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Synthèse [6] DEFALL..INSTRAW.pdf - Matrix

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Projet <strong>INSTRAW</strong> : revue de littérature<br />

Fatou SARR, Papa Demba FALL, Oumoul K. COULIBALY-TANDIAN<br />

Sommaire<br />

1 – Introduction................................................................................. 2<br />

2 - Evolution historique des flux migratoires .............................................. 2<br />

3 - Géodynamique de l'espace migratoire international des Sénégalais ............... 4<br />

3.2.1 - L’Afrique: la destination principale ............................................. 5<br />

3.2.2- L’Europe: un champ migratoire remodelé ..................................... 5<br />

3.2.4 - Autres continents..................................................................22<br />

4 - Causes et conséquences de la migration ..............................................23<br />

5 - Le profil des migrants/ou migratoire ..................................................26<br />

6 - Femme et migration ......................................................................27<br />

7 - Les protagonistes de la migration sénégalaise........................................38<br />

8 - les transferts monétaires ou remittances .............................................46<br />

9 - Les Etats face au défi migratoire .......................................................48<br />

9.1- les choix politiques du Sénégal .....................................................49<br />

9.2 - la politique migratoire de la France ..............................................55<br />

9.3- les politiques migratoires internationales ........................................56<br />

Conclusion......................................................................................57<br />

Bibliographie...................................................................................60<br />

1


1 – Introduction<br />

De la fin du 19e siècle et le début du vingtième, la migration sénégalaise a connu<br />

des évolutions significatives. Mais l’on retiendra que le fait migratoire a surtout été<br />

une conséquence des politiques coloniales et libérales car la migration ne peut être<br />

dissociée du contexte global des luttes de domination, des relations Nord Sud et les<br />

rapports sociaux de genre.<br />

La migration a eu des conséquences à la fois négatives et positives. Parmi les effets<br />

bénéfiques, les transferts d’argent vers les pays d’origine constituent un des<br />

aspects les plus visibles dont il est important d’examiner les voies et moyens en<br />

vue d’une meilleure utilisation pour l’atteinte des objectifs de développement du<br />

millénaire. En effet, les transferts peuvent constituer une solution de sortie de la<br />

pauvreté pour bon nombre de personnes, et au-delà de l’augmentation du capital<br />

individuel, les flux financiers contribuent, au niveau macro, à la constitution de<br />

réserves de devises étrangères pour le pays d’origine.<br />

L’attention portée sur l’argent de la migration permet de souligner le rôle<br />

important joué par le ou la migrante comme agent de changement aussi bien dans<br />

leurs pays d’origine que dans les pays d’accueil. L’analyse genre est essentielle non<br />

seulement pour produire et améliorer la compréhension de la circulation des<br />

revenus de la migration au niveau informel mais aussi de définir une approche<br />

participative des interventions centrées sur l’identification d’opportunités<br />

entrepreneuriales.<br />

C’est dans cette perspective que la présente revue de littérature a été entreprise.<br />

Elle fait le point sur les principales questions soulevées par les travaux de<br />

recherche d’une part et, d’autre part, identifie les dimensions à prendre en<br />

compte dans l’étude menée en partenariat par l’IFAN, le PNUD, le BDP, CDG et UN-<br />

<strong>INSTRAW</strong> au sujet des transferts de fonds de la migration. L’objectif de la dite<br />

recherche est d’améliorer les conditions de vie des populations et de promouvoir<br />

l’entreprenariat féminin dans les zones de départ.<br />

Les travaux analysés portent essentiellement sur l’historique et les dynamiques<br />

migratoires ainsi que leurs causes et conséquences. Ils nous donnent aussi des<br />

informations sur les zones de départ et d’arrivée, les profils des migrants ainsi que<br />

les acteurs et les politiques.<br />

2 - Historique et évolution des flux migratoires sénégalais<br />

De la fin du XIX e siècle à nos jours, les migrations sénégalaises ont connu des<br />

mutations importantes. Les courants migratoires ont été d’abord saisonniers et<br />

internes puis transfrontaliers. Les migrations qui s’opéraient en Afrique d’abord<br />

avant de gagner le continent européen concernaient seulement les hommes et<br />

adultes avant de toucher les femmes (BA, 1996).<br />

La migration sénégalaise est largement documentée du point de vue de son<br />

évolution historique et de ses étapes.<br />

La dynamique migratoire des Sénégalais peut être reliée à des événements<br />

importants qui permettent de distinguer trois grandes époques :<br />

2


• Les courants dictés par les sécheresses et l’appauvrissement du monde<br />

rural ;<br />

• Les mouvements consécutifs aux politiques d’ajustement structurel qui sont<br />

caractérisés par la crise de l’emploi salarié en milieu urbain ;<br />

• La mobilité consécutive à la libéralisation économique qui a entraîné la<br />

destruction de secteurs comme la pêche et des entreprises de production.<br />

Les cycles de sécheresse et l’appauvrissement du monde rural<br />

Déjà entre 1947 et 1960, avec l’installation progressive du déficit pluviométrique,<br />

les produits vivriers agricoles destinés à l’autoconsommation et les produits<br />

agricoles de rente se font rares poussant les populations à émigrer vers les grandes<br />

villes du Sénégal et des pays limitrophes. Ces mouvements sont venus s’ajouter au<br />

départ des pionniers de la migration de longue distance vers l’Afrique centrale et<br />

l’Europe, la France en l’occurrence.<br />

De 1960 à 1969, on assiste à la grande vague des départs vers l’Europe. Elle<br />

concerne essentiellement les Mandjacks de la Casamance, les Soninkés et Halpular<br />

de la vallée du fleuve Sénégal qui mettent à profit les facilités de voyage et<br />

d’entrée en France pour s’y installer de façon temporaire (six mois à deux ans),<br />

afin de retourner au village avec des ressources permettant de s’acquitter de<br />

l’impôt et entretenir leur famille.<br />

De 1969 à 1973 les migrants commencent à s’organiser tant dans les villages<br />

d’origine qu’en France. Ils créent alors les premières associations de ressortissants<br />

ou des comités villageois qui, à l’image du Comité de Rénovation de Diawara<br />

(COREDIA), qui réalisent les premiers investissements collectifs dans les domaines<br />

de l’éducation, de la santé, etc.<br />

C’est avec la sécheresse des années 1973, que commence la fixation des migrants<br />

essentiellement formés d’hommes seuls dans les pays d’accueil. L’allongement de<br />

la durée du séjour et/ou l’installation définitive ouvre alors la voie au<br />

regroupement familial.<br />

Les politiques d’ajustement structurel<br />

Aux difficultés du monde rural viennent s’ajouter, dans les années 1980, les<br />

conséquences des programmes d’ajustement structurel (déflation des personnels<br />

des sociétés de développement et sociétés privées, incitation aux départs<br />

volontaires des personnels de l’Administration, chômage des jeunes diplômés) qui<br />

ont plongé le Sénégal dans une longue crise économique.<br />

Il faut ajouter que les années 1990 sont marquées par une diversification des zones<br />

de départ avec la participation de plus en plus significative des nouvelles régions.<br />

Dakar et le bassin arachidier (Diourbel, Louga et Kaolack) sont les principales<br />

animatrices de cette dynamique migratoire internationale caractérisée par l’entrée<br />

en scène du groupe ethnique des Wolofs et/ou de la confrérie des Mourides (Tall<br />

