer à la
prise de décision. Elle veut prendre en main le destin de son pays.
N’est-ce pas au gouvernement que l’on propose les budgets à allouer aux
différents secteurs ? N’est-ce pas là encore que l’on décide des relations de
voisinage avec les autres pays ? C’est au Parlement (Assemblée nationale et
Sénat) que l’on adopte les budgets, et au Parlement également que l’on décide
des lois organiques et autres lois d’intérêt général, national et spécifique. Ce
sera en ce lieu que la femme pourra obtenir la révision de tous les textes de
lois discriminatoires à son égard, tels que le code de famille, le code du travail
ou les autres textes réglementaires. C’est aussi à ce niveau qu’elle devra arrêter
des stratégies pour se présenter aux élections et décider de quelle manière
elle pourra augmenter la présence des femmes au sein des institutions législatives
telles que l’Assemblée nationale, le Sénat ou les assemblées provinciales.
Comment exploiter, cette fois de manière positive, la discrimination à son
endroit ?
Les femmes, pour arriver à une pleine participation à la reconstruction du
pays, doivent impérativement se trouver là où se prennent les décisions, c’està-dire
à tous les niveaux de prise de décision, non seulement au gouvernement
mais aussi à tous les autres échelons (provincial, cantonal, etc.). Cela ne signifie
pas qu’elles doivent uniquement se cantonner dans le secteur politique. On
doit les retrouver dans tous les secteurs de la vie active.
Toutes les compétences devront être éprouvées et ce, d’abord dans une collaboration
entre femmes et dans la solidarité effective. Il faudra essayer de
monter des stratégies pour placer la femme partout où elle pourrait apporter
son savoir-faire, car elle porte en elle tous les atouts pour réussir dans la
reconstruction du pays.
69

N’oublions pas que dans le préambule de la Constitution, s’il est recommandé
que la participation effective de la femme s’opère à tous les niveaux de responsabilité,
il est également exigé des acteurs socio-politiques qu’ils prennent
en compte des critères de compétence, de crédibilité, d’honorabilité et de
réconciliation nationale.
Ici, deux éléments importants entrent en ligne de compte : les critères objectifs
d’un côté et la nécessité de réconciliation nationale.
S’agissant du premier, il est important que toutes les femmes responsables
puissent avoir, à portée de main, une banque de données féminines. De cette
manière, en cas de vacances ou d’appel de candidature, elles pourront recommander
les femmes remplissant le profil demandé, et ce sera un bel exemple
de solidarité. Le guide bibliographique initié par le PNUD, en collaboration
avec le Ministère des Affaires sociales et de la Famille, arrive fort à propos et
pourrait être d’une grande utilité.
Quant au deuxième élément, celui de la réconciliation, il ne concerne pas seulement
les acteurs politiques. Il est temps que les femmes congolaises enterrent
la hache de guerre et arrêtent de se considérer comme des rivales dont la
promotion de l’une apparaît comme une entrave pour l’autre.
Ainsi, les femmes congolaises devront s’organiser pour préparer les élections
et amener le plus de femmes possibles à la prise de décision. C’est ici le lieu
d’exploiter au maximum l’idée d’un espace de concertation permanente des
femmes au sein duquel elles réfléchiraient sur la façon et les moyens d’accompagner
la masse féminine congolaise, population la plus importante du pays
pour « voter utile », c’est-à-dire en faveur des femmes.
Parvenues aux postes de responsabilité, elles devront penser des programmes
et stratégies en faveur des femmes dans tous les secteurs socio-économiques.
Elles devront organiser des séminaires de formation et de renforcement des
capacités des femmes, en collaboration avec les organismes internationaux et
les bailleurs de fonds, gouvernement compris, et favoriser l’adoption de programmes
en faveur de la femme et de l’enfant ainsi que dans les secteurs de
l’éducation et de la santé.
3. Recommandations
A travers la lutte qu’elles viennent de mener pour s’impliquer dans le processus
de paix, les femmes congolaises ont démontré qu’elles possèdent
d’importantes potentialités qui leur permettront de jouer un rôle inestimable
dans la reconstruction nationale. Pour ce faire, elles doivent se réorganiser,
comme je l’ai dit au début de mon propos, c’est-à-dire tirer les leçons des
échecs du passé (passé somme toute très récent) et affûter des stratégies
susceptibles d’augmenter leur nombre dans la vie active.
70

En outre, elles ont à impliquer dans leurs projets tous les acteurs et intervenants
de la vie nationale. C’est ainsi que je pourrais recommander ce qui
suit à chacun d’entre eux (et ceci bien sûr dans le but de renforcer le rôle de
la femme pendant la transition) :
a. aux femmes elles-mêmes
• de se placer, par leur compétence, leur crédibilité, leur honorabilité parmi
les décideurs et cela dans tous les secteurs de la vie nationale (politique,
économique, sociale) ;
• de créer et organiser un espace permanent de concertation pour les
femmes ;
• de faire un plaidoyer permanent pour obtenir l’application effective de
l’article 51 de la Constitution de la transition et de réfléchir aux possibilités
d’amélioration de cette disposition dans la future constitution ;
• de cultiver la culture de la paix, du dialogue, et de la tolérance et d’éduquer
leur entourage dans ce sens ;
• de favoriser la pratique de l’excellence et de la solidarité dans toutes leurs
entreprises ;
• de veiller à la représentativité des femmes à tous les niveaux de prise de
décision et dans tous les secteurs de la vie.
b. aux associations et ONG :
• de faire une large diffusion de l’article 51 de la Constitution de la
transition ;
• d’inciter les femmes à s’intéresser à la vie politique et publique ;
• de les préparer aux échéances futures ;
• d’aider les femmes à lutter contre la pauvreté pour leur permettre de prendre
part à la vie de la cité ;
• de se mobiliser pour le renforcement des capacités des femmes.
c. au Gouvernement et autres institutions de la transition :
• de veiller à l’application effective des dispositions de l’article 51 de la
Constitution de la transition en procédant notamment à la révision des
textes législatifs et réglementaires contraires ;
• d’aider au renforcement des capacités des ONG par un partenariat transparent
et efficace ;
• de soutenir tous les efforts des femmes et d’être attentif à leurs attentes et
préoccupations.
71

d. aux partis politiques :
• d’inclure les dispositions de l’article 51 dans les textes et règlements qui
les régissent.
e. aux femmes politiques :
• d’obtenir l’acceptation de systèmes (quota, listes, etc.) pour corriger les
inégalités dans la représentation des femmes dans la vie politique.
Je pense que si les femmes occupent efficacement la scène pendant la transition,
notre pays aura beaucoup gagné et l’on peut gager qu’il sera rapidement
reconstruit. Un conseil utile et indispensable avant de terminer : les femmes
devront veiller à rester en dehors des intrigues que les hommes se plaisent à
entretenir. Elles devraient se lancer dans l’assainissement du milieu politique
par l’exigence de la pratique de l’éthique.
Je vous remercie.
72

Résumé
Les différentes présentations de l’après-midi ont été suivies par des débats particulièrement
riches articulés autour des préoccupations suivantes :
• La stratégie à adopter pour réussir la représentativité des femmes
• Les solutions qu’a la femme pour inhiber sa peur
• Le manque de visibilité des actions des femmes congolaises malgré leurs
années de combat
• La marginalisation des femmes non instruites par celles plus instruites et
la marginalisation des femmes de l’intérieur par celles de Kinshasa
• Le phénomène d’enfants dits « sorciers »
• Les femmes n’avancent pas malgré la succession des séminaires, malgré
les redites.
A toutes ces préoccupations, l’assemblée a essayé d’apporter des réponses :
• En effet, parler de stratégie implique une perspective à long terme. Pour
ce qui est de l’immédiat, il faudrait apprendre à négocier avec les autres
car il y a toujours eu des conflits et des rapports de force.
• A propos de la peur, les uns ont suggéré de faire un effort pour tout d’abord
reconnaître cette peur, c’est-à-dire cette faiblesse et chercher ensuite une
solution. Cela revient à identifier la faiblesse et à la combattre par la
suite.
Les autres pensent que pour surmonter sa peur, il faut se connaître : la
femme doit savoir ce qu’elle veut, avoir l’estime de soi et être consciente
de ses potentialités. En effet, elle a tendance à se sous-estimer et à communiquer
ses complexes à ses enfants. Il faut qu’elle soit à l’aise avec
elle-même.
Enfin, d’autres pensent que la femme a peur car elle n’ose pas créer de
partis politiques, par exemple.
• Concernant l’impression du manque de visibilité de l’action de la femme,
il a été suggéré d’agir en groupes de pression, d’organiser des rencontres
pour que l’action des femmes soit plus efficiente.
• A propos de l’inquiétude des femmes de l’arrière-pays, il a été reconnu
qu’elles sont moins soutenues par les organismes internationaux que celles
de Kinshasa, en termes d’information et d’appui. Cependant, il est vrai
que même si les femmes de Kinshasa disposent de l’information et de
plusieurs appuis, elles ne sont pas nombreuses à exploiter cet avantage en
s’informant et en se formant. C’est ainsi qu’il a été recommandé non
73

seulement de chercher à se former et à s’informer, mais aussi d’encourager
les jeunes filles à lire.
• A propos des enfants dits « sorciers », s’est dégagée une opinion commune :
ce phénomène est à prendre au sérieux, car c’est une bombe à retardement.
Certains pensent que ce phénomène a pris de l’ampleur avec la misère qui
s’est abattue sur le pays, et d’autres que c’est plutôt l’influence des sectes
qui l’a amplifié.
• Quant à la constatation que les femmes font du sur-place, malgré la multiplication
des séminaires et conférences, il a été observé que ce n’est qu’une
impression, et que les jalons sont posés et la situation change petit à petit.
Il a également été recommandé de créer des synergies entre les femmes qui
sont au pays et celles de la diaspora. Madame MONKASA a souligné que
cet espace d’échange et de concertation doit être formalisé pour que la
femme congolaise aille de l’avant.
La représentante de l’OIM, Madame KABAMBA, a souligné que les femmes congolaises
avaient besoin d’être appuyées, encadrées, et qu’elles pourraient trouver
cet appui auprès du Ministère des Affaires sociales qui possède toutes les informations.
Elle a ajouté qu’il était malheureux de constater que la Congolaise était
non seulement absente des forums internationaux, mais qu’elle n’utilisait pas non
plus les instruments internationaux pourtant ratifiés par la RDC.
Enfin, la représentante du Ministère des Affaires sociales a tenu à préciser qu’il
était faux de croire qu’il n’existait pas d’espace d’échanges entre les femmes
puisque existent le Conseil national de la femme, la plate-forme Cause commune,
le Caucus de femmes, etc.
Elle a ajouté que si la Congolaise ne s’engageait pas suffisamment, ce n’était pas
à cause de la peur mais plutôt parce que les femmes ont tendance à voir d’un
mauvais œil une ambition déclarée de la part d’une femme.
74

Thème Thème 2:
2:
Le Le Le rôle rôle de de la la femme femme dans dans la la reconstruction
reconstruction
nationale nationale et et la la prévention prévention des des conflits
conflits
à à travers travers les les activités activités créatrices créatrices d’emploi
d’emploi
et et génératrices génératrices génératrices de de revenus
revenus
Résumé
La deuxième séance de travaux s’est ouverte le 28 juin 2003 sous la modération de
Madame PIKININI, Secrétaire générale de la Culture.
La première oratrice de la journée a été Madame Pélagie RASHIDI, expert comptable
à la Banque centrale du Congo. Elle a axé son exposé autour de « la problématique
de la génération des revenus et de l’épargne chez la femme congolaise ».
Elle a d’abord abordé la problématique de l’épargne et a défini l’épargne comme
étant l’excès du revenu sur la dépense de consommation ou la fraction du revenu
qui n’est pas affectée à la consommation. Elle a ensuite cité les différentes sortes
d’épargne classique, à savoir : épargnes contractuelle, potentielle, liquide, d’autofinancement,
épargne-assurance, épargne force et épargne collective.
Elle a identifié deux causes principales à l’affaiblissement de l’épargne en RDC :
l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat. Elle a constaté l’instabilité du circuit
bancaire en RDC mais a mis l’accent sur le rôle de la femme congolaise qui, grâce
à son esprit créatif, a imaginé deux autres modes d’épargne : les tontines
« likelemba », et les systèmes baptisés « bwakisa carte ».
Dans la deuxième partie de sa présentation, Madame RASHIDI a parlé des activités
génératrices de revenus et a fait remarquer que devant la destruction du tissu
économique, les femmes se sont recyclées dans des activités multiples et multiformes
qui génèrent des revenus. On les retrouve dans l’agriculture, l’élevage, la
pêche, le commerce, la transformation, etc.
75

PROBLEMATIQUE DE LA GENERATION
DES REVENUS ET DE L’EPARGNE
CHEZ LA FEMME CONGOLAISE
Madame Godée RASHIDI
Introduction
Nous tenons avant tout à remercier l’Organisation internationale pour les
migrations de daigner nous donner l’occasion de nous exprimer pendant ce
séminaire qu’elle organise dans le but de promouvoir le rôle des femmes dans
le processus de développement économique durable, à travers des activités
génératrices de revenus, en vue d’accroître leur accès au crédit et de favoriser
l’exercice d’une activité rémunérée.
En espérant que ces échanges d’expériences aideront la femme congolaise à
prendre davantage conscience du rôle qu’elle est appelée à jouer dans le pays :
combattre les principaux handicaps qui rendent difficile son intégration dans
le processus de la reconstruction nationale, à savoir la pauvreté, l’analphabétisme,
la sous-représentation de la femme dans les institutions décisionnelles
du pays, etc.
Le thème qui nous a été proposé est « La problématique de la génération des
revenus et de l’épargne chez la femme congolaise ». Nous allons aborder
notre thème en deux grands volets en parlant tout d’abord de la problématique
de l’épargne et ensuite des activités économiques génératrices de revenus.
Dans la partie « problématique de l’épargne » nous allons nous pencher sur :
• La définition de l’épargne classique et ses différents types
• Les causes de la diminution de l’épargne ainsi que ses remèdes
• Les principales modes d’épargne chez la femme congolaise ainsi que leur
rôle (tontines, cartes, mutualité)
• Le rôle des ONG et des coopératives d’épargne et de crédit.
Ensuite, nous développerons le second volet :
1.Les activités économiques génératrices de crédit
• La définition des activités économiques
• Le concept de revenu
76

2.Les activités des femmes
• La femme dans l’agriculture, l’élevage et la pêche
• La femme dans la transformation des produits agricoles
• La femme dans le commerce
• La femme et les activités non financières
• La femme et les activités financières
- les difficultés rencontrées
- les résultats obtenus
- les conclusions
I. La problématique de l’épargne
1. Définition
Selon l’économiste britannique Maynard Keynes, l’épargne est « l’excès du
revenu sur la dépense de consommation » ou encore « la fraction du revenu
qui n’est pas affectée à la consommation. » Notons que l’épargne est en
corrélation avec la consommation dans la mesure où elle n’est rien d’autre
qu’une consommation future, c’est-à-dire déclarée dans le temps.
2. Rôle de l’épargne
L’épargne joue un rôle prépondérant dans l’économie d’un pays : elle est la
matière première de toutes les institutions de dépôts de fonds qui leur permet
d’effectuer des financements et écarte ainsi la thésaurisation. Sans épargne, il
n’y a pas d’investissement et pas non plus de production ni d’emplois ; par
conséquent, il n’y a pas de revenus et la misère s’installe.
3. Sortes d’épargne classique
Nous nous limiterons à donner une brève définition des différentes sortes
d’épargne selon les lois bancaires classiques. Notons qu’elles ne sont pas
pratiquées dans notre pays, vu le délabrement et la destruction de toutes les
infrastructures.
• Epargne contractuelle : elle permet aux épargnants de se constituer une
réserve qui leur permet d’accéder à certains types de crédit (épargnevacances,
logement).
• Epargne potentielle : masse d’argent en espèces dans les portefeuilles ou
les coffres-forts des opérateurs économiques. C’est l’épargne en puissance,
mobilisable pour être confiée aux institutions financières.
77

• Epargne liquide : elle comprend les dépôts d’épargne dans les comptes à
vue ou à très court terme. (ex. : bons du trésor, bons de caisse).
• Epargne d’autre financement : réservée au financement d’une entreprise
par l’affectation d’une fraction des projets aux investissements (ex. : augmenter
la capacité de production, agrandir les installations).
• Epargne-assurance : l’assureur rend au bénéficiaire une prestation en cas
de réalisation de risque couverts (ex. : assurance-vie, retraite).
• Epargne-forcée : elle n’appartient pas au budget de consommation mais
aux comptes de la nation. (ex. : cotisation de l’INSS).
• Epargne collective : pratiquée par les membres d’une mutualité.
4. Les causes affaiblissant la réalisation de l’épargne en RDC
a. L’inflation
Depuis le milieu de l’année 1975 jusqu’à ce jour, l’économie de notre pays
connaît de graves difficultés et sa situation socio-économique ne cesse de se
détériorer, nonobstant toutes les tentatives visant à la stabiliser.
Cette situation qui découle de la crise économique et monétaire internationale
réduit le pouvoir d’achat du Congolais et par conséquent décourage l’épargne.
Nous pouvons sommairement définir l’inflation comme le déséquilibre qui
existe entre l’excès de la demande et les coûts des produits de l’Etat par
rapport à l’offre des biens et services.
Les causes de cette inflation :
• L’accroissement de charges de l’Etat, l’explosion démographique,
l’accroissement des coûts de production des entreprises. Le déficit perpétuel
du budget des Etats, les importations massives, le manque de mesure
d’encadrement de la monnaie nationale face au taux de change, etc.
b. La baisse du pouvoir d’achat
Définition du Larousse : le pouvoir d’achat d’un ménage, d’un individu ou
d’une société est l’ensemble des biens et services de toute nature que l’on
peut se procurer avec ses revenus.
Cependant, l’ensemble des revenus perçus est le plus vulnérable de tous les
faits attaqués par l’inflation.
La baisse du niveau de vie à Kinshasa et au Congo en général se caractérise
principalement par :
• Le chômage (le Kinois réduit au niveau le plus bas de la mendicité : ne
sachant pas subvenir à ses besoins primaires, il se retrouve dans
l’impossibilité de penser « épargne ».
78

• La délinquance juvénile (le gouvernement est incapable de créer des emplois
et d’encadrer les jeunes désœuvrés, ce qui entraîne la débauche et le vol,
les rêves d’un voyage en Europe où les jeunes croient trouver mieux,
etc.).
• La tendance à l’inégalité entre les classes sociales (les pauvres
s’appauvrissent, les riches prospèrent davantage, d’où un profond fossé
entre les deux classes).
5. L’instabilité du circuit bancaire
Le fonctionnement des institutions financières bancaires et non bancaires a
été fortement gêné par la pénurie des signes monétaires et la rareté des devises
ainsi que la perte de confiance du public.
Cette dégradation du circuit bancaire a entraîné inéluctablement :
• La faillite des banques commerciales et l’essoufflement des banques
privées
• La réduction sensible des activités financières non bancaires dont la
CADECO et la SOFIDE
• Le ralentissement significatif des coopératives et de la distribution de crédit.
Confrontées à toutes ces difficultés de survie dans une société économiquement
rongée depuis 1975, et suite aux deux pitoyables pillages de 1999 et
1993 et aux guerres de 1996 et 1998 qui ont délabré toutes les infrastructures
restantes, mettant ainsi au chômage des milliers de travailleurs, les femmes
congolaises n’ont pas croisé les bras. Elles se sont levées pour braver toutes
ces épreuves et guidées par l’esprit de créativité féminine, elles se sont lancées
dans de multiples activités nouvelles, capables de générer des revenus,
qu’elles s’efforceront de faire fructifier et d’épargner à leur façon.
C’est ainsi que sont nés d’autres modes d’épargne en dehors du circuit
bancaire classique.
Ce sont :
- Les tontines ou « Likelemba »
- Les systèmes des cartes ou « Bwakisa cartes »
- Les caisses mutuelles
- Les ONG et coopératives d’épargne et de crédit.
a. Les tontines
La tontine est un crédit rotatif qui consiste à mettre en commun une épargne
dont la somme est attribuée à tour de rôle aux membres du groupe. Pour
celui qui remet le montant convenu c’est une épargne, et pour celui qui reçoit
79

toutes les sommes apportées par les membres c’est un crédit. La gestion
des tontines est simple : elle ne demande ni local, ni personnel et il n’y a pas
de fonds à gérer. Sa taille et sa composition dépendent de l’appréciation du
groupe. La tontine se gère de façon autonome : le groupe fixe lui-même le
montant des cotisations, leur périodicité et les modalités d’attributions de fonds
rassemblés.
Ces dispositions qui tiennent lieu de règlement ou de statut (rarement écrit, et
modifiable à tout moment) sont réduites à leur plus simple expression. Les
décisions sont prises de façon démocratique. Ce qui pose problème, c’est
l’ordre dans lequel chacune est servie.
Celle qui reçoit en premier les participations des membres est économiquement
avantagée par ce qu’elle reçoit le crédit sans épargne tandis que la dernière
sentira plus lourdement l’obligation de rembourser ; elle reçoit un crédit précisément
de ses propres épargnes.
Pour remédier à cette situation, les femmes recourent au système de tontine
améliorée ou « Likelemba » amélioré, où toutes les bénéficiaires sont protégées
et favorisées.
Une petite illustration graphique nous aidera à mieux comprendre la tontine
améliorée :
Janv. Fév. Mars Avril Mai Juin Juill. Août Sept. Oct.
R
Q Crédit R R R R E E E E Crédit
R E Crédit R R R E E E Crédit R
S E E Crédit R R E E Crédit R R
T E E E Crédit R E Crédit R R R
U E E E E Crédit Crédit R R R R
Nous remarquons qu’avec ce système de tontine améliorée, les cinq participantes
pourront à tour de rôle bénéficier une fois d’un crédit provenant des
propres épargnes et l’autre fois d’un crédit sans épargne. Il y a ainsi équilibre
dans les différentes épargnes et remboursements de chacune des membres.
La tontine demeure la forme d’épargne et de crédit la plus pratiquée dans le
milieu féminin. La confiance entre les membres qui se connaissent et s’assistent
mutuellement est le socle principal sur lequel repose ce type de pratique.
Son désavantage est que le montant d’épargne est faible, car il est fonction de
leurs faibles revenus, d’où l’importance de recourir au système extérieur ou
aux institutions des micros-finances.
80

. Les cartes ou système « Bwakisa Cartes »
Le phénomène « cartes » est un système innovateur d’épargne journalière
adapté au mode de vie des plus démunis qui vivent au jour le jour. C’est une
épargne de précaution très accessible. Le système consiste à déposer quotidiennement
chez un boutiquier ou une ONG un montant fixe déterminé par le
client selon ses possibilités. A la fin du mois, la déposante retire la totalité de la
somme épargnée mais paie au guichet une somme équivalente à une mise
journalière. Ce système ne permet pas d’octroyer des crédits aux membres
car les clients retirent souvent leurs dépôts (épargne) régulièrement à la fin de
chaque mois.
Le système « Bwakisa carte » aide dans une certaine mesure l’épargnant à
augmenter son revenu pour améliorer sa micro-entreprise, mais il profite plus
au boutiquier ou artisan qui, en plus de la mise journalière payée par le client,
utilise l’épargne du client et la fait fructifier dans ses activités.
Ce phénomène est de pratique courante dans les quartiers et marchés de
Kinshasa.Il est possible d’améliorer ce système de Bwakisa carte en supprimant
le retrait de mise journalière, puis en donnant la possibilité d’accorder de
petits crédits aux clientes détentrices des cartes.
c. Les caisses mutuelles
Beaucoup d’habitants de Kinshasa ont créé des caisses mutuelles. Chaque
mois, le membre verse à la caisse un montant fixe voté par l’assemblée. En
contrepartie, la caisse offre deux services :
• En cas de deuil ou de maladie, on accorde un montant déterminé au membre
éprouvé.
• La caisse peut accorder des crédits remboursables moyennant un intérêt
de 20 %.
La caisse est gérée par un comité de trois membres (présidente, trésorière et
secrétaire) qui rendent des comptes à chaque assemblée. C’est un précieux
outil d’épargne basé sur la confiance, la solidarité et l’équité.
d. Les ONG et les coopératives d’épargne et de crédit
Les ONG et les coopératives d’épargne et de crédit sont des institutions de
micro-finances qui essaient, dans les limites de leurs moyens, de favoriser
l’épargne et l’accès au crédit en vue de les aider à lutter contre la pauvreté en
rapport avec l’activité exercée. Les femmes dans leurs activités économiques
recourent à ces ONG et coopératives où elles gardent leurs revenus pour
épargner et où elles peuvent bénéficier d’un crédit à court terme. Une caution
est exigée dans ce cas comme garantie ; le plus souvent l’épargne constitue la
garantie préalable.
81

La plus connue des ces ONG est l’ACCCO. Cette ONG a mis en place un
équilibre de caissiers ambulants qui vont récolter les mises journalières partout
où c’est possible.
Nous nous référons à l’échantillon de femmes que nous avons interrogées et
constatons que dans ses activités économiques, la femme congolaise est réellement
animée par l’esprit d’épargne en dépit des ses contraintes budgétaires.
Elle s’efforce et s’attelle à économiser le peu qu’elle gagne dans toutes les
formes d’épargne mentionnées ci-dessus.
Malheureusement, elle est freinée par certains handicaps qui ne lui permettent
pas d’émerger et de dépasser le seuil de pauvreté :
• L’absence d’un taux d’intérêt et d’octroi de crédit dans le système des
cartes ;
• Le taux d’intérêt presque insignifiant fixé par les coopératives ;
• L’exploitation par les coopératives et ONG des revenus des épargnants,
étant donné qu’elles ne thésaurisent pas mais exploitent au maximum les
collectes des clients.
Par exemple :
1e mois 2e mois 2e mois 3e mois 4e mois
Epargne Remb. + Epargne Remb + Epargne Remb.+ Epargne
Remb.+ Epargne
1e 2e 3e 4e 1e 2e 3e 4e 1e 2e 3e 4e
1e 2e 3e 4e 1e 2e 3e 4e
Epargne 1 $
1 $ 1 $ 1 $ 1 $
Remb. 1,50 $
2,5 2,5 2,5 2,5 2,5 2,5 2,5 2,5
2,5 2,5 2,5 2,5 2,5 2,5 2,5 2,5
Cette ONG propose à ses clientes :
• Une épargne de 1 dollar par semaine ;
• Après 1 mois d’épargne (4 dollars), elle accorde un crédit de 30 dollars
remboursables pendant 4 mois à raison de 1,5 dollar par semaine ainsi que
l’épargne de 1 dollar par semaine ;
• Au bout de 4 mois l’épargnant aura remboursé 24 dollars, épargné
16 dollars, 40 $ = l’ONG gagne 10 $ par épargnante après 4 mois.
82

