colloque « surréalisme et contraintes formelles - Centre de ...
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COLLOQUE <strong>«</strong> SURRÉALISME ET CONTRAINTES<br />
FORMELLES »<br />
Université Paris III, 13-14 octobre 2006<br />
en Sorbonne (17 rue <strong>de</strong> la Sorbonne, Paris V°)<br />
Organisé par le <strong>Centre</strong> <strong>de</strong> recherches sur le <strong>surréalisme</strong> (Paris III-CNRS) <strong>et</strong> la<br />
revue Formules<br />
Argument<br />
Comme ultime avatar <strong>de</strong> la tourmente romantique, l’écriture surréaliste s’est voulue une<br />
libération par rapport aux formes traditionnelles jugées contraignantes.<br />
Une contrainte littéraire peut être définie comme une règle supplémentaire, distincte <strong>de</strong>s lois<br />
<strong>de</strong> la langue <strong>et</strong> <strong>de</strong>s règles du discours, ainsi que <strong>de</strong>s règles définissant les divers genres<br />
littéraires canoniques. (Cf. Bernardo Schiav<strong>et</strong>ta, <strong>«</strong> Définir la Contrainte »<br />
http://www.formules.n<strong>et</strong>/<strong>de</strong>finirlacontrainte.htm<br />
Contrairement au déclencheur futuriste <strong>et</strong> à certaines manifestations <strong>de</strong> poésie visuelle ou<br />
sonore qu’on peut trouver dans le mo<strong>de</strong>rnisme <strong>et</strong> chez Dada, le mouvement institué par André<br />
Br<strong>et</strong>on a respecté ces lois <strong>et</strong> ces règles. Mais n’a-t-il pas introduit, d’une façon très voyante,<br />
<strong>de</strong> nouvelles <strong>contraintes</strong> à visée créatrice comme celles <strong>de</strong>s <strong>«</strong> jeux surréalistes », du cadavre<br />
exquis au jeu <strong>de</strong> <strong>«</strong> l’un dans l’autre » en passant par le dialogue surréaliste, — <strong>contraintes</strong><br />
elles-mêmes issues <strong>de</strong> certains jeux <strong>de</strong> société, comme la notation, les préférences, les p<strong>et</strong>its<br />
papiers, l’énigme, <strong>et</strong>c. ? Les jeux sur le son <strong>et</strong> le sens <strong>de</strong>s mots <strong>de</strong> Robert Desnos anticipentils<br />
ceux <strong>de</strong> l’Oulipo ? Peut-on périodiser ces différents jeux, sans om<strong>et</strong>tre ceux <strong>de</strong>s surréalistes<br />
belges, à commencer par Paul Nougé ?<br />
Plus profondément, l’écriture automatique, le <strong>«</strong> parler surréaliste », n’est-elle pas, elle aussi,<br />
une contrainte en visant à interdire aussi bien l’usage ordinaire du discours que son usage<br />
poétique traditionnel ? Son échec ne semble pas avoir été relevé par l’imitation <strong>de</strong>s différents<br />
types <strong>de</strong> discours correspondant aux maladies mentales. Quel rapport la recherche d’une<br />
spontanéité affective a-t-elle avec la poésie intellectuelle du nonsense ?<br />
Le récit <strong>de</strong> rêve a-t-il été un genre nouveau en prose ? Le poème en prose a-t-il connu à ce<br />
moment une pério<strong>de</strong> d’efflorescence ? Le récit poétique ou le théâtre surréaliste annonce-t-il<br />
la libération <strong>de</strong> certaines formes nouvelles <strong>de</strong> roman ou <strong>de</strong> théâtre ? La maxime poétique chez<br />
Robert Desnos <strong>et</strong> chez René Char, ou la maxime morale chez Louis Scutenaire, n’ont-t-elles<br />
pas été renouvelées ? La présentation <strong>de</strong> la théorie littéraire, sous la forme <strong>de</strong> manifestes, <strong>et</strong><br />
celle <strong>de</strong> la critique elle-même n’a-t-elle pas été modifiée ?<br />
Dans le domaine <strong>de</strong> la métrique, la disparition <strong>de</strong> la charge musicale du vers symboliste, au<br />
nom <strong>de</strong> la quête <strong>de</strong> l’image, voire <strong>de</strong> l’expression <strong>de</strong>s idées, n’a-t-elle pas renforcé<br />
l’hégémonie d’un vers libre <strong>de</strong>s plus platement <strong>«</strong> syntaxiques » dans la poésie française ? Ne<br />
convient-il pas néanmoins <strong>de</strong> reconsidérer le vers blanc chez Éluard, l’alexandrin chez<br />
Desnos, le vers oral d’Aragon ? Quelles formes poétiques cachées peut-on déceler chez ces<br />
<strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers poètes ? Le <strong>surréalisme</strong> a-t-il engendré les <strong>«</strong> grands poèmes » qui se faisaient<br />
attendre <strong>de</strong>puis la constriction parnassienne ? L’O<strong>de</strong> à Charles Fourier d’André Br<strong>et</strong>on peutelle<br />
encore être définie comme un poème surréaliste ?<br />
La similarité <strong>de</strong> résultat entre texte surréaliste <strong>et</strong> texte oulipien dans les détournements <strong>de</strong><br />