2002; Lalou et Ndione 2004 ; ESAM-II 2004). Précurseurs de la migration<br />

commerciale ils seront à l’origine de l’explosion du phénomène migratoire<br />

3


sénégalais marquée par l’ouverture de nouvelles destinations 1 : Italie, Espagne et<br />

USA.<br />

Les politiques de libéralisation et d’ouverture du marché<br />

Les années 2000 qui coïncident avec l’ouverture des marchés dite politique de<br />

« libéralisation sauvage » qui a touché le secteur de la pêche marquent l’arrivée de<br />

nouveaux candidats à l’expatriation : les populations des zones côtières. L’année<br />

phare de ce phénomène dit des pirogues de fortune est 2006. Il concerne les jeunes<br />

qui embarquent dans des pirogues artisanales pour rejoindre les îles Canaries.<br />

On rattache ce phénomène à l’exacerbation de la crise économique qui se traduit<br />

par la chute du taux de croissance qui est passé de 5% à 2% consécutivement aux<br />

difficultés rencontrées par les principales unités de production comme les<br />

Industries chimiques du Sénégal ou les huileries mais aussi le mauvais déroulement<br />

de la « campagne arachidière » qui affecte le monde rural.<br />

3 - Géodynamique de l’espace migratoire international des Sénégalais<br />

Les travaux sur la migration renseignent à la fois sur l’évolution des zones de<br />

départs et les pays d’installation.<br />

3.1- Zones de départs<br />

La migration internationale de travail des Sénégalais remonte à la Deuxième<br />

Guerre mondiale. Elle a d’abord été le fait, dans des proportions importantes, des<br />

populations de la vallée du fleuve (Bakel et Matam) avant de gagner, au cours des<br />

années 90, les zones de Louga, Diourbel/Touba et Dakar.<br />

En effet, c’est au milieu des années 80 qu’on assiste à la fin de la prééminence de<br />

la vallée du fleuve Sénégal comme zone de migration.<br />

La diversification des zones de départ, marquée par la participation de plus en plus<br />

importante de Dakar et du bassin arachidier. On estime aujourd’hui que 40% des<br />

migrations récentes vers l’Europe proviennent de Touba, de Louga et de Dakar qui<br />

s’affirme comme la première région sénégalaise d’émigration, de transit, de<br />

retour.<br />

3.2 - Zones de destinations<br />

Depuis les années 90, le champ migratoire sénégalais a connu des changements<br />

importants :<br />

- La France qui a été pendant longtemps le principal pays d’accueil après<br />

l’Afrique a commencé à cède du terrain, au début des années 80 à l’Italie et<br />

à l’Espagne 2 .<br />

- Les années 90 correspondent à la conquête de l’Amérique et de l’Asie qui<br />

restent encore des destinations modestes.<br />

1 Longtemps considéré comme un foyer d’émigration vers la France, le Sénégal oriente de plus en<br />

plus ses flux vers l’Italie (27 000 individus en 1993 à près de 40 000 en 1999) et l’Espagne (3190<br />

migrants en 1993 et 11051 en 2007).<br />

2 Abdou THIAM, 2000, La migration internationale des Baol-Baol : déterminants et effets à Bambey<br />

et son arrière-pays. UCAD de Dakar : .Mémoire de maîtrise de sociologie,<br />

4


Selon les résultats de la deuxième Enquête sénégalaise auprès des ménages (DPS<br />

2004), 54% des sénégalais partis à l’étranger entre 1999 et 2004 sont allés en<br />

Europe (46%) et aux Etats Unies (8%) contre 44% en Afrique répartis entre les pays<br />

de l’UEMOA et le reste de l’Afrique (30%).<br />

Destinations des<br />

migrants Hommes Femmes<br />

UEMOA 13,1 17,4<br />

Autres pays africains 30,1 30,4<br />

Europe 46,9 41,1<br />

Amérique du Nord 7,2 9<br />

Autres destinations 2,7 1,6<br />

Sans réponse 0,1 0,6<br />

3.2.1 - L’Afrique ou la destination majeure des migrants<br />

La migration sénégalaise a d’abord été orientée vers l’Afrique avant de s’étendre à<br />

l’Europe. L’Afrique reste le premier continent d’accueil avec des destinations<br />

comme : la Côte- d’Ivoire, le Gabon. Les pays limitrophes comme la Gambie, la<br />

Mauritanie et le Mali accueillent environ 40% des migrants<br />

Destinations au sein de l’UEMOA Hommes Femmes Total<br />

Bénin 0,6<br />

Burkina Faso 0,8<br />

Côte-d'Ivoire 6,6 7<br />

Guinée Bissau 2,5 6,6<br />

Mali 2,3 3,1<br />

Togo 0,2 0,7<br />

Niger 0<br />

Notons que l’émigration vers les pays africains diminue alors que celle à<br />

destination des pays sud européens s’accroît.<br />

3.2.2- L’Europe : un champ migratoire remodelé<br />

L’Europe constitue la seconde destination après l’Afrique. En 1993, les Sénégalais<br />

constituaient le premier groupe ouest africain en Union Européenne (77 000<br />

individus) devant le Nigéria et le Cap-Vert.<br />

Les pays de prédilection des Sénégalais, après la France, sont l’Italie (de 27 000<br />

individus en 1993 à près de 40 000 en 1999, selon les chiffres officiels) et l’Espagne<br />

(de 3190 sénégalais en 1993 à 11051 en 2007). Ainsi que l’indique le tableau cidessous,<br />

la France demeure la première terre européenne d’accueil des migrants<br />

sénégalais.<br />

Tableau 4. Les grandes destinations européennes des Sénégalais (1995)<br />

Belgique Danemark France Espagne Italie Pays-Bas Suisse Allemagne<br />

733 81 40 848 6 657 32 953 167 891 2 660<br />

Source : L. Marfaing 2002 & Eurostat<br />

5


3.2.2.1- France : une destination majeure<br />

La migration vers la France est la plus ancienne et la mieux documentée des<br />

migrations sénégalaises internationales vers le Nord. En effet, pour des raisons<br />

historiques, la France, ancienne puissance colonisatrice, reste une place forte du<br />

champ migratoire sénégalais.<br />

Les premiers migrants sénégalais vers la France sont les Soninké, les Toucouleurs<br />

ou Halpular et les Mandjack. Ils arrivés au lendemain de la Première Guerre suite à<br />

la levée de l’interdiction de débarquement des employés marins dans les ports<br />

d’attache des longs courriers transatlantiques de Marseille, Bordeaux, Le Havre et<br />

Dunkerque (Diarra 1968).<br />

La seconde vague migratoire, orientée vers la région parisienne, notamment entre<br />

1945 et 1970, est essentiellement constituée d’étudiants – qui vont constituer<br />

l’élite intellectuelle sénégalaise à l’indépendance – et d’ouvriers engagés dans la<br />

« reconstruction de l’Hexagone » (Daff 1999).<br />

Depuis 1974, le protectionnisme migratoire dicté par la montée en puissance de la<br />

xénophobie a eu quatre conséquences majeures 3 :<br />

- la réduction à la portion congrue de l’arrivée de travailleurs sénégalais en<br />

France : 25 personnes en 1989 et 18 en 1990 ;<br />

- un recours à l’aide au retour ou à la réinsertion dans le pays d’origine 4 qui n’a<br />

cependant pas cessé de reculer au fil des années : 205 candidats en 1985 ; 182 en<br />