Si le groupe épargnant est composé de 50 personnes, l’ONG aura gagné 2000
dollars après ce délai, alors qu’elle n’a accordé qu’un crédit total de 1500 dollars.
Bien que, visiblement, la femme épargnante remarque de son coté que le crédit
octroyé lui est bénéfique parce qu’il l’a aidée à élever un peu son capital et
à améliorer sa condition de vie et bien que ces ONG coopératives de crédit
aient pour but de collecter l’épargne et de prêter aux micro-entrepreneurs et
aux ménages à faibles revenus pour alléger la pauvreté, nous remarquons que
l’épargne de cette population démunie ne rapporte pas suffisamment comparativement
à ce que gagne l’ONG en question. De plus, l’argent de ses
épargnants n’est pas thésaurisé.
Après ces quelques analyses, il y a lieu de se poser les questions suivantes :
• Quelles stratégies appliquer pour que les deux parties, le client et l’ONG,
puissent jouir dans des conditions acceptables de la marge bénéficiaire
permettant à l’un et l’autre de continuer ses activités ?
• Dans le cas contraire, la pauvreté de la masse ne va-t-elle pas se perpétuer,
étant donné que les sommes prêtées sont souvent modiques et accordées
pour de trop courtes périodes ?
II. Les activités économiques génératrices de revenus
Face à la carence de l’Etat dans tous les domaines, on remarque de façon
éclatante le combat des femmes, qui ne capitulent pas et ne se résignent pas
au marasme social. Ces femmes qui disent non à la souffrance quotidienne et
à la tristesse de la misère, synonyme de résignation et de défaitisme, disent
non à la mort qui rôde inévitablement autour de leurs cases.
C’est ainsi que, endurant le poids des épreuves de notre société déstructurée,
elles s’impliquent, en vue de subvenir aux différents besoins de leur ménage.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il serait aisé de donner quelques définitions
des notions d’« activité économique » et de « revenus », sans entrer dans les
détails.
Qu’est-ce qu’une activité économique ?
Selon le dictionnaire, une activité économique est l’ensemble des activités
d’une collectivité humaine relatives à la production, à la circulation et à la
consommation des biens et des richesses.
Une activité économique se déroule en trois phases :
• La production : créer des biens et services ;
• L’échange : procéder à la commercialisation, qui implique l’importation et
l’exportation ;
• La consommation : la satisfaction des besoins.
83

Concept de revenu
Le dictionnaire définit le revenu comme ce qui revient à une personne, une
collectivité comme rémunération d’un travail, d’un produit, d’un capital pour
une période déterminée.
Le revenu, donc, désigne l’ensemble des biens et des sommes d’argent qu’un
individu ou une personne morale reçoit périodiquement, quelle qu’en soit
l’origine.
Les objectifs des activités économiques des femmes congolaises
Dans les « Actes du 18e séminaire théologique » à Kinshasa en 1991, dans son
exposé sur « l’Eglise et la promotion intégrale de l’homme et de la femme », le
professeur B. NYIMI MOENDO déclare : « nous ne devons pas oublier le
fait que dans nos villes de misère, le gros de la population doit se contenter
d’un salaire situé largement en dessous du minimum vital et tenter de le compléter
par le fruit du petit travail exercé quotidiennement presque jour et nuit
par la mère de famille […] »
Les principaux objectifs poursuivis par les femmes dans l’exercice de ces
activités génératrices de revenus sont :
• Le complément du budget ménager afin de faire face aux différentes charges
du ménage (nourriture, vêtements, soins en santé, eau, loyer, etc.)
• L’indépendance financière, donc une amélioration du revenu des femmes
• L’épargne d’une partie des revenus par le système des cartes et des tontines
en vue d’accroître les activités
• L’augmentation de la production agroalimentaire qui favorisera aussi l’accès
de la femme aux facteurs de production et aux micro-crédits
• L’échange d’information et d’expériences entre femmes et groupements
des femmes.
Les activités économiques des femmes
« Une enquête récente montre que les femmes représentent 51 % de la
population contre 48,5 % d’hommes. Par conséquent, nous pouvons dire que
la population potentiellement active est marquée par une prédominance
féminine.
Devant la faillite de l’Etat, devenu incapable de remplir correctement ses obligations
classiques, les femmes congolaises ont été forcées par la situation de
se recycler dans des activités génératrices de revenus multiples et multiformes,
en participant de plus en plus à la production, à la transformation et à la
commercialisation des biens et services.
84

1. La femme dans l’agriculture, l’élevage et la pêche
L’agriculture demeure le secteur le plus important de la production dans la vie
économique congolaise. Les deux-tiers de la population active féminine gagnent
leur vie totalement ou partiellement grâce à l’agriculture et aux activités qui
s’y rattachent.
2. La femme congolaise dans le commerce
C’est dans le commerce qu’excellent la grande majorité des femmes congolaises
qui assument cette activité avec compétence ; le secteur où elles se
trouvent essentiellement est l’agro-alimentaire (+ 80 % de commerçants). On
les retrouve dans les marchés publics, aux coins des rues, dans les boutiques,
les magasins ou devant leurs habitations.
Quelques obstacles, cependant, empêchent encore la femme d’exercer comme
il se doit cette activité. Il s’agit notamment de :
• L’accès difficile au crédit par manque de garantie et à cause du taux d’intérêt
élevé.
• L’ignorance des notions élémentaires de comptabilité et parfois le manque
de documents commerciaux (p.ex : registre du commerce).
Soulignons toutefois que c’est dans les activités commerciales que les femmes
s’investissent le plus.
Selon les études de Mme MPUTELA sur la politique alimentaire de la RDC et
la motivation des petits agriculteurs « les femmes commerçantes congolaises
réalisent l’exportation des produits alimentaires tels que le thé, le café, et l’huile
de palme avec les pays africains voisins (Burundi, Congo-Brazzaville, etc.) et
les échangent directement contre d’autres produits à vendre sur le marché
national. »
3. La femme et les activités non financières
La conjoncture économique difficile dans lequel se trouve plongé le pays a
réveillé l’esprit de créativité de la femme congolaise et l’a aidé à ouvrir une
panoplie d’autres moyens susceptibles de générer des revenus :
• La couture, activité en vogue ces dernières années, avec ses centres de
formation et d’information
• La coiffure pour dames de style traditionnel et moderne
• La restauration populaire
• La fabrication et la transformation des produits agricoles et autres : savon,
braises, bois, chikwanga, salaison et séchage des poissons, maïs, farine et
manioc en farine, charcuterie, jus, confiserie, produits pharmaceutiques.
85

4. La femme et les services financiers
Il est rare que les femmes recourent aux banques commerciales et autres
institutions modernes de crédit. Elles utilisent pour la plupart les associations
d’épargne et de crédit rotatif pour s’entraider dans l’accroissement de leurs
capitaux. Beaucoup de femmes se sont spécialisées dans le cambisme national
contre les devises. Malheureusement, cette activité cambiste appelée communément
« banque des rues » a acquis un statut que les lois de l’économie
classique sont incapables d’expliquer, car les rentrées de devises dans le pays
dont disposent ces femmes s’opèrent par le circuit non bancaire.
Difficultés rencontrées par les femmes congolaises dans leurs activités
économiques :
• Difficultés d’accès aux facteurs de production surtout l’accès au crédit à
des conditions souples ;
• Ignorance des mécanismes chargés de la promotion de leurs activités économiques
génératrices de revenus et manque de statut juridique adapté,
donc manque d’organisation administrative ;
• Utilisation des outils de production rudimentaires et manque d’accès à la
formation en technologie appropriée ;
• Les us et coutumes ne garantissent pas totalement à la femme mariée le
titre de propriété de la terre et des immeubles.
Que dire des résultats atteint par les femmes ?
D’une façon générale, l’échantillon des femmes interrogées a montré que les
activités économiques qu’elles exercent génèrent des revenus étant donné que
ces derniers les aident à :
• Subvenir aux besoins primaires de leur foyer ;
• Créer de petits emplois permanents ou à temps partiel ;
• Se familiariser davantage avec lesdites activités, à échanger des expériences
et à profiter à tout moment des connaissances et compétences des unes et
des autres.
Conclusion
Bien que les résultats des activités économiques génératrices de revenus chez
la femme congolaise demeurent encore très faibles, à cause des multiples
difficultés qu’elle rencontre, la participation et la contribution de la femme
congolaise au développement, à la reconstruction d’une nation libérée et à son
épanouissement ne présentent plus de doute ; elles devraient normalement
être l’objet de respect et d’admiration pour le bien de chacun. En effet, ses
activités économiques génèrent des revenus qu’elle affecte principalement
86

aux besoins divers du ménage et aussi dans l’épargne, les cotisations ou les
modes énumérés plus hauts. Les questions qui demeurent sont :
• La femme congolaise bénéficie-t-elle de son épargne ?
• L’épargne lui rapporte-t-elle les intérêts escomptés qui peuvent l’aider à
accroître son capital et ainsi diminuer sa pauvreté et améliorer son niveau
de vie ?
• Le taux d’intérêt fixé par les COOPEC et ONG lui permet-elle de jouir
d’une certaine marge bénéficiaire ?
Pour sensibiliser la femme congolaise à pratiquer davantage d’épargne dans
ses activités génératrices de revenus, les COOPEC et ONG devraient :
• Organiser des campagnes de vulgarisation (débats radio-télévisés, conférences
publiques, etc.) auprès des populations les plus démunies sur les
thèmes de l’éducation et la formation de la femme en matière d’épargne et
de crédits, qui démontrent les bienfaits de l’épargne, base de toute activité
d’intermédiaire financier.
• Financer leurs activités.
• S’employer à revaloriser le revenu des activités de la femme en les finançant
par l’octroi des micro-crédits dans le but de lutter contre la pauvreté
et améliorer les conditions de vie de la population, le faible revenu de la
femme constituant un obstacle à l’obtention dudit crédit.
• Améliorer le taux d’intérêt qui doit être favorable pour les deux parties.
Prendre des dispositions pour protéger et sécuriser ressources mobilisées
et les épargnes contre les agressions diverses : vols, mauvaise gestion,
dépréciation de la monnaie, etc.
• Mise en œuvre de divers moyens pour collecter les épargnes des particuliers
et des ménages.
Terminons par cet hymne d’admiration et de reconnaissance de M. Vata
Diabanza, extrait de son œuvre « Mères courages » dans Renaître n°18
sept.1995 :
… Elles sont toujours à la tâche accumulant fatigues et sacrifices mais
heureuses de construire le bonheur des autres. Et beaucoup meurent à la
tâche, épuisées mais jamais amères, fières d’accomplir jusqu’au bout leur
devoir de mère. Elles remplacent l’homme au chômage, un père démissionnaire,
un mari parti un jour, un époux gagne – petit…. Eléments stabilisateurs
de foyers, elles sont pour beaucoup dans l’équilibre de notre société en ce
temps de crise : elles rendent possibles les miracles, qui font vivre de millions
de congolais sinistrés ! Mères courages, pleines d’imagination, elles
sont pour l’Afrique et pour notre pays, les moteurs du développement.
Programme des Nations Unies pour le développement
Projet – PNUD ZAI/00/003/B/01/01 « APPUI AU PNPFC »
87

Résumé
Madame MPUTELA, responsable du projet PNUD Congo, a fait une présentation
intitulée: « L’accès au micro-crédit : modalités et systèmes adaptés aux réalités
du pays.»
En guise d’introduction, elle a précisé que le micro-crédit s’est développé à la
suite de la faillite des institutions financières, avec comme objectif principal la
réduction de la pauvreté. Elle a fait remarquer que le micro-crédit consiste en
l’octroi des crédits de manière répétitive et graduelle, tout en accompagnant le
bénéficiaire dans ses activités et leurs revenus.
Madame MPUTELA a cependant constaté que le micro-crédit reste inaccessible
aux femmes, alors que ce système vise la réduction de la pauvreté : il devrait
susciter chez les femmes et les jeunes l’esprit d’épargne et leur permettre d’augmenter
ainsi leurs activités et leurs revenus. Compte tenu de l’ampleur que prend
ce système, elle propose qu’il y ait un programme de développement et d’appui à
la micro-finance. Pour ce faire, elle propose que l’on s’inspire des propositions
faites après le forum sur l’entrepreneuriat qui avait eu lieu à Kinshasa: propositions
sur les types d’intervention, la durée, un système de gestion décentralisé et
une formation des bénéficiaires.
GUIDE GUIDE PRATIQUE PRATIQUE SUR SUR LE LE MICRO-
MICRO-
CREDIT: CREDIT: CREDIT: CREDIT: CREDIT: MODALITES MODALITES ET ET SYSTEMES
SYSTEMES
ADAPTES ADAPTES AUX AUX REALITES REALITES DE DE LA LA RDC
RDC
Madame Antoinette MPUTELA MBONGOLO
NDUNDU
1. Introduction
En RDC, le micro-crédit se caractérise par la faillite des institutions financières
non bancaires et le ralentissement des activités des coopératives en matière de
collecte d’épargne et de distribution de crédit.
Les responsables de la Banque centrale ont déjà perçu la nécessité de promouvoir
des structures alternatives de financement capables d’assurer la
mobilisation de la petite épargne, d’octroyer du crédit surtout dans le milieu
rural, et de créer les conditions d’une insertion progressive du secteur financier
informel dans le circuit moderne.
88

Les institutions de micro-finance ont pour vocation la réduction de la
pauvreté par l’octroi de crédits répétitifs et graduels tout en accompagnant
les bénéficiaires dans leurs activités génératrices de revenus et créatrices
d’emplois.
Néanmoins, pour que le micro-crédit soit une approche efficace de développement
humain durable et de réduction de la pauvreté, il doit être correctement
utilisé par une partie importante de la population et surtout par la grande majorité
des femmes qui exercent des activités génératrices de revenus et créatrices
d’emplois.
Le micro-crédit reste inaccessible aux femmes et aux jeunes qui ont peur de
ne pas être en mesure d’honorer les exigences des emprunteurs alors que
certaines femmes refusent d’avoir à faire à des petits crédits incapables de
renforcer leurs activités génératrices de revenus. Mais la grande majorité des
femmes et des jeunes du milieu rural ne sont pas informés des possibilités
d’obtenir des prêts disponibles pour l’amélioration de leurs conditions de
vie.
A l’heure actuelle et malgré le contexte d’insécurité post-conflit, le microcrédit
prend de l’ampleur dans notre pays, en raison de sa capacité à apporter
un plus à la quantité et la qualité des produits et services des bénéficiaires. Il
devient donc impératif de fixer les modalités et les systèmes adaptés aux différentes
activités génératrices de revenus dans un partenariat dynamique et
transparent entre les emprunteurs et les prêteurs pour une participation effective
des femmes et des jeunes à la réduction de la pauvreté.
2. Objectifs du micro-crédit
2.1. Objectif global
La mise en place de la stratégie de micro-crédit a pour objectif global d’améliorer
la participation effective des femmes et des jeunes à la mise en œuvre
des stratégies locales de réduction de la pauvreté (alimentaire, monétaire,
humaine).
2.2. Objectifs spécifiques
• Accroître le nombre de femmes et de jeunes qui ont accès au crédit ;
• Susciter chez les femmes et les jeunes l’esprit de l’épargne ;
• Permettre aux femmes et aux jeunes épargnants d’obtenir un crédit susceptible
de renforcer leurs activités génératrices de revenus et créatrices
d’emplois ;
• Accroître les revenus des femmes bénéficiaires de micro-crédit.
89

3. Résultats attendus du micro-crédit
• L’augmentation du nombre de femmes et de jeunes participant au système
d’épargne
• L’augmentation du nombre de femmes et de jeunes bénéficiaires du microcrédit
• L’augmentation de la production des biens et services des femmes et jeunes
bénéficiaires des micro-crédits
• L’augmentation des revenus des femmes et des jeunes bénéficiaires de
micro-crédit
• L’accroissement du nombre d’emplois des femmes et jeunes.
4. Propositions de programme de développement et
d’appui à la micro-finance à Kinshasa en 2001
Il s’agit des propositions faites par un comité de suivi du forum sur l’entreprenariat
féminin, la micro-finance et la lutte contre la pauvreté à Kinshasa.
Ce comité est composé des institutions suivantes :
• Ministère des Affaires sociales
• Banque centrale
• FGED/Ambassade du Canada
• CONAFED
• CREP/NGABA
• DIRAF
• Alternatives/Canada
• COOCEC/CEAC.
Et de trois consultants :
• Monsieur Pierre MBAMBI
• Monsieur Charles LUNJWIRE
• Monsieur Lambert MIMPIYA.
4.1. Objectif global
Contribuer à la lutte contre la pauvreté des femmes et des ménages dans la
ville de Kinshasa par le développement et l’appui à la micro-finance.
90

4.2. Aspects de la micro-finance
• Nombreuses initiatives de micro-finance par les ONG
• Manque de professionnalisme de la micro-finance
• Institutions de micro-finance financièrement non autonomes et rentabilité
des institutions de micro-finance non assurée
• Initiatives des institutions de micro-finance ne dépassant pas le court terme,
donc faible durabilité
• Peu d’effort de mobilisation de l’épargne
• Intérêt réel de la Banque centrale congolaise aux institutions de microfinance
• Opérations de proximité non facilitées et en dysfonctionnement
4.3. Résultats attendus
• Institutions de micro-finance autonomes, rentables et professionnelles à
Kinshasa
• Prise en charge des besoins sociaux (santé, éducation) assurée aux femmes
et ménages bénéficiaires des micro-crédits
4.4. Stratégies et activités de la micro-finance
4.4.1. Renforcement des activités de la micro-finance :
• Culture de l’épargne et de crédit
• Orientation des femmes vers des activités rentables
• Acquisition de l’esprit d’affaires
• Mobilisation des épargnes par les institutions de micro-finance
• Sécurité et rémunération des épargnes par les institutions de micro-finance
• Services de proximité aux bénéficiaires des micro-crédits auprès des institutions
de micro-finance
• Procédures et suivi des bénéficiaires des micro-crédits par les institutions
de micro-finance
• Commission de contrôle et de suivi des institutions de micro-finance
• Diversification des services par les institutions de micro-finance
• Outils de gestion appropriés par les institutions de micro-finance
• Autonomie institutionnelle des institutions de micro-finance par rapport
aux ONG/D
• Vulgarisation des textes légaux sur les institutions de micro-finance
91

4.4.2. Intégration des activités de solidarité (santé et éducation) et
assistance mutuelle au sein des institutions de micro-finance
Il s’agit des activités suivantes :
• Recensement des mutuelles existantes et de leurs expériences
• Formation des membres des institutions de micro-finance à l’activité
d’assistance mutuelle
• Organisation d’un système d’assistance maladie et scolaire mieux adapté à
l’environnement
• Création de petites pharmacies et de petits dispensaires financés par les
institutions de micro-finance en faveur des membres exclusivement
• Mise en place d’un fonds de solidarité et d’assistance mutuelle
• Création de regroupements, d’associations et de mutualités d’assurance
santé
5. Modalités pratiques d’octroi de micro-crédit
5.1. Types d’intervention
Les micro-crédits devraient être octroyés à toutes les femmes et à tous les
jeunes qui s’investissent déjà avec plus ou moins de succès dans les activités
génératrices de revenus et créatrices d’emplois dans les domaines suivants :
- Agriculture mixte
• Production végétale (manioc, maïs, arachides, courges, légumes
maraîchers, patates douces)
• Elevage de petit bétail (porcs, chèvres, canards, poules, etc.)
- Transformation agroalimentaire
• Fabrication artisanale d’huile de palme
• Fabrication de la chikwangue
• Fabrication de galettes de courges
• Fabrication de jus de fruits
• Fabrication de miel
• Production de biscuits
• Fabrication de boulettes de viande
• Salaison de poissons et viandes
• Fumage de poissons et viandes
92

- Transformation chimique et cosmétique
• Savons
• Créoline et bactérol
• Pommades pour cheveux
• Parfums
- Autres transformations artisanales
• Maroquinerie
• Teinturerie
• Couture
• Peinture
- Pharmacie à base de plantes médicinales
- Restauration sur la base de la cuisine congolaise
- Commerce des produits alimentaires et manufacturés
- Transport fluvial
5.2. Le montant individuel des micro-crédits
Il est acceptable, vu que la nature des activités génératrices de revenus dans
notre pays varie entre 200 $ (deux cents dollars américains) et 500 $ (cinq
cents dollars américains).
5.3. Les critères d’octroi des micro-crédits sont :
• Avoir un minimum d’épargne individuelle représentant un dixième (1/10)
du crédit sollicité ;
• Etre membre d’un groupement professionnel, confessionnel ou syndical
encadrant les activités génératrices de revenus de leurs membres depuis
au moins six mois ;
• Avoir une expérience professionnelle dans l’activité génératrice de revenu
d’une année ;
• Etre parrainé par son groupement (association, ONG, église) pour constituer
la garantie solitaire.
5.4. Durée du crédit
La durée des prêts devrait être de 12 mois avec un délai de trois mois pour
permettre aux femmes agricultrices d’avoir un début de récolte surtout pour
la culture de manioc qui est l’aliment de base de la grande majorité de la
population congolaise.
93

5.5. Taux d’intérêt
L’institution traditionnelle d’épargne et de crédit, la tontine améliorée, est organisée
sans paiement d’intérêt. Le taux d’intérêt annuel pour le crédit libellé en
devises varie entre 12 % et 16 % l’an, donc de 1 % à moins de 2 % par mois,
c’est-à-dire un crédit à faible taux d’intérêt.
Dans la mesure où l’institution de micro-finance mobilise aussi l’épargne des
bénéficiaires de crédit, il serait juste de proposer aux épargnants le même taux
d’intérêt appliqué à l’octroi de crédit.
5.6. La gestion des micro-crédits
La gestion des micro-crédits devrait être très décentralisée pour atteindre les
femmes et les jeunes avec leurs activités génératrices de revenus jusqu’au
niveau des villages. Les structures proposées sont :
1ère structure : Le comité de pilotage
Ce comité devrait renforcer le partenariat entre l’Etat, la Banque centrale, les
institutions de micro-finance des femmes et des jeunes, les groupements des
bénéficiaires de micro-crédits et les bailleurs des fonds.
2ème structure : Le comité national de gestion
Ce comité assure le suivi de l’identification des bénéficiaires, de la collecte de
l’épargne des bénéficiaires, de la distribution des micro-crédits, du remboursement
des crédits, de la formation des bénéficiaires en gestion de micro-crédit
et formation professionnelle et des indicateurs de réduction de la pauvreté des
bénéficiaires.
Etant donné qu’il s’agit de mobiliser l’épargne des femmes et des jeunes
pauvres, les membres du comité national de gestion devront aussi mettre en
œuvre leurs propres capacités d’épargner.
3ème structure : Les comités de gestion décentralisés
Les différents groupements de femmes et de jeunes encadrant les activités
génératrices de revenus devraient désigner les institutions de micro-finance
crédibles susceptibles de mobiliser leurs épargnes et leur accorder les microcrédits.
Ces institutions de micro-finance devraient mettre en place des comités
de gestion en veillant à la parité hommes-femmes dans leurs organes de prise
de décision. Ici aussi, les membres du comité de gestion devront mettre en
œuvre leur propre capacité d’épargner.
5.7. Formation des bénéficiaires de micro-crédits
• Formation professionnelle (professionnalisation) : pour permettre aux bénéficiaires
des micro-crédits de maîtriser le métier qu’elles ont elles-mêmes
94

choisi et pour améliorer leur capacité de production et la qualité des
produits.
• Formation en gestion : pour permettre aux bénéficiaires non seulement de
bien gérer leurs avoirs financiers mais également toutes leurs unités de
production. Cela leur permettra, sans doute, d’exercer un contrôle sur le
fonctionnement du système de micro-crédit.
• Accompagnement des bénéficiaires sur terrain : il s’agit du suivi de l’utilisation
des micro-crédits pour assurer aux bénéficiaires l’amélioration de la
productivité et la pérennisation des activités.
95

Résumé
La troisième oratrice de la journée a abordé le thème de « L’expérience de la
diaspora dans le mouvement associatif des femmes de la diaspora et la problématique
du développement ». Madame Dora ILUNGA, conseillère au Ministère belge
du Travail en matière d’Emploi et de Formation a d’abord tenu à exprimer à quel
point elle était impressionnée par les conférences dans lesquelles on ne parle que
des femmes des autres pays africains, sans mentionner les Congolaises.
Elle a commencé par définir ce qu’il fallait entendre par « diaspora » et par
« mouvement associatif des femmes de la diaspora », et a ensuite brossé un historique
de la naissance du mouvement associatif dans les pays européens et surtout
en Belgique. Il s’est dégagé de cette explication que le mouvement associatif de la
diaspora s’est créé au fur et à mesure, en commençant par des regroupements
informels par origine, puis à la faveur de l’accroissement de la population africaine
en Belgique suite aux afflux de population vers les années 1990 d’une part,
et à l’assouplissement des lois sur la nationalité d’autre part.
Après ce bref historique, l’intervenante s’est penchée sur le fonctionnement des
associations de la diaspora. Elle a parlé notamment des domaines d’intervention
de ces associations, de leur mode de fonctionnement et de leurs sources de financement.
Elle a donné l’exemple de l’association « Chantier Afrique » et de la mise en place
d’un projet en s’inspirant d’une expérience positive en Equateur, en collaboration
avec les banques espagnoles.
Elle a ensuite défini les côtés positifs et négatifs des associations de la diaspora,
avant de conclure que les associations de la diaspora avaient un grand rôle à
jouer dans la coopération au développement et restaient ouvertes à une collaboration
avec les associations de la RDC.
96

EXPERIENCE DE LA DIASPORA DANS LE
MOUVEMENT ASSOCIATIF DES FEMMES
DE LA DIASPORA ET PROBLEMATIQUE
DU DEVELOPPEMENT
Madame Dora ILUNGA
Mesdames et Messieurs les représentants des gouvernements,
Mesdames les Ministres,
Madame la représentante de l’Organisation internationale pour les migrations,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un immense plaisir que je me tiens aujourd’hui devant vous dans le
but de partager ensemble nos expériences de femmes à différents postes de
responsabilités et de différents lieux géographiques.
Je tiens à remercier les promoteurs d’une telle rencontre et particulièrement
l’Organisation internationale pour les migrations.
Il me sera très difficile de développer, en 20 minutes seulement, un sujet aussi
riche que celui de l’ « Expérience de la diaspora dans le mouvement associatif
des femmes de la diaspora et problématique du développement ». En effet,
chaque terme de ce sujet vaut à lui seul tout un débat !
J’ai donc choisi de présenter mon intervention de la manière la plus générale
possible en mettant toutefois en évidence la dimension du genre.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de clarifier les concepts
suivants :
Diaspora :
ensemble de la communauté africaine subsaharienne qui s’est établie à l’étranger,
essentiellement dans les pays européens d’immigration (Belgique, France,
Pays bas, Royaume-Uni, etc.)
Mouvement associatif des femmes de la diaspora :
ensemble des associations dont les membres du comité de direction ou les
leaders sont des femmes issues de la communauté africaine sub-saharienne.
1.Le 16 décembre 2002 une loi belge crée l’Institut pour l’égalité des femmes
et des hommes.
97

Son objet (en résumé) : veiller au respect de l’égalité des femmes et des hommes.
Son action : organiser le soutien aux associations actives en matière d’égalité
des femmes et des hommes ou des projets ayant pour finalité la réalisation de
l’égalité des femmes et des hommes.
2.Le service public fédéral (SPF) de l’emploi contribue depuis 2001 aux
initiatives que le service public fédéral des Affaires étrangères développe
en matière de diplomatie préventive.
C’est exactement sur ces deux pistes que se situe le rôle des associations des
femmes de la diaspora.
Le SPF Emploi contribue à la dimension sociale de ce programme tandis que
le SPF Affaires étrangères est davantage axé sur la dimension politique de la
prévention des conflits.
L’aspect « égalité des chances » est une question prioritaire pour le SPF Emploi.
Il a d’ailleurs soutenu plusieurs projets proposés par des associations de femmes
migrantes entre 2001 et 2003.
Le SPF Emploi peut acquérir de l’expérience grâce à d’autres acteurs de la
société civile, à savoir les ONG et les associations du Nord comme celles du
Sud.
Historiquement, les femmes ont souvent été exclues des ressources matérielles,
financières ou sociales telles que l’éducation ou l’accès à certaines
professions.
Pour réduire ces inégalités et permettre aux femmes de jouer un plus grand
rôle au sein de la société, il est nécessaire de favoriser leur accès aux ressources
matérielles, humaines et sociales qui vont renforcer leur autonomie et leurs
possibilités de choix.
L’engagement associatif semble être un bon moyen pour répondre à ce besoin
d’autonomie. Mais qui sont ces associations des femmes de la diaspora? Que
font-elles ? Que veulent-elles ?
Autant des questions auxquelles cet exposé tentera de répondre de manière
succincte.
« L’union fait la force », dit un célèbre proverbe !
Chez tout groupe humain en milieu étranger, le fait de se regrouper procède
d’une logique de sécurité d’abord, et d’une logique d’action ensuite.
La perception d’un environnement hostile, peu accueillant, et le désir de se
faire reconnaître auprès de la société d’accueil sont des éléments catalyseurs
du mouvement associatif.
98