proverbes ou <strong>de</strong> textes classiques, ou dans certains textes à base combinatoire, comme ceux
<strong>de</strong> Pér<strong>et</strong> ou <strong>de</strong> Jean Arp, amène à poser la question <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> la<br />
contrainte dans un texte, qu’elle ait été explicitée ou non.<br />
Faut-il rapprocher ou distinguer les productions <strong>de</strong> <strong>«</strong> l’automatisme mental », inconscient ou<br />
préconscient, qu’il soit personnel ou issu d’un travail collectif, <strong>et</strong> l’automatisme aléatoire,<br />
comme celui <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> S + 7 ou <strong>de</strong>s procédures informatiques actuelles ? Quelle est la<br />
part <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux automatismes dans les jeux alphabétiques d’E.L.T. Mesens, les<br />
variations phoniques <strong>de</strong> Ghérasim Luca ou la composition rousselienne à partir <strong>de</strong> jeux<br />
syllabiques <strong>de</strong> Guy Cabanel ?<br />
Pour le <strong>surréalisme</strong>, il ne sera pas inutile <strong>de</strong> revoir les liens avec les <strong>contraintes</strong> <strong>de</strong>s arts<br />
plastiques, ou même les <strong>contraintes</strong> <strong>de</strong> l’intervention culturelle ou politique, comme les<br />
papillons, les tracts, mais aussi l’art <strong>de</strong> l’insulte <strong>et</strong> les manifestations à scandale.<br />
Dans quelle mesure l’Oulipo a-t-il été <strong>et</strong> reste-t-il une image en miroir du <strong>surréalisme</strong>, tant en<br />
ce qui concerne son découplage <strong>de</strong>s avant-gar<strong>de</strong>s politiques révolutionnaires en faveur d’un<br />
escapisme souvent ludique d’allure postmo<strong>de</strong>rne, qu’en ce qui intéresse son fonctionnement<br />
interne qu’il affiche comme non conflictuel ? Son art conscient <strong>de</strong> la prestidigitation, avec le<br />
dévoilement <strong>de</strong> ses tours, que d’autres écrivains peuvent reprendre, n’est-il pas l’opposé <strong>de</strong><br />
l’invocation à la magie, forme affaiblie <strong>de</strong> religion séculière, d’où est partie <strong>et</strong> sur laquelle<br />
s’est terminée l’activité surréaliste ?<br />
Quelle est la part du <strong>surréalisme</strong>, <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>«</strong> l’angoisse <strong>de</strong> son influence », dans l’œuvre <strong>de</strong><br />
Raymond Queneau ? Comment comprendre la trajectoire <strong>de</strong> Noël Arnaud ? Et <strong>de</strong>s poètes à la<br />
frontière du <strong>surréalisme</strong> comme Henri Michaux, ou Jean Tardieu, ou André Frédérique, n’ontils<br />
pas exploré également <strong>de</strong>s <strong>contraintes</strong> littéraires ?<br />
Autant <strong>de</strong> questions auxquelles il nous paraît que le moment est venu <strong>de</strong> tenter d’apporter <strong>de</strong>s<br />
réponses.<br />
Interventions<br />
Henri Béhar (Université Paris III) : <strong>«</strong> Le <strong>surréalisme</strong> : mauvais genre »<br />
En prolongement <strong>de</strong> mon article sur l’éclatement <strong>de</strong>s genres au XX e siècle : <strong>«</strong> Il n’y a que<br />
<strong>de</strong>ux genres, le poème <strong>et</strong> le pamphl<strong>et</strong> », dans L’Éclatement <strong>de</strong>s genres au XX e siècle, Presses<br />
<strong>de</strong> la Sorbonne nouvelle, 2001, p. 61-80, <strong>et</strong> reprenant le corpus d’ouvrages sur lequel était<br />
construit le chapitre <strong>«</strong> Lieux-dits, les titres surréalistes », dans Les Enfants perdus, essai sur<br />
l’avant-gar<strong>de</strong>, Lausanne, L’Age d’Homme, 2002, j’entends montrer comment les surréalistes<br />
travaillent la notion <strong>de</strong> genre : présence <strong>et</strong> contestation.<br />
Jean-Clau<strong>de</strong> Blachère (Université <strong>de</strong> Montpellier) : <strong>«</strong> Océanie »<br />
Quelques réflexions sur la manière dont les surréalistes – <strong>et</strong> Br<strong>et</strong>on au premier chef – ont<br />
essayé <strong>de</strong> résoudre la contradiction contrainte formelle/liberté <strong>de</strong>s formes dans les arts<br />
plastiques <strong>de</strong>s cultures primitives. Ils n’ignorent pas que la ritualisation du masque est une<br />
donnée essentielle, <strong>et</strong> que celle-ci implique <strong>de</strong>s canons formels ; mais d’autre part,<br />
<strong>«</strong> Océanie » célèbre à l’envi la vigueur <strong>de</strong> l’imagination <strong>de</strong> l’artiste mélanésien… Le débat a<br />
r<strong>et</strong>enu l’attention <strong>de</strong> Bounoure, <strong>de</strong> Bédouin, <strong>de</strong> José Pierre.<br />
Willard Bohn (Illinois State U.) : Poésie critique <strong>de</strong> Benjamin Pér<strong>et</strong><br />