1986 ; 93 en 1987 ; 45 en 1988 ; 17 en 1989 et 6 en 1990 ;<br />

- la quasi-limitation des flux migratoires au regroupement familial (2 154 personnes<br />

entre 1987 et 1990 dont 1 094 épouses et 1 060 enfants) ;<br />

- l’ouverture de nouvelles destinations migratoires comme l’Italie, l’Espagne, les<br />

États-Unis d’Amérique qui sont en totale rupture avec les mouvements<br />

traditionnels notamment du point du vue des acteurs 5 .<br />

a. Des mouvements du XIX e aux mobilités des Trente Glorieuses<br />

I. Les Marins, navigateurs et « tirailleurs » d’abord<br />

La migration actuelle des Sénégalais en France puise ses origines dans un processus<br />

qui a débuté avec l’arrivée des marins et navigateurs et des « Tirailleurs<br />

sénégalais ». Dans beaucoup de travaux, ces derniers sont considérés comme les<br />

pionniers de l’immigration africaine en France. Pourtant, leur arrivée a de loin été<br />

précédée par celles des navigateurs et marins africains qui ont commencé à partir<br />

travailler dans les ports français à partir de 1848. Ils avaient été embauchés pour<br />

travailler sur des navires marchands ou au sein des compagnies indigènes en tant<br />

que mécaniciens, manutentionnaires, courtiers, etc., ou dans d’autres structures<br />

« rattachées au port de Toulon » (Bertoncello et Bredeloup, 2004 : 30).<br />

Avant d’arriver en France, la plupart des migrants travaillait déjà en tant que<br />

matelots ou soutiers dans les compagnies maritimes européennes qui desservaient<br />

3 Cf. OMI. Rapport d’activités 1990. Dakar : Délégation pour le Sénégal, 28 février 1991.<br />

4 Programme géré par le BAOS (Bureau d’Accueil, d’Orientation et de Suivi) en rapport avec la<br />

Caisse centrale de coopération.<br />

5 Il s’agit essentiellement de l’émigration des populations de la vallée du fleuve Sénégal vers la<br />

France. Voir notamment Daniel Delaunay, op. cit. ; Sadio Traoré « Les modèles migratoires soninké<br />

et poular de la vallée du fleuve Sénégal », REMI 10 (3), 1994: 61-80.<br />

6


la côte occidentale africaine (Assouline et Lallaoui, 1996c). C’est cette première<br />

expérience en matière de cabotage et de navigation sur les côtes africaines qui a<br />

favorisé leur recrutement dans la marine française. Celle-ci était d’autant plus<br />

importante que la possession d’un livret marin était indispensable pour que ces<br />

marins et navigateurs puissent être recrutés sur les navires européens et intégrer<br />

les compagnies maritimes implantées dans les ports français. Même si les marins<br />

ressortissants des Quatre Communes (Dakar, Rufisque, Gorée et Saint-Louis) étaient<br />

des citoyens français et avaient droit à ce livret, au même titre que ceux de la<br />

Métropole, ledit document n’était, en général, remis qu’aux marins ayant au moins<br />

une expérience de cabotage de trois à quatre ans sur les côtes africaines.<br />

Cependant, comme le but de ces compagnies françaises était de satisfaire la<br />

demande urgente en personnel, elles embauchaient aussi une main-d’œuvre peu<br />

qualifiée, composée de dockers, de caboteurs débutants et d’aventuriers<br />

(Bertoncello et Bredeloup, idem).<br />

Ils étaient tous issus des populations riveraines des fleuves d’Afrique de l’ouest. En<br />

ce qui concerne les Sénégalais, ils venaient essentiellement de deux régions : la<br />

vallée du fleuve Sénégal et la Casamance. C’est ce qui explique que les principaux<br />

groupes qui les composaient étaient les Soninké, les Halpular, les Diolas et<br />

Mandjacks (Barou 1993).<br />

Nombreux étaient les descendants de chefs traditionnels ou les personnes issues de<br />

l’aristocratie. Leur présence dans les compagnies européennes était, en grande<br />

partie, liée à l’image noble associée à la Marine.<br />

Les marins et navigateurs constituent les véritables pionniers de la migration<br />

économique africaine en France. Ils étaient essentiellement présents dans les ports<br />

de Marseille, du Havre, de Bordeaux et de Rouen (Barou, idem). Les migrants<br />

installés profitaient de leurs réseaux pour favoriser le recrutement et l’arrivée<br />

d’autres membres de leurs familles ou ressortissants de leurs villages.<br />

Avec la Première Guerre mondiale, les marins et navigateurs africains enrôlés dans<br />

la Marine de guerre rejoignirent les troupes françaises sur le front où ils seront<br />

rejoints par les « tirailleurs sénégalais ». Créés en 1857, les bataillons des<br />

« tirailleurs » dits sénégalais étaient en réalité composés de ressortissants de tous<br />

les pays d’Afrique occidentale française et pas uniquement de Sénégalais<br />

(Assouline et Lallaoui, 1996a). C’est à partir d’août 1945 qu’ils arrivèrent à la<br />

rescousse de la « mère-patrie » (Bertoncello et Bredeloup, 2004) et combattirent à<br />

côté des ressortissants des colonies françaises du Maghreb et d’Asie avec qui ils<br />

formaient les troupes coloniales.<br />

Au cours de la Grande Guerre, la France avait aussi fait appel à deux reprises à ses<br />

« sujets » d’Afrique Occidentale française 6 .<br />

Le premier appel était une levée autoritaire (Michel 1971) et s’apparentait à une<br />

chasse à l’homme (Fall 1986), car la France avait enrôlé de force, en 1915, plus de<br />

100.000 africains.<br />

6 L’AOF est née le 16 juin 1895. Elle regroupait les colonies françaises allant de la Mauritanie au<br />

Dahomey (Bénin) et s'étend sur 4.425.000 km². Elle comprend en huit territoires ayant avec à leur<br />

tête un gouverneur.<br />

7


Le second appel, qui débuta à la fin de 1917 sous Georges Clemenceau.<br />

L’administration coloniale avait confié au député sénégalais Blaise Diagne 7 le soin<br />

de négocier, avec les populations africaines, de leur enrôlement volontaire (Michel,<br />

1971). Blaise Diagne réussit à convaincre 63.000 africains composés des élites<br />

occidentalisées des villes ou « évolués » de s’engager volontairement au secours de<br />

la “nation civilisatrice” 8 en échange de la promesse - qui ne fut pas tenue - d’accès<br />

à la citoyenneté française pleine et entière à la fin du conflit.<br />

La volonté de la France d’enrôler les sujets africains s’expliquaient, certes par un<br />

besoin d’hommes, mais aussi, par le fait que les Africains avaient déjà fait leur<br />

preuve dans les expéditions coloniales conduites sous les ordres de chefs militaires<br />

comme Faidherbe et Gallieni.<br />

À la fin de la guerre, un grand nombre d’entre eux avait survécu. Une partie avait<br />