Je propose, pour développer mon analyse, de scinder mon exposé en quatre
parties :
La première partie, purement théorique, sera faite d’une brève introduction au
monde associatif de la diaspora et son contexte général, avec un clin d’œil à la
diaspora de Belgique.
La deuxième partie, plus pratique, tentera de mettre en lumière la pratique des
associations de la diaspora dans le cas précis du développement. Nous nous
arrêterons sur quelques expériences intéressantes à partager.
La troisième partie traitera des éléments positifs (plus-values) et négatifs
(critiques) des associations de la diaspora mais aussi spécifiquement des
associations des femmes de la diaspora.
Pour terminer, la dernière partie proposera des perspectives d’avenir ainsi que
diverses recommandations.
Ière PARTIE :
Contexte général
Pendant la première phase de l’immigration africaine, le nombre d’associations
était faible. Cela découlait du fait que certaines exigences administratives
quant à la création des associations, en Belgique par exemple, exigeaient la
présence dans les administrations de personnes de nationalité belge. Or, comme
nous l’avons mentionné plus haut, le regroupement était le plus souvent basé
sur l’appartenance à un même pays, donc à une même culture et une même
manière de vivre.
Les objectifs de départ étaient de garder le contact avec le pays d’origine
(avec en toile de fond le retour au pays), et aussi de préserver et conserver
des repères culturels indispensables à la survie du groupe ou de la communauté.
A ce moment-là, rien ne se fait en direction du pays d’accueil.
Petit à petit, la diversité et le nombre des associations africaines s’accroit. La
dimension du genre fait son apparition suite aux regroupements familiaux et à
l’évolution des mœurs (les femmes se déplacent également seules, soit pour
des raisons de formation, de protection comme réfugiée ou tout simplement
de recherche de bien-être économique).
La décennie 1990 se caractérise par un accroissement visible des demandes
d’asile. Ainsi, aux côtés des pays d’où proviennent le plus de demandeurs
d’asile (Roumanie, L’ex-Yougoslavie, l’Inde, le Pakistan, etc.) viennent se
ranger sept Etats africains : la République démocratique du Congo, le Nigeria,
le Ghana, l’Angola, le Togo, la Guinée et le Liberia.
Notons d’ailleurs que c’est durant cette période que sont engagés, un peu
partout en Afrique, les processus de démocratisation des Etats. Les mouve-
99

ments d’opinion et les troubles sociaux qui ont accompagné un peu partout
ces processus ont probablement joué un rôle non négligeable sur ces importants
déplacements de population, à la recherche de conditions de vie moins
hostiles1 .
Durant cette période et les années qui suivirent, la population africaine a augmenté
de manière spectaculaire, non seulement en termes quantitatifs mais
aussi qualitatifs ; les personnes vivent dans des situations de moins en moins
précaires. On assiste à une véritable sédentarisation de ces populations à
l’étranger.
En Belgique, dans les années 90, on entend parler pour la première fois de
projet de vie et d’intégration de la communauté africaine.
Ce nouvel engouement se manifeste par l’acquisition de la nationalité belge, le
code d’acquisition ayant été par ailleurs assoupli.
Pour la seule année 1998 par exemple, sur un total de 34 034 étrangers devenus
belges, 1997 étaient issus du continent africain.(Sources : Institut national
des Statistiques 1990-1998. Calculs: B.KAGNE, ULG, 2000.)
On voit alors l’inscription de ces nouveaux migrants dans une démarche de
recherche d’emploi, puis dans l’achat du logement, la participation citoyenne
dans la ville ou dans le quartier via notamment le réseau associatif.
En 1992, l’anthropologue Christophe Daum a ainsi dénombré plus de 400
associations de développement du village d’origine. Il a estimé à 70 % le
pourcentage de ressortissants immigrés originaires de la région sub-saharienne
et liés à ces associations sur le territoire français2 .
Cet engouement des migrants à se constituer en association se retrouve également
dans les activités d’associations installées dans tous les pays d’immigration
: la Belgique, la France, les Pays-Bas, le Canada ou le Royaume-Uni.
Aujourd’hui, le mouvement associatif et celui des femmes de la diaspora en
particulier témoignent d’une diversité aussi bien sur le plan du niveau d’intervention
(familial, villageois, régional ou national) que sur celui des types
d’actions et de projets retenus, ce qui s’explique aussi par la diversité des
histoires migratoires des promoteurs de ces associations.
1 B. Kagne et M. Martiniello, L’immigration subsaharienne en Belgique, courrier
hebdomadaire, n°1721, 2001, P. Salmon (ed), processus de démocratisation en Afrique :
impact et perspectives, Actes du colloque international des 11-14 à Cotonou, Editions
CGRI et ULB, 1994; G. de Villers et J. Omasombo, Zaïre, La transition manquée, Paris
et Bruxelles, CEDAF, 1998; A. Coubba, Le mal djiboutien, Rivalités ethniques et enjeux
politiques, op.cit. pp.60 et ss.
2 DAUM Ch., Ici et là-bas, immigration et développement. Les associations des
immigrés ouest-africains, Migrations Société, vol.6, n°32, mars-avril 1994, p.99.
100

IIème PARTIE :
La pratique des associations de développement
de la diaspora
Qui sont-elles ? Que font-elles ? Que veulent-elles ?
La structuration de ces associations semble avoir connu trois étapes :
• la caisse de solidarité informelle pour la survie du groupe à l’étranger
• l’apparition progressive des actions de solidarité internationale mais dirigées
encore trop souvent vers le village d’origine
• vers 1990 apparaissent des actions véritables de solidarité internationale
qui dépassent le cadre du village.
a. Types, nombre et domaines d’intervention d’associations de
migrants
La majorité des associations est actuellement enregistrée dans les différents
pays d’immigration. Elles peuvent donc avoir accès aux différentes subventions
existantes sur place.
Une étude de l’association SongES en 20013 qui avait pour objectif de répertorier
les associations africaines en Belgique dénombra environ 285 associations
répertoriées mais seulement 54 se retrouvaient dans le guide. On est confronté
à la difficulté de faire une répartition selon les domaines d’intervention ; selon
cette étude, très peu d’associations se spécialisent dans un domaine particulier.
Mais aujourd’hui en Belgique, seules quatre associations de migrants sur les
54 citées plus haut et 284 estimées dans le guide SongES par exemple, sont
agrées comme ONGD, c’est-à-dire qu’elles sont reconnues et financées par
le gouvernement belge dans le cadre de la coopération au développement belge.
Ce chiffre est très faible ; nous aborderons le sujet un peu plus loin.
Toujours selon l’étude réalisée par SongES, l’aspect « genre », c’est-à-dire la
participation des femmes dans les associations des migrants est très intéressante
: plus de la moitié du comité de direction de ces associations est constituée
par des femmes et ce chiffre a sûrement augmenté de manière importante
depuis 2001. Il suffit de voir le nombre d’associations gérées par des femmes
de la diaspora lors de colloques ou la quantité de leurs démarches de promotion
auprès des organismes donateurs que nous sommes.
Christophe Daum relève dans son étude sur la typologie des associations sahéliennes
qu’à partir de 1985, les domaines d’intervention relatifs aux investissement
ressortent clairement. Le choix des associations des migrants se porte
sur quatre domaines prioritaires : la santé (acheminement des médicaments,
3 Kassa Adèle, Répertoire : les associations africaines de Belgique, creuset des nouvelles
solidarités ; SongES, Bruxelles, Belgique, avril 2001.
101

construction de dispensaires, etc.), la consommation (banques de céréales,
magasins coopératifs, véhicules pour acheminement des denrées alimentaires,
etc.), l’eau (assainissement, eau pour les cultures et l’élevage, etc.) et l’éducation
(écoles). Ensuite vient la religion : ces pays étant souvent musulmans,
la construction des mosquées était parmi les domaines d’actions les plus
répandus avant 19754 .
Ces constats semblent se confirmer pour l’ensemble des associations africaines.
b. Mode de fonctionnement
Il dépend de plusieurs paramètres.
Après un voyage dans le pays d’origine, on peut revenir avec une demande
précise de celui-ci, par exemple, la construction d’une route dans une zone
rurale ou proposer son soutien, face au simple constat d’un manque.
Certaines ONG de développement sont sollicitées par des associations étrangères,
travaillant dans le Sud pour créer une synergie ou des ponts avec celles
du Nord, faute de moyens pour venir elles-même au Nord (moyens financiers
pour couvrir les frais du voyage, démarches pour obtenir un visa, etc.)
Les associations du Sud peuvent aussi contacter directement celles des migrants
du Nord pour partager un savoir-faire ou une pratique professionnelle.
Il faut également noter que l’élaboration des projets ne se fait pas uniquement
dans le pays d’origine mais dans d’autres pays africains limitrophes. C’est le
cas de ‘Chantier d’Afrique’, une association congolaise en Belgique qui a des
projets au Bénin.
c. Les sources de financements
Il serait impossible et inutile de citer ici toutes les aides en matière de développement
; notre objectif est bien de montrer de quelle manière les associations
des migrants utilisent ces opportunités.
Le premier niveau de financement est occupé par les différentes organisations
internationales dérivées ou non de l’Organisation des Nations Unies (ONU).
Ces macro-structures fonctionnent le plus souvent avec les gouvernements
ou en partenariat avec d’autres macro-structures du pays ou encore directement
avec les ONG sur place. Rares sont celles qui passent par des associations
de migrants non agrées à l’étranger comme ONGD, qui constituent pourtant
la quasi totalité des associations. En effet, seules quatre associations sur environ
284 dénombrées par SongES possèdent cet agrément.
4 Daum, Ch., Les associations des maliens en France. Migration, développement et
citoyenneté, Paris, Karthala, 1998, p.24.
102

Puis il y a l’Europe qui à travers différents programmes soutient des initiatives
de développement au sud. La participation des associations des migrants y est
plus effective : c’est le cas du service volontaire européen grâce auquel chaque
année des jeunes peuvent partir dans le sud pour participer à des projets de
développement introduits par des associations de migrants. Il existe également
des lignes de financement accessibles aux associations des femmes ou
gérées par des femmes : c’est le cas du programme EQUAL (égalité des
chances) ou encore DAPHNE (contre la violence physique ou morale à l’endroit
des femmes entre autres).
Comme nous l’avons cité dans le préambule, les gouvernements des pays
d’accueil soutiennent également des initiatives au sud : c’est le cas du gouvernement
fédéral belge, qui agit notamment via les services publics fédéraux, la
diplomatie préventive ou le financement direct des projets par les femmes
pour les femmes, dont plusieurs associations de femmes de la diaspora ont pu
bénéficier.
En Belgique, le Centre national de la Coopération au Développement finance
également plusieurs micro-projets de développement au sud, notamment via
l’opération 11.11.11, opération nationale de récolte de fonds qui a lieu chaque
année en novembre.
Toutefois, la majorité des financements est utilisée par les associations
reconnues et agrées comme ONG de développement, ce qui n’est pas l’idéal
puisque les ONGD ont encore des préjugés à l’égard des associations de
migrants, alors qu’un travail de partenariat pourrait être enrichissant.
Par contre, ce qui est intéressant de relever est le fait que les quatre seules
associations de migrants reconnues comme ONGD parmi environ 285 autres
sont soit présidées, soit gérées par des femmes.
Il faut cependant souligner que la récente décentralisation de la coopération au
développement en Belgique, à différents niveaux des pouvoirs (régional et
communal), a permis à de nombreuses associations de réaliser des projets de
développement en collaboration avec ces institutions de pouvoir. Celles-ci se
positionnent alors comme intermédiaire entre les administrations et le projet
choisi.
Ici aussi beaucoup d’associations de femmes de la diaspora se mobilisent,
surtout lorsqu’il s’agit de l’aide urgente, par exemple lors de l’éruption volcanique
à Goma.
Pour conclure, il y a également dans l’informel des organisations de femmes
de la diaspora qui n’apparaissent dans aucune statistique et qui effectuent des
transferts d’argent vers des projets de développement au Sud.
Citons deux expériences intéressantes d’associations de femmes de la diaspora
ou pour ces femmes.
103

1er cas : L’association Chantier d’Afrique
Basée à Bruxelles en Belgique et gérée par des femmes essentiellement.
Objectifs :
• accompagner les personnes migrantes dans leurs pays d’origine dans le
but d’une réinsertion socio-professionnelle ;
• réinsérer en Belgique des personnes migrantes ;
• accroître le pouvoir des femmes et par conséquent, améliorer les conditions
de vie et l’éducation de la famille.
Activités :
Des femmes congolaises se rendent au Bénin pour promouvoir la culture et
l’exploitation des feuilles de manioc dit « pondu ». Ensuite, elles procèdent à
la vente des produits de transformation (pondu prêt à l’emploi, tubercules de
manioc et ses dérivés, entre autres), dans le magasin de produits alimentaires
de l’association à Bruxelles.
Les effets multiplicateurs de cette action ne sont plus à démontrer, notamment
: création d’emplois pour les femmes de l’association en Belgique, création
d’une activité rémunératrice pour les femmes du Bénin, valorisation des
« mama » congolaises.
2ème cas : Le flux des capitaux qui vont des pays d’accueil vers les pays
d’origine est considérable (p.ex : 100 millions de FF résultent de l’immigration
malienne en France).
Cependant, ces transferts sont non sécurisés (pas d’assurance d’arrivée à
destination et coûts élevés). Les fonds ainsi transférés sont absorbés par la
famille pour les besoins de consommation ou investis sans projet pré-étudié,
et le migrant continue à vivre ici dans une situation précaire.
Des contacts sont actuellement en cours entre une association présidée et
gérée par des femmes de la diaspora et les organismes concernés. De quoi
s’agit-il ?
En collaboration avec une banque européenne, une banque congolaise active
dans l’épargne et le micro-crédit créera un service d’appui à la diaspora des
femmes congolaises en Belgique et leurs familles. Ces femmes congolaises et
leurs familles auront un projet avec trois objectifs :
1. Rentrer au Congo dans un délai minimum d’un an et de maximum 3 ans ;
2. Acheter leur propre maison une fois de retour au Congo ;
3. Réunir le capital nécessaire pour démarrer leur propre micro-entreprise.
Ce projet permettra aux migrants d’épargner via un compte ouvert en Belgique
mais directement versé au Congo, à moindre frais. Grâce à cette épargne, ils
104

pourront constituer un capital, acheter une maison et financer leur retour, à
l’aide d’un soutien complémentaire de la banque belge.
IIIème PARTIE :
Les éléments de la plus-value et les critiques
concernant les associations des migrants
Nous nous baserons ici sur certaines études ou évaluations réalisées notamment
par Mesdames SACRÉ5 et AGEZAL6 ainsi que par moi-même.
Plusieurs points sont reconnus comme des spécificités positives, des plusvalues
à exploiter dans les associations de migrants, éléments absents chez les
acteurs classiques du développement :
1.la motivation et la mobilisation
2.un long processus de négociation pour l’identification des projets
3.une grande adhésion des bénéficiaires
4.une forte capacité à cotiser
5.une prise en charge du projet quasi totale
6.des actions et des projets remettant en cause les politiques
7.des projets à forte composante sociale
8.des interventions agissant sur la transformation des sociétés
9.un contact régulier avec leur lieu d’origine
10.différents niveaux d’interventions
En analysant les plus-values supplémentaires liées au genre, on peut souligner
que :
11.l’accès de la femme aux subventions est un moyen d’augmenter son capital
de travail et donc de professionnaliser son activité, ce qui lui permet de
renforcer son autonomie
12.la confiance en soi et l’autonomie qui peuvent résulter de la gestion par les
femmes entraînent un effet très positif au sein de la communauté ici et làbas
: elles deviennent conseillères, exemples et confidentes et peuvent
faire passer tout message de manière efficace.
5 Sacré, C., Les communautés de migrants, actrices de développement, Résultat d’une
enquête, éléments de réflexion et d’analyse, CNCD-FCD-ITECO-OXFAM, octobre
2000.
6 Agezal, L. JH., La plus-value des actions et des projets des associations migrantes de
développement, mémoire en vue de l’obtention du DESS en Coopération et Développement,
ULB, 2001-2002.
105

Les failles et les manques qui empêchent malheureusement l’épanouissement
total des associations de migrants sont les suivants :
1.Le localisme
2.Des actions et des projets consuméristes et non productifs
3.Les désaccords avec les villageois sur la conception du développement
4.La réduction des transferts financiers liée à la diminution de la migration
5.L’apparition de nouveaux bailleurs de fonds sur le terrain
6.Le manque d’implication du migrant dans la réalisation et le manque de
suivi des projets financés par ses cotisations
7.Le manque de professionnalisme dû au manque de moyens financiers,
matériels, intellectuels
8.La faiblesse du fait des divisions internes ou externes qui la déchirent et
des conséquences que ces divisions imposent au processus global
d’insertion
9.Un manque total de solidarité avec les associations présentes dans d’autres
communautés ou régions (Magreb, Afrique de l’Ouest, etc.) Est-ce dû à
la religion musulmane, dont les principes de partage et de solidarité ne
sont plus à prouver ? Le débat reste ouvert.
Les points 7 et 8 sont des points négatifs qui ont été mis en évidence lors
d’évaluations réalisées au sein des associations de migrants d’origine africaine,
en ma qualité d’évaluatrice de projet entre 1999 et 2002.
Les points négatifs spécifiques à envisager sous la dimension du genre sont :
10.Lorsqu’une femme adhère à une association et que celle-ci se développe,
le mari, la famille ou la belle-famille n’acceptent pas le fait qu’elle gagne en
autonomie et s’affirme ; il y a alors un risque de violences ou d’attitudes
négatives qui auront forcément un impact sur l’association et ses activités.
IVème PARTIE :
Conclusions et perspectives
Tout au long de cet exposé, nous avons découvert l’apport immense que les
associations de migrants et spécialement de femmes migrantes peuvent présenter
pour l’efficacité et la réussite de la coopération au développement. Or,
ces atouts ne pourront être réellement efficaces que si certaines conditions
sont remplies, telles que la reconnaissance et la prise en compte :
• des compétences et apports cités plus haut
• des associations de migrants en tant qu’acteur viable de développement
106

• de la mise en place d’un réel partenariat entre les associations des migrants
et les ONGD agrées du Nord
• et surtout de la révision des critères d’agrément : il n’est pas logique que
seulement quatre associations de migrants soient reconnues et agréées
comme ONGD. Y remédier permettrait de résoudre le problème du manque
de moyens dont elles sont victimes
• de la formation au management de projet qui permettrait également d’améliorer
l’efficacité et la crédibilité de ces associations.
Il est tout aussi important de retrouver au sein de ces associations de migrants
cette solidarité légendaire du pays d’origine dans les pays du Nord.
Je terminerai par le même adage cité au début de mon exposé : « L’union fait
la force ».
Je vous remercie.
* * * *
Les différentes présentations de la matinée ont été suivies par une heure de
débats. Les discussions ont tourné essentiellement autour des questions
suivantes :
- Le but caché du paternalisme belge en favorisant l’émergence des étrangers,
en se référant au cas du rapatriement des Rwandais via la RDC fait
par l’OIM en remettant 25 000 dollars à chacun.
- L’origine du financement des coopératives de crédit et des exemples de
coopérative.
- A qui profitent les crédits octroyés aux ONG ?
- Les facteurs à l’origine de la faillite des banques et les remèdes à y apporter.
- Les avantages du CD (certificat dépôt) dans la stabilisation de la monnaie.
- Les leçons tirées de l’octroi des crédits.
- Y a-t-il des contrôles après l’octroi ?
- La difficulté de garder le contact avec les associations de la diaspora.
- La nécessité pour la diaspora de se muer en structure internationale pour
mieux aider les associations locales.
- Les conseils que nos sœurs de la diaspora peuvent donner aux femmes
congolaises pour qu’elles remédient à leur sous-représentation au sein des
institutions de transition.
- Les domaines de coopération possibles entre nos associations, c’est-àdire
diaspora et RDC.
107

A ces différentes préoccupations, les réponses ont été les suivantes :
- En ce qui concerne la question posée par l’envoyée de la DYNAFEP, la
représentante de l’OIM a fait une mise au point claire surtout en ce qui
concerne l’OIM, dont les ressources principales sont les cotisations des
membres.
- Il existe par exemple la COOPEC et la COSEC.
- Quand on octroie des financements, c’est sur la base d’une ligne projet
qu’il faut regrouper utilement.
- Les facteurs à la base de la faillite des banques sont l’inflation et la perte du
pouvoir d’achat.
- L’avantage d’un certificat-dépôt est la stabilisation de la monnaie. Il faut
noter que l’opération visait l’épargne.
- L’octroi des micro-crédits se fait effectivement par l’entremise de la FAO
et du PNUD dans les domaines de l’agriculture dans certaines provinces.
Malheureusement, les bénéficiaires ont tendance à utiliser ces crédits pour
d’autres financements et ils deviennent insolvables. Cela est dû au manque
de formation et de suivi.
- Des contrôles a priori et posteriori existent déjà.
- Les associations de la diaspora sont récentes, et il faudrait que les critères
soient assouplis et qu’une fois que ces associations sont devenues ONG,
elles puissent être plus efficaces dans la collaboration avec les ONG congolaises.
De plus, les ONG belges, plus structurées, prennent des marchés à
celles de la diaspora.
- Il faudrait que les femmes imposent l’alternance homme-femme dans les
partis politiques, par exemple lors des élections. Il faudrait aussi constituer
des alliances avec les hommes qui sont attentifs à la question de la représentation
de la femme.
- Il est difficile de dire d’emblée quels domaines de collaboration sont
envisageables. Il incombe aux ONG/RDC de proposer des domaines de
partenariat. Il a été proposé la constitution d’un relevé de toutes les associations
de la diaspora comprenant tous les renseignements à ce sujet.
108

Résumé
Deux oratrices ont donné une présentation l’après-midi, sous la modération de
Madame Josianne MFULU :
La première, Madame Henriette MINCHIABO, directrice des études au Ministère
du Travail et de la Prévoyance sociale, a parlé du thème « Nouveau code du
travail, vers l’égalité des chances? »
L’intervenante a d’abord voulu circonscrire le sujet en précisant qu’il existait des
instruments internationaux en matière du travail ayant été ratifiés par la RDC. Le
BIT a classé en trois catégories les conventions et recommandations qui concernent
la femme travailleuse :
- égalité des chances et de traitement
- emploi et mise en valeur des ressources humaines
- condition de travail et de vie.
Toutes ces catégories visent à une meilleure protection sociale de la travailleuse.
Il faut noter cependant qu’elles sont aussi critiquées parce qu’elles portent soidisant
atteinte à l’égalité des chances et de traitement.
En deuxième lieu, l’oratrice a tenu à définir la notion d’« égalité des chances et
de traitement ». Cette expression est un principe qui a pour objectif de promouvoir
le droit des travailleuses et d’améliorer leurs conditions de travail. Elle a
voulu, de façon résumée, relever quelques innovations du nouveau code du travail
par rapport à l’ancien code, et a parlé notamment de la définition du terme
« travailleur » et du contrat de travail en explicitant la référence à la suppression
de l’opposition expresse du mari, de l’âge (16 ans au lieu de 14 ans), de la
suspension du contrat (l’employeur ne peut suspendre ou résilier le contrat pour
cause de grossesse ou d’accouchement), de l’embauche (on ne peut exiger un
certificat attestant ou non l’état de grossesse), du droit de la femme au congé
maternité, à l’allaitement, et du droit au logement.
Madame MINCHIABO a précisé que c’était sur le terrain que l’on pouvait décider
si le nouveau code du travail conduisait réellement à l’égalité des chances et de
traitement.
Pour terminer, elle a loué le nouveau code du travail qui, s’étant inspiré de normes
de l’OIT et de la constitution, permet à la travailleuse de jouir des mêmes conditions
de travail que son collègue homme et de prendre désormais part, au même
titre que son collègue masculin, à la reconstruction nationale et à la prévention
les conflits.
109

LE LE NOUVEAU NOUVEAU CODE CODE DU DU DU TRAVAIL TRAVAIL :
:
VERS VERS L’EGALITE L’EGALITE DE DE CHANCES
CHANCES
ET ET ET DE DE TRAITEMENT TRAITEMENT ?
?
Madame Henriette TSHIMUANGA MINCHIABO
1.Nous tenons tout d’abord à remercier les organisateurs pour la confiance
témoignée à notre modeste personne en nous associant au séminaire de
renforcement du rôle des femmes dans la reconstruction.
2.Nul n’ignore que la RDC est membre de l’Organisation internationale du
Travail depuis sa souveraineté nationale, le 30 juin 1960. La Conférence
internationale du Travail a adopté jusqu’à présent environ 184 conventions
et 195 recommandations. La RDC compte 37 ratifications à ce jour
et la plupart des dispositions pertinentes ont été insérées dans la Loi
n° 015/2002 du 16 octobre 2002 promulguée en 2002, comportant le Code
du Travail. Cette loi fait l’objet de notre échange de ce jour. Nous pouvons
nous demander si le nouveau Code du Travail permet d’éliminer les inégalités,
de supprimer la discrimination entre les hommes et les femmes dans
l’emploi, et si cette loi contribue à la promotion des droits de la femme
travailleuse. Y a-t-il égalité de chances et de traitement entre les travailleurs
des deux sexes ?
3.Nous savons qu’aujourd’hui dans le monde, des millions de travailleurs et
des travailleuses sont au bénéfice des lois qui s’inspirent des conventions
et des recommandations adoptées par la Conférence internationale du Travail.
La plupart des instruments de l’OIT s’appliquent aux hommes et aux
femmes sans distinction. Ainsi, les femmes jouissent des mêmes droits
que les hommes dans les divers domaines couverts par ces instruments.
Par exemple :
- les droits fondamentaux
- l’emploi et la formation
- les conditions de travail et de la sécurité et l’hygiène au travail.
La Convention (n°3) concernant la protection de la maternité, 1919
La Convention (n°4) concernant le travail de nuit (femmes), 1919
La Convention (n°89) concernant le travail de nuit (femmes), révisée, 1948
et protocole, 1990
La Convention (n°100) concernant la rémunération pour un travail de valeur
égale, 1951
110