Examen <strong>de</strong> la poésie critique <strong>de</strong> Benjamin Pér<strong>et</strong>, poésie contrainte à répondre à d’autres<br />
œuvres d’art (y compris la poésie) en utilisant l’imitation, la citation, la traduction, la<br />
transposition <strong>et</strong> d’autres principes littéraires. Trois textes en particulier : publié dans Les<br />
Feuilles Libres en avril 1922, le premier traite <strong>de</strong> Calendrier cinéma du cœur abstrait <strong>de</strong><br />
Tzara ; paru dans Littérature en septembre 1922, le <strong>de</strong>uxième évoque la peinture <strong>de</strong> Giorgio<br />
<strong>de</strong> Chirico. Intitulé <strong>«</strong> Les Cheveux dans les yeux » ; le troisième a servi <strong>de</strong> préface pour le
catalogue d’une exposition <strong>de</strong> Joan Miro en juin 1925. Dans chaque cas, je propose d’analyser<br />
les rapports entre l’œuvre originale <strong>et</strong> le texte <strong>de</strong> Pér<strong>et</strong> qu’elle a engendrée.<br />
Bernard Bosredon (Université Paris III) : Les peintres surréalistes : <strong>de</strong>s titreurs<br />
libérés ?<br />
L’intitulation <strong>de</strong>s toiles surréalistes participe-t-elle <strong>de</strong> la libération <strong>de</strong>s formes langagières<br />
spécifiques du mouvement surréaliste ? Le statut du titre <strong>de</strong> peinture est-il lui-même l’obj<strong>et</strong><br />
d’un déplacement ou d’une transformation, voire d’une interrogation spécifique ? En utilisant<br />
l’analyse linguistique, nous nous proposons d’examiner la nature, le périmètre <strong>et</strong> les limites <strong>de</strong><br />
l’action surréaliste dans l’invention <strong>de</strong>s titres. Nous mesurerons l’impact <strong>de</strong> la relation<br />
image/texte dans c<strong>et</strong>te production. Nous observerons également la variété <strong>de</strong>s choix selon les<br />
peintres, analyserons les jeux sémiotico-linguistiques auxquels ils se livrent <strong>et</strong> apprécierons la<br />
possible libération dont ils témoignent. Nous essaierons enfin d’i<strong>de</strong>ntifier l’unité discursive <strong>et</strong><br />
sémiotique <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te intitulation au-<strong>de</strong>là même <strong>de</strong>s choix <strong>de</strong>s titreurs.<br />
Alain Chevrier (Rouen, Formules) : Le sonn<strong>et</strong> à l’épreuve du <strong>surréalisme</strong><br />
Le sonn<strong>et</strong> joue le rôle d’un révélateur dans l’histoire <strong>de</strong>s formes poétiques. La subversion<br />
revendiquée <strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong> la culture classique, maintenue par ailleurs par les fossiles vivants<br />
<strong>de</strong> la poésie traditionnelle, mais aussi l’ignorance regr<strong>et</strong>table <strong>de</strong> la place du sonn<strong>et</strong> dans les<br />
littératures <strong>de</strong>s pays voisins, comptent au nombre <strong>de</strong> ses principaux facteurs. À partir d’un<br />
corpus constitué <strong>de</strong>s trois p<strong>et</strong>its <strong>«</strong> sonn<strong>et</strong>s surréalistes » publiés par Br<strong>et</strong>on, Éluard <strong>et</strong> Aragon<br />
dans la revue La Vie <strong>de</strong>s l<strong>et</strong>tres <strong>et</strong> <strong>de</strong>s arts en 1921. Ces poèmes font s’interroger sur la notion<br />
<strong>de</strong> contrainte littéraire : se situe-t-elle alors du côté <strong>de</strong> la forme-sonn<strong>et</strong> ou du côté du style<br />
surréaliste ? Et quels problèmes soulève c<strong>et</strong>te coexistence avec l’écriture automatique ? En<br />
quoi celle-ci peut-elle être qualifiée d’<strong>«</strong> automatique » ?<br />
Frédérique Joseph-Lowery (Emory) : La contrainte par corps, dans l’œuvre écrite <strong>de</strong><br />
Salvador Dalí<br />
Salvador Dalí présente trois sortes <strong>de</strong> <strong>contraintes</strong> : la première prend la forme <strong>de</strong> chaussures<br />
noires vernies trop serrées. C’est une contrainte formelle en ceci que la prise ferme du pied est<br />
la condition <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> parole à l’ouverture <strong>de</strong> son Journal d’un génie. La chaussure trop<br />
serrée est strictement l’incipit du texte. La secon<strong>de</strong> nous invite à envisager la question sur un<br />
plan organique. Au cours d’une longue métaphore performative, Dalí montre que la force<br />
appelée coaction exerce sa contrainte sur le motif antique <strong>de</strong> la feuille d’acanthe dont il suit<br />
les variations plastiques jusqu’à nos jours au gré d’interprétations délirantes. Enfin vient la<br />
métho<strong>de</strong> paranoïaque-critique. C’est une contrainte physique : la langue, le muscle dans la<br />