été rapatriée, souvent de force (Blanc-Chaléard 2001). Une autre partie était<br />

restée en France pour y vivre et travailler bien que le contexte d’après guerre et<br />

les difficultés économiques de l’époque eussent poussé certains à se rapprocher<br />

des bureaux de rapatriement.<br />

Ceux qui étaient restés avaient renforcé les contingents de travailleurs africains<br />

déjà présents sur les ports français avant l’éclatement de la Première Guerre<br />

mondiale. L’ensemble constituait un réservoir de main-d’œuvre civil et militaire<br />

pour la France et jeté les bases de la migration africaine de travail. Mais le<br />

contexte difficile d’après guerre les avait mis dans des situations professionnelles<br />

difficiles. En effet, de nombreuses activités portuaires avaient connu des<br />

perturbations qui engendrèrent le chômage des marins et navigateurs et poussèrent<br />

quelques uns à se reconvertir dans d’autres secteurs.<br />

L’éclatement de la Seconde Guerre mondiale avait, non seulement, engendré la<br />

mobilisation d’autres « tirailleurs », mais aussi, permis le recrutement, dans la<br />

Marine de guerre comme dans la Marine marchande, de ceux qui étaient déjà<br />

présents. La France avait ainsi mobilisé, une fois de plus, ses sujets africains pour<br />

combattre l’ennemi nazi. Certains venaient directement des colonies alors que<br />

d’autres étaient issus des contingents de marins, navigateurs et tirailleurs qui<br />

étaient déjà là pendant la Première Guerre mondiale. D’après les estimations du<br />

Sous-secrétariat d’État aux Anciens combattants, plusieurs milliers d’Africains<br />

avaient été tués ou faits prisonniers entre 1939 et 1945. Certains avaient été<br />

transformés en “travailleurs libres” et recrutés par l'organisation Todt pour<br />

construire des fortifications sur la côte méditerranéenne.<br />

Comme après la Première Guerre, certains « tirailleurs », arrivés durant la Seconde<br />

Guerre mondiale, étaient restés en France pour y travailler. Mais là encore, la<br />

situation d’après guerre rendit difficile leur insertion puisque après 1945, les ports<br />

fonctionnaient au ralenti. De même, la mise en place de techniques nécessitant de<br />

nouvelles qualifications professionnelles engendra des bouleversements dans les<br />

métiers marins.<br />

Des soutiers africains avaient été, ainsi, victimes de licenciements en raison, entre<br />

autres, du remplacement des chaudières à charbon par des chaudières à<br />

mazout (Assouline et Lallaoui 1996c), de la disparition de bateaux, de destructions<br />

d’usines, etc. (Bertoncello et Bredeloup 2004). Ils furent alors contraints de se<br />

7 Premier député africain à siéger, en 1914, au Palais-Bourbon.<br />

8 Cf. http://www.histoire-immigration.fr/index.php?lg=fr&nav=16&flash<br />

8


econvertir dans d’autres secteurs activités. C’est ainsi que, ceux qui ont pu<br />

constituer un capital, seuls ou avec l’aide d’une tierce personne, par exemple,<br />

ouvert des cafés ou restaurants à Marseille (Bertoncello et Bredeloup idem) sont de<br />

fait, les précurseurs du système commercial africain dans la cité phocéenne.<br />

En somme, jusqu’en 1945, la main-d’œuvre africaine en France était<br />

essentiellement constituée de tirailleurs démobilisés et d’anciens matelots de la<br />

Marine commerciale. Les besoins créés par la guerre et le boom économique<br />

avaient cependant permis à ceux qui étaient restés dans l’Hexagone de trouver un<br />

emploi mais d’accueillir d’autres travailleurs.<br />

II. La mobilisation de la main-d’œuvre halpulaar et soninké<br />

Après la Seconde Guerre mondiale, le Général De Gaulle lança un appel aux<br />

travailleurs étrangers pour la reconstruction de la France (Ba 1998). À l’époque, les<br />

besoins en main-d’œuvre destiner à compenser le déficit d’hommes tués pendant<br />

la guerre et faire face à la demande du marché était tellement important que la<br />

France encourageait les arrivées des travailleurs peu ou pas qualifiés. C’est ce qui<br />

se dégage du discours programme du Général De Gaulle daté du 2 mars 1944 : « La<br />

France, hélas ! manque d’hommes » (Blanc-Chaléard 2001). Ce sont les<br />

destructions massives causées par les deux guerres mondiales qui ouvrirent un<br />

grand chantier de reconstruction et favorisé l’arrivée d’autres africains dont des<br />

Sénégalais. Mais, bien que les besoins en travailleurs étrangers fussent importants,<br />

les autorités françaises avaient aussi clairement affiché leur volonté de contrôler<br />

les arrivées de populations. Le souci d’organiser une migration« intelligente » et<br />

« d’introduire de bons éléments » a conduit à la création, en 1945, de l’Office<br />

Nationale de l’Immigration (ONI) qui avait justement pour but de réguler, à partir<br />

de critères stricts, le recrutement et le séjour des travailleurs étrangers. Ceci<br />

indique d’ailleurs que les principes de « l’immigration choisie » qui font<br />

aujourd’hui l’objet de vifs débats ne datent pas d’aujourd'hui.<br />

Mais, la rigidité du système entravait l’arrivée de travailleurs étrangers qui<br />

n’arrivaient pas à remplir les conditions requises pour entrer légalement en France.<br />

Peu de travailleurs y parvenaient donc, ce qui engendra un afflux de travailleurs<br />

illégaux. En effet, « un grand nombre d’entrées en 1946 et 1947 se firent sous le<br />

signe de l’illégalité, par des filières plus ou moins traditionnelles » (Blanc-<br />

Chaléard 2001 : 60).<br />

Ce sont donc l’essor économique et industriel des années 1945 et 1974 et le<br />

manque de bras qui obligèrent la France à faire appel à la main-d’œuvre<br />

étrangère. Les colonies africaines dont le Sénégal avaient fourni un contingent<br />

important d’hommes. Ils étaient, au début, essentiellement constitués des<br />

ressortissants de la vallée du fleuve Sénégal et Casamance (Barou 1993) et, plus<br />

tard, de ceux du bassin arachidier et d’autres régions du pays. Cependant, les<br />

« Gens de la Vallée » constituaient la grande majorité de cette main-d’œuvre<br />

originaire du Sénégal.<br />

Pendant cette période de forte croissance économique, la migration en France<br />

était « libre » et l’entrée des travailleurs étrangers alors souhaitée et encouragée<br />

par les pouvoirs politiques et le patronat français. De ce fait les Mauritaniens, les<br />

Maliens et les Sénégalais n’avaient besoin que d’une carte d’identité pour y entrer.<br />

C’est ainsi qu’à partir des années 50 les Soninkés et Halpular, appelés aussi « Gens<br />

de la Vallée », et les Mandjacks commencèrent à partir répondre à la demande de<br />

9


main-d’œuvre. C’est aussi à partir de ce moment que la migration de travail des<br />

Sénégalais en France prit une nouvelle tournure. Jusqu’au début des années 70, ils<br />

symbolisaient « l’immigré africain en France » (Dewitte 2002) avant d’être rejoints<br />

par d’autres ressortissants d’autres régions du Sénégal, notamment du bassin<br />

arachidier.<br />

Dès lors que les contingents de marins et de navigateurs étaient majoritairement<br />

formés de populations originaires des bassins des fleuves Sénégal, Casamance et<br />

Gambie les nouveaux migrants rejoignaient des membres de leur communauté.<br />

a. L’arrivée à « Bordeaux 9 »<br />

Le phénomène migratoire des « Gens de la Vallée » et sa place dans les<br />

mouvements contemporains sénégalais ont fait, et continuent encore aujourd’hui à<br />

faire, l’objet de plusieurs études. Nombreux sont les auteurs qui se sont intéressés<br />