La Convention (n°103) concernant la protection de la maternité (révisée),
1952
La Convention (n°111) concernant la discrimination (emploi et profession),
1958
La Convention (n°122) concernant la politique de l’emploi, 1964
La Convention (n° 142) concernant la mise en valeur des ressources
humaines, 1975
La Convention (n° 156) concernant les travailleurs ayant des responsabilités
familiales, 1981
La Convention (n° 183) concernant la protection de la maternité, 2000
Nous tenons à préciser que les mesures prises en faveur des femmes sont
considérées comme leur assurant une protection sociale nécessaire, mais elles
sont aussi critiquées parce qu’elles portent atteinte à l’égalité des chances et
de traitement entre les hommes et les femmes, et qu’elles sont préjudiciables
à l’emploi et à la carrière des femmes. Le BIT classe en trois catégories les
conventions et les recommandations internationales du Travail concernant les
travailleuses :
• Egalité de chances et de traitement. Il s’agit de :
- Convention (n°100) concernant l’égalité de rémunération, 1951
- Convention (n°111) concernant la discrimination (emploi et profession),
1958
- Convention (n°156) concernant les travailleurs ayant des responsabilités
familiales, 1981
• Emploi et mise en valeur des ressources humaines
- Convention (n°122) concernant la politique de l’emploi, 1964
- Convention (n°142) concernant la mise en valeur des ressources
humaines, 1975
- Convention (n°140) concernant le congé éducation payé, 1974
- Convention (n°158) concernant le licenciement, 1982
- Convention (n°159) concernant la réadaptation professionnelle et l’emploi
des personnes handicapées, 1983
• Conditions de travail et de vie
- Convention (n°3) concernant la protection de la maternité, 1919
- Convention ( n°13) concernant la cerise, 1921
- Convention (n° 89) concernant le travail de nuit, 1989 et protocole de 1990
- Convention ( n°102) concernant sécurité sociale (norme minimum), 1952
- Convention (n°103) concernant la protection de la maternité
- Convention (n°127) concernant poids minimum, 1967
- Convention (n° 136) concernant le benzène, 1971
- Concernant (n° 157) concernant le personnel infirmier, 1977
- Convention ( n°183) concernant la protection de la maternité, 2000
111

Ces mesures se regroupent par deux, les unes sont sociales et humanitaires,
tandis que les autres sont de sécurité et de santé.
4. Définition de l’égalité de chances et de traitement
L’objectif poursuivi par l’égalité de chances et de traitement est de promouvoir
les droits des travailleuses et d’améliorer la condition de la femme dans le
monde du travail. Nous connaissons l’importance croissante que les instances
nationales et internationales attachent à l’égalité de chances et de traitement
des hommes et des femmes en matière d’emploi.
Or, les législations nationales et les normes internationales du travail en matière
d’emploi contiennent des dispositions qui ne visent que les femmes ou qui ne
s’appliquent pas de la même manière pour les deux sexes ; ces dispositions
sont dites « protectrices » parce qu’elles ont été expressément adoptées pour
protéger les travailleuses. Ces mesures de protection comprennent des lois
qui excluent les femmes de certaines professions ou activités ou celles qui
disposent de conditions ou facilités particulières dans leur travail.
5. Le nouveau Code du Travail et l’égalité de chances et de traitement
Concernant le champ d’application :
L’article 1 confirme que le présent Code est applicable aux travailleurs et
employeurs quel que soient le sexe et l’état civil.
Pour ce qui est du droit au Travail et de la capacité à contracter :
- le travail est pour chacun un droit et un devoir, l’article 2 prend en compte
l’âge et l’aptitude au travail
- l’article 6 fixe l’âge d’admission à l’emploi à 16 ans pour les travailleurs
des deux sexes
- la suppression de l’opposition expresse du mari à l’engagement d’une
femme mariée
Des définitions (article 7) :
- la définition du concept « travailleur » a été améliorée par l’introduction
des termes « son état civil » après « sexe » pour éviter toute discrimination
à l’endroit de la femme mariée.
- temps de travail (article 7 j)
Le congé de maternité est compté comme temps de travail et doit être
rémunéré.
112

En matière de contrat de travail
Dispositions générales (articles 36-38)
L’exécution du contrat (article 38) est sanctionnée à la constatation de l’aptitude
au travail du travailleur. La grossesse et l’état civil ne peuvent handicaper
l’exécution du contrat. La grossesse ne constitue pas l’inaptitude au travail.
De la suspension du contrat (articles 57-60)
L’incapacité de travailler résultant d’une maladie ou d’un accident, de la
grossesse ou de l’accouchement et de ses suites. Pendant cette période le
contrat ne peut être résilié, et la femme bénéficie de tous ses avantages.
De la résiliation du contrat article (62, 4e et 5e tirets)
Sont exclus expressément comme motifs valables de licenciement
- le sexe, l’état matrimonial, les responsabilités familiales, la grossesse et
ses suites
- l’absence du travail pendant la période de congé de maternité.
Le harcèlement sexuel ou moral (art.73 et 74) et l’intimidation sont désormais
considérés comme faute lourde du chef de l’employeur ou du travailleur. Dans
les deux cas, on résilie le contrat.
Concernant la détermination du salaire (art.86)
A conditions égales de travail, de qualification professionnelle et de rendement,
le salaire est égal pour les travailleurs, quels que soient leur origine, leur
sexe et leur âge.
Du travail des femmes
La législation nationale a prévu une série des dispositions protégeant la
travailleuse :
L’article 128 alinéa 2 dispose : la maternité ne peut pas constituer une source
de discrimination en matière d’emploi. Il est, en particulier, interdit d’exiger
d’une femme qui postule pour un emploi qu’elle se soumette à un test de
grossesse ou qu’elle présente un certificat attestant ou non l’état de la grossesse,
sauf pour les travaux qui sont totalement ou partiellement interdits aux femmes
enceintes ou qui allaitent, ou comportant un risque reconnu ou significatif
pour la santé de la femme et de l’enfant.
L’article 129 stipule que la femme enceinte peut résilier son contrat de travail
sans préavis et sans avoir, de ce fait, à payer une indemnité de rupture de
contrat. La même faculté lui est accordée pendant une période de huit semaines
qui suivent l’accouchement.
L’article 130 dispose : toute femme a le droit de suspendre son travail pendant
quatorze semaines consécutives, dont huit semaines maximum postérieures à
la délivrance et six semaines avant l’accouchement.
113

Pendant cette période, que l’enfant vive ou non, la femme salariée a droit aux
deux tiers de sa rémunération ainsi qu’au maintien des avantages contractuels
en nature.
Durant cette même période, l’employeur ne peut pas rompe le contrat. Les
dispositions des articles 129 et 130 la protègent contre le licenciement, qu’elle
soit mariée ou non, que l’enfant vive ou non.
Aux termes de l’article 132 du code du travail lorsque la femme allaite son
enfant, elle a droit dans tous les cas à deux repos d’une demi-heure par jour
pour lui permettre l’allaitement. Ces périodes de repos sont rémunérées comme
temps de travail.
L’article 137 dispose : l’inspecteur du travail peut requérir l’examen des enfants,
des femmes et des personnes avec handicap par un médecin en vue de vérifier
si le travail dont ils sont chargés n’excède pas leurs forces. Cette réquisition
est de droit à la demande des intéressés.
La femme ne peut être maintenue dans un emploi ainsi reconnu au-dessus de
ses forces et doit être affectée à un emploi convenable. Si cela est impossible,
le contrat doit être résilié à l’initiative de l’employeur avec paiement de
l’indemnité de préavis.
En ce qui concerne le logement
L’article 138 alinéa c) stipule que la travailleuse a droit au logement ou à
l’indemnité de logement. Ici, l’état civil ne constitue pas un obstacle. C’est un
droit lié au contrat.
6. Conclusions
Le nouvel instrument permet à la travailleuse de jouir de toutes les conditions
de travail et de ce fait, contribuer au même titre que son collègue masculin à la
reconstruction nationale et à la prévention des conflits à travers les activités
créatrices d’emploi et génératrices de revenus. Ce Code du travail est pour
tout travailleur un instrument efficace mis à sa portée par les pouvoirs publics
pour la défense de ses intérêts vers le progrès social.
Le nouveau code du travail marque en même temps la volonté du Gouvernement
d’orienter la législation nationale dans le sens du progrès social. Ce code
s’est beaucoup inspiré des principes et droits fondamentaux au travail et autres
normes de l’OIT.
Il confirme également l’engagement du gouvernement en collaboration avec
les organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs de respecter
les droits fondamentaux ainsi que les libertés individuelles et publiques consacrés
par la constitution de la transition.
114

DOCUMENTS CONSULTES
• Constitution de la transition du 04 avril 2003-06-02 ;
• Recueils des Conventions et Recommandations de l’OIT 1919-1984 ;
• Déclaration de l’OIT relative aux Principes et Droits fondamentaux au
Travail, 1999 ;
• Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du Travail ;
• Loi n° 87-010 du 1er août 1987 portant Code de la Famille.
Je vous remercie.
115

Résumé
Suite à l’exposé de Madame MINCHIABO, Madame Madeleine LEMAITRE, éditrice
de la revue AFRICA B en Belgique, a défini le média comme étant un fait dont
on détient la connaissance et que l’on transmet à quelqu’un d’autre, la connaissance
prenant de la valeur quand elle est démultipliée. Elle a continué en disant
que l’impact de l’information diffère selon le lieu où elle est communiquée.
Parlant de son expérience à Kinshasa, elle a noté que la ville était une mine
d’informations et qu’il y avait plusieurs journaux disponibles, mais a déploré le
fait qu’il y ait peu de diversification des articles.
L’oratrice a soutenu l’idée que la femme congolaise avait tout intérêt à créer une
presse féminine, car les médias sont le quatrième pouvoir. Il existe certes des
difficultés, du fait que la création d’un journal exige de l’argent, du papier, de
l’encre, des films, etc. De plus, la femme n’achète presque pas de journal. Malgré
ces difficultés, elle pourrait en retirer beaucoup de dividendes, surtout lors des
élections. En effet, à ce moment-là, le journal féminin ferait la promotion des
candidatures féminines et permettrait ainsi d’avoir beaucoup d’élues.
Avant de terminer, l’oratrice a voulu toutefois mettre en garde les femmes de ne pas
faire la promotion de la femme en tant que femelle de l’homme, mais en tant
qu’agent dotée de compétences. Elle a conclu en disant que la femme congolaise
avait beaucoup à gagner à s’allier à un homme convaincu du bien-fondé de sa
cause, et qui pourrait l’épauler. Elle a cité l’exemple de l’actuel Ministre des
Affaires étrangères et celui de la Coopération internationale.
116

FEMMES FEMMES ET ET MEDIA: MEDIA: MEDIA: MEDIA: MEDIA:
LA LA PLACE PLACE DE DE L’INFORMATION
L’INFORMATION
DANS DANS LA LA PROMOTION PROMOTION DU DU GENRE GENRE
GENRE
Madame Madeleine LEMAITRE
Mesdames et Messieurs les représentants des gouvernements,
Mesdames les Ministres,
Madame la directrice générale adjoint de l’Organisation internationale des
migrations,
Mesdames et Messieurs,
Très chères amies femmes d’ici et de plus loin,
Très chères consœurs et confrères journalistes,
Si j’avais à résumer en un terme général le moment que je suis en train de
vivre, je choisirais le mot « défi ».
Défi que de prendre la parole comme dernière intervenante de ce séminaire,
après les prestations de si grande qualité qui ont précédé la mienne pendant
deux jours.
Défi que de le faire en fin de journée, ce qui m’oblige non seulement à vous
apporter des nourritures intellectuelles, mais en plus de vous tenir éveillés
pour les digérer !
Défi d’avoir accepté de parler d’un sujet aussi complexe que celui des
« Femmes et media », qui plus est, en Afrique.
Défi encore plus grand d’avoir accepté de le faire depuis Bruxelles.
Qu’à cela ne tienne, Madame NDIAYE, qui me connaît bien, savait que c’était
la meilleure manière de me faire accepter.
Et je la remercie de ce qui s’est révélé être un merveilleux cadeau pour une
journaliste, à savoir, la confrontation sur place des termes utilisés et de la
réalité.
Parler de l’information pour la promotion du genre féminin, c’est aborder le
vaste domaine de l’information en général, des media, des journalistes, de la
presse féminine, des valeurs qui la sous-tendent et de celles qui en émanent.
117

I. L’Information
Dans le cadre de notre colloque, qu’entend-on par « information » ?
Il s’agit, banalement, d’un fait dont on détient la connaissance, et que l’on
transmet à quelqu’un d’autre. Dans la sphère privée, l’exemple premier est la
plus importante de ces informations, si importante qu’elle nous a été communiquée
hier ici-même en primeur : une nouvelle vie, un bébé est né.
Suivant cet exemple, on peut immédiatement imaginer le contexte dans lequel
cette information va surgir : en ville, en brousse, dans un village ? Dans le
cadre d’une famille, d’un couple, par une maman seule, isolée ? Dans un
environnement de paix, de guerre ? Fils premier-né d’un chef d’Etat ou
neuvième enfant d’un agriculteur ?
Un même fait, objectivement identique, est une information totalement différente
suivant les données du contexte où il apparaît, données géographiques,
sociologiques, culturelles, économiques, etc. Dès lors, un fait ne devient
« information » que dans le domaine où il génère l’attention, l’intérêt de l’auditeur.
Dans le cadre de notre propos, un fait ne devient « information » que si
la défense du genre y est mise en exergue ou compromise. Les conférences
précédentes sont, à cet égard, des informations.
Il va de soi qu’une bonne information est le fondement majeur d’une société
démocratique. Ce que nous faisons ici n’a de sens que si nos travaux sont
connus à l’extérieur, discutés et mis en pratique par des femmes.
L’information multiplie sa valeur par son mouvement, comme transmission
d’une nouvelle. On aborde dès lors le vaste domaine de la communication des
données, soit écrites, soit dites, soit transmises par e-mail, radio, télévision,
presse écrite, courrier, et tout ce qui peut multiplier jusqu’à l’infini le boucheà-oreille
initial entre deux personnes.
On comprend tout de suite la complexité du domaine de l’information, entre le
fait lui-même, considéré différemment suivant son contexte, et la transmission
de ce fait, différente elle aussi suivant son vecteur. Quant au croisement
des deux, on imagine à quel point de complexification on peut arriver. Par
exemple, la naissance du fils premier-né d’un chef d’Etat sera diffusée sur
toutes les télévisions du monde, s’il s’agit du fils du roi du Maroc, mais uniquement
dans la presse locale s’il s’agit du fils du président d’une petite république
quelque part dans le monde. Pour la jeune mère isolée, coupée de son milieu
familial, la venue au monde de son enfant, ne sera diffusée que par les conversations
des voisins… si elle a la chance qu’ils soient assez attentifs à elle.
Il est curieux de constater que l’information est de type différent suivant les
lieux, les univers socio-culturels, et même les continents.
En Amérique du Nord, et plus particulièrement aux Etats-Unis, tout « fait »
peut devenir « information ». La presse est friande du plus incroyable, du plus
inédit. Souvenons-nous de l’« affaire Monica Lewinski ».
118

En Europe, une certaine culture de la pudeur agit comme filtre, et l’on s’étonne
que la presse britannique diffuse les faits et gestes des membres de la famille
royale. Lady Diana, de son vivant, avait élaboré avec la presse des relations
qui faisaient de tous ses gestes une information. Le Président Mitterrand, en
revanche, avait conclu avec la presse une sorte de pacte du silence pour
cacher qu’il avait une fille adultérine, et la presse, qui aurait pu faire de ce fait
une information, s’est tue.
En Afrique, l’information est à la fois tue et diffusée : si rien n’est dit de la vie
privée des hautes personnalités, tous leurs faits et gestes officiels sont traités
comme une information. Quel que soit le pays, du nord au sud du continent,
de l’est à l’ouest, la pose des premières pierres se trouve en exergue dans les
journaux écrits, la radio ou la télé. En revanche, les informations économiques
et sociales sont peu traitées, sauf dans la presse spécialisée, qui est le plus
souvent aux mains des étrangers.
Pourtant, l’information circule vite et bien. La RDC et plus particulièrement
Kinshasa est, à cet égard, un modèle du genre. Savez-vous que notre bonne
capitale est réputée « la » ville d’Afrique où un fait devient « information »
plus vite que partout ailleurs ? Et surtout, que ce fait y est traité par la population
avec cet humour particulier, et que traduit en musique, il fait le tour du
monde ? Ici, l’information est devenue un jeu subtil non pas, comme ailleurs,
entre celui qui la détient et celui qui l’ignore encore, mais entre tous ceux qui
la détiennent, et qui deviennent très vite tout le monde, et ceux qui ont l’art
d’y ajouter l’intelligence du commentaire. Chacun y va de son analyse, des
groupes de conversation se forment dans la rue, dans les bars, partout où l’on
se regroupe pour l’activité ou le divertissement… Le fait devient dès lors bien
plus que de l’information. Il devient ce que l’information devrait toujours être,
le support de la formation à la réflexion.
Dans le cadre de notre réflexion sur la promotion du genre, cela est un fait
majeur. Les femmes d’Afrique sont, culturellement, éveillées à la vie sociale
dont elles sont le maillon le plus fort et le plus constructif.
A Kinshasa, elles baignent dans un environnement social d’une fertilité intellectuelle
plus importante qu’ailleurs. Très jeunes, elles sont concernées par la
vie en société, par la politique, et par les prises de position des uns et des
autres face à l’information qui circule. Elles sont entraînées, dès leur plus
jeune âge, à la réflexion citoyenne.
Sont-elles pour autant à la source de l’information ? En ont-elles le pouvoir ?
Car celui qui sait quelque chose, qui détient l’information, est capable d’agir
en connaissance de cause, voire à l’insu de ceux qui ne savent rien. Il est donc
capable de les manipuler. Dans cet ordre des choses, on comprend que l’information
génère, outre le savoir, le pouvoir. Raison pour laquelle l’examen des
différents types de « media » ne peut se dissocier de la capacité financière de
ceux qui les détiennent.
119

II. Les médias
Ce n’est pas pour rien que la presse est appelée le quatrième pouvoir. L’exemple
le plus éclatant est celui de l’homme le plus puissant de la terre, le Président
des Etats-Unis Nixon, acculé à la démission par un journal qui a fait éclater
l’affaire du Watergate. Journal dirigé par une femme, entre parenthèses, qui a
pu, d’un simple « ok, print » faire de son « bon à imprimer » une bombe.
Qu’avait-elle de plus que vous et moi ? Elle dirigeait un organe de presse qui
diffusait à des millions de lecteurs. Ce journal avait la capacité financière d’acheter
du papier, de le faire imprimer et de le faire vendre. Quiconque a travaillé
dans la presse en Afrique sait que chacun de ces termes recouvre des problèmes
immenses. Avoir l’information n’est pas la difficulté majeure. Il existe ici des
journalistes remarquables, par leurs capacités de recherche et d’analyse, par
leur probité intellectuelle, par leur sens de la communication, par leur talent
d’écriture. C’est la « fabrication » d’un journal qui freine les élans. Et si la
presse féminine veut se développer, il est impératif qu’elle s’assure d’emblée
les solutions aux interrogations majeures d’un outil médiatique.
Si cet outil est de papier, l’approvisionnement en matières premières (papier,
encre, matériel d’impression) doit être assuré. Viennent ensuite sa diffusion et
ses sources de financement pour renouveler l’opération. On ne peut pas, en
Afrique, compter sur la publicité comme dans les pays à économie libérale
florissante.
C’est pourquoi certains Etats africains ont préféré soutenir la radio. Pour ce
médium, c’est la réception qui pose problème. Mais il existe des récepteurs à
batteries solaires quasi inaltérables, de coût réduit, et dont certaines ONG se
chargent de diffuser les exemplaires en grand nombre. Dans ce cas, le matériel
d’émission est un poste émetteur de moyenne puissance, dont le problème
majeur est constitué non par l’achat, peu onéreux, mais par l’approvisionnement
régulier en électricité. Chacun de nous connaît les dommages des coupures
de courant…
Quant à la télévision, nous savons, en RDC surtout, combien elle peut être
difficile et coûteuse à établir, à produire, et à pérenniser.
Aujourd’hui, tous ces types de presse sont en quelque sorte « déclassés » par
Internet.
Il s’agit là d’une évolution qui est une révolution à deux titres : la rapidité et la
gratuité. Internet est quasiment gratuit et connecte instantanément des milliers
de lecteurs. En effet, si l’achat d’un ordinateur peut être équivalent à celui
d’un téléviseur, et le coût des communications Internet équivaut à celui des
communications téléphoniques verbales, le producteur de l’information n’a
besoin ni de studio d’enregistrement, ni de personnel qualifié. C’est vous,
moi, n’importe qui et n’importe où. Ce mode de fonctionnement devrait en
faire le réseau d’informations le plus performant de tous les temps et, surtout,
le plus bénéfique pour le développement de l’information en Afrique. Son
120

application à des secteurs divers de la vie sociale, économique, personnelle,
publique, est illimitée. L’avantage le plus attractif d’Internet est sa personnalisation,
sa capacité intrinsèque à se faufiler n’importe où et à échapper à tout
système de contrôle étatique, politique, économique ou autre. Ses seules limites
sont de deux ordres et répondent à deux questions : la première est d’ordre
macro-économique : le réseau matériel, téléphonique, existe-t-il ? Et la deuxième,
d’ordre micro-économique: combien de citoyens peuvent se permettre d’acheter
le matériel et de s’offrir le prix des communications ?
L’extraordinaire taux de pénétration de l’Internet dans la société civile, qui
peut faire de chaque citoyen le concepteur et le diffuseur de sa propre information,
dépend de ces facteurs, hélas handicapants.
Malgré ces difficultés, l’intérêt d’Internet est tel qu’il serait certainement utile
pour les femmes de se pencher sur des solutions à apporter pour étendre son
utilisation. Si l’on pense, par exemple, à l’éducation, à la formation, à la santé,
à la gestion : quel ne serait pas l’apport d’une bonne circulation de l’information
auprès des familles, des jeunes, et plus particulièrement des jeunes filles ?
Or, on perçoit immédiatement le problème dit de « fracture numérique » entre
le Nord et le Sud. Et, par-delà, les sphères d’influences qui se profilent, en
soutien au développement de ce type de réseau. Car il s’agit encore de pouvoir
et du renforcement de ceux qui détiennent le pouvoir d’informer par rapport à
ceux qui ne savent pas, et se font manipuler malgré eux.
Néanmoins, partout sur le continent africain, et plus spécifiquement en Afrique
anglophone, on assiste à un phénomène extrêmement encourageant. Il s’agit
du « retour au bercail » de jeunes universitaires diplômés des grandes écoles
de formation économique, européennes et africaines, fermement décidés à
créer des entreprises rentables grâce au réseau. Et les jeunes femmes ne sont
pas les moins actives dans ce domaine.
Notre voisin l’Angola connaît, depuis la mort de Savimbi, une croissance
exponentielle de ce phénomène, et j’ai rencontré ici plusieurs jeunes hommes
lusophones venus explorer la situation, questionner les banques pour l’obtention
d’un crédit en vue de leur expatriation de l’autre côté de la frontière avec
femmes et enfants. Chaque jeune entrepreneur est un pôle de développement
à lui seul. Sa réussite profite non seulement à sa famille proche, mais à tout
son environnement. Et l’on ne saurait assez encourager les jeunes filles, souvent
réputées plus travailleuses que les jeunes gens, à créer leur propre réseau.
« La promotion du genre », notre sujet de réflexion, s’en trouverait grandement
augmentée et, surtout, implantée concrètement dans la vie sociale.
III. Les journalistes
On ne peut évoquer « la place de l’information pour la promotion du genre »
sans parler des professionnels de l’information que sont les journalistes.
121

La formation de journaliste est réglementée depuis une dizaine d’années.
Auparavant, depuis la création des premiers grands journaux au 19e siècle,
était journaliste celui qui écrivait dans un journal. Aucune formation n’était
requise, prenait la place qui en avait le talent, le culot, le sens de l’arrivisme, et
surtout le courage. Car il en fallait – et il en faut toujours, mes consœurs
présentes ici ne me contrediront pas – pour oser attaquer les puissants.
Souvenons-nous de l’article « J’accuse » de Zola, qui a forcé la réouverture
du dossier Dreyfus. Pour se mettre ainsi en lumière, il fallait, il faut toujours,
un dossier solide, complètement investigué, imparable. On n’en était pas encore
à certaines dérives médiatiques récentes qui ont conduit des journalistes en
vue à devoir se dédire à la première attaque de fond de leur dossier, ni au
sensationnalisme qui fait surgir tout à coup une nouvelle poussée dans la presse
par des milieux judiciaires moins muets que leur fonction l’impose. Néanmoins,
on peut encore réussir dans la presse avec une bonne plume et un
courage à toute épreuve. L’exemple le plus frappant est celui de Françoise
Giroud, simple dactylo, mais ô combien volontaire, courageuse, visionnaire
avec sa création de l’Express, et qui a laissé dans la presse féminine l’esprit
d’avant-garde encore présent (parfois !) dans l’hebdomadaire Elle. Elle était
farouchement indépendante et plus tard, liée au pouvoir, devenue ministre, elle
n’a cessé de tracer une voie de pensée novatrice qui mettait au défi les engoncements
et les a-priori. Quel exemple !
Ceci dit, le dynamisme des journalistes en RDC est remarquable, malgré toutes
les difficultés auxquelles ils doivent faire face. La plus grande différence entre
les journalistes européens et africains est évidemment leur condition pécuniaire.
Professer ce métier ici tient davantage de la vocation et de l’abnégation
que dans les pays nantis où la presse se dit en difficulté, mais où elle est
soutenue, voire maintenue à coup de subsides.
IV. Femmes et médias
La relation des « femmes avec les médias » est tout à fait intéressante, voire
passionnante dans le sens où l’on s’aime de passion. Et il est particulièrement
instructif pour des femmes africaines d’en percevoir les aspects et les contours,
afin d’éviter les écueils de ses ambiguïtés.
Françoise Giroud n’est pas la seule à illustrer la relation passionnelle à la presse,
même si elle en est une des plus illustres figures. Les Belges Colette Braeckman
pour Le Soir, Marie-France Cros pour La Libre Belgique, démontrent dans
leurs investigations mêmes à quel haut niveau d’intelligence, de travail et de
talent, peut être porté le journalisme au féminin. Contrairement à Françoise
Giroud qui avait débuté dans la presse dite féminine, elles se sont présentées
d’emblée comme les égales de leurs confrères masculins. Cette accession
directe de nos consœurs belges à l’égalité professionnelle n’est pas due uni-
122

quement à notre époque. Il s’agit d’un travail très différent, voire d’une opposition,
entre journalistes féminines, presse féminine, et sujets féminins.
La presse féminine est un domaine spécifique de la presse. Elle a ses titres,
son lectorat, ses publicités. Editée au début du siècle dernier dans le but
d’instruire la ménagère, elle était basée sur la mode, la cuisine, l’éducation des
enfants, et les soins à apporter au petit mari pour le retenir. Ne soyons pas
hypocrites, chères amies, les journaux féminins actuels prolongent cet esprit.
Les fiches-cuisine continuent d’y paraître, et les numéros consacrés chaque
année en hiver aux sous-vêtements féminins, et en été aux maillots de bains,
sont régulièrement retrouvés « égarés » dans les papiers du mari… On conçoit
très bien que des journalistes féminines se spécialisent dans ces domaines de
l’information. Mais vous imagineriez mal que Colette Braeckman et Marie-
France Cros signent ce genre d’articles, bien qu’elles soient toutes deux très
élégantes et de fins cordons bleus.
Néanmoins, la presse féminine se fait un devoir (parfois concrétisé) d’ouvrir
ses colonnes à des sujets d’actualité graves et à des enquêtes de société,
économiques ou politiques. On peut imaginer des articles de nos consœurs
dans des publications comme Elle ou Femme actuelle. C’est que le sujet n’est
pas féminin, mais il est traité par une femme. Il pourrait l’être aussi par un
journaliste masculin. C’est la qualité de l’analyse qui compte. Elle l’emporte
sur le genre de celui ou celle qui écrit. On touche de près au rôle sociologique
de la presse au féminin, et à sa fonction d’éveil, qui renoue avec les origines
en en réactualisant les thèmes.
La presse féminine est donc, par nature, le fruit d’une société qui s’interroge
sur la fonction de la femme en son sein. En Afrique, le rôle de la femme est
soit culturellement déterminé, soit à définir. En effet, ou bien les femmes
restent enserrées dans les fonctions prévues par leur environnement social et
poursuivent sur le chemin tout tracé de leurs aînées. Ou alors, extraites de ce
terrain, elles se trouvent devoir tracer une voie nouvelle dans une société où
rien n’est prévu pour elles. Soit, dans le meilleur des cas, nanties de diplômes
et de fonctions sociales fortes, occupant des postes à responsabilités, elles
ont les moyens matériels d’inventer ce nouveau mode de vie en déléguant à
d’autres les fonctions qui leur sont traditionnellement dévolues. Soit, dans le
pire des cas, expatriées de leur environnement de naissance, démunies, sans
repères, sans aide, elles sont contraintes de subir et d’inventer les recours
d’urgence aux situations que la vie leur impose.
Quelle que soit leur situation, elles n’ont ni le temps, ni les moyens financiers,
de se créer une presse spécialisée répondant à leurs questions. Et les supports
dans la société où elles évoluent n’existent pas. La presse féminine en Afrique
est donc réduite à des articles spécialisés dans les publications écrites, et à des
rubriques radio ou télévisées. Les relais médiatiques existent, mais au masculin,
et dévolus aux thèmes essentiellement politiques et économiques.
123