bouche doit repousser les poils qui lui poussent par en-<strong>de</strong>ssous.<br />
Ainsi du pied à la langue, à la boule du fœtus, le corps forme boucle <strong>et</strong> offre une image<br />
d’écrivain surréaliste pour qui la contrainte littéraire est inséparable <strong>de</strong> l’enveloppe charnelle<br />
qu’elle s’efforce <strong>de</strong> contenir. Le plus surprenant <strong>de</strong> ce dispositif est que la contrainte œuvre<br />
avec <strong>et</strong> contre ce qui semble le moins approprié à sa tâche : le délire.<br />
Caroline Lebrec (Université <strong>de</strong> Toronto) : Découpage, collage <strong>et</strong> <strong>«</strong> décollage » :<br />
OuLiPo, Surréalisme <strong>et</strong> Dada<br />
Entre puzzle, jeu d’échec, jeu <strong>de</strong> go <strong>et</strong> cadavre exquis, nous voulons démontrer la différence<br />
<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux approches, oulipienne <strong>et</strong> surréaliste, <strong>et</strong> ainsi tordre le cou au concept <strong>de</strong> <strong>«</strong> gratuité »<br />
qui entoure les pratiques oulipiennes.<br />
L’approche du ludique nous perm<strong>et</strong> d’embrasser la pratique oulipienne <strong>de</strong> la contrainte<br />
formelle dans toute sa potentialité : jeu avec les mots, jeu avec la langue, jeu avec la
littérature, <strong>et</strong> enfin jeu avec le lecteur. C<strong>et</strong>te approche nous perm<strong>et</strong> également <strong>de</strong> faire un lien<br />
entre ce qui a été publié sur papier, mais aussi sur le N<strong>et</strong>.<br />
Delphine Lelièvre (Université Paris XII) : Noël Arnaud, Dictionnaire analytique<br />
C<strong>et</strong>te communication s’appuiera sur un fonds manuscrit totalement inédit, conservé au Musée<br />
<strong>de</strong> la Résistance Nationale <strong>de</strong> Champigny sur Marne : quelques tracts publiés par le groupe La<br />
Main à plume, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s pages du Dictionnaire analytique, ouvrage né d’une collaboration entre<br />
Noël Arnaud <strong>et</strong> André Stil.<br />
Les articles définitifs y portent l’empreinte surréaliste <strong>et</strong> cachent dans le même temps une<br />
contrainte <strong>de</strong> type mathématique dans leur élaboration manuscrite, mais sans jamais envisager<br />
<strong>de</strong> rendre visible ni même connue c<strong>et</strong>te démarche d’automatisme raisonné. Il semble que les<br />
<strong>contraintes</strong> d’ordre matériel aient été utilisées à <strong>de</strong>s fins créatrices, avec jubilation <strong>et</strong> plaisir,<br />
par certains membres <strong>de</strong> la Main à plume, opposés en cela à plusieurs <strong>de</strong> leurs compagnons<br />
qui choisirent plutôt <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le silence, refusant <strong>de</strong> se soum<strong>et</strong>tre à <strong>de</strong>s obligations<br />
extérieures perçues alors comme <strong>de</strong>s freins à la création.<br />
Sophie Lemaître (Université <strong>de</strong> Cergy) : L’usage <strong>de</strong> la forme du dictionnaire par les<br />
surréalistes<br />
Dans la conception surréaliste, le dictionnaire détermine un co<strong>de</strong> intolérable, <strong>et</strong> ne présente<br />
qu’une succession dérisoire d’équivalences sémantiques restrictives, <strong>de</strong> contenus figés. Il<br />
paraît donc étonnant que <strong>de</strong>s auteurs surréalistes aient publié <strong>de</strong>s ouvrages sous la forme <strong>de</strong><br />
dictionnaires, s’astreignant à couler leur gran<strong>de</strong> liberté langagière dans un <strong>de</strong>s moules les plus<br />
normés qui soient.<br />
Nous proposons d’étudier l’usage <strong>de</strong> la forme du Dictionnaire par les surréalistes, notamment<br />
dans le Glossaire j’y serre mes gloses <strong>de</strong> Michel Leiris <strong>et</strong> dans le Dictionnaire abrégé du<br />
<strong>surréalisme</strong> d’André Br<strong>et</strong>on <strong>et</strong> Paul Eluard.<br />
Ces dictionnaires surréalistes, où les mots sont arrachés à l’ornière du sens, m<strong>et</strong>tent en œuvre<br />
une pratique extravagante <strong>de</strong> la forme dictionnairique <strong>et</strong> révèlent, selon la formule <strong>de</strong> Julien<br />
Gracq, <strong>«</strong> l’énergie latente en puissance dans le vocable ».<br />
Jean-Clau<strong>de</strong> Marceau (Université Paris VIII) : Les anagrammes d’Unica Zürn <strong>et</strong> Hans<br />
Bellmer<br />
La pratique <strong>de</strong>s anagrammes tient un rôle essentiel au sein du couple Hans Bellmer-Unica<br />
Zürn. Pour Bellmer, <strong>«</strong> le corps est comparable à une phrase qui nous inviterait à la<br />
désarticuler, pour que se recomposent à travers une série d’anagrammes sans fin, ses contenus<br />