à cette longue tradition migratoire ainsi qu’à son mode d’organisation et la<br />

solidarité traditionnelle qui la caractérise.<br />

Il faut toutefois noter qu’à la différence des Mandjacks, les mobilités internes ou<br />

internationales des « gens de la vallée » remontent très loin dans le temps et ont<br />

commencé bien avant leur arrivée en France (Manchuelle 2004). Leurs premiers<br />

déplacements remontent à bien avant l’époque coloniale même s’ils ont pris une<br />

ampleur plus importante à partir des Trente Glorieuses. La tradition migratoire est<br />

cependant, plus ancienne et plus ancrée chez les Soninkés que chez les Halpular.<br />

Traditionnellement commerçants, les Soninkés sillonnaient, bien avant l’arrivée<br />

des Européens, le Sahel pour exercer le commerce (Condé 1986). Leur système<br />

commercial était tellement dynamique qu’ils écoulaient leurs produits un peu<br />

partout en l’Afrique occidentale et centrale. Selon Traoré, les Soninkés seraient à<br />

« l’origine de l’expansion du commerce dans le Soudan occidental » (1994 : 65).<br />

Si les premiers déplacements des Soninkés étaient motivés par des raisons<br />

économiques, ceux des Halpular, et surtout ceux des Pulars étaient liés à<br />

l’islamisation de la région notamment avec la révolution maraboutique de 1776 qui<br />

marque le début d’importants départs de populations qui fuyaient l’insécurité liée<br />

à la traite des esclaves (Traoré, idem). Mais quel que soit le groupe ethnique, et<br />

malgré la diversité des raisons du départ, la recherche de revenus occupait une<br />

place importante dans les mouvements. La longue tradition migratoire des « gens<br />

de la vallée » est largement liée à la dégradation des conditions économiques de<br />

cette région. En effet, la baisse du niveau des précipitations annuelles, les<br />

périodes de sécheresse successives, etc. ont progressivement rendu aléatoire la<br />

pratique d’activités agricoles et pastorales (Condé et Diagne 1994 ; Tandian 2003).<br />

Comme ces groupes vivent essentiellement de l'agriculture et de l’élevage, les<br />

nombreuses difficultés qu’ont connues ces secteurs et leurs conséquences sur<br />

l’autosuffisance alimentaire et l’entretien des familles, ont conduit bon nombre<br />

d’entre eux sur les routes de l’exil (Timéra 1996 ; Lanly 1998).<br />

En plus de la dégradation des conditions environnementales, l’appropriation du<br />

commerce par les Européens, l’instauration de l’impôt, les nouveaux besoins que<br />

cette situation avait engendré avaient, non seulement, contribué au<br />

bouleversement de l’ordre social traditionnel et poussé les populations à partir<br />

(Quiminal 1991). Conséquence de la mainmise sur le commerce dans le bassin,<br />

9 Bordeaux symbolise la France tout entière dans les représentations populaires des certaines<br />

ethnies, en l’occurrence les Soninkés.<br />

10


l’administration coloniale poussa les Soninkés, qui dominaient jusque-là ce secteur,<br />

à se redéployer vers d’autres secteurs d’activité (Daum 1993) ou à se replier sur<br />

une économie d’autosubsistance ou encore à migrer.<br />

Contrairement aux Soninkés, les Halpular de la Moyenne vallée ont bénéficié<br />

pendant longtemps de conditions climatiques plus favorables et ont connu des<br />

difficultés plus tard. C’est ce qui explique leur entrée tardive dans les migrations<br />

économiques.<br />

En somme, les facteurs climatiques conjugués à d’autres difficultés économiques<br />

ont entraîné une modification du fonctionnement traditionnel de la région et<br />

engendré les départs volontaires de populations en quête de revenus. Parmi les<br />

premières formes de mobilités soninkés et halpulaar avant leur départ pour la<br />

France, il faut signaler le « navétanat» 10 . Ces mouvements se dirigeaient<br />

essentiellement vers la Gambie et vers les autres régions du Sénégal et surtout vers<br />

le bassin arachidier où la culture de l’arachide était encore très développée.<br />

Les Soninkés sont ceux qui partaient le plus à l’époque vers le bassin arachidier.<br />

C’est progressivement que les migrations saisonnières se sont conjuguées ou ont<br />

cédé la place à la migration de longue durée. Une fois installés, les migrants<br />

exercent diverses activités salariées ou en développent de petits commerces tout<br />

en constituant un pôle d’accueil pour leurs compatriotes.<br />

Le champ migratoire s’étendaient à aux régions et villes du Sénégal mais aussi aux<br />

pays africains comme le Zaïre (actuelle RDC), le Congo, le Cameroun, le Gabon, la<br />

Côte-d’Ivoire, Centrafrique, etc. (Coulibaly 2001 ; Barou 1993 ; Bredeloup & Ba<br />

1997).<br />

C’est à dans ces pays mais surtout, à partir du Sénégal que les « gens de la<br />

Vallée », les Mandjaks ou Diolas de la Casamance ainsi que les ressortissants de la<br />

région de Tambacounda ont été recrutés travailler en France. En effet, à partir des<br />

années 50 et surtout 60, des sociétés françaises en l’occurrence les firmes comme<br />

Renault, Chausson et Talbot, commencèrent à recruter massivement dans ces<br />

régions du Sénégal. En plus de l’antenne de l’ONI installée à Dakar en 1963, il<br />

existait aussi un bureau « Renault-Dakar » où s’effectuait la sélection fondée<br />

notamment sur le niveau d’instruction et l’état de santé (Robin, 1996a).<br />

Cependant, même si les recrutements tout le Sénégal, les ressortissants de la<br />

vallée du Sénégal étaient majoritaires dans les contingents de travailleurs. Ce sont<br />

les Soninkés qui arrivèrent les premiers à partir des années 50 suivis des Haalpular<br />

à partir des années 60. Cette situation peut s’expliquer, en plus des raisons déjà<br />

évoquées, par les différences de comportement vis-à-vis du système colonial. En<br />

effet, chez les haalpular, l’idéologie religieuse avait suscité un rejet du colon qui<br />

contribua à l’isolement économique de la Moyenne vallée (Traoré, 1994).<br />

Même s’ils n’avaient pas abandonné les destinations africaines, la France devint, à<br />

partir des années 50, la destination préférée des Soninké comme en témoigne<br />

l’expression populaire, « Aller à Bordeaux ou mourir » (Traoré, 1994).<br />

10 Une forme de migration saisonnière qui consistait aux départs de plusieurs hommes pendant la<br />

saison des pluies pour travailler dans des zones plus propices à l’agriculture, comme le bassin<br />

arachidier, par exemple, et revenir chez eux à l’arrivée de la saison sèche.<br />

11


En revanche, si les Halpular commençaient à s’installer en France, la migration<br />

africaine n’était pas vécue de la même façon et avait la préférence des candidats.<br />

Ainsi, selon Lanly (1998), jusqu’au début des années 70, près de 70 % des<br />

travailleurs africains sont originaires des trois pays qui forment l’espace soninké<br />

contre 16,5 % de Halpulaar.<br />

La migration de travail des populations de vallée du Sénégal vers la France connut<br />

une croissance sans précédent à l’orée des années 60. Deux raisons président à cet<br />