Le pouvoir des femmes ne s’exprime pas par la presse. Et c’est dommage.
Car les expériences qu’elles vivent ne sont pas transmises, les solutions qu’elles
inventent ne sont reproductibles que par les femmes de leur entourage immédiat.
La fonction de mémoire qu’assume la presse en entérinant les faits, et sa
fonction d’éveil, si précieuse aux femmes isolées ou en perte de repères, ne
sont pas assurées.
Or, il serait intéressant que la fonction éducative de la presse soit prise en
compte, et que des femmes qui en ont le pouvoir réfléchissent ensemble à
créer des structures médiatiques adaptées à leur environnement. Des solutions
peu onéreuses existent, comme, à la radio, l’élargissement des heures
d’écoute réservées aux programmes féminins, et surtout leur adaptation horaire
aux disponibilités d’écoute des travailleuses. Diffuser de 12 à 15 heures est
absurde. Les matériels sont utilisables et fonctionnent déjà. Quant aux compétences,
elles sont innombrables, tant la capacité des femmes à innover est
immense, quotidienne, et féconde d’enseignements nouveaux.
L’avenir de la presse au féminin en Afrique est non seulement possible, mais
indispensable. Face à la déstructuration des sociétés traditionnelles au sein
desquelles les femmes trouvaient soutien et assistance, confrontées aux défis
de l’éducation, les responsables féminines devraient pouvoir créer ces liens
nouveaux, ces relais intergénérationnels, que constituent les organes d’information
au féminin.
Voilà, chères amies, où s’arrêtaient mes réflexions en débarquant à la Ndjili
lundi soir.
Il me restait à vivre à la fois un roman d’aventures « le tour du monde (de la
presse à Kinshasa) en 80 heures », et un roman policier « à la recherche de la
femme ».
Je ne prétendrai pas avoir bouclé mon tour, mais j’ai, en revanche, trouvé des
femmes de presse et de media. Toutes passionnées, toutes passionnantes.
J’ai rencontré une femme extraordinaire, connue dans tout Kinshasa, au
Sénégal, au Maroc où elle est née, et à Paris où on m’avait parlé d’elle : la
directrice du bureau de l’Agence France Presse à Kin, à la source des faits et
de leur envoi dans le monde, Madame Rose-Marie BRUBALLA. Face à elle,
l’indifférence est un péché, la clarté d’esprit une vertu cardinale, et la générosité
une fonction impérative.
Son message envers vous, Mesdames les décisionnaires, est de faire en sorte
que les journalistes soient respectés, la priorité entre toutes étant qu’ils soient
rémunérés. Car pour vivre ils sont obligés de passer par des systèmes biaisés,
tels que le coût-page qui les rémunère par anticipation pour s’assurer que leur
copie rendra compte du fait tel qu’on le leur impose. De plus, il faudrait que la
formation donnée en RDC soit équivalente à celle d’autres pays d’Afrique, et
que les professeurs, potentiellement excellents, assument réellement leur charge.
124

Elle suggère aussi une formation sud-sud, illustrant entre autres mon propos
de tout à l’heure sur les radios, en proposant que les stagiaires se perfectionnent
au Mali, pays d’Afrique le plus prolifique en radios locales.
A la MONUC, organisme qui permet aux journalistes de rejoindre les zones de
conflit, auxquelles seuls leurs avions donnent accès, j’ai rencontré Mathy
MUPAPA, qui m’a orientée vers Clarisse MUSEME, directrice de l’information
au PNUD. Passionnée, Clarisse a fondé une association de consœurs qui
réfléchissent ensemble à ce qu’est et devrait être la presse dans ce pays. J’ai
croisé – car peut-on dire qu’une heure fait une rencontre ? – deux vraies
conquérantes de l’impossible, créatrices de leur propre journal :
Francine MOKOKO d’abord, ancienne journaliste de télévision, devenue correspondante
d’AFRICA International, de AITV/RFO (Agence internationale de
Télévision), et de REUTERS Télévision, et fondatrice d’une publication bihebdomadaire
de grande rigueur, Le Révélateur ; puis Colette TSHOMBA,
fondatrice de UHURU, Liberté, bi-hebdomadaire qui vient de fêter son centième
numéro.
Et d’autres, qui « en veulent » comme on dit.
Je ne peux conclure sans vous proposer de donner la parole, dans les débats
qui vont suivre, à Amy SMITH, « Senior Gender Adviser », qui a, mieux que
moi, étudié, développé et approfondi le sujet qui m’avait été dévolu : « La
place de l’information dans la promotion du genre ».
Mesdames, Messieurs, Madame la Directrice générale adjoint, chère Ndioro,
il me reste à vous annoncer que, m’ayant donné l’occasion de mordre à l’hameçon
de ce thème de réflexion, vous serez à l’origine de mon retour pour l’étudier
plus en profondeur, afin d’en faire le sujet d’un des futurs numéros de ma
revue AFRICA-B.
C’est la meilleure manière que j’ai trouvée, en tant que journaliste, que femme,
et qu’Africaine ardente, de vous remercier de m’avoir invitée à ce travail.
****
La journée s’est terminée par une heure de débats qui ont porté sur les préoccupations
ci-après:
- L’inaccessibilité aux médias en raison de leur prix élevé.
- Le problème de l’autorisation maritale avant l’embauche de la femme, qui
semble persister malgré le nouveau code du travail.
- Faut-il créer un organe de presse exclusivement féminin avec les risques
d’indifférence que cela comporte, ou alors insérer des rubriques dans les
journaux qui existent déjà ?
- La situation des travailleuses migrantes est problématique.
125

- La réaction du ministre des Affaires sociales contre les images stéréotypées
de la femme dans les médias.
- Le Ministre du travail a reproché la complaisance de l’octroi de la carte de
travail aux étrangers qui violent les lois.
- Quels sont les mécanismes mis en place pour la vulgarisation du nouveau
code du travail ?
- Que peut faire la femme de la diaspora pour aider financièrement les
Congolais ?
A toutes ces questions, les réponses suivantes ont été données :
- Concernant l’inaccessibilité aux médias, le problème est réel. Il est surtout
lié à la situation actuelle : les journalistes essaient de survivre car ils sont
mal payés. Le danger, c’est que l’information plus objective soit biaisée.
- Pour ce qui est de l’autorisation maritale, les discussions devraient être
prolongées car un problème épineux demeure : celui de l’instabilité juridique
de la femme. Après plusieurs échanges, il a été rapidement proposé
des modifications des textes discriminatoires.
- Pour ce qui est des hésitations à créer un organe de presse féminin, il a été
répété que le journalisme est un métier dangereux. Le seul problème est
d’avoir les moyens nécessaires pour réaliser le projet.
- Les travailleuses migrantes qui sont en RDC sont régies par le code du
travail, sauf s’il existe en particulier un contrat de réciprocité entre deux
Etats.
- Le ministre des Affaires sociales faisait partie de la commission de la publicité,
qui malheureusement a été suspendue. Cette commission examinait
les scripts avant le passage télévisé de la publicité. En fait, la difficulté
résidait d’abord dans l’inexistence d’une législation en la matière, et ensuite
dans le fait que les médias vivent essentiellement de leurs contrats avec les
annonceurs, ce qui les pousse à contourner les contrôles. De plus, la
Ministre s’est rendue compte qu’afin d’éviter que l’information destinée
aux publicités soit tronquée, il serait préférable que ces messages passent
par un réseau de journalistes femmes, qui existe du reste. En outre, il faut
savoir qu’il a été exigé des chaînes de télévision qu’elles ne diffusent les
pubs de boissons alcoolisées et de tabac qu’après 20h. Nous constatons
que ce combat contre l’image stéréotypée de la femme est le même qu’en
Europe.
- Quant à la complaisance qui existerait dans l’octroi des cartes de travail
aux étrangers, il n’en est rien : les cartes sont octroyées par une commission
diversement composée de délégués d’autres institutions, ce qui assure
la garantie d’un sérieux dans l’octroi. Quant aux abus, il appartient à
l’inspection du travail et aux syndicats de s’en occuper. Le problème est
126

que les travailleuses n’ayant pas adhéré à un syndicat ont tort puisqu’en
cas de problème, elles ne peuvent être défendues correctement.
- Concernant la vulgarisation du code travail, il y a déjà eu des séances
d’information à l’intérieur du pays. La femme de la diaspora est disposée à
aider les journalistes, à condition de savoir ce dont ils ont besoin.
127

128

Chapitre III
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
129

130

Thème 3:
Travaux en groupes
La troisième journée du séminaire (29 juin 2003) a été essentiellement consacrée
à des travaux de groupe, sous la modération de Madame Esther
KIRONGOZI. Les travaux se sont déroulés en trois groupes relatifs aux thèmes
du séminaire.
A l’issue du séminaire, les participants des trois groupes ont formulé les
recommandations suivantes :
GROUPE I
Thème: Que devons-nous faire aujourd’hui pour que la
femme congolaise soit vraiment actrice dans la
reconstruction nationale?
a) la femme en RDC
b) la femme de la diaspora
Le premier groupe s’est penché sur la question des actions à mener pour que
la femme congolaise soit vraiment actrice dans la reconstruction nationale :
Sur le plan politique, les participants ont constaté que les femmes ne créaient
pas de partis politiques, et ont donc formulé plusieurs solutions pour les y
aider. Ils ont suggéré de stimuler l’engagement politique de la femme (c’est-àdire
lui fournir des bases idéologiques et un projet de société), appuyer la
femme en politique, former le leadership féminin et un lobbying de femmes et
leur permettre d’avoir une superstructure indépendante, différente du Conseil
national de la femme.
Sur le plan juridique, ils ont remarqué que les droits et les textes juridiques
étaient généralement ignorés. Pour y remédier, ils ont émis l’idée de vulgariser
la connaissance des textes nationaux et internationaux en matière juridique et
d’inscrire la Révision du Code de la Famille à la première session de l’Assemblée
nationale, afin de l’harmoniser avec la convention relative à toutes les
discriminations à l’égard de la femme.
Sur le plan économique, ils ont noté une rémunération insuffisante et une
pauvreté généralisée, et ont proposé d’encourager les femmes à exercer des
activités créatrices d’emploi et génératrices de revenus, à créer un fonds pour
femmes, à accéder aux micro-crédits, et à encourager la création des PMEA
et PMI. De plus, ils voudraient voir la femme encadrée dans le secteur informel,
et informée et impliquée dans le projet du NEPAD, du plan d’action
AGOA et dans la mise en œuvre de résolutions des ACP.
131

Sur le plan social, le groupe I a suggéré de répertorier et sensibiliser d’une
part les femmes médecins et infirmières comme personnes ressources pouvant
créer des cliniques de femmes, et de sensibiliser d’autre part les chefs
coutumiers gardiens de tradition pour qu’ils comprennent le danger que court
la femme en matière de SIDA.
Sur le plan de l’éducation, le groupe a proposé de créer des foyers sociaux, de
rendre l’enseignement gratuit jusqu’à l’âge de 15 ans, de relever l’âge nubile à
18 ans, et de rendre la scolarisation obligatoire.
Sur le plan culturel, les différents participants ont conseillé de sensibiliser la
population à l’inversion des valeurs à travers la musique et les images négatives
ainsi qu’aux méfaits de certaines pratiques traditionnelles, d’interdire le
travail de jeunes filles de moins de 18 ans comme danseuses, et enfin de
rendre opérationnelle la Commission de censure pour éviter le débordement
dans le domaine de la musique.
Les médias doivent également faire l’objet d’un recadrage : interdiction de
l’utilisation de jeunes filles dans des publicités obscènes, large diffusion et
vulgarisation des textes, et enfin diffusion d’émissions promouvant la femme
et la jeune fille.
Sur le plan de l’environnement, la femme doit assainir son environnement le
plus immédiat (famille, quartier…) et recycler les ordures ménagères. Les
égouts doivent être débouchés et les services d’hygiène réhabilités.
Concernant les enfants, et plus particulièrement les petites filles, les participants
ont rappelé l’importance d’identifier, regrouper et renforcer les capacités
des ONG et autres associations travaillant dans le domaine de défense des
droits de l’enfant, et celle de lutter contre l’éducation stéréotypée favorisant le
garçon au détriment de la fille.
SUR LE PLAN POLITIQUE
CONSTAT : Les femmes ne créent pas de partis politiques.
Actions
• Stimuler l’engagement politique de la femme, c’est-à-dire avoir les bases
idéologiques et un projet de société ;
• Appuyer les femmes politiques ;
• Former le leadership féminin, le renforcer ;
• Former un lobbying des femmes ;
• Avoir une superstructure indépendante (différente du Conseil nationale de
la femme).
132

SUR LE PLAN JURIDIQUE
CONSTAT : Ignorance des droits et des textes juridiques
Actions
• Vulgarisation des textes nationaux et internationaux en matière juridique ;
• Inscription à la 1ère session de l’Assemblée nationale de la Révision du
Code de la famille, afin de l’harmoniser avec la convention relative à toutes
les discriminations à l’égard de la femme.
SUR LE PLAN ECONOMIQUE
CONSTAT : Rémunération insuffisante et pauvreté généralisée
Actions
• Encourager les femmes à exercer les activités créatrices d’emploi et génératrices
de revenus ;
• Création d’un fonds pour les femmes ;
• Encourager la création des PMEA et PMI ;
• Accès à des micro-crédits ;
• Encadrement de la femme dans le secteur informel ;
• Informer et impliquer la femme dans le projet du NEPAD, du plan d’action
ARGOA et dans la mise en œuvre des résolutions des ACP.
SUR LE PLAN SOCIAL
• Répertorier et sensibiliser les femmes médecins et infirmières comme
personnes ressource pouvant appuyer les cliniques de femmes qui doivent
être créées ;
• Action de sensibilisation auprès des chefs coutumiers gardiens de tradition,
pour qu’ils comprennent le danger que court la femme en matière de
SIDA.
SUR LE PLAN DE L’EDUCATION
• Créer des foyers sociaux ;
• Rendre l’enseignement gratuit jusqu’à l’âge de 15 ans ;
• Relever l’âge nubile à 18 ans ;
• Obligation de la scolarisation.
133

SUR LE PLAN CULTUREL
• Sensibiliser la population à l’inversion des valeurs à travers la musique et
les images négatives ;
• Sensibiliser la population aux méfaits des pratiques traditionnelles ;
• Interdire le travail des jeunes filles de moins de 18 ans comme danseuses ;
• Rendre opérationnelle la Commission de censure pour éviter le débordement
dans la musique.
MEDIAS
• Interdiction d’utilisation des jeunes filles dans les publicités obscènes
(alcool, tabac…) ;
• Large diffusion et vulgarisation des textes ;
• Encourager des émissions promouvant la femme et la jeune fille.
SUR LE PLAN DE L’ENVIRONNEMENT
• L’assainissement de son environnement immédiat (famille, quartier, …)
par la femme ;
• Le recyclage des ordures ménagères ;
• Le débouchage des égouts ;
• La réhabilitation des services d’hygiène.
LA PETITE FILLE
• Identifier, regrouper et renforcer les capacités des ONG et associations
qui travaillent dans le domaine de la défense des droits de l’enfant ;
• Lutter contre l’éducation stéréotypée favorisant le garçon au détriment de
la fille.
EN CONCLUSION
• SUR LE PLAN POLITIQUE : formation, outils, stratégies et idéologie ;
• SUR LE PLAN JURIDIQUE : lobbying de soutien aux femmes politiques,
députées, déjà présentes ;
• SUR LE PLAN ECONOMIQUE : retour des investisseurs belges, microcrédits,
micro-finance ;
• SUR LE PLAN EDUCATIF : Scolarité obligatoire et gratuite.
134

GROUPE II
Thème: Que faire pour que les femmes démunies aient
plus d’accès aux micro-crédits?
Le Groupe II a examiné la question de l’accès des femmes aux micro-crédits,
et de la façon de lui rendre ces micro-crédits plus accessibles.
Le groupe a d’abord tenté de donner une définition de la femme démunie : la
femme démunie est celle qui vit en dessous du seuil de pauvreté dans tous les
domaines : économique, social, culturel, éducatif, etc.
Quant au micro-crédit, il a été défini comme une somme d’argent accordée à
un individu ou à un groupe d’individus pour leur permettre de résoudre les
besoins primaires en exerçant une activité génératrice de revenus. Ce crédit
quoique micro ne peut être en-dessous du seuil de pauvreté puisqu’il doit
permettre de pérenniser une activité génératrice de revenus.
Les stratégies suggérées par le groupe pour que les femmes accèdent au microcrédit
sont les suivantes : d’abord, identifier les femmes, puis créer des petits
groupes, les informer sur la formation professionnelle et la gestion du microcrédit
pour améliorer la productivité de leurs activités génératrices de revenus.
L’épargnant doit être motivé par un taux d’intérêt comparable à celui du
micro-crédit (2 % par mois), le crédit adapté à l’épargne génératrice de revenus
par un montant variant entre 200 et 500 dollars. Les participants du groupe
II ont proposé que le taux de remboursement soit de 2 % par mois et le
remboursement échelonné sur une année, mais ils ont cependant insisté sur le
renforcement de la tontine améliorée qui donne l’avantage et l’occasion d’épargner,
d’obtenir un crédit sans intérêt et de le rembourser facilement.
Ils ont recommandé que les femmes fassent la promotion du crédit alternatif
(« likelemba » amélioré), qu’elles sensibilisent leurs membres sur la mobilisation
de l’épargne locale, qu’une banque des femmes soit créée à court terme,
et enfin qu’un bureau accompagne l’octroi d’un micro-crédit.
Pour ce faire, le groupe II a suggéré de mobiliser l’épargne de la diaspora, y
compris l’épargne locale.
LA METHODOLOGIE DU GROUPE II
DEFINITIONS
La femme démunie : celle qui vit en dessous du seuil de la pauvreté dans
tous les domaines (économique, social, culturel, éducatif, etc.).
135

Le micro-crédit : une somme d’argent accordée à un individu ou un groupe
d’individus pour leur permettre de résoudre les besoins primaires en exerçant
une activité génératrice de revenus. Ce crédit quoique micro ne peut être endessous
du seuil de pauvreté puisqu’il doit permettre de pérenniser une activité
génératrice de revenus.
STRATEGIES ET MOYENS D’ACCES AU MICRO-CREDIT
STRATEGIES
• Identifier les femmes ;
• Les regrouper en petits groupes de 5 à 10 au maximum ;
• Les informer sur la formation professionnelle et les former dans la gestion
du micro-crédit pour améliorer la productivité de leurs activités génératrices
de revenus ;
• Motiver l’épargnant par un taux d’intérêt comparable à celui du microcrédit
(2 % par mois) ;
• Adapter le crédit à l’activité génératrice de revenus par un montant variant
entre 200 et 500 dollars ;
• Fixer le taux de remboursement à 2 % par mois et le remboursement
échelonné sur une année ;
• Renforcer la tontine améliorée.
RECOMMANDATIONS
• Que les femmes fassent la promotion du crédit alternatif (likelemba
amélioré) ;
• Que les femmes sensibilisent leurs membres à la mobilisation de l’épargne
locale en commençant par le groupe ici présent ;
• Que soit créée une banque des femmes à court terme ;
• L’octroi du micro-crédit et l’accompagnement par un bureau-conseil
(car ce processus est renouvelable).
MOYENS
• Mobilisation de l’épargne de la diaspora, y compris l’épargne locale.
136

GROUPE III
Thème: Le rôle de la femme est indispensable à une
bonne gouvernance. Quelle stratégie utiliser
pour obtenir au moins 30 % de femmes dans
tous les domaines et à tous les échelons?
Les participants ont commencé par définir le terme « gouvernance »
La gouvernance a été définie par Madame MODUA comme un ensemble de
règles, d’institutions, et de valeurs qui dirigent la société, l’Etat, et les institutions
sociales en général. La femme, qui est citoyenne à part entière, a un rôle
à jouer dans la gestion de la cité.
Le rôle de la femme est indispensable parce qu’elle est un agent déterminant
du changement dans tous les domaines, et particulièrement sur le plan éthique.
Les stratégies qui ont été évoquées sont les suivantes : regrouper et animer les
femmes autour de l’objectif principal qui est la représentativité de la femme
dans les instances décisionnelles à tous les niveaux et dans tous les domaines,
ceci pour consolider la solidarité agissant à la base. Animer les femmes suppose
leur sensibilisation, leur conscientisation, et le renforcement de leurs
capacités en les formant au leadership féminin, à la communication, à l’éthique.
Ensuite, il a été conseillé de prendre en compte la dimension sexospécifique
dans la définition et la planification des politiques et du budget de l’Etat.
Pour finir, le Groupe III a suggéré de créer un fonds pour le soutien des
femmes candidates.
Les actions à court terme comprennent l’évaluation de l’action des structures
existantes qui militent en faveur de la participation de la femme pour en dégager
les forces et les faiblesses en vue de leur redynamisation. De plus, le lobby
de femmes « Cause Commune » a un projet qu’il mettra à la disposition du
cadre de suivi des présentes assises, et l’OIM pourra mobiliser les ressources
pour le mettre sur pied. Ces actions seront menées pendant la période de
transition.
Les participants ont recommandé de procéder à l’évaluation menée dans le
cadre des structures et organisations existantes afin mettre en œuvre la stratégie
de participation significative des femmes dans les instances de prise de
décisions. Ils ont également suggéré de regrouper et d’organiser les femmes à
la base en vue de leur préparation à l’accès aux instances de prise de décisions
à tous les niveaux et à tous les échelons, et de mettre en place des mécanismes
permanents d’information et de formation des femmes. Par ailleurs, il a été
conseillé d’intégrer les aspects sexospécifiques dans les politiques et programmes
de développement national et de rechercher les voies et moyens
d’actions des femmes.
137

Outre la création du fonds pour le soutien des femmes candidates, Madame
Joséphine ISALU a recommandé l’accompagnement des femmes pour la création
de groupements politiques dans le créneau de la conquête du pouvoir.
Madame Eve BAZAHIBA, quant à elle, souhaite que l’on pense à l’organisation
d’une évaluation globale des organisations féminines qui œuvrent dans le
domaine des droits de l’homme et des droits spécifiques de la femme.
DEFINITION DES TERMES
• Gouvernance
• Rôle de la femme
• Stratégies
OBJECTIF
La représentativité de la femme d’au moins trente pour cent (30 %) après la
transition.
LA GOUVERNANCE
Dans son exposé, Mme MODWA définit la gouvernance comme un ensemble
de règles, d’institutions et de valeurs à diriger la société, l’Etat et les institutions
sociales en général ; la femme, citoyenne à part entière, a un rôle à jouer
dans la gestion de la cité.
LE ROLE DE LA FEMME
La femme est indispensable parce qu’elle est un agent déterminant du changement
dans tous les domaines et particulièrement sur le plan éthique.
LES STRATEGIES
1.Regrouper et animer les femmes autour de l’objectif principal qui est la
représentativité de la femme dans les instances décisionnelles à tous les
niveaux et dans tous les domaines, cela pour consolider la solidarité agissant
à la base.
Animer suppose :
- sensibiliser les femmes ;
- conscientiser la femme ;
- renforcer les capacités de la femme en l’informant et en la formant
dans :
138

• le leadership féminin
• la communication
• l’éthique.
2.La prise en compte de la dimension sexospécifique dans la définition et la
planification des politiques et du budget de l’Etat.
3.La création d’un fonds pour le soutien des femmes candidates.
Actions à court terme
Evaluation de l’action des structures existantes qui militent en faveur de la
participation de la femme pour en dégager les forces et les faiblesses en vue
de leur redynamisation.
Le lobby des femmes « Cause Commune » mettra son projet à la disposition
du cadre de suivi des présentes assises, et l’OIM pourra mobiliser les ressources
pour le mettre sur pied. Ces actions seront menées pendant la période de
transition.
Conclusions et recommandations
• Procéder à l’évaluation des actions menées à ce jour dans le cadres des
structures et organisations existantes, afin de mettre en œuvre la stratégie
de participation significative des femmes dans les instances de prise de
décisions.
• Regrouper et organiser les femmes à la base en vue de leur préparation à
l’accès aux instances de prise de décisions à tous les niveaux et à tous les
échelons.
• Mettre en place des mécanismes permanents d’information et de formation
des femmes.
• Intégrer les aspects sexospécifiques dans les politiques et programmes de
développement national.
• Rechercher les voies et moyens pour rendre visible les actions des femmes.
Apports de la plénière
Outre la création du fond pour le soutien des femmes candidates, Mme Joséphine
ISALU recommande l’accompagnement des femmes pour la création
de groupements politiques dans le créneau de la conquête du pouvoir. Quant à
Madame Eve BAZAHIBA, elle souhaite qu’en dehors de l’évaluation de l’action
sur la représentativité, on pense à l’organisation d’une évaluation globale des
organisations féminines qui œuvrent dans le domaine des droits de l’Homme
et des droits spécifiques de la femme.
139

Résumé
Ces différents travaux en groupes se sont terminés par les conclusions et recommandations
par le rapporteur. Madame NDIAYE, Directrice générale adjoint de
l’OIM, ainsi que le représentant du gouvernement congolais ont chacun prononcé
un discours de clôture, discours qui ont mis fin au séminaire de Kinshasa.
DISCOURS DE CLOTURE
Madame Ndioro NDIAYE
Madame le Ministre des Affaires sociales et de la Famille,
Madame le Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale,
Monsieur le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération
internationale,
Monsieur le Représentant du Gouvernement de la Belgique,
Mesdames, Messieurs,
Chers invités,
Nous voici arrivés à la fin des trois jours de formation sur le renforcement du
rôle des femmes dans la reconstruction nationale et le développement économique
en République démocratique du Congo. Au terme de cette longue marche
qui est devenue désormais un tremplin pour nous propulser davantage vers
notre but, il convient avant tout d’adresser mes sincères remerciements et
mes vives félicitations aux autorités congolaises.
Je voudrais donc vous prier Madame le Ministre de trouver ici l’expression
de ma reconnaissance pour votre dévouement et votre engagement constants
en faveur du bien-être des femmes congolaises. Vous voudrez transmettre à
Son Excellence Monsieur le Président de la République nos remerciements les
plus chaleureux pour tout le soutien dont nous avons bénéficié de sa part dans
l’organisation et la tenue de ce séminaire. Pour ma part, je pense que cela
représente incontestablement, pour l’avenir, un élément suffisant en vue d’une
coopération encore plus fructueuse entre l’Organisation internationale pour
les migrations et la République démocratique du Congo.
De manière particulière, je voudrais dire toute ma gratitude au Gouvernement
de la Belgique dont l’appui financier a été un élément déterminant pour la tenue
de ce séminaire.
140