véritables ». Serait-ce là la cause <strong>de</strong> l’intérêt majeur qu’Unica porte aux anagrammes ? Nous<br />
interrogerons plus avant c<strong>et</strong>te pratique <strong>de</strong> la l<strong>et</strong>tre chez ces <strong>de</strong>ux artistes à partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te autre<br />
remarque <strong>de</strong> Lacan dans Lituraterre : <strong>«</strong> Entre savoir <strong>et</strong> jouissance, il y a littoral qui ne vire au<br />
littéral qu’à ce que ce virage, vous puissiez le prendre le même à tout instant ».<br />
Ioanna Papaspyridou (Université d’Athènes) : Récit <strong>de</strong> rêve<br />
Le corpus établi par Frédéric Canovas (Narratologie du rêcit <strong>de</strong> rêve dans la prose française<br />
<strong>de</strong> Charles Nodier à Julien Gracq) nous perm<strong>et</strong>, désormais, d’intégrer définitivement <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
façon systématique le récit <strong>de</strong> rêve surréaliste dans un ensemble <strong>de</strong> textes. Se pose alors la<br />
question <strong>de</strong>s <strong>contraintes</strong> narratives introduites par les surréalistes. Qu’est-ce qui distingue les<br />
récits <strong>de</strong> rêve br<strong>et</strong>oniens dans Clair <strong>de</strong> terre, par exemple, ou dans La Révolution surréaliste,<br />
d’autres récits pré-surréalistes ? s’agit-il <strong>de</strong> bribes, <strong>de</strong> débris, <strong>de</strong> pur automatisme mental ?<br />
Enfin, qu’en est-il <strong>de</strong>s interprétations, du rôle <strong>de</strong> l’allégorie ou <strong>de</strong> la présence <strong>de</strong> l’archétype<br />
tel que Lacan l’a défini ?
Gérald Purnelle (Université <strong>de</strong> Louvain) : Le vers régulier chez les surréalistes :<br />
<strong>de</strong>dans ou <strong>de</strong>hors ?<br />
Approche globale <strong>de</strong> l’inscription <strong>de</strong> la métrique régulière dans le parcours esthétique <strong>et</strong> dans<br />
la pratique <strong>de</strong> plusieurs surréalistes. Cela perm<strong>et</strong>trait <strong>de</strong> comparer ceux qui la pratiquent<br />
d’abord pour la rej<strong>et</strong>er, ceux qui l’excluent totalement, ceux qui l’intègrent à leurs premières<br />
œuvres, le passage <strong>de</strong> l’alexandrin au vers libre, les fonctions spécifiques du vers régulier<br />
chez tel poète ; mais aussi <strong>de</strong> comparer français <strong>et</strong> belges, <strong>et</strong>, chez les français, les <strong>de</strong>ux<br />
générations <strong>de</strong> surréalistes. Plus précisément, il s’agira <strong>de</strong> tester plusieurs <strong>de</strong>s questions<br />
suivantes : <strong>de</strong> quelle esthétique provient-on lorsqu’on intègre (même provisoirement ou<br />
discrètement) la métrique régulière dans la pratique naissante du <strong>surréalisme</strong> ou quand on la<br />
rej<strong>et</strong>te d’emblée ? comment c<strong>et</strong>te pratique se combine-t-elle avec d’autres formes (prose, vers<br />
libre, jeux surréalistes) ? comment peut-elle sous-tendre l’évolution d’un poète vers son<br />
esthétique post-surréaliste propre ? comment la pratique peut-elle être confrontée au discours<br />
sur la forme ? chaque poète a-t-il <strong>«</strong> son » vers régulier ? ces différences font-elles sens sur le<br />
plan formel ou poétique ? les Belges diffèrent-ils <strong>de</strong>s Français ? C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> se fon<strong>de</strong>ra sur <strong>de</strong>s<br />
cas d’espèces : Br<strong>et</strong>on, Éluard, Aragon, Desnos, Artaud, Leiris, Queneau, Tzara, Goemans,<br />
Colin<strong>et</strong>, Chavée, Scutenaire.<br />
Christophe Reig (Université <strong>de</strong> Perpignan) : Leiris/Roubaud – Règles <strong>de</strong>s jeux, Jeux<br />
dans les Règles<br />
À quelques décennies d’intervalles, Roubaud l’oulipien partage avec Leiris – dont le nom<br />
reste attaché au <strong>surréalisme</strong> <strong>de</strong> la première moitié du XX e – le souci autofictionnel. A priori,<br />
on se trouve face à <strong>de</strong>ux écritures fort dissemblables, <strong>de</strong>ux écrivains issus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux groupes<br />
littéraires antagonistes. Le traitement réservé au rêve (n’oublions pas que le ‘proj<strong>et</strong>’<strong>«</strong> grand<br />
incendie » est un rêve) se révèle ainsi exemplaire <strong>de</strong>s différences entre nos auteurs ; alors que<br />
chez l’un, l’activité onirique, la prépondérance accordée au désir, perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> faire surgir<br />
l’étincelle <strong>de</strong>s mots, <strong>de</strong> repousser les limites édictées au <strong>«</strong> je » par les <strong>contraintes</strong> sociales,<br />