état de fait:<br />

- la signature, en 1963 et 1964, avec le Mali, le Sénégal, la Mauritanie, d’accords<br />

permettant à la main- d’oeuvre d’entrer « librement » sur son territoire ;<br />

- le souhait exprimé au gouvernement français par le patronat, en vue de<br />

l’indépendance de l’Algérie, de faciliter l’arrivée des travailleurs noirs pour<br />

remplacer, le cas échéant, la main-d’œuvre algérienne (Traoré, 1994).<br />

Les migrants, arrivés légalement, avaient signé un contrat de travail avec l’ONI qui<br />

durant des décennies a réglementé l’entrée et le séjour des travailleurs étrangers<br />

en France. Cependant, les antennes de l’ONI avaient aussi pour mission de limiter<br />

les entrées de ces ressortissants africains parce que la France les jugeait<br />

« difficilement assimilables » et « incapables de s’adapter à la vie occidentale et<br />

industrielle » (Assouline et Lallaoui 1996b). D’ailleurs, au fil des années, les<br />

obstacles à l’entrée en France de cette main-d’œuvre noire africaine ont été<br />

régulièrement renforcés. Ce qui amena certains candidats à recourir à l’illégalité<br />

pour entrer dans l’Hexagone. Mais dans cette tentative de sélection de la maind’œuvre<br />

étrangère selon les origines et la couleur de la peau, le meilleur allié des<br />

migrants africains était la croissance économique qui exigeait une main-d’œuvre<br />

souple et bon marché. C’est cette situation qui avait poussé les pouvoirs publics à<br />

fermer les yeux sur les entrées clandestines et, même, à encourager la<br />

régularisation administrative de ceux qui avaient trouvé un emploi (Assouline et<br />

Lallaoui 1996c).<br />

Une fois en France, les travailleurs sénégalais s’installaient dans des zones bien<br />

déterminées et reproduisaient le schéma organisationnel de leurs sociétés<br />

d’origine.<br />

Si les « gens de la vallée » sont essentiellement composés de populations<br />

musulmanes peu ou pas scolarisées et sans qualification professionnelle si ce n’est<br />

un savoir-faire agricole ou artisanal, les Mandjack qui sont de confession catholique<br />

et plus scolarisés, ont connu une trajectoire migratoire particulière et pu trouver<br />

des points d’appui qui leur ont permis de procéder rapidement au regroupement<br />

familial (Coulibaly, 2001).<br />

b. Lieux d’implantation et organisation de type « communautaire »<br />

Plusieurs études menées sur les migrations des « gens de la vallée » ont constaté,<br />

non seulement, l'importance des liens basés sur la parenté, l’origine géographique<br />

et ethnique qui facilitent le départ en migration et influent à la fois sur les<br />

stratégies adoptées et les destinations choisies (Findley 1990 ; Condé 1986 ; Lanly<br />

1998). Par exemple, si les migrants soninkés ont pu venir en France à partir des<br />

12


années 50, avant les Halpular, c’est en grande partie parce que des Soninkés,<br />

mobilisés dans l'armée française pendant les deux guerres ou arrivés bien avant en<br />

tant que navigateurs, étaient déjà nombreux et avaient constitué des réseaux qui<br />

ont favorisé l’accueil de membres de leur communauté. Leur longue tradition<br />

migratoire et la diversification des lieux d’implantation ont largement contribué à<br />

la mise en place de tels réseaux.<br />

Le mode d’organisation communautaire explique aussi le fait qu’à leur arrivée, les<br />

migrants de la vallée du Sénégal se regroupaient autour des anciens navigateurs<br />

établis à Marseille, Bordeaux, Le Havre, etc. Cependant, hormis la présence de<br />

leurs compatriotes marins ou navigateurs, l’importance de ces zones portuaires<br />

dans le choix de leur lieu d’implantation, même provisoire, peut aussi s’expliquer<br />

par le fait qu’à l’époque, le voyage se faisait par bateau et pouvaient s’y faire<br />

embaucher plus facilement. Mais peu à peu, la relative pénurie de travail dans les<br />

ports les poussa à se diriger vers les zones industrialisées : le long du couloir<br />

rhodanien et la vallée de la Seine jusqu’à Paris (Poiret, 1996). En effet, comme les<br />

ports ne pouvaient plus absorber toute la main-d'œuvre, certains migrants se sont<br />

tournés vers d’autres agglomérations françaises qui offraient de nombreux emplois<br />

non qualifiés, dans l’industrie, les services, etc.<br />

La région parisienne devint ainsi une nouvelle zone d’attraction pour les migrants<br />

sénégalais. À l’époque, les Soninkés et Halpular, qui résidaient en Île-de-France,<br />

étaient essentiellement répartis dans les départements de la Seine-Saint-Denis, les<br />

Hauts-de-Seine, le Val-de-marne, les Yvelines, l’Essonne, le Val-d’Oise, etc.<br />

Au bout de quelques années, Paris et sa banlieue étaient devenues la plaque<br />

tournante des mouvements de main-d’œuvre noire africaine de façon générale, et<br />

plus particulièrement, de ceux des Soninkés et Halpular. Ainsi, au début des années<br />

70, la région parisienne concentrait plus de 70 % des travailleurs africains qui<br />

vivaient en France. Au fur et à mesure des arrivées, le centre de gravité de la<br />

migration sénégalaise s’est progressivement déplacé vers l’axe Paris-Rouen-le<br />

Havre (Barou, 1978).<br />

En somme, c’est à partir de la région parisienne et des villes portuaires que les<br />

travailleurs sénégalais se sont dispersés sur le territoire français.<br />

Le mode d’organisation communautaire avait été aussi nécessaire pour se loger<br />

dans les villes comme Paris. En effet, faute de politique de logement claire seuls<br />

les réseaux communautaires permettaient de développer un système de solidarité<br />

et d’entraide. Car même si les travailleurs avaient été recrutés et étaient venus<br />

répondre à la demande de main-d’œuvre, rien n’était prévu par les pouvoirs<br />

publics en termes de logement.<br />

La question du logement fut, donc, un problème majeur en raison de l’absence de<br />

dispositions concrètes d’installation d’un groupe au mode de vie jugé incompatible<br />

avec celui de la société française.<br />

De ce fait, les migrants ont dû se débrouiller seuls en s’entassant dans des locaux<br />

insalubres comme des foyers surpeuplés, des « entrepôts, usines désaffectées,<br />

anciennes écoles » (Barou, 1993 : 96) ou dans des habitations louées par des<br />

marchands de sommeil peu scrupuleux.<br />

C’est le drame d’Aubervilliers de 1971, avec la mort de cinq personnes par<br />

asphyxie, qui avait révéla au grand jour la situation des travailleurs africains de la<br />

13


égion parisienne. Un élan de solidarité vis-à-vis des étrangers avait alors vu le jour<br />

et poussé les pouvoirs publics à adopter des mesures destinées à améliorer les<br />

conditions de logement.<br />

Paradoxalement, en permettant à l’opinion française de découvrir les conditions de<br />

logement de ces populations, le drame d’Aubervilliers avait aussi participé à les<br />

rendre visibles et fait basculer la question de la migration dans le débat politique.<br />