Je voudrais en outre exprimer mes félicitations au présidium, aux modérateurs,
aux formatrices, aux rapporteurs et aux participantes pour l’énorme
travail que vous avez abattu.
Je ne saurais oublier le personnel de l’OIM qui n’a ménagé aucun effort pour
assurer l’organisation, le secrétariat, et l’encadrement de ce séminaire et qui,
de surcroît, reste disponible pour la suite du processus.
Vous avez tous mis à profit, chacun en ce qui le concerne, trois précieux jours
de votre existence pour le bien-être de votre prochain, pour la cause de votre
pays, et pour le bonheur de l’humanité. C’est l’humanité entière qui vous est
reconnaissante.
Comme vous le savez, ce séminaire visait entre autres objectifs à :
• Sensibiliser sur le rôle important joué par les femmes dans les processus
de paix, de prévention des conflits et de réconciliation nationale ;
• Attirer l’attention de la communauté internationale sur l’importance du
rôle des femmes dans la prévention des conflits et le développement économique
;
• Engager les femmes dans un dialogue sur le rôle essentiel qu’elles peuvent
jouer en faveur d’une plus grande paix et d’une meilleure prévention des
conflits, tant par la création d’emplois et la génération de revenus que par
un développement économique général ;
• Promouvoir et encourager le rôle actif joué par les femmes dans la création
d’emplois et la génération de revenus dans le but de soutenir la
réconciliation ethnique et la prévention des conflits ;
• Lutter contre l’exode de ressources humaines hautement qualifiées par la
création d’emplois dans la région des Grands Lacs ;
• Renforcer la position des femmes dans la société en accentuant leur importance
au niveau de la communauté.
Par rapport à ces objectifs, nous pouvons nous féliciter de ce que , à l’issue
des travaux de ce séminaire, vous avez présenté un plan d’action dont la mise
en œuvre devra déboucher sur :
• la création d’un « réseau de coopération » entre les femmes de la diaspora
congolaise et les femmes congolaises restées au pays ;
• le « soutien aux femmes et aux groupements de femmes à travers la mise
à disposition de micro-crédits ».
En ce qui concerne les micro-crédits, l’OIM, en partenariat avec la Coopérative
centrale d’épargne et de crédit de la Communauté évangélique de l’Alliance
du Congo et la Coopérative de l’Union Nationale des Femmes, mettra à la
disposition d’une cinquantaine de femmes des prêts à un taux d’intérêt assez
faible, remboursables à moyen terme. Ces crédits devront servir à financer
141

des micro-projets viables soutenus par des femmes en groupe ou individuellement.
Les remboursements de crédits effectués serviront à financer ultérieurement
d’autres demandes de crédits. Des mécanismes d’encadrement et
d’assistance seront mis en place dans le but de suivre l’évolution des activités
des femmes et du projet dans son ensemble.
En termes de rendement, cela devra bien évidement constituer l’opportunité
pour le démarrage d’une relation véritablement pleine d’espoir, riche d’expérience
et révélatrice d’une dimension nouvelle en ce qui concerne la participation
des femmes congolaises à la promotion du dialogue national et de la paix, à la
réconciliation et à la prévention des conflits, facteurs de stabilité en République
démocratique du Congo et dans toute la région des Grands Lacs.
En outre, le soutien aux groupements de femmes devra permettre, à court et
à moyen termes, de renforcer le rôle économique des femmes au sein de leur
familles, de leurs communautés et de leur pays, notamment à travers la génération
de revenus et la création d’emplois.
Vous convenez alors avec moi que l’accroissement des opportunités d’emploi
reste un élément important pour l’intégration et la participation sans exclusion
des femmes dans tous les niveaux de prise de décision pour la reconstruction
et la consolidation de la paix, c’est-à-dire dans toutes les phases qui re-dessinent
son avenir. Il est capital que les voix des femmes soient entendues et que leur
travail sur le terrain soit reconnu, valorisé, et épaulé. Les décisions doivent
être prises par elles et non pour elles.
En ce qui concerne l’OIM, l’importance et l’ampleur de ce projet demandent
de sa part une responsabilité accrue en matière de suivi. Pour mener à bien ce
projet, elle voudrait compter sur le mécanisme de consultation établi de concert
avec les femmes et les groupements de femmes, y compris les réseaux issus
de la diaspora.
Elle voudrait globalement s’appuyer sur le bon vouloir des unes et des autres
et sur la coopération des uns et des autres dans l’évaluation des activités du
projet.
Du reste, je voudrais assurer le Gouvernement de la Belgique que l’OIM fera
diligence pour le tenir régulièrement informé de l’état du projet ainsi que des
avancées réalisées.
Sur ce, je voudrais souhaiter à chacun, à chacune, un bon retour dans sa
famille.
Je vous remercie.
142

MOT DE CLOTURE
Madame Marie-Ange LUKIANA MUFWANKOLO
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Madame la Directrice générale adjoint de l’OIM,
Mesdames et Messieurs les participants,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
Lorsque les nombreuses charges d’Etat m’ont surprise loin de Kinshasa et ne
m’ont pas permis d’être avec vous pour l’ouverture de ces importantes assises
et pour les travaux qui ont suivi, je dois avouer que j’ai eu quelques remords
qui se dissipent fort heureusement en ce moment étant donné que j’ai pu avoir
l’occasion de vous rejoindre et de clôturer ce séminaire qui s’est déroulé dans
ce magnifique cadre de l’Hôtel Memling.
Avant toute chose, nous voudrions remercier très sincèrement l’Organisation
internationale pour les migrations (OIM) pour avoir tout mis en œuvre afin
que cette activité fortement attendue se réalise, pour le plus grand bien du
peuple congolais en général et des femmes congolaises en particulier. En effet,
l’exploitation efficiente et au concret de son thème à savoir « Le renforcement
du rôle des femmes dans la reconstruction nationale et le développement
économique en RDC », est non seulement opportune mais surtout vitale pour
un rôle fort de la femme congolaise en faveur des populations meurtries et du
pays.
Dans ce cadre, nos remerciements s’adressent particulièrement à Madame
Ndioro NDIAYE ici présente, qui, une fois de plus, fait honneur à notre peuple
en forçant son agenda déjà très chargé pour accomplir l’engagement pris et
ce, à un moment spécial de notre histoire. Qu’elle trouve ici le sentiment de
notre gratitude et notre reconnaissance pour tant de volonté à accompagner
la femme africaine dans un processus de prise en charge qualitative de sa
communauté.
Vous avez déjà montré cette volonté par la diligence avec laquelle vous avez
géré le processus de l’admission de la RDC à l’OIM, l’installation rapide du
bureau de l’OIM à Kinshasa pour lequel nous plaidons le maintien afin de
maintenir la coopération entre notre pays et votre organisation, et enfin le
résultat très encourageant du MIDA qui se passe de tout commentaire, au
point que le chef de l’Etat a, dans son discours de fin d’année clairement fait
143

mention du rôle significatif que doit jouer la diaspora congolaise pour la
reconstruction du pays.
Je voudrais également remercier les collaborateurs de Madame NDIAYE qui
se sont montrés très perspicaces dans tous les projets mis en œuvre en
République démocratique du Congo, au nombre desquels figure la Coordonnatrice
du MIDA Grands Lacs Madame KABAMBA dont le travail abattu est
très louable. J’ai la ferme conviction que la panoplie des résultats positifs que
nous avons enregistrés jusqu’ici dans le partenariat RDC/OIM n’est en réalité
que la conséquence logique des grandes qualités que possèdent toutes ces
femmes et tous ces hommes de l’OIM.
Je ne puis passer sous silence notre gratitude envers les oratrices qui se sont
succédé à la tribune pour présenter des communication de très haute facture,
tous les participants pour la qualité des débats, sans oublier les femmes de la
diaspora congolaise qui se sont jointes à nous pour un apport communicationnel
positif.
Cependant, je serais incomplète si je terminais ce chapitre sans présenter mes
félicitations à tous les participants et participantes à ces assises pour la qualité
des débats et pour les résolutions et recommandations pertinentes qui ont été
adoptées au cours des discussions. J’étais hélas physiquement loin de vous,
mais bien qu’éloignée pour des raisons indépendantes de ma volonté, j’ai suivi
avec beaucoup d’intérêt vos différents débats et je ne puis vous cacher la
fierté que j’éprouve au regard du travail que vous avez abattu.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Madame la Directrice générale adjoint de l’OIM,
Mesdames et Messieurs les participants,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
Dès l’annonce de ce séminaire, nous avions clairement fait mention du fait
que la situation de crise multiforme qui prévaut actuellement dans notre pays
a mis en exergue la profonde motivation des femmes pour une paix durable.
Il apparaît dès lors nécessaire et utile de considérer la femme comme une
actrice de pointe dans les stratégies de recherche de paix, notamment en capitalisant
ses capacités diverses.
Il s’agissait là d’un cri d’alarme adressé à un partenaire qui s’est avéré très
attentif et qui réalise aujourd’hui le présent séminaire dont le résultat est très
flatteur, au regard des recommandations et dispositions pratiques arrêtées.
Mesdames et Messieurs les participants,
Il y a des raisons profondes qui donnent à ce séminaire un cachet spécial :
144

D’abord, la recherche de la paix en ce moment trouble où les affres d’une
guerre imposée entraînent une grande misère pour notre peuple en général et
pour la femme en particulier. Celle-ci, comme vous le savez, subit toutes
sortes de sévices comme les tortures, les viols et que sais-je encore.
Ensuite, les charges sociales de la femme sont, dans un environnement sinistré,
très importantes dans la mesure où elle doit intervenir à tous les niveaux
pour assurer la survie de la cellule aussi bien familiale, communautaire que
nationale. Le souhait du renforcement des capacités des femmes s’en trouve
très largement justifié et présente même un besoin urgent de diligence.
Tout au long de ce séminaire, vous vous êtes posé des questions relatives à la
condition de la femme congolaise, aux facteurs qui bloquent la femme et qui
ne lui permettent pas de s’épanouir, bref, à un diagnostic complet permettant
de dégager les contraintes ainsi que les moyens d’y faire face.
Vos interventions et débats riches en enseignements ont permis une approche
tendant à une plus grande visibilité du rôle de la femme congolaise dans la
reconstruction nationale et le développement économique. Vous avez montré
avec brio que ce rôle ne se limite pas à quelques secteurs privilégiés, mais
plutôt à tous les secteurs de la vie nationale sans exclusive, qu’il s’agisse de la
femme exerçant dans les institutions publiques, dans les entreprises privées, la
vie associative ou confessionnelle.
Ce séminaire a été pour vous l’occasion de confirmer que la mobilisation de la
femme congolaise est inlassable malgré toutes ces difficultés et son long combat
jalonné jusque là par de maigres résultats. Cette mobilisation est également
totale sur toute l’étendue du territoire national ainsi qu’au niveau de la diaspora.
Celle-ci adhère à toute action pour la recherche de la paix dans toutes ses
dimensions, ce qui implique forcement la nécessité du renforcement de capacités.
Ce précieux séminaire s’inscrit dans un ensemble de manifestations qui montrent
que la femme congolaise est pleinement consciente de son importance dans le
processus de développement national. Cette prise de conscience forte s’est
concrétisée par la prise en charge par la femme de ses droits et des intérêts de
la communauté, traduite par la mise en œuvre d’actions tendant à lui assurer
une plus grande promotion et un meilleur épanouissement de sa personne
dans la société. Cette prise en charge implique par conséquent que la femme,
à quelque niveau que ce soit, puisse de manière effective participer à toutes les
actions que vous avez si bien énumérées sans que cette liste soit exhaustive,
de manière que la femme congolaise puisse apporter plus efficacement et plus
visiblement sa contribution à l’œuvre de reconstruction nationale.
Pour ce faire, il est heureux de constater que la femme congolaise a désormais
cessé de se lamenter sur son sort et a pris l’option de se battre désormais aux
côtés de l’homme pour le bien de son peuple et de l’humanité. De ce fait, elle
doit pouvoir s’appuyer sur ses acquis et développer des stratégies à impact
visible.
145

Concernant la capitalisation des acquis, nous lançons un appel pour que la
femme elle-même ne puisse pas hypothéquer les avancées que sa lutte lui a
permis d’enregistrer pour la promotion de ses droits au travail et contre la
violence professionnelle, et ce, en se laissant distraire par ceux qui ont les
attaques et les critiques faciles en lieu et place des réalisations palpables.
Concrètement, la femme travaille aujourd’hui dans les entreprises, les ONG,
etc.
Pour les stratégies porteuses, nos programmes socio-économiques doivent
être plus ambitieux : parler de tracteur à la place des houes, véhicule à la place
des frais de voyage, créations d’entreprises, de grands centres visibles…
Enfin, il y a nécessité de s’organiser en conséquence et en synergie, tout en
sachant qu’il n’ y aura jamais de paix durable sans pain en RDC.
C’est pour toutes ces raisons que je vous recommande de vous approprier le
résultat positif de ces travaux et de tout faire pour que la mise en œuvre se
fasse sans accroc et que votre part d’engagement soit scrupuleusement respectée.
C’est de cette façon que vous vous crédibiliserez et que ceux qui se
décident de nous aider auront la force d’intensifier les initiatives mises en
œuvre et d’en proposer d’autres en vue d’un plus grand impact.
J’espère pour ma part que ce séminaire n’est qu’un point de départ d’un
grand mouvement que notre partenaire l’OIM et nous-mêmes pourrions très
vite enclencher pour apporter un plus à la lutte contre la pauvreté et pour la
paix en RDC, assortie de l’épanouissement socio-économique visible de la
femme congolaise.
Sur cette note d’heureuse perspective, de consolidation de l’action de la Congolaise
de toutes tendances confondues je déclare clos le séminaire sur le
renforcement du rôle des femmes dans la reconstruction nationale et le développement
en République démocratique du Congo.
Je vous remercie.
146

ANNEXES
147

148

PROGRAMME
Kinshasa, Kinshasa, du du 27 27 27 au au au 29 29 juin juin 2003,
2003,
Hôtel MEMLING
Journée 1 : 27 juin 2003
08:30 – 09:30 Accueil et enregistrement des participants
149
ANNEXE I
Séance d’ouverture
09:30 – 11:00
• Discours du représentant du Gouvernement du Royaume de Belgique
• Discours du représentant de l’OIM
• Discours de Madame le Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale
• Discours de Madame le Ministre des Affaires sociales et de la Famille
11:00 – 11:30 Pause
Début des travaux sous la présidence de Madame Jeanne EMAMBA BOBOTO,
Ministre des Affaires sociales
Thème 1 : Rôle des femmes dans la reconstruction nationale,
la résolution et la prévention des conflits
11:30 – 12:30 Modérateur :
Madame Marie-Ange Lukiana MUFWANKOLO,
Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale et
Madame Marie-Josée MIKABA, secrétaire générale à
l’information
Rapporteur : Madame Pélagie EBEKA, avocate

a.Bonne gouvernance et genre,
Marie-Thérèse MODUA, directeur de Cabinet, Ministère des Affaires
sociales et de la Famille
b.Prévention des conflits et développement économique,
Madame Marie-Noëlle NYANGWILE, conseillère juridique à la REGIDESO
c.Influence des femmes dans la prévention des conflits à travers les activités
créatrices d’emploi et génératrices de revenus,
Madame MAVUELA, chargée du projet femme au PNUD en collaboration
avec le Ministère des Affaires sociales
12:30 – 13:15 Débats et interventions de la salle
13:15 – 14:30 Déjeuner
14:30 – 15:30 Modérateur : Madame Philomène EYAL, chef de division
urbaine à la famille
Rapporteur : Madame Pélagie EBEKA, avocate
d.Vers une participation accrue des femmes aux mécanismes de règlement
des conflits en Afrique :
• En RDC : Madame Catherine NZUZI WA MBOMBO, présidente du MPR
• Perspectives de la diaspora : Madame Suzanne MONKASSA, cofondatrice
du CCAE/B
e.Quelle place, quel rôle pour la femme dans la transition ?
Madame Marie-Madeleine KALALA, présidente de l’AFEJUCO
15:30 – 16:30 Débats
16:30 – 17:00 Pause
17:00 – 17:30 Conclusions de la première journée par le rapporteur
Journée 2 : 28 juin 2003
Thème 2 : Le rôle de la femme dans la reconstruction nationale
et la prévention des conflits à travers les activités
créatrices d’emploi et génératrices de revenus.
09:30 – 10:30 Modération : Madame PIKININI, secrétaire générale à la
culture
Rapporteur : Madame Pélagie EBEK, avocate
150

a.Problématique de la génération des revenus et de l’épargne chez la femme
congolaise
Madame Godée RASHIDI, expert-comptable à la BCC
b.L’accès au micro-crédit : modalités et systèmes adaptés aux réalités du
pays
Madame MPUTELA, Projet PNUD-Congo
c.Expérience de la diaspora dans le mouvement associatif des femmes de la
diaspora et la problématique du développement
Madame Dora ILUNGA, conseillère au Ministre belge du Travail en
matière d’Emploi et de Formation.
10:30 – 11:00 Pause
11:00 – 12:00 Débats
12:00 – 14:30 Déjeuner
14:30 – 15:15 Modération : Madame Josianne MFULU, Vice-gouverneur
de la Ville de Kinshasa
Rapporteur : Madame Pélagie EBEKA, avocate
a.Le nouveau « Code du Travail », vers l’égalité des chances ?
Madame MINCHIABO, directeur des études au Ministère du Travail et de
la Prévoyance sociale
b.Femmes et médias : la place de l’information pour la promotion du genre
Madame Madeleine LEMAITRE, éditrice de la revue Africa B en Belgique
15:15 – 16:30 Débats
16:30 – 17:00 Pause
17:00 – 17:30 Conclusions de la deuxième journée par le rapporteur
Journée 3 : 29 juin 2003
Travaux en groupes
09:30 – 11:30 Modération : Madame Esther KIRONGOZI, secrétaire
général à la coopération internationale
Dans les groupes de travail :
• Election du bureau (Président, Vice-Président, Secrétaire et Rapporteur)
• Travaux
151

11:30 – 12:30 Conférence de presse : Madame Ndioro NDIAYE et
le Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale
Préparation du rapport des travaux de groupes
12:30 – 13:30 Conclusions et recommandations par le rapporteur
Discours de clôture
Représentant de l’OIM et représentant du Gouvernement
congolais
13:30 Déjeuner officiel
152

LISTE DES PARTICIPANTS
I. MINISTERE DES AFFAIRES SOCIALES
153
ANNEXE II
01 Jeanne Ebamba BOBOTO Ministère des Affaires
sociales et Famille
Ministre
02 Marie-Ange LUKIANA Ministère du Travail et de Ministre
MUFWANKOLO la Prévoyance sociale
03 Chantal WETSHI Mère et Enfant Secrétaire générale
04 Lucie PUTSHU Cuvette Secrétaire générale
05 Louise MUNGA ASSOFE
06 Angélique BUATSIA Association des femmes
chrétiennes pour le progrès
Présidente
07 Anny NGOY PHECOPEHA Présidente
08 MWEYA TOLANDE DIRAF Présidente
09 Bernadette EBAMBA FEC Présidente
10 Jeannine NGUNGU La Sunamite Présidente
11 Anicette
LIKONZOLOKO
ANOFECO Présidente
12 Angélique INZUN SIAMA Secrétaire générale
13 Jaqueline LOFULO S/G Famille Secrétaire générale
14 Marcelline YAYAWILI ISAM
15 VASIKA POLA S/G Famille Directeur chargé de la
coordination et suivi
des ONG
16 MABILA KONDE S/G Famille Secrétaire permanente
du CNF
17 PASI VALU CRESH Experte
18 SOKI FUANI EYENGA SESOMAS Présidente
19 MWELA KAPINGA AFPUR Présidente
20 Anastasie MOLEKO FENAPOC Présidente
21 Marie-Jeanne NGOYI ACD Secrétaire générale
22 Pascaline GERENGBO Ministère des Affaires
étrangères
23 Colette APONGA Ministère des Affaires
sociales, Service Femme et
Développement
Directrice
24 Philomène MONKUMA Experte indépendante
25 Louise LONGANGE UNAFECOD Membre
26 Thérèse GERENGBO Actions directes au
Développement intégral
Secrétaire générale
27 Adrienne BINWANA Ministère des Affaires Directrice chargée de la
sociales
promotion socioéconomique
de la femme

II. FEMMES SYNDICALISTES
28 Josée LOKONGO UNTC Secrétaire executif
chargée des femmes
travailleuses
29 Léonie NDJOKO CSC 2 e Vice-présidente de la
Commission nationale
des femmes de la CSC
30 Isabelle MATAMBA CDT Vice-présidente chargée
du Genre et de la
Jeunesse
31 Rachel NYUNGA Solidarité Secrétaire nationale
chargée du Département
des femmes travailleuses
32 Angélique KIPULU COPEICO Présidente
33 Louise MYENGE OTUC
34 LIFOLI BOTAMBA STL
35 NGOMA TEZO CTP
36 Mme PIKININI Association des femmes
travailleurs de la fonction
publique
Présidente
III. FEMMES CADRES DES ENTREPRISES PUBLIQUES
37 BADIASHILE KAYEYE SNEL Directeur Direction générale SNL
Kin/Gombe
38 Agnès MWAD INSS Administrateur Building INSS
directeur Boulevard du 30 juin
technique Kin/Gombe
39 Suzane MBULUO INPP Directeur général Direction générale INPP
SANZI
adjoint
40 Perpétue TAMBWE FIKIN Directeur général FIKIN,
enceinte Foire internat.
Kin/Limete
IV. FEMMES DES ASSOCIATIONS DE PROMOTION DE DROITS
ET PAIX
41 Georgette BIEBIE Cause Commune Secrétaire générale
42 Marie-Rose MOSI RAF Présidente
43 Martine MASIKA AFEJUCO Secrétaire générale
44 MAYUMA KALA DYNAFEP Présidente
45 Solonge KAMBIDI Vision Femme Secrétaire exécutive
46 Monique KANDE Caucus des Femmes Présidente
47 Elise MUHIMUZI CONAFED Secrétaire permanente
48 KYET MAYELE Conseil national de la Jeunesse Vice-présidente
49 Elysée DIMANDJA WOPPA Présidente
154

V. FEMMES DES ASSOCIATIONS FEMININES
A VOLET SOCIAL ET ECONOMIQUE
50 Florence BOLOKO UNAF Présidente
51 Constantine MATHY Association des mamans
vendeuses
Présidente
52 Henriette DIUR ACIJF Présidente
53 Alphonsine NYABIGANO Association des Femmes Présidente
KANDOLO
sans voix à la base
54 Marie Josée MAVAMBU DJFC Vice-présidente
55 Odette GEMA ASSOFE
56 Joséphine Charlotte ISALU FOLECO
VI. FEMMES DES ASSOCIATIONS CONFESSIONNELLES
57 Cécile LEPIRA Association des mamans
catholiques
Présidente
58 Pasteur Rose LALA Fédération des femmes protestantes Présidente
59 IBRAHIM LADIA Association des femmes
Secrétaire chargée
musulmanes
de la Femme
60 Jacquie BIDILA Association des femmes
kimbanguistes
Secrétaire
61 Mama OLANGI Association des femmes des
Eglises du Réveil
Présidente
62 Rose LESIE Manne cachée Présidente
VII. PERSONNES RESSOURCES
63 Esther KIRONGOZI Secrétaire générale
internationale
64 Pélagie EVEKA Avocat
65 Marie-Noëlle NYANGWILE REGIDESO Conseillère
juridique
66 Mme MAVWELA Projet Femme
PNUD/Ministère des
Affaires sociales
67 Catherine NZUZI WA
MBOMBO
MPR Présidente
68 Suzanne MONKASSA
69 Godée RASHIDI Banque centrale
70 Mme MPUTELA Ministère des Affaires
sociales
71 Mme MITSHABO Ministère du Travail et de la
Prévoyance sociale
72 Madeleine KALALA AFEJUCO Présidente
155

73 Marie Thérèse MODUA Ministère des Affaires Directeur de
sociales
Cabinet
74 SHAKO KASHAMA REFIDE Président
75 Isabelle KUSU PEMO Femme parlementaire
76 Adèle KAINDA Femme parlementaire
77 Ndioro NDIAYE OIM Genève Directeur général
adjoint
78 Margaret KABAMBA OIM Genève Coordinatrice de
projets
79 Boni KADIMA OIM Kinshasa Administrateur
156

SEMINAIRE REPUBLIQUE
DEMOCRATIQUE DU CONGO
Contexte et justification
157
ANNEXE III
Parmi les crises que connaît la région des Grands Lacs en Afrique, celle de la
République démocratique du Congo qui dure depuis bientôt une décennie, fait
l’objet d’attention particulière et mérite de recevoir toute l’assistance nécessaire
en vue de sa résolution. Le 2 avril 2003 à Sun City (Afrique du Sud), les
participants au dialogue intercongolais ont signé l’Acte final des négociations
politiques intercongolaises qui avaient commencé en octobre 2001, par lequel ils
ont formellement approuvé l’ensemble des accords qui constituent un programme
global pour la restauration de la paix en République démocratique du
Congo. La signature de l’Acte final a marqué un nouveau tournant important
dans le processus de réconciliation nationale et de paix en République démocratique
du Congo, voire dans l’histoire de la région des Grands Lacs.
Toutefois, depuis lesdits accords, la résurgence par intermittence des conflits
continue de faire ici et là, nombre de victimes parmi lesquelles on compte une
grande proportion de femmes et d’enfants. Les conflits armés dans la région
des Grands Lacs ont détérioré davantage la condition de la femme en République
démocratique du Congo.
Dans ce contexte, bien qu’il n’existe pas de statistiques fiables, il est clair que
les femmes et les enfants représentent la population civile la plus touchée. Les
femmes, en particulier, sont victimes des violations de leurs droits humains.
Pourtant, c’est encore la femme, meurtrie, qui doit jouer un rôle plus
important : elle doit faire preuve de force et d’initiative. Elle doit se battre et
subvenir aux besoins de sa famille en fuite et en outre, assurer l’éducation des
enfants à la culture de la paix, car elle constitue un véritable espoir pour une
paix durable.
Les conflits en RDC font chaque jour des morts, un grand nombre de personnes
déplacées et de réfugiées et exposent la population à des épidémies, notamment
le choléra. Les récents développements de la crise congolaise ont donné
un écho particulier surtout dans la région de Bunia, où l’on a déploré une fois
de plus des victimes et assisté à des mouvements de personnes fuyant les
hostilités.