chez l’autre, les ressorts oulipiens semblent à la fois se resserrer autour <strong>de</strong>s chiffres <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
l<strong>et</strong>tres, afin <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssiner en creux le moi conjugué au passé. Dans les <strong>de</strong>ux cas, la recherche du<br />
moi n’est pas forcément <strong>et</strong> absolument opposée au formalisme – terme à prendre dans tous les<br />
sens. L’ombre <strong>de</strong> l’entreprise <strong>de</strong> Leiris ne saurait être absente du <strong>«</strong> traité <strong>de</strong> mémoire » qu’est<br />
Le Grand Incendie. Chez Roubaud, comme chez Leiris, on va ainsi r<strong>et</strong>rouver le goût du<br />
détour, du chiffre <strong>et</strong> bien <strong>de</strong>s points communs : une méfiance avouée face au récit<br />
autobiographique, une réticence envers ses co<strong>de</strong>s <strong>et</strong> ses conventions… D’où l’intervention <strong>de</strong><br />
<strong>«</strong> <strong>contraintes</strong> », lesquelles seront suj<strong>et</strong>tes aux changements. <strong>«</strong> Autobiographie critique »,<br />
<strong>«</strong> autobiographie sous <strong>contraintes</strong> », l’un comme l’autre se sont lancés, pour <strong>de</strong>s raisons<br />
différentes, peut-être dissymétriques, dans la fabrication <strong>de</strong> dispositifs, <strong>de</strong> montages<br />
logomachiques qui ne peuvent – plus ou moins volontairement – qu’échouer, d’écritures qui<br />
vivent <strong>de</strong> leurs traces <strong>et</strong> qui parfois meurent <strong>de</strong> revenir sur elles.<br />
Effie Rentzou (Princ<strong>et</strong>on University) : Contrainte <strong>et</strong> poétique : le proverbe dans le<br />
Manifeste du <strong>surréalisme</strong> <strong>et</strong> L’Immaculée Conception<br />
Si d’un point <strong>de</strong> vue stylistique <strong>et</strong> rhétorique, la forme proverbiale est proche d’autres formes<br />
sentencieuses brèves, comme l’aphorisme, l’apophtegme, le slogan, <strong>et</strong> même la définition<br />
lexicographique, d’un point <strong>de</strong> vue sémiotique le proverbe se trouve plus proche <strong>de</strong>s mythes<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong>s contes. Dans la poétique surréaliste la perte d’intérêt pour les proverbes est<br />
contrebalancée par un intérêt croissant pour le mythe, qui <strong>de</strong>vient une <strong>de</strong>s préoccupations<br />
centrales du <strong>surréalisme</strong> pendant les années trente. C<strong>et</strong>te double fonction du proverbe en tant<br />
que langage miniaturisé <strong>et</strong> distillé d’une part, <strong>et</strong> en tant que discours oral <strong>de</strong> cohésion d’une<br />
communauté donnée, tel le mythe, <strong>de</strong> l’autre, semble être reflétée par l’usage du proverbe
dans la <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> L’Immaculée Conception. Ce texte se présente à la fois comme la<br />
<strong>de</strong>rnière gran<strong>de</strong> œuvre automatique, dans la veine <strong>de</strong>s Champs Magnétiques, <strong>et</strong> comme une<br />
ouverture à la gran<strong>de</strong> envergure <strong>de</strong>s années trente. L’Immaculée Conception peut être lu<br />
comme un long commentaire sur l’écriture <strong>et</strong> l’éthique surréalistes. Si <strong>«</strong> Les possessions »<br />
<strong>«</strong> remplacerai (en) t avantageusement la bala<strong>de</strong>, le sonn<strong>et</strong>, l’épopée, le poème sans queue ni<br />
tête <strong>et</strong> autres genres caducs », formant ainsi un inventaire <strong>de</strong>s <strong>«</strong> genres » surréalistes possibles,<br />
la <strong>de</strong>rnière partie, <strong>«</strong> Le jugement originel », forme un manuel d’éthique surréaliste.<br />
Emmanuel Rubio (Université Paris X) : Des <strong>«</strong> équations poétiques » du <strong>surréalisme</strong><br />
Détournements avant la l<strong>et</strong>tre, les premières déclarations <strong>de</strong>s surréalistes belges s’imposent<br />
comme <strong>de</strong>s manifestes au carré – m<strong>et</strong>tant en scène leur écriture dans une veine plus proche<br />
<strong>de</strong>s Poésies que <strong>de</strong>s Chants <strong>de</strong> Maldoror. Fidèle à c<strong>et</strong>te orientation, la poésie <strong>de</strong> Nougé<br />
s’éloignera également <strong>de</strong> l’automatisme pour tenter une approche <strong>«</strong> expérimentale » <strong>de</strong><br />
l’écriture à même <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s <strong>«</strong> équations poétiques » – selon une mise en scène qui relirait<br />