Devant la soudaine visibilité des travailleurs noirs l’État français chercha un moyen<br />

de contrôler leur migration. Aubervilliers aura pour conséquence et d’attiser le<br />

racisme et de mobiliser l’opinion naguère indifférente à la présence noire. Des voix<br />

s’élevèrent pour réclamer, à l’État français, la limitation des arrivées et veiller à<br />

ce que les séjours soient temporaires (Blanc-Chaléard 2001).<br />

Des foyers furent pourtant construits suite au drame d’Aubervilliers. Dans leurs<br />

nouvelles habitations, les travailleurs africains développent leur mode de vie<br />

communautaire en reconstituant des entités familiales, ethniques et/ou<br />

villageoises. Ils vivaient alors regroupés dans des foyers dénommés « Soundjata »,<br />

« ASSOTRAF », « SONACOTRA », etc., qui sont gérés par des associations régies par<br />

la loi de 1901 (Barou 1978). La vie en communauté et l’entassement à la périphérie<br />

de la région parisienne renforçaient leur solidarité mais engendraient, par la même<br />

occasion, leur isolement.<br />

Au-delà d’une volonté réelle ou supposée des pouvoirs publics de les parquer loin<br />

des populations françaises, le mode vie les poussait à limiter au strict minimum le<br />

contact avec la société d’accueil. Ce comportement s’expliquait aussi par leur<br />

projet migratoire qui se voulait temporaire et avait pour objectifs principaux de<br />

satisfaire les besoins de la famille restée au village voire le développement des<br />

localités d’origine en vue d’un retour prestigieux (Coulibaly 2002).<br />

Barou (1978) note que si les Soninkés et les Halpular partageaient les modes de vie<br />

et d’organisation communautaire aussi bien dans les lieux de vie et de travail, les<br />

Halpular étaient moins ouverts que leurs voisins.<br />

c. Types d’activités professionnelles et système de noria<br />

Si l’arrivée des travailleurs africains fut fortement souhaitée et encouragée, c’est<br />

parce que la France avait besoin d’eux les secteurs où les conditions de travail<br />

étaient des plus pénibles. En effet, ces populations travaillaient dans des secteurs<br />

où il y avait plus de population étrangère que de Français et occupaient<br />

généralement les postes les plus bas de l’échelle ouvrière. Ils étaient également<br />

cantonnés dans des postes spécifiques et réduits aux tâches les plus précaires come<br />

la voirie, l’industrie automobile, a métallurgie, etc. D’après Assouline et Lallaoui<br />

(1996c) plus de 70 % des éboueurs de la ville de Paris étaient, dans les années 70,<br />

originaires de la vallée du Sénégal. En plus du manque de qualification<br />

professionnelle et l’analphabétisme qui freinent leur ascension professionnelle, ils<br />

étaient victimes de préjugés racistes hérités de l’idéologie coloniale française<br />

(Barou, 1978).<br />

Le monopole, qu’ils exerçaient dans les activités précaires et leur bonne réputation<br />

auprès des employeurs leur permettait d’instaurer un système de remplacement<br />

entre de ceux qui vivaient en France par leurs petits frères et autres proches venus<br />

14


du village. C’est système de noria ou mode de gestion du temps de travail qui<br />

permettait aux travailleurs de retourner au pays pour un séjour plus ou moins long<br />

en se faisant remplacer par un proche qu’on faisait venir en France. En effet,<br />

quand un migrant voulait rentrer au pays il cédait son poste dans l’entreprise et sa<br />

place au foyer au membre de son clan venu spécialement pour le remplacer (Barou,<br />

1993). Les populations de la vallée parvenaient ainsi à mener une migration<br />

rythmée par des retours au pays environ tous les 2 à 3 ans pendant 1 à 6 mois<br />

(Lanly, 1998).<br />

Un des mérites du système de permutation qu’est la noria, se situe aussi dans le<br />

fait qu’il favorisait la présence permanente d’hommes au village. Ceci favorisait<br />

alors le maintien des activités agricoles, des liens familiaux traditionnels en même<br />

temps que la recherche de revenus additionnels pour la survie de la famille et de la<br />

communauté toute entière.<br />

Puisque la migration était davantage motivée par des raisons communautaires et<br />

familiales, les parents participaient largement au fonctionnement du système de<br />

noria. La durée du séjour à l’étranger était alors liée aux objectifs fixés<br />

individuellement par le migrant mais aussi et surtout, par la collectivité (Gonin,<br />

2001). Ainsi, le départ et le séjour en terre étrangère reposaient sur un équilibre<br />

entre les choix individuels et les contraintes familiales et communautaires.<br />

La dépendance progressive des villages vis-à-vis des envois d’argent, la solide<br />

organisation communautaire, le contrôle exercé par leur communauté villageoise<br />

se sont conjugués aux évolutions du contexte migratoire du pays d’installation<br />

comme des zones de départ pour favoriser la prise en charge du développement<br />

des localités d’origine par les associations villageoises (Lanly, 1998). Au fil des<br />

années, ces associations se sont multipliées et diversifiées. Elles jouent un rôle<br />

important dans la survie et le développement des zones d’exode. Dans certains<br />

endroits, les associations sont devenues, loin devant l’Etat, les premiers agents de<br />

développement durable et endogène (Daum, 1995).<br />

Ainsi, jusqu’à la fermeture des frontières, la migration sénégalaise de travail en<br />

France était l’oeuvre d’hommes qui, par des séjours entrecoupés de retours, ont<br />

fait vivre leur famille et leur clan restés au village tout en mettant de côté un<br />

pécule permettant de rentrer définitivement en se faisant remplacer par un cadet.<br />

L’arrêt de la migration de travail modifia les projets migratoires et influa<br />

fortement sur son mode de gestion.<br />

d. La fermeture des frontières en 1974, début de l’installation des migrants<br />

sénégalais<br />

La crise pétrolière, qui a suivi le conflit israélo-arabe de 1973, a provoqué une<br />

crise pétrolière et économique dans les pays occidentaux. En France, une des<br />

réponses à cette crise a été la fermeture des frontières à la migration de travail.<br />

C’est une circulaire datée du 3 juillet 1974 du comme Premier ministre Jacques<br />

Chirac qui signa l’arrêt du recrutement de travailleurs étrangers. La mesure se<br />

voulait provisoire car les autorités françaises croyaient que la crise était passagère.<br />

Il en résulta d’ailleurs que les mesures adoptées à la hâte souffraient de<br />

nombreuses imperfections. Mais, en voyant la crise s’éterniser, le gouvernement<br />

français durcit les conditions d’entrée et de séjour des étrangers non originaires<br />

des pays de la CEE. La France commença, alors, à adopter une série de lois et de<br />

15


èglements destinées à la protéger de l’« invasion » et à durcir les conditions<br />

d’entrée sur son sol. C’est ainsi qu’elle signa avec certains pays africains dont le<br />

Sénégal de nouveaux accords instituant la carte de séjour et l’autorisation de<br />

travail (Poiret, 1996) pour leurs ressortissants. Ces mesures ont fortement<br />

influencé les formes migratoires des populations sénégalaises et les profils des<br />

migrants. Au fur et à mesure que leurs conditions d’entrée et de séjour devenaient<br />

draconiennes, les projets migratoires se modifièrent. En effet, les titulaires de<br />

cartes de séjour et d’autorisations de travail se trouvaient dans l’obligation de<br />

prolonger leur séjour et de gérer à distance leur famille sans possibilité de<br />

permutation.<br />

Ne pouvant plus circuler comme avant, les migrants repensèrent le système<br />

migratoire et adoptèrent e nouvelles stratégies d’insertion et d’installation.<br />