Malgré le fait qu’elles ne sont généralement pas impliquées dans les processus
de prise de décision concernant le déclenchement des conflits, les femmes
endossent une lourde responsabilité dans les périodes consécutives aux conflits.
Au cours des dernières années, l’on s’est rendu compte, à travers les différentes
situations de crise en Afrique et ailleurs dans le monde, que les femmes
peuvent avoir un rôle important à jouer dans les processus de paix, de prévention
des conflits et de reconstruction.
Les femmes ne devraient pas seulement être considérées comme des victimes
qui requièrent une protection et une assistance mais plutôt comme des partenaires
à part entière pour la paix. Elles peuvent s’engager et diriger les efforts
pour soutenir et promouvoir la paix et la réconciliation car elles cherchent
souvent des méthodes consensuelles pour résoudre les conflits et se concentrent
plus sur le bien-être collectif.
En réalité, les femmes ont été de tout temps, des acteurs véritables de la
promotion du dialogue social, des artisans de la paix et du rapprochement
entre les peuples. Cependant, leurs talents et leurs capacités de médiation sont
bien souvent méprisés et loin d’être reconnus et acceptés dans les négociations
de paix. Il s’avère donc indispensable de promouvoir leur rôle aussi bien
que leur représentation au sein des instances dirigeantes et d’affiner davantage
leurs compétences afin de les impliquer pleinement dans les processus de
paix et de prévention des conflits.
Dans le cas précis de la République démocratique du Congo, les femmes
congolaises ont, par le passé, pris des initiatives importantes pour le retour et
la promotion de la paix. Elles ont créé des organisations comme le collectif
des associations féminines pour le développement, la Plate forme des
femmes au Nord Kivu, et la Coordination provinciale des ONG et associations
féminines au Sud Kivu.
La femme congolaise peut jouer un rôle très important au niveau de l’intégration
nationale dont le but est de faire en sorte que des ethnies qui cohabitent
dans un même espace ou dans des espaces contigus puissent harmoniser
leurs rapports de sorte que les différences et/ou les divergences d’ordre socioculturel
soient sensiblement dissipées.
Les conflits inter-ethniques en RDC sont essentiellement alimentés et entretenus
par des facteurs liés à des événements conflictuels dont certains datent
de la période pré-coloniale et sont transmis oralement de génération en génération.
Le rôle de la femme apparaît donc au niveau éducationnel. Une éducation
centrée sur la recherche de la paix ne peut qu’engendrer l’abandon progressif
des frustrations presque automatiques transmises en vertu du principe que la
violence appelle la violence. C’est la raison pour laquelle une sensibilisation est
nécessaire afin de faire découvrir les capacités opérationnelles et potentielles
des femmes. Celles-ci devront répandre la culture de paix à tous les niveaux,
de la tendre enfance à l’âge adulte, et valoriser la disparité ethnique afin que
celle-ci ne soit pas un motif de dissension.
158

Au Congo, par le biais des Organisations non gouvernementales de développement,
les femmes ont joué un rôle très important dans la lutte contre la
pauvreté. Elles se sont battues pour se sortir de la misère et ont entraîné toute
leur famille avec elles dans ce combat.
Le Séminaire sur le renforcement du rôle des femmes dans le processus de
réconciliation et de reconstruction nationale devra permettre de renforcer les
capacités déjà existantes des femmes dans le but de favoriser leur implication
active dans la recherche des solutions durables à la stabilité politique et au
dialogue social en RDC.
Objectifs poursuivis
Ce séminaire a pour but de faire prendre conscience aux femmes congolaises
de l’importance de leur rôle dans la paix et l’unité nationale de leur pays grâce
aux activités économiques qu’elles peuvent initier ou consolider pour assurer
la sécurité alimentaire et le développement économique et politique.
Il s’agit donc de favoriser l’établissement de relations franches et constructives
entre les femmes congolaises résidant en RDC et à l’étranger, dans le but
de contribuer efficacement et conjointement au processus de paix en cours.
Plus spécifiquement, le projet vise à :
• Sensibiliser l’opinion nationale sur le rôle important joué par les femmes
dans les processus de paix, de prévention des conflits et de réconciliation
nationale ;
• Attirer l’attention de la communauté internationale sur l’importance du
rôle des femmes dans la prévention des conflits et le développement économique
;
• Engager les femmes dans un dialogue sur le rôle essentiel qu’elles peuvent
jouer en faveur d’une plus grande paix et d’une meilleure prévention des
conflits, tant par la création d’emplois et la génération de revenus que par
un développement économique général ;
• Lutter contre l’exode de ressources humaines hautement qualifiées par la
création d’emplois en RDC ;
• Renforcer la position des femmes dans la société en accentuant leur importance
au niveau de la communauté.
Resultats attendus
• Les décideurs du pays et l’ensemble de la population sont mieux informés
de l’importance du rôle des femmes dans les processus de réconciliation
nationale et de développement économique ;
159

• Le gouvernement congolais prend des mesures pour encourager les initiatives
des femmes dans la prévention des conflits et les activités génératrices
de revenus ;
• Des réseaux et/ou des activités coopératives sont mis en place ou renforcés
par les femmes pour appuyer des activités génératrices de revenus, en
vue de contribuer au processus global de la réconciliation nationale et à la
prévention de conflits ;
• La place des femmes congolaises dans les processus de décision politique
et dans la vie économique est davantage reconnue.
La contribution de l’OIM à la realisation de ce projet
L’OIM s’intéresse de plus en plus au rôle des femmes dans le rétablissement
de la paix à travers des programmes d’après-conflit et de reconstruction
sociale. Dans ses programmes d’intervention après-conflits, l’OIM a contribué
à donner une aide immédiate aux personnes déplacées, aux réfugiés et aux
combattants démobilisés qui veulent rentrer au pays en leur offrant une
formation à court terme et en mettant sur pied des micro-projets de
développement communautaire. L’OIM s’efforce d’identifier dans ses futurs
programmes de retour et de réintégration, les femmes comme « des agents
de développement ».
Les conflits et la militarisation ont souvent comme corollaires des capacités et
des responsabilités nouvelles pour les femmes. Par exemple, pendant une crise,
la population féminine développe des mécanismes créatifs et flexibles ainsi
que des stratégies qui devraient être identifiées et développées dans toute intervention
après-conflit. En d’autres termes, il est nécessaire de renforcer les
capacités socio-économiques des femmes. Cette condition devrait être le point
de départ de toute assistance internationale visant à promouvoir le changement
social et à prévenir les conflits.
Depuis près d’une décennie, l’OIM a mis sur pied un certain nombre de projets
facilitant l’accès des femmes au marché de l’emploi et aux micro-crédits
dans le but de promouvoir la prévention des conflits par le biais de la stabilisation
économique. Ces projets ont touché plusieurs pays notamment l’Angola,
l’Arménie, l’Azerbaïdjan, le Guatemala et le Mozambique.
En mars1999, afin d’accroître l’accès aux soins médicaux et à l’éducation
pour le peuple afghan – surtout les femmes et les filles dans les zones difficilement
accessibles – l’OIM a mis sur pied un projet de retour et de
réintégration de nationaux qualifiés afghans (depuis le Pakistan et des
zones rurales d’Afghanistan) dans les secteurs de la santé et l’éducation avec
une grande importance donnée aux médecins femmes afghanes. Ce projet est
en conformité avec la stratégie de l’OIM en matière d’égalité des sexes car il
donne aux femmes et aux hommes l’opportunité de développer et d’utiliser
160

pleinement leurs capacités. En offrant aux femmes qualifiées l’accès à
l’emploi, le projet leur a permis de réaliser leur potentiel professionnel et a
ainsi contribué à la reconstruction de leur pays tout en restant un source en
terme de provision aux besoins de leur famille.
De même, grâce au programme de « Retour de Nationaux Africains
Qualifiés » (RQAN) mis en œuvre par l’OIM, un grand nombre de femmes
africaines hautement qualifiées sont retournées volontairement dans leur pays
d’origine pour occuper des postes clés et créer des entreprises. Ces femmes
ont contribué de façon significative à la promotion du rôle économique et à la
création d’emplois pour les femmes en Afrique, ainsi qu’au développement de
stratégies de prévention des conflits sur tout le continent. Mais il est évident
que ce type de projet est quantitativement limité, car la plupart des migrants
souhaitent conserver le statut acquis dans le pays d’accueil et privilégient la
mobilité que permet aujourd’hui un programme comme le MIDA (Migrations
pour le développement en Afrique), dont le Rwanda est d’ailleurs l’un des
pays bénéficiaires.
C’est dans ce contexte qu’un projet de campagne d’information a été mis sur
pied en mars 2001 à Hargeisa, en Somalie, afin de rétablir la confiance et
renforcer les efforts de paix par une meilleure communication entre les femmes
somaliennes. Ce projet était axé sur les femmes en raison de leur propension
naturelle à réduire la tension parmi la population et les clans belligérants. Dans
le même ordre d’idées, un séminaire a été organisé pendant une semaine à
l’intention d’une vingtaine de femmes professionnelles venant de toutes les
régions de la Somalie, à Hargeisa dans le nord du pays afin de:
• promouvoir une prise de conscience du rôle important des femmes somaliennes
dans le processus de paix et de reconstruction du pays à travers
des discussions constructives ;
• atteindre un consensus sur une déclaration de principe et identifier des
actions à poursuivre par les femmes somaliennes qui puissent inclure leur
participation active ;
• former des groupes de femmes dans les communautés, à travers le pays,
en les aidant à mettre sur pied d’autres séminaires à l’intérieur et à l’extérieur
du pays.
Ce séminaire a ainsi permis entre autres résultats :
• d’identifier des “leaders” femmes ;
• de créer une base de données avec les participantes ;
• de définir et de distribuer une déclaration de principes traçant les grandes
lignes du rôle important des femmes somaliennes dans le processus de
paix ;
• de mettre sur pied un réseau pour des actions à long terme ;
161

• d’établir et de distribuer un plan d’action avec des activités spécifiques et
des objectifs aux activistes somaliennes.
En outre, une prise de conscience s’est développée chez les femmes somaliennes
sur le rôle essentiel qu’elles peuvent jouer pour promouvoir la paix à
travers une meilleure communication entre elles. Des efforts de lobby se sont
intensifiés auprès des leaders politiques actuels somaliens dans le but de rétablir
la paix totale et durable dans le pays.
C’est sur la base de ces acquis que l’OIM, en partenariat avec le Gouvernement
congolais, à travers le Ministère des Affaires Sociales et de la Famille et
celui du Travail et de la Prévoyance Sociale, organise en RDC un séminaire
sur le renforcement du rôle des femmes dans la reconstruction nationale
et le développement économique.
Ce projet a pour but de contribuer à promouvoir la paix, la stabilité, le développement
économique et la réconciliation nationale en RDC. Il permettra une
communication ouverte et constructive parmi les femmes congolaises vivant
en RDC ainsi que celles de la diaspora dans le but d’apporter une contribution
effective au processus de paix. Ce soutien au dialogue et au développement de
réseaux vise à promouvoir l’emploi, la génération de revenus et le développement
économique parmi les femmes, et aussi à prévenir la fuite des cerveaux.
Le séminaire aura pour effet de faciliter la réconciliation nationale ainsi que la
cohabitation et aura pour cible la coopération entre les femmes. Une campagne
d’information sera menée parallèlement à ce séminaire afin d’accroître la sensibilité
de l’ensemble de la population congolaise.
Le rôle économique important des femmes ne doit pas être négligé surtout en
relation avec les activités qui correspondent à des emplois durables. La contribution
des femmes à la vie de leurs familles ainsi qu’à celle de leurs
communautés par leur soutien économique et leur stabilité peut jouer un rôle
vital dans la promotion de la stabilité et une paix durable. A travers le soutien
aux activités économiques des femmes et en particulier à travers l’établissement
de micro-entreprises, on peut atteindre un impact significatif dans le
rétablissement de la paix.
162

163
ANNEXE IV
SEMINAIRE SUR LE RENFORCEMENT
DU ROLE DES FEMMES DANS DANS LA
LA
RECONSTRUCTION RECONSTRUCTION NATIONALE NATIONALE ET
ET
LE LE LE DEVELOPPEMENT DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
ECONOMIQUE
EN EN RDC RDC
RDC
Kinshasa, Kinshasa, du27 du27 du27 du27 du27 au au 30 30 juin juin 2003
2003
SYNTHESE SYNTHESE DES DES INTERVENTIONS INTERVENTIONS ET ET DES DES DEBATS
DEBATS
PREMIERE PREMIERE JOURNEE: JOURNEE: JOURNEE: JOURNEE: JOURNEE: VENDREDI VENDREDI 27 27 27 JUIN JUIN 2003
2003
Les travaux de la première journée se sont déroulés en deux séances, sous le
thème : « Rôle des femmes dans la reconstruction nationale, la résolution
et la prévention des conflits ».
Séance (de 11 h 30 à 13 h 30)
1 ère Séance
Modérateur : Madame Solange KAMBIDI Conseillère au Ministère
du Travail et de la Prévoyance sociale
A. LES INTERVENTIONS
a. Bonne gouvernance et genre : Par Madame Marie-Thérèse MODWA,
Directeur de Cabinet au Ministère des Affaires sociales et de la Famille,
présenté par Madame Angélique INZUN
Madame Angélique INZUN a, comme entrée en matière, fait le constat avec
l’UNIFEM, qu’il n’existe pas au monde des pays où les femmes jouissent du
même statut politique que les hommes. Elle a ensuite livré quelques définitions
sur les concepts comme la gouvernance, la bonne gouvernance ainsi que la
guerre, avant de poser le diagnostic du genre en République démocratique du
Congo.

Elle a fini par conclure que malgré la ratification par la République démocratique
du Congo de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination à l’égard des femmes (CEDEF, 6 octobre 1985), malgré la
Constitution actuelle (article 51) et enfin, malgré le fait que la République
Démocratique du Congo applique l’approche genre depuis des décennies, celleci
n’est pas encore intégrée dans tous les domaines : juridique, politique, social,
économique, et encore moins dans les organes de prise de décision.
Essayant de comprendre les raisons de la non-intégration de cet aspect genre,
elle s’est rendue compte qu’il existe plusieurs facteurs qui limitent cette intégration
et a par conséquent proposé comme voie de sortie pour la RDC : le
respect du principe de genre dans la bonne gouvernance, pour un développement
national harmonieux.
b. Prévention des conflits et développement économique : Par Madame
Marie-Noëlle NYANGWILE, Conseillère juridique à la REGIDESO.
L’intervenante est partie d’un constat : au cours des années 90, plusieurs pays
de l’Afrique sub-saharienne sont secoués par des guerres civiles et des crises
politiques.
Avec cette illustration, elle a d’emblée voulu démontrer le lien étroit qui existe
entre la notion de conflit et celle de développement. Ainsi, pour mieux aborder
son sujet, elle a préféré se pencher sur les notions de développement et de
conflit pour ensuite proposer quelques voies et moyens.
Parlant du développement, elle a d’abord tenu à souligner la difficulté de définir
ce mot, pour ensuite adopter la définition la plus large proposée par le
Professeur D’HAESE, qui présente le développement comme un processus
résultant de plusieurs facteurs : démographiques, socio-politiques, économiques,
culturels.
Parlant des conflits, l’intervenante s’est d’abord attardée sur les différentes
sortes de conflits : conflits relatifs aux intérêts (politiques et économiques),
conflits sur les moyens-buts, conflits sur les valeurs, conflits d’identité collective,
pour ensuite réfléchir sur les différentes conséquences des conflits.
C’est après cet examen que l’intervenante est arrivée à la conclusion qu’il est
impérieux de prévenir les conflits pour permettre un développement harmonieux.
c. Influence des femmes dans la prévention des conflits à travers les
activités créatrices d’emploi et génératrices de revenus : Par Madame
Augustine MAVUELA, Coordonnatrice nationale du Projet PNUD/Femmes.
Dès le départ, l’intervenante a fait le constat que suite aux multiples événements
et différentes crises qui ont marqué la vie politique et économique de la
RDC, la femme congolaise a appris à se prendre en charge et a développé en
un temps record plusieurs activités génératrices d’emplois et de revenus.
164

Malheureusement, la femme est freinée dans cet élan par plusieurs contraintes
auxquelles elle doit faire face.
Après avoir examiné la situation des foyers en ces temps de crise en RDC, elle
en est arrivée au constat que lorsque la femme exerce une activité économique,
elle est en mesure d’apaiser les tensions au sein de sa famille (son
foyer) et éduquer ses enfants dans de bonnes conditions.
L’oratrice est allée plus loin en affirmant que lorsque la femme prospère dans
ses activités économiques, elle est à même de prévenir les conflits.
Pour terminer, elle a vanté l’appui du PNUD aux femmes dans la lutte contre
la pauvreté.
B. LES DEBATS
Il y a eu deux séries de débats, respectivement de 5 (cinq) questions et de 2
(deux) questions.
De toutes les questions posées par les participantes, se sont dégagées les
préoccupations suivantes
1.les stratégies à adopter par les femmes pour a) faire accepter son message
par les hommes, b) se faire accepter en tant qu’agents et abolir ainsi les
préjugés stéréotypés sur ses compétences et c) obtenir l’intégration de
l’aspect genre dans les secteurs dominés par l’homme ;
2.la nécessité pour les femmes ayant une expérience dans la vie politique ou
d’autres secteurs, d’encadrer les autres femmes qui aspirent à émerger ;
3.la situation de « laissée pour compte » de la femme de l’arrière-pays qui
reste dans l’ignorance, dans la sous-information ;
4.le schéma à préconiser pour promouvoir le bien-être de l’homme et résoudre
les conflits fonciers qui semblent avoir un impact important dans la crise
congolaise.
Par rapport à ces préoccupations, les intervenantes ont apporté leur contribution
et ont proposé les réponses suivantes :
• Pour vaincre la résistance des hommes au message de la femme, il convient
d’adopter trois stratégies, à savoir : veiller à l’éducation des enfants dès le
bas âge car les hommes dont nous déplorons le comportement ont d’abord
été élevés par leur mères, persévérer dans un comportement irréprochable
en ce qui concerne les compétences et l’intégrité morale, et enfin, se regrouper
pour moraliser la vie politique car la femme a beaucoup de vertus
à apporter.
Il faudrait en outre, pour intégrer l’aspect genre, préparer déjà la jeune fille
à être plus ambitieuse et à choisir les activités jusque-là exercées par les
165

hommes. Il faudrait également que la femme s’affirme seulement par ses
compétences.
Le combat de la femme pour l’abolition des mesures discriminatoires trouvera
une solution dans l’adoption des projets proposés par le Ministre des Affaires
sociales avec l’aide des ONG et l’appui de la Coopération canadienne.
• Les femmes ayant de l’expérience devraient encadrer celles qui en ont
besoin pour les aider à émerger, comme cela se fait chez les hommes.
• La femme de l’arrière-pays, il vrai, accuse un déficit d’information par
rapport à la femme de Kinshasa. Elle mérite qu’on s’occupe d’elle.
• Le développement de l’homme procède d’un processus et cela doit se
faire dans un pays pacifié. Il importe donc avant tout d’imposer la paix
afin de pouvoir trouver une solution aux différents problèmes.
Débutée à 11 h 30, la première séance des travaux a pris fin à 13 h 30.
2 ème SEANCE
* * * *
SEANCE (de 14 h 30 à 17 h 30)
Modérateur : Madame Philomène EYALE, Chef de Division urbaine à
la Famille
A. LES INTERVENTIONS
a. Vers une participation accrue des femmes aux mécanismes de règlement
des conflits en Afrique, Cas de la RDC : Par Madame Catherine
NZUZI WA MBOMBO, rendu par Mme MUNYANYA
L’oratrice a d’abord fait le constat de la faible représentativité des femmes
dans les instances de décision et la survivance des pratiques discriminatoires
à leur égard.
En vue de proposer des pistes de solution, elle a ensuite articulé son propos
autour de quatre axes :
• Elle pense d’abord qu’il faut une participation de la femme au développement
de la RDC. En effet, la femme qui constitue la majorité sur le plan
démographique (52 % de la population) devrait participer activement au
développement de la RDC d’autant plus qu’à l’heure actuelle, beaucoup de
femmes sont au bénéfice de compétences solides au point d’égaler ou
parfois de surpasser les hommes.
• L’oratrice a illustré son propos par une citation de l’Evêque de Bukabu
(feu Mgr MUZIHIRWA) : « la société humaine est un oiseau pourvu de
166

deux ailes : l’une masculine, l’autre féminine. Elle ne peut prendre son
envol que lorsque les deux ailes sont pareillement développées ».
• Elle soutient qu’il est déjà réjouissant que la femme participe au développement,
mais qu’elle doit en outre participer à la vie politique et aux mécanismes
de prévention des conflits, en s’appuyant sur la garantie de l’égalité lui
assurée par les textes constitutionnels et sur les nombreux atouts qu’elle
possède : le courage, le goût de travail, l’esprit de conciliation, etc.
• Elle a également souligné que la femme a un grand rôle à jouer dans le
règlement des conflits car il existe une interaction entre le développement
et la prévention des conflits. Or, la plupart des conflits surviennent suite
aux ambitions démesurées des hommes et face à cela, il convient de proposer
le modèle féminin qui est fait d’une propension d’écoute, d’un sens
aigu de l’intérêt général, de dialogue, et de recherche de consensus.
Toutes ces considérations ont amené l’oratrice à conclure qu’il faut une grande
participation de la femme, à condition qu’elle prenne conscience de ses atouts,
qu’elle soit solidaire et qu’elle arrête de s’opposer à ses compatriotes, de
monter des stratégies communes et de s’inspirer de l’expérience des autres
pays.
b. Vers une participation accrue des femmes aux mécanismes de règlement
des conflits en RDC, Cas de la Diaspora : Par Madame Suzanne
MONKASSA, Co-fondatrice du Conseil des Communautés africaines en
Europe/Belgique
L’intervenante remarque que la participation des femmes aux instances de
décision demeure faible en Afrique subsaharienne (11,5 % dans les parlements)
; elle est absente alors qu’elle devrait participer activement au niveau
des instances de décisions.
Elle a ensuite survolé les différents domaines de participation de la femme au
règlement des conflits :
• Au niveau familial, c’est la femme qui joue le rôle principal dans le climat
de paix et d’harmonie dans la famille, et cela en veillant à l’éducation des
enfants.
• Au niveau des quartiers, c’est encore elle qui, par sa médiation informelle
écoute les parties en conflit et établit la communication entre elles. C’est
donc la femme qui règle les conflits.
• Au niveau communal, la femme devrait accroître sa participation au sein
des communes, en prenant soin de se présenter aux élections. L’oratrice a
donné l’exemple des élections municipales au Bénin en 2002.
• Au niveau national, la femme a toutes les raisons de s’impliquer car la paix
est la condition au développement et la femme est la plus touchée par les
167

conflits (voir à ce propos l’ouvrage cité de Edith Sizoo : « Le corps féminin
: merveille ou champ de bataille »).
• Au niveau sous-régional, les femmes devraient créer des réseaux pour
mener des actions de lobbying.
• Au niveau international, l’intervenante suggère que la femme fasse sienne
la Résolution 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité – Conseil de
Sécurité 2000.
En conclusion, Madame Suzanne MONKASSA a estimé que les femmes
devraient s’approprier les textes des instruments internationaux et qu’il est
impérieux que les gouvernements les aident à renforcer leurs capacités.
c. Quelle place, quel rôle pour la femme dans la transition ? : Par Madame
Marie-Madeleine KALALA, présidente de l’AFEJUCO (Association des
femmes juristes du Congo) et coordonnatrice de Cause Commune
Dernière oratrice de cette journée, Madame KALALA a présenté son sujet en
trois volets :
• En premier lieu, s’agissant de la place de la femme en RDC, elle soutient
que la femme est plus visible dans la vie politique, professionnelle, associative
qu’il y a dix ans. Cela est certainement dû à la prise de conscience et
à l’encouragement provoqués par la Conférence de Beijing. Elle a ensuite
indiqué que les femmes se sont particulièrement mobilisées pour prendre
une part active à la résolution de la crise congolaise et qu’elles sont également
parvenues à faire reconnaître leurs droits à une représentation
significative dans les institutions de la République. Il lui appartient désormais
de les revendiquer.
• En second lieu, elle a examiné le rôle que doit jouer la femme dans la
transition. Selon elle, la femme doit participer à la prise de décisions dans
tous les domaines de la vie, et cela en s’impliquant au parlement, au gouvernement
ainsi que dans les organes provinciaux et locaux, dans tous les
secteurs de la vie active. Pour ce faire, la femme devra être solidaire et
monter des stratégies pour être présente sur tous les fronts, en tenant
compte des compétences et des exigences de réconciliation. Elle devra se
préparer à participer aux élections sans oublier la création de cadres de
concertation.
• En troisième lieu, elle a soutenu que la femme aura le loisir de penser des
programmes et des stratégies en faveur d’elle-même, en ayant tiré les leçons
des échecs de son passé récent.
En guise de conclusion, l’oratrice a formulé des recommandations aux femmes
elles-mêmes ainsi qu’aux ONG, aux institutions de la transition et aux partis
politiques, afin d’obtenir une grande participation des femmes.
168

B. LES DEBATS
Les débats ont été particulièrement riches et se sont articulés autour des préoccupations
suivantes :
1.la stratégie à adopter pour obtenir la représentativité des femmes ;
2.les solutions que la femme a pour inhiber sa peur ;
3.le manque de visibilité des actions des femmes congolaises malgré leurs
années de combat ;
4.la marginalisation des femmes non instruites par celles plus instruites, et la
marginalisation des femmes de l’intérieur par celles de Kinshasa ;
5.le phénomène d’enfants dits « sorciers » ;
6.les femmes n’avancent pas malgré la succession des séminaires, malgré
les redites.
A toutes ces préoccupations, toute l’assemblée a essayé d’apporter des
réponses :
• En effet, parler de stratégie implique une perspective à long terme. Pour ce
qui est de l’immédiat, il faudrait apprendre à négocier avec les autres car il
y a toujours des conflits et des rapports de force (S. MONKASSA).
• A propos de la peur, les uns ont suggéré de faire un effort pour tout d’abord
reconnaître cette peur, c’est-à-dire sa faiblesse, et chercher ensuite la
solution. Cela revient à identifier la faiblesse et à la combattre par la suite
(S. MONKASSA).
• Les autres pensent que pour surmonter sa peur, il faut se connaître, la
femme doit savoir ce qu’elle veut, connaître ses potentialités, et avoir
l’estime de soi. En effet, elle a tendance à se sous-estimer et à communiquer
ses complexes à ses enfants. Il faut qu’elle soit à l’aise avec elle-même
(M. KABAMBA, parlant de son expérience personnelle). Enfin, d’autres
pensent que la femme a peur car elle n’ose pas créer de partis politiques,
par exemple.
• Concernant l’impression du manque de visibilité de l’action de la femme, il
a été suggéré d’agir en groupes de pression, d’organiser des rencontres
pour que l’action des femmes soit plus efficiente.
• A propos de l’inquiétude des femmes de l’arrière-pays, il a été reconnu
qu’elles sont moins favorisées que celles de Kinshasa en termes d’information
et d’appui par les organismes internationaux. Il reste cependant
vrai que bien que les femmes de Kinshasa disposent de l’information et de
plusieurs appuis, elles ne sont pas nombreuses à exploiter cet avantage en
s’informant et en se formant. C’est ainsi qu’il a été recommandé non
seulement de chercher à se former et à s’informer, mais aussi à encourager
les jeunes filles à lire.
169