à sa manière les jeux sur le signifiant <strong>de</strong> Desnos ou Leiris, <strong>et</strong> inscrirait le <strong>surréalisme</strong> belge<br />
comme au revers transparent <strong>de</strong> son homologue français. La contrainte, dans un tel dispositif,<br />
pourrait jouer le rôle <strong>de</strong> contre-automatisme. Encore sera-t-elle certainement à lire dans c<strong>et</strong>te<br />
inversion même, récusant tout propos <strong>«</strong> littéraire », <strong>et</strong> assez loin <strong>de</strong>s enjeux <strong>de</strong> l’Oulipo.<br />
Gabriel Saad (Université Paris III) : Usage surréaliste du langage <strong>et</strong> écriture sous<br />
contrainte chez A.P. <strong>de</strong> Mandiargues<br />
Comme je l’ai déjà démontré à propos du Fantôme <strong>de</strong> la liberté, <strong>de</strong> Luis Buñuel, il existe un<br />
lien précis entre l’usage surréaliste du langage <strong>et</strong> la contrainte choisie pour bâtir une poétique<br />
(voir G. Saad, <strong>«</strong> Un fantôme parcourt la langue, c’est le fantôme <strong>de</strong> la liberté », La Licorne,<br />
Université <strong>de</strong> Poitiers, 1993). J’aimerais, à présent, montrer que ce rapport est déterminant<br />
dans les œuvres en prose d’André Pieyre <strong>de</strong> Mandiargues. Les trois couleurs du drapeau<br />
italien régissent le discours <strong>de</strong> <strong>«</strong> Marbre », par exemple. À cela viennent s’ajouter <strong>de</strong>s<br />
<strong>contraintes</strong> issues <strong>de</strong> la traduction, <strong>de</strong> la réécriture ou du choix <strong>de</strong> certaines formes<br />
géométriques (l’ellipse, la spirale, p. ex.) <strong>et</strong>, surtout, d’une attention particulière portée à la<br />
matérialité <strong>de</strong> l’écriture. Le mot "blanc", p. ex., est constitué <strong>de</strong> quatre consonnes <strong>et</strong> d’une<br />
seule voyelle. Cela en fait un mot exceptionnel dans notre langue. Il introduit ainsi une<br />
contrainte : l’utilisation <strong>de</strong> monovocalismes en <strong>«</strong> a » (Safara, Barbara Bara) <strong>et</strong> d’un réseau<br />
sémantique autour du blanc. C<strong>et</strong>te contrainte régit clairement le discours d’<strong>«</strong> Armoire <strong>de</strong><br />
lune » <strong>et</strong>, associée au jeu <strong>de</strong> la traduction (<strong>«</strong> Ropero <strong>de</strong> luna ») perm<strong>et</strong> à Mandiargues <strong>de</strong><br />
construire un récit érotico-thanatique dans lequel la quête du point suprême résulte,<br />
précisément, <strong>de</strong> la contrainte choisie. <strong>«</strong> La marge », <strong>«</strong> Le lis <strong>de</strong> mer » <strong>et</strong> bien <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong><br />
Mandiargues perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce c<strong>et</strong>te utilisation particulière <strong>de</strong> l’écriture sous<br />
contrainte.<br />
Bernardo Schiav<strong>et</strong>ta (Paris, Formules) : <strong>«</strong> Des blagues qui ne font pas rire »<br />
Le XIX e siècle a produit <strong>de</strong>s caricatures <strong>de</strong>s <strong>«</strong> mo<strong>de</strong>rnes » d’alors, qui ont parfois été mises en<br />
parallèle avec les œuvres sérieuses <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong>rnité postérieure (surréalistes, dadaïstes ou<br />
d’avant-gar<strong>de</strong>). À tort, car ces exemples (dus aux Incohérents, Scapigliatti <strong>et</strong> autres facétieux)<br />
ne sont pas historiquement <strong>de</strong>s <strong>«</strong> précurseurs » du <strong>surréalisme</strong> au même titre que le sont, par<br />
exemple, les œuvres d’art primitif. Toutefois, les similitu<strong>de</strong>s évi<strong>de</strong>ntes entre ces caricatures <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>s œuvres sérieuses postérieures ne sont pas, à notre avis, fortuites ; elles gagnent à être<br />
abordées comme <strong>de</strong>s possibilités esthétiques structurelles <strong>de</strong> certaines sous-catégories du<br />
comique. (<strong>et</strong> du grotesque). Ces détournements gagnent à être abordés comme <strong>de</strong>s possibilités<br />
esthétiques actualisées par un changement <strong>de</strong>s horizons d’attente <strong>et</strong> donc dépendantes <strong>de</strong>s<br />
avatars historiques <strong>de</strong> la réception esthétique. Depuis l’Antiquité, elles ont connu très
épisodiquement <strong>de</strong>s actualisations partielles, mais leur actualisation effective au XX e siècle, <strong>et</strong><br />
leur hégémonie, nous semblent être liées à une problématique historique <strong>de</strong> la réception du<br />
sérieux <strong>et</strong> du sublime.<br />
Paolo Scopelliti (Rome) : M. Jourdain surréaliste, ou les <strong>contraintes</strong> <strong>de</strong> la prose<br />