La vie dans les foyers leur permettait de joindre les deux bouts puisque l’habitat<br />

en foyer rend possible une épargne au vu du faible coût du loyer, des dépenses de<br />

nourriture et des services. Elle permet de répondre à trois grandes d’obligations :<br />

honorer la dette contractée lors du départ ou envoyer de l’argent à la famille<br />

restée au village, faire face aux obligations communautaires en France (cotisation<br />

aux caisses des associations d’origine, etc.) et épargner en vue du retour (Poiret,<br />

1996).<br />

Cependant, malgré la fermeture des frontières françaises et le durcissement des<br />

lois, quelques candidats parvenaient à passer entre les mailles du filet et à entrer<br />

en France d’autant plus que des employeurs continuaient à embaucher des<br />

étrangers (Blanc-Chaléard, 2001).<br />

Les restrictions à la libre circulation ont favorisé l’élargissement du champ<br />

migratoire sénégalais et l’éclosion des réseaux informels, ethniques, familiaux,<br />

religieux, etc.<br />

Une autre modification liée à la fermeture des frontières est le recours au<br />

regroupement familial qui a conduit à la féminisation progressive des migrations<br />

sénégalaises en France.<br />

Les années soixante sont également marquées par l’arrivée d’un nouveau type de<br />

migrant sénégalais : le commerçant ambulant.<br />

III. Des circulations commerciales estivales à l’installation des Modou-Modou 11<br />

C’est à partir des années 60 que des populations wolof commencent à se rendre ou<br />

à s’implanter en France dans le but commercialiser des produits artisanaux<br />

africains (Salem; 1981Sané 1987 ; Sall 2007). Ils étaient des commerçants<br />

circulants, antiquaires et/ou hommes d’affaires, fréquentant les marchés et<br />

galeries durant la période estivale. Ces mouvements sont nés et/ou ont été<br />

favorisés par l’engouement, à partir des années 50, des Européens pour l’Art nègre.<br />

Le choix de la période estivale pour vendre ces produits n’était pas dû au hasard<br />

dans la mesure où c’est une période propice au commerce.<br />

11 Le terme Modou-Modou est utilisé par les Sénégalais et les migrants eux-mêmes, à la base, pour<br />

désigner les migrants commerçants wolofs, par opposition aux ressortissants de la Vallée. Mais<br />

aujourd’hui, il désigne tout simplement les migrants sénégalais.<br />

16


Après avoir sillonné le Sénégal et d’autres pays africains, ces commerçants et<br />

antiquaires commencèrent à venir en tournées commerciales estivales et retourner<br />

au Sénégal à la fin de l’été.<br />

Cette conquête du marché français et la mise en place du réseau commercial<br />

sénégalais en Europe (Salem 1981) ont été davantage l’œuvre des Wolofs à travers<br />

les artisans boisseliers laobés 12 et les adeptes du mouridisme 13 .<br />

Ces commerçants étaient au début, un petit nombre qui approvisionnait des<br />

galeries d’art français et/ou écoulait directement leurs produits sur les marchés<br />

aux puces et sites touristiques.<br />

Les deux points d’ancrage et de commerce étaient Paris et Marseille. Les produits<br />

étaient réceptionnés au port de Marseille et vendus dans les deux villes et leurs<br />

environs.<br />

Si l’engouement pour l’Art nègre favorisa l’essor de ce commerce, le Festival des<br />

mondial Arts nègres organisé pour la première fois à Dakar en 1966 et transposé, à<br />

Paris, au Grand Palais constitua un tournant décisif pour cette activité (Salem,<br />

1981).<br />

L’un des précurseurs du commerce wolof et mouride en France est El Hadji Yanda<br />

Diop 14 . Originaire de la région de Diourbel qui est aussi le fief du mouridisme, ce<br />

pionnier du commerce international sénégalais 15 débuta ses périples commerciaux<br />

estivaux en France à partir des années 60. Membre très influent de cette confrérie,<br />

il occupa une place de choix dans le négoce mouride à Paris et ses environs. Il<br />

12 Les Laobés constituent un groupe sociolinguistique ayant comme langue le Poular, mais ils ne sont<br />

pas forcément originaires de la région de la Vallée du Fleuve Sénégal. Ils viennent généralement du<br />

bassin arachidier et sont généralement mourides. Les Laobés sont composés de plusieurs sousgroupes,<br />

les Laobés « Yett» qui traditionnellement fabriquent des mortiers, pillons, calebasses, etc.<br />

et qui, aujourd’hui, sculptent des produits plus modernes comme les statuettes, djembés, masques,<br />

etc., et les Laobés « dioulas » ou commerçants.<br />

13Le Mouridisme est une confrérie religieuse fondée par Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké au XIXe<br />

siècle. Créé dans le contexte de colonisation, cette confrérie a eu comme première base le pays<br />

wolof qui, à l’époque, connaissait le déclin de ses monarchies. Sa philosophie est basée<br />

essentiellement sur le travail, surtout de la terre, et les prières dans une relation spéciale entre le<br />

marabout et ses disciples. Ainsi, comme elle est née dans un milieu rural, le travail de la terre y<br />

occupe une grande place. Les Mourides ont dominé la culture de l’arachide au Sénégal pendant<br />

toute la période coloniale. Même si elle a été considérée par les colonisateurs comme un<br />

mouvement anticolonial, ce qui a valu à son fondateur de multiples exils forcés, l’administration<br />

coloniale s’était néanmoins appuyé sur elle pour introduire et développer la culture de l’arachide<br />

dans le pays. Ce qui montre que, même si elle a opposé une résistance passive à l’occupation<br />

coloniale, elle a été aussi un de ses collaborateurs au moins dans le domaine de l’agriculture<br />

(Guèye, 2002). Ainsi, la culture de l’arachide a d’abord été développée dans le fief du Mouridisme à<br />

savoir dans le Baol avant de se diffuser dans d’autres endroits du pays comme le Sine-Saloum, le<br />

Djambour, etc.<br />

14 C’est Samir Amin qui a, dans un article publié en 1969 par la Revue française des Affaires<br />

sociales, repéré cet homme.<br />

15 El Hadji Yanda Diop fait partie de ces membres de la confrérie mouride qui ont quitté leur village<br />

pour faire du commerce dans les centres urbains sénégalais. Les commerçants wolofs et mourides<br />

ont été les premiers à s’installer en France pour y commercialiser des objets d’art africains. C’est le<br />

déclin de la culture de l’arachide qui avait conduit El Hadji Yanda, comme d’autres ressortissants<br />

du pays wolof, à se reconvertir dans des activités économiques en milieu urbain sénégalais avant de<br />

se diriger vers les pays africains avant de se lancer à la conquête de pays européens, américains,<br />

asiatiques et moyen-orientaux.<br />

17


distribuait une partie de sa marchandise dans les galeries de la capitale française<br />

et écoulait l’autre directement au marché aux Puces de Saint-Ouen (Bertoncello et<br />

Bredeloup, 2004). Au fil des années, un réseau de jeunes commerçants mourides se<br />

constitua autour du quartier parisien de La Goutte d’Or pour former un des pôles<br />

les plus importants du commerce sénégalais dans la région parisienne et