• A propos des enfants dits sorciers, il a semblé se dégager une opinion qui
est celle de dire que ce phénomène est à prendre au sérieux, car c’est une
bombe à retardement. Il y a cependant certains qui pensent que ce phénomène
a pris de l’ampleur avec la misère qui s’est abattue sur le pays,
d’autres encore pensent que c’est plutôt l’influence des sectes qui l’a
amplifié.
• Pour ce qui est de l’opinion selon laquelle les femmes font du sur-place,
malgré la multiplication des séminaires et conférences, il a été observé
que ce n’est qu’une impression car c’est petit à petit qu’on pose les
jalons, qu’on arrive à faire accepter les choses. C’est un processus
(S. MONKASSA). A ce propos, il a été fait la recommandation de la
création de synergies entre les femmes qui sont au pays et celles de la
diaspora et que cet espace d’échange, de concertation soit formalisé pour
que la femme congolaise aille de l’avant (S. MONKASSA).
Pour finir, il faut relever l’intervention de la représentante de l’OIM, Mme
KABAMBA qui a exprimé la joie qu’elle éprouvait en organisant de telles assises
dans son propre pays (ce qui est exceptionnel pour un fonctionnaire international).
Après avoir parlé de son expérience personnelle, pour répondre à une préoccupation
de l’assemblée, elle a souligné que les femmes congolaises ont besoin
d’être appuyées et encadrées ; elles pourraient trouver cet appui auprès du
Ministère des Affaires sociales qui reçoit toutes les informations.
Elle a ajouté qu’il est malheureux de constater que la Congolaise est non seulement
absente des forums internationaux, mais ne s’approprie pas non plus les
instruments internationaux que la République démocratique du Congo a pourtant
ratifiés. Elle a par ailleurs conseillé aux femmes de faire l’effort de les
connaître.
Enfin, la représentante du Ministère des Affaires sociales a tenu à préciser
qu’il est faux de croire qu’il n’existe pas d’espace d’échange entre les femmes
puisque existent le Conseil national de la femme, la plate-forme Cause commune,
le Caucus des femmes, etc. Elle a ajouté que si la Congolaise ne s’engage
pas suffisamment, ce n’est pas à cause de la peur mais c’est plutôt parce que
la femme perçoit très mal une ambition déclarée de la part d’une femme. Elle
la trouve malsaine alors qu’elle aurait intérêt à encourager sa sœur dans cette
voie.
170

SYNTHESE DES INTERVENTIONS ET DES DEBATS
DEUXIEME JOURNEE: SAMEDI 28 JUIN 2003
Comme pour la première journée, les travaux de la deuxième journée se sont
déroulés en deux séances.
1 ère Séance
Modérateur : Madame Angélique INZUN
I. I. LES LES INTERVENTIONS
INTERVENTIONS
INTERVENTIONS
a. Problématique de la génération des revenus et de l’épargne chez la
femme congolaise : Par Madame Godée RASHIDI, expert-comptable à
la Banque centrale du Congo
Après les remerciements d’usage, la première oratrice de la journée a annoncé
son plan : premièrement, la problématique de l’épargne ; deuxièmement, les
activités économiques génératrices de revenus.
Concernant la problématique de l’épargne, l’oratrice a défini l’épargne comme
l’excès du revenu sur la dépense de consommation ou la fraction du revenu
qui n’est pas affectée à la consommation (cf J.M. Keynes)
Elle a ensuite cité à l’intention de l’assemblée, les différentes sortes d’épargne
classique : épargne contractuelle, épargne potentielle, liquide, d’autofinancement,
épargne-assurance, épargne forcée et épargne collective.
Elle a noté que dans notre pays, l’épargne classique est quasi-inexistante ou
très faible, ce qui l’a amenée à examiner les causes de l’affaiblissement de
l’épargne en RDC.
A ce propos, elle a relevé principalement deux causes : l’inflation et la baisse
du pouvoir d’achat.
L’oratrice a alors fait le constat suivant : suite au délabrement du tissu économique
du pays, consécutif à la crise mondiale accentuée en RDC par les
différents pillages et par les guerres, il y a eu instabilité du circuit bancaire.
Devant cette situation, la femme congolaise, grâce à son esprit de créativité, a
imaginé d’autres modes d’épargne : (1) les tontines appelées communément
« likelemba » et (2) les systèmes baptisés « bwakisa carte ». En plus de ces
deux modes d’épargne, il y a les caisses de mutualité et les coopératives
d’épargne et de crédit.
Abordant le deuxième volet, les activités génératrices de revenus, l’intervenante
a fait remarquer que devant la destruction du tissu économique entraînant la
171

clochardisation de leurs maris, les femmes congolaises n’ont pas baissé les
bras. Au contraire, elles se sont recyclées dans des activités multiples et multiformes
qui génèrent des revenus. On retrouve la femme dans l’agriculture,
l’élevage, la pêche, le commerce, la transformation, etc.
b. L’accès au micro-crédit : modalités et systèmes adaptés aux réalités
du pays : Par Madame MPUTELA, rendu par Mme SANGANA, chef des
Travaux à l’UNIKIN.
En guise d’introduction, l’intervenante a fait remarquer que suite à la faillite
des institutions financières se développe actuellement le micro-crédit avec
comme objectif principal la réduction de la pauvreté. Le micro-crédit consiste
en l’octroi des crédits de façon répétitive et graduelle, tout en accompagnant
le bénéficiaire dans ses activités génératrices de revenus.
Cependant, elle constate que le micro-crédit reste inaccessible aux femmes,
alors que ce système vise la réduction de la pauvreté ; il devrait susciter chez
les femmes et les jeunes l’esprit d’épargne et leur permettre d’augmenter ainsi
leurs activités et leurs revenus.
Face à cela, et compte tenu du fait que ce système prend de l’ampleur, elle
propose qu’un programme de développement et d’appui à la micro-finance
soit mis en place. Pour ce faire, elle propose que l’on s’inspire des propositions
faites après les travaux du forum sur l’entreprenariat qui avait eu lieu à
Kinshasa.
Ces propositions ont porté par exemple sur les types d’intervention (domaine
de l’agriculture, sur le montant (entre 200 et 500 USD), la durée : 12 mois +
3 mois de délai, taux d’intérêt le plus faible, entre autres, ainsi qu’un système
de gestion décentralisée et une formation des bénéficiaires.
c. Expérience de la diaspora dans le mouvement associatif des fermes
de la diaspora et la problématique du développement : Par Madame
Dora ILUNGA, Conseillère du Ministre belge du Travail en matière
d’Emploi et de Formation, élue locale et présidente de l’association Planète
sans frontières.
La troisième oratrice de la journée a d’abord tenu à exprimer à quel point elle
était impressionnée par les conférences qu’elle a entendues, où on ne parle
que des femmes des autres pays africains et non des Congolaises.
Entant dans le vif du sujet, elle a définit les mots « diaspora » et « mouvement
associatif des femmes de la diaspora ». Elle a ensuite brossé un historique de
la naissance du mouvement associatif dans les pays européens et surtout en
Belgique.
Il s’est dégagé de cette explication que le mouvement associatif de la diaspora
s’est crée au fur et à mesure, en commençant par des regroupements informels
par origine.
172

Ensuite, à la faveur de l’accroissement de la population africaine en Belgique
suite aux afflux de population vers les années 1990 d’une part et à l’assouplissement
des lois sur la nationalité d’autre part, les associations commencent à
voir le jour, à se structurer, à se faire enregistrer (elle a tenu à préciser que
toutes les associations ne sont pas des ONG, car il faut être officiellement
reconnu, ce qui est actuellement le cas de quatre associations).
Après ce bref historique, l’intervenante s’est penchée sur le fonctionnement
des associations de la diaspora.
Elle a parlé notamment des domaines d’intervention de ces associations, de
leur mode de fonctionnement et de leurs sources de financement, et a cité
l’exemple de l’association « chantier Afrique » et du projet mis en place en
s’inspirant de l’expérience réussie en Equateur en collaboration avec les banques
espagnoles.
Elle a ensuite tenu à donner deux exemples d’expériences que pourraient vivre
des femmes de la diaspora et a cité les côtés positifs et les côtés négatifs des
associations de la diaspora.
Pour conclure, elle a affirmé que les associations de la diaspora ont un grand
rôle à jouer dans la coopération au développement et restent ouvertes à une
collaboration avec les associations de la RDC.
II. LES DEBATS
Les débats ont été enrichissants surtout grâce à l’intérêt suscité par l’expérience
de la diaspora.
Les différentes préoccupations ont tourné essentiellement autour des questions
suivantes :
1°/ Le but caché du paternalisme belge en favorisant l’émergence des étrangers,
en se référant au cas du rapatriement des Rwandais via la RDC fait par
l’OIM en remettant 25 000 dollars à chacun.
2°/ L’origine du financement des coopératives de crédit et des exemples de
coopérative.
3°/ A qui profitent les crédits octroyés aux ONG ?
4°/ Les facteurs à l’origine de la faillite des banques et les remèdes à y apporter.
5°/ Les avantages du CD (certificat dépôt) dans la stabilisation de la monnaie.
6°/ Les leçons tirées de l’octroi des crédits.
7°/ La difficulté de garder le contact avec les associations de la diaspora. Il y
a nécessité pour la diaspora de se muer en organisation internationale pour
mieux aider les associations locales.
173

8°/ Y a-t-il des contrôles après l’octroi d’un outsider ?
9°/ Les conseils que nos sœurs de la diaspora peuvent donner aux femmes
congolaises pour qu’elles remédient à leur sous-représentation au sein des
institutions de transition.
10°/ Les possibles domaines de coopération entre les associations de la diaspora
et la RDC.
A ces différentes préoccupations, les réponses ont été les suivantes :
1°/ La représentante de l’OIM a fait une mise au point claire surtout en ce qui
concerne l’OIM dont les ressources principales sont des cotisations des
membres.
2°/ Il y a par exemple la COPEC et COSEC.
3°/ Quand on octroie des financements, c’est sur base d’une ligne projet qu’il
faut regrouper utilement.
4°/ Les facteurs à la base de la faillite des banques sont l’inflation et la perte du
pouvoir d’achat.
5°/ L’avantage d’un certificat-dépôt est la stabilisation de la monnaie. Il faut
noter que l’opération visait l’épargne.
6°/ L’octroi des micro-crédits se fait effectivement par l’entremise de la FAO
et du PNUD dans les domaines de l’agriculture dans certaines provinces.
Malheureusement, les bénéficiaires ont tendance à utiliser ces crédits pour
d’autres financements et ils deviennent insolvables. Cela est dû au manque de
formation et de suivi.
7°/ Les associations de la diaspora sont récentes, et il faudrait que les critères
soient assouplis et qu’une fois devenues ONG, ces associations puissent
avoir une plus grande efficacité pour collaborer avec les ONG congolaises.
De plus, les ONG belges, plus structurées, prennent des marchés à celles de
la diaspora.
8°/ Des contrôles a priori et a posteriori existent déjà.
9°/ Il faudrait que les femmes imposent l’alternance homme-femme dans les
partis politique par exemple lors des élections. Il faudrait aussi constituer des
alliances avec les hommes qui sont attentifs à la question de la représentation
de la femme.
10°/ Il est difficile de dire d’emblée quels sont les domaines de collaboration.
Proposer des domaines de partenariat incombe aux ONG de RDC. Il a été
proposé la constitution d’un relevé de toutes les associations de la diaspora
contenant tous les renseignements.
* * * *
174

2 ème Séance
Modérateur : Mme Josiane MFULU, Vice-Gouverneur de la ville de
Kinshasa.
I. LES INTERVENTIONS
a. Le nouveau code du travail, vers l’égalité des chances et de traitements
: Par Mme Henriette TSHIMUANGA MINCHABO, Directeur des
études et planification du Ministère du Travail et de la Prévoyance sociale.
L’intervenante a d’abord voulu circonscrire le sujet en précisant qu’il existe
des instruments internationaux en matière du travail (37) qui ont été ratifies
par la RDC (conventions et recommandations)
Elle a relevé le classement des conventions et recommandations qui concernent
la femme travailleuse, proposé par le BIT :
1. égalité chance et traitement
2. emploi et mise en valeur des ressources humaines
3. condition de travail et de vie
Toutes ces catégories visent une meilleure protection sociale de la travailleuse.
Il faut noter cependant qu’elles sont aussi critiquées parce qu’elles porteraient
atteinte à l’égalité des chances et de traitement.
En deuxième lieu, l’oratrice a tenu à définir la notion d’égalité des chances et
de traitement. Cette expression est un principe qui a pour objectif de promouvoir
le droit des travailleuses et d’améliorer leurs conditions de travail.
Ensuite, l’oratrice a brièvement relevé quelques innovations du nouveau code
du travail par rapport à l’ancien code, en parlant notamment :
• de la définition du travailleur
• du contrat de travail, en explicitant la référence à la suppression de l’opposition
expresse du mari
• de l’âge : 16 ans au lieu de 14 ans
• de la suspension contrat : l’employeur ne peut suspendre ou résilier le
contrat pour cause de grossesse ou d’accouchement.
• d’embauche : on ne peut exiger un certificat attestant ou non état de
grossesse
• du droit de la femme au congé maternité, à l’allaitement
• du droit au logement, comme l’homme.
175

L’oratrice précisa que c’est sur le terrain que l’on peut vérifier que le nouveau
code du travail conduise réellement à l’égalité des chances et de traitements.
Pour terminer, l’oratrice a loué le nouveau code du travail qui, inspiré de
normes de l’OIT et de la constitution, permet à la travailleuse de jouir des
mêmes conditions de travail que son collègue homme, ce qui permet désormais
de prendre part, au même titre que son collègue masculin, à la
reconstruction nationale et à la prévention des conflits.
b. Femmes et médias : la face de l’information pour la promotion du
genre : Par Mme Madeleine LEMAITRE, journaliste éditrice de la revue
AFRICA B Belgique.
Parlant de l’information, la dernière oratrice du jour d’abord défini le média
comme étant un fait dont on détient la connaissance et que l’on transmet à
quelqu’un d’autre. Elle a ajouté que l’information prend de la valeur quand elle
est démultipliée.
L’oratrice a continué en disant que l’impact de l’information diffère selon le
lieu où elle est communiquée.
S’appuyant sur son expérience à Kinshasa, elle a relevé que la ville est une
mine d’informations et qu’il y a plusieurs journaux, mais elle a déploré le fait
qu’il n’y ait presque pas de diversification des articles.
L’oratrice a soutenu l’idée que la femme congolaise a tout intérêt à créer une
presse féminine, même si la femme n’achète presque pas le journal, car les
médias sont le quatrième pouvoir. Pour ce faire, il faut faire face à certaines
difficultés : la création d’un journal exige de l’argent, du papier, de l’encre,
des films, etc.
Elle a cependant soutenu que malgré ces difficultés, elle pourrait en retirer
beaucoup de dividendes, surtout lors des élections. En ce moment, le journal
féminin ferait la promotion des candidatures féminine, ce qui permettrait d’avoir
beaucoup d’élues.
Avant de terminer, elle a voulu mettre en garde les femmes de ne pas faire la
promotion de la femme en tant que femelle de l’homme, mais en tant qu’agent
dotée de compétences.
Elle a conclu en disant que la femme congolaise a beaucoup à gagner en
s’alliant à un homme convaincu du bien-fondé de sa cause et qui pourrait
l’épauler. Elle a cité l’exemple de l’actuel ministre des Affaires étrangères et la
Coopération internationale.
176

II . LESDEBATS
Les débats, très intéressants, ont porté sur les préoccupations ci-après :
1.L’inaccessibilité aux médias en raison de leur prix élevé.
2.Le problème de l’autorisation maritale avant l’embauche de la femme, qui
semble persister malgré le nouveau code du travail.
3.Faut-il créer un organe de presse exclusivement féminin avec les risques
d’indifférence que cela comporte, ou alors insérer des rubriques dans les
journaux qui existent déjà ?
4.La situation des travailleuses migrantes est problématique.
5.La réaction du ministre des Affaires sociales contre les images stéréotypées
de la femme dans les médias.
6.Le Ministre du travail a reproché la complaisance de l’octroi de la carte de
travail aux étrangers qui violent les lois.
7.Quels sont les mécanismes mis en place pour la vulgarisation du nouveau
code du travail ?
8.Que peut faire la femme de la diaspora pour aider financièrement les
Congolais ?
A toutes ces questions, les réponses suivantes ont été données :
1.Concernant l’inaccessibilité aux médias, le problème est réel. Il est surtout
lié à la situation actuelle : les journalistes essaient de survivre car ils sont
mal payés. Le danger, c’est que l’information plus objective soit biaisée.
2.Pour ce qui est de l’autorisation maritale, les discussions devraient être
prolongées car un problème épineux demeure : celui de l’instabilité juridique
de la femme. Après plusieurs échanges, il a été rapidement proposé
des modifications des textes discriminatoires.
3.Pour ce qui est des hésitations à créer un organe de presse féminin, il a été
répété que le journalisme est un métier dangereux. Le seul problème est
d’avoir les moyens nécessaires pour réaliser le projet.
4. Les travailleuses migrantes qui sont en RDC sont régies par le code du
travail, sauf s’il existe en particulier un contrat de réciprocité entre les
deux Etats.
5.Le ministre des Affaires sociales faisait partie de la commission de la publicité,
qui malheureusement a été suspendue. Cette commission examinait
les scripts avant le passage télévisé de la publicité. En fait, la difficulté
résidait d’abord dans l’inexistence d’une législation en la matière, et ensuite
dans le fait que les médias vivent essentiellement de leurs contrats avec les
annonceurs, ce qui les pousse à contourner les contrôles. De plus, la
Ministre s’est rendue compte qu’afin d’éviter que l’information destinée
aux publicités soit tronquée, il serait préférable que ces messages passent
177

par un réseau de journalistes femmes, qui existe du reste. En outre, il faut
savoir qu’il a été exigé des chaînes de télévision qu’elles ne diffusent les
pubs de boissons alcoolisées et de tabac qu’après 20h. Nous constatons
que ce combat contre l’image stéréotypée de la femme est le même qu’en
Europe.
6.Quant à la complaisance qui existerait dans l’octroi des cartes de travail
aux étrangers, il n’en est rien : les cartes sont octroyées par une commission
diversement composée de délégués d’autres institutions, ce qui assure
la garantie d’un sérieux dans l’octroi. Quant aux abus, il appartient à
l’inspection du travail et aux syndicats de s’en occuper.
LE PROBLEME :
Les travailleuses n’ayant pas adhéré à un syndicat ont tort puisqu’en cas de
problème, elles ne peuvent être défendues valablement.
7.Concernant la vulgarisation du code travail, il y a déjà eu des séances
d’information à l’intérieur du pays (Bas Congo, Kasai).
8.La femme de la diaspora est disposée à aider les journalistes mais, à condition
de savoir ce dont ils ont besoin.
Il a été observé que les femmes devaient créer des partis politiques.
Débutée à 15h50, la séance a pris fin à 17h30, après quoi la modératrice a
donné lecture des trois thèmes des travaux en atelier qui ont eu lieu le dimanche
29 juin.
178

SYNTHESE SYNTHESE DES DES TRAVAUX TRAVAUX TRAVAUX DE DE GROUPES
GROUPES
TROISIEME TROISIEME JOURNEE: JOURNEE: JOURNEE: JOURNEE: JOURNEE: DIMANCHE DIMANCHE 29 29 JUIN JUIN JUIN 2003
2003
REPONSES DES TRAVAUX DE GROUPES
QUESTION N°1 : Que devons-nous faire aujourd’hui pour que
la femme congolaise soit vraiment actrice
dans la reconstruction nationale ?
a.La femme en RDC
b.La femme de la diaspora
SUR LE PLAN POLITIQUE
Constat : Les femmes ne créent pas de partis politiques
Actions
• Stimuler l’engagement politique de la femme c.à.d avoir des bases idéologiques
et un projet de société ;
• Appuyer les femmes politiques ;
• Former le leadership féminin renforcer ;
• Former un lobbying des femmes ;
• Avoir une superstructure indépendante (différente du Conseil national de la
femme).
SUR LE PLAN JURIDIQUE
Constat : Ignorance des droits et des textes juridiques
Actions
• Vulgarisation de connaissance des textes nationaux et internationaux en
matière juridique ;
• Inscription à la 1e session de l’assemblée nationale de la Révision du CODE
DE LA FAMILLE afin de l’harmoniser avec la convention relative à toutes
les discriminations à l’égard de la femme.
SUR LE PLAN ECONOMIQUE
Constat : Rémunération insuffisante et pauvreté généralisée
179

Actions
• Encourager les femmes à exercer les activités créatrices d’emploi et génératrices
de revenues ;
• Création d’un fonds pour les femmes ;
• Encourager la création des PMEA, PMI ;
• Accès à des micro-crédits ;
• Encadrement de la femme dans le secteur informel ;
• Informer et Impliquer la femme dans le projet du NEPAD, DU PLAN
D’ACTION ARGOA et dans la mise en œuvre des résolutions des ACP.
SUR LE PLAN SOCIAL
• Répertorier et sensibiliser les femmes Médecins et Infirmières comme
personne ressource pouvant appuyer les cliniques des femmes à créer ;
• Action de sensibilisation auprès des chefs coutumiers gardiens de tradition
pour qu’ils comprennent le danger que court la femme en matière de SIDA.
SUR LE PLAN DE L’EDUCATION
• Créer des foyers sociaux ;
• Rendre l’enseignement gratuit jusqu’à l’âge de 15 ans ;
• Relever l‘âge nubile jusqu’à 18 ans ;
• Obligation de la scolarisation.
SUR LE PLAN CULTUREL
• Sensibiliser la population de l’inversion des valeurs à travers la musique et
les images négatives ;
• Sensibiliser sur les méfaits des pratiques traditionnelles ;
• Interdire l’utilisation des jeunes filles de moins de 18 ans comme danseuses ;
• Rendre opérationnelle la Commission de censure pour éviter le débordement
dans la musique.
MEDIAS
• Interdiction d’utilisation des jeunes filles dans des publicités obscènes
(alcool, tabac…) ;
• Large diffusion et vulgarisation des textes – déclaration ;
• Encourager des émissions qui font la promotion de la femme et de la jeune
fille.
180

SUR LE PLAN DE L’ENVIRONNEMENT
• La femme doit assainir son environnement le plus immédiat (famille,
quartier…) ;
• Recyclage des ordures ménagers dont les sachets ;
• Débouchage des égouts [voir OVD] ;
• Réhabilitation des services d’hygiène.
PETITE FILLE
• Identifier, regrouper et renforcer les capacités des ONG et Association qui
travaillent dans le domaine de défense des droits de l’enfant ;
• Lutter contre l’éducation stéréotypée favorisant le garçon au détriment de
la fille ;
• Encourager.
EN CONCLUSION LES FEMMES DOIVENT
• Sur le plan politique : Formation, outil, stratégies et idéologie
• Sur le plan juridique : Lobbying de soutien aux femmes politiques, député,
déjà présente
• Sur le plan économique : Retour investisseurs Belges, micro-crédit, microfinance
• Sur le plan éducatif : Scolarité obligatoire et gratuite.
QUESTION N° 2 : Que faire pour que les femmes démunies aient
plus d’accès aux micro-crédits ?
LA METHODOLOGIE DU GROUPE II :
1. Définitions
La femme démunie : qui vit en dessous du seuil de la pauvreté dans tous les
domaines (économique, social, culturel, éducatif, etc.).
Le micro-crédit : une somme d’argent accordée a un individu ou un groupe
d’individus pour leur permettre de résoudre les besoins primaires en exerçant
une activité génératrice de revenus. Ce crédit quoique micro ne peut pas être
en dessous du seuil de pauvreté car il doit permettre de pérenniser une activité
génératrice de revenus.
181

2. Stratégies et moyens d’accès au micro-crédit
• Identifier les femmes.
• Les regrouper en petits groupes de 5 à 10 au maximum.
• Les informer et les former sur la formation professionnelle et la gestion du
micro-crédit pour améliorer la productivité de leurs activités génératrices
de revenus.
• Motivation de l’épargnant par un taux d’intérêt comparable à celui du micro-crédit
[2 % par mois].
• Adaptation du crédit à l’activité génératrice des revenus par un montant
variant entre 200$ à 500$.
• Nous proposons que le taux de remboursement soit de 2 % par mois et le
remboursement échelonné sur une année.
• Cependant, nous insistons aussi le renforcement de la tontine améliorée
qui donne l’avantage et l’occasion d’épargner, d’obtenir un crédit sans
intérêt et de le rembourser facilement.
3. Recommandations
• Que les femmes fassent la promotion du crédit alternatif (likelemba
amélioré).
• Que les femmes sensibilisent leurs membres sur la mobilisation de l’épargne
local en commençant par le groupe ici-présent.
• Qu’il soit crée une banque des femmes a court terme.
• L’octroi du micro-crédit et l’accompagnement par un bureau – conseil car
c’est un processus renouvelable.
4. Moyens
• Mobilisation de l’épargne de la diaspora y compris l’épargne locale.
QUESTION N°3 : LE ROLE DE LA FEMME EST INDISPENSABLE
A UNE BONNE GOUVERNANCE. QUELLE
STRATEGIE UTILISER POUR AVOIR AU MOINS
30 % DANS TOUS LES DOMAINES ET A TOUS
LES ECHELONS ?
Définition des termes
• Gouvernance
• Rôle de la femme
• Stratégies
182

Objectif : la représentativité de la femme à la hauteur d’au moins trente pour
cent (30 %) après la transition.
1. La gouvernance :
Dans son exposé, Mme MODWA définit la gouvernance comme un ensemble
de règles, d’institutions et de valeurs à diriger la société, l’Etat et les institutions
sociales en général, la femme qui est citoyenne à part entière a un rôle à
jouer dans la gestion de la cité.
2. Le rôle de la femme :
Le rôle de la femme est indispensable parce qu’elle est un agent déterminant
du changement dans tous les domaines et particulièrement sur le plan éthique.
3. Les stratégies :
a.Regrouper et animer les femmes autour de l’objectif principal qui est la
représentativité de la femme aux instances décisionnelles à tous les
niveaux et dans touts les domaines ; ceci pour consolider la solidarité
agissante à la base. Animer suppose :
- sensibiliser les femmes,
- conscientiser la femme,
- renforcer les capacités de la femme, l’informer et la former en :
• leadership féminin
• communication
• éthique
b.La prise en compte de la dimension sexospécifique dans la définition et
planification des politiques et du budget de l’Etat.
c. Créer un fonds pour le soutien des femmes candidates.
Actions à court terme
Evaluation de l’action des structures existantes qui militent en faveur de la
participation de la femme pour en dégager les forces et les faiblesses en vue
de leur redynamisation.
Le lobby des femmes « Cause Commune » mettra son projet à la disposition
du cadre de suivi des présentes assises, et l’OIM pourra mobiliser les ressources
pour le mettre sur pied. Ces actions seront menées pendant cette période de
transition.
183

Conclusions et recommandations
• Procéder à l’évaluation des actions menées à ce jour dans le cadre des
structures et organisations existantes afin de mettre en oeuvre la stratégie
de participation significative des femmes dans les instances de prise de
décisions.
• Regrouper et organiser les femmes à la base en vue de leur préparation à
l’accès aux instances de prise décisions à tous les niveaux et à tous les
échelons.
• Mettre en place des mécanismes permanents d’information et de formation
des femmes.
• Intégrer les aspects sexospécifiques dans les politiques et programmes de
développement national.
• Rechercher les voies et moyens pour rendre visibles les actions des femmes.
Apports de la plénière
Outre la création du fond pour le soutien des femmes candidates, Mme Joséphine
ISALU recommande l’accompagnement des femmes pour la création
des groupements politiques dans le créneau de la conquête du pouvoir. Quant
à Mme Eve BAZAHIBA, elle souhaite qu’en dehors de l’évaluation de l’action
sur la représentativité, on pense à l’organisation d’une évaluation globale des
organisations féminines qui oeuvrent dans le domaine des droits humains et
des droits spécifiques de la femme.
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