Br<strong>et</strong>on affiche toujours le respect <strong>«</strong> naturel » <strong>de</strong> la syntaxe : comme M. Jourdain, les<br />
surréalistes font <strong>de</strong> la prose (automatique) à leur insu. D’un autre côté, c’est bien au mètre<br />
poétique qu’ils jaugent leurs propres textes. Or, si c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière ambiguïté peut se ramener à<br />
la définition <strong>«</strong> classique » <strong>de</strong> contrainte, qui rattachait celle-ci essentiellement à la poésie, les<br />
<strong>de</strong>ux ambiguïtés prises ensemble renvoient à l’idée d’un rythme inhérent au langage <strong>et</strong> lié à<br />
une notion d’écoulement qui précè<strong>de</strong> celle <strong>de</strong> mètre. C<strong>et</strong>te définition, convenant parfaitement<br />
pour le flux <strong>de</strong> l’automatisme surréaliste, mais tirée d’une réflexion sur le langage en soi,<br />
montre que l’analyse <strong>de</strong> la relation du <strong>surréalisme</strong> à l’idée même <strong>de</strong> contrainte formelle ne<br />
saurait se départager <strong>de</strong> celle portant sur la théorie surréaliste du langage. Celle-ci, inspirée<br />
non seulement <strong>de</strong> Freud, mais encore <strong>de</strong> Vico <strong>et</strong> <strong>de</strong> Rousseau, établit une primauté<br />
chronologique <strong>de</strong> la poésie sur la prose : dans le même temps qu’elle attribue à celle-là les<br />
règles, c’est bien à celle-ci qu’elle rattache la notion <strong>de</strong> contrainte…<br />
Hans T. Siepe (Université <strong>de</strong> Düsseldorf) : La contrainte <strong>de</strong> la récursivité dans la<br />
poésie surréaliste<br />
Par <strong>«</strong> récursivité » je comprends : qui peut être répété un nombre indéfini <strong>de</strong> fois par<br />
l’application <strong>de</strong> la même règle. Je me réfère donc aux <strong>contraintes</strong> syntaxiques <strong>de</strong> ce type :<br />
Migraine<br />
(à suivre)<br />
La carie c’est le sol<br />
Le sol c’est la patrie<br />
La Batterie c’est le mol<br />
Le Khol c’est la jolie<br />
L’embolie c’est le col<br />
(R. Vitrac, dans : Littérature, n.s. 11/12)<br />
Intérêts<br />
Le rat crevé qu’on a dans la cervelle <strong>et</strong> la cervelle <strong>de</strong> l’estomac<br />
Les étoiles du Zambèze <strong>et</strong> l’oiseau <strong>de</strong>s lèvres<br />
La vertu américaine<br />
L’alcool <strong>de</strong> peau <strong>et</strong> le pain <strong>de</strong>s yeux<br />
La richesse du riche <strong>et</strong> le vice d’hiver<br />
Le rire tiè<strong>de</strong> <strong>et</strong> l’algue d’urine<br />
L’eau <strong>de</strong>s genoux tristes<br />
Les p<strong>et</strong>its os cariés<br />
Et les <strong>de</strong>moiselles <strong>de</strong>s roseaux du sang<br />
Tamtam du biberon <strong>et</strong> bonbon du cœur<br />
(G. Ribemont-Dessaignes)<br />
Ce poème sans verbes repose sur un principe <strong>de</strong> structure syntaxique très simple <strong>de</strong><br />
substantifs <strong>et</strong> d’attributs ou appositions. On pensera à beaucoup d’autres comme <strong>«</strong> Union<br />
libre » <strong>de</strong> Br<strong>et</strong>on, <strong>«</strong> Allô » <strong>et</strong> d’autres poèmes <strong>de</strong> Benjamin Pér<strong>et</strong>, <strong>et</strong>c.<br />
Vittorio Trionfi (Université <strong>de</strong> Colorado) : Le modèle automatique dans la théorie<br />
cinématographique d’Antonin Artaud<br />
À travers une analyse <strong>de</strong> la théorie cinématographique d’Antonin Artaud (qui va <strong>de</strong><br />
l’enthousiasme <strong>de</strong> 1927 au rej<strong>et</strong> du cinéma vers 1932) je me propose <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce sa
critique du modèle automatique tant comme processus associatif formel que dans son recours<br />
à <strong>de</strong>s formes accomplies (verbales ou visuelles). Ce modèle donne lieu, selon Artaud, à une<br />
pratique signifiante tout aussi contrainte <strong>et</strong> limitée que celle soumise à la logique <strong>de</strong> la parole.<br />
L’échec <strong>de</strong> ce cinéma s’annonce ainsi dès les premiers textes <strong>de</strong> 1927. Mais ce n’est qu’au<br />
début <strong>de</strong>s années trente qu’il se rendra à l’évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> c<strong>et</strong> échec. Et c’est à partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
réflexion qu’il va mener alors que peut être appréhendée le plus clairement sa pensée sur les<br />
limites — du cinéma tel qu’il le concevait, certes — mais aussi <strong>de</strong> l’automatisme.<br />
Inscription gratuite. Pour vous inscrire, envoyer un courriel à :<br />
hbehar@univ-paris3.fr<br />
alain-chevrier@wanadoo.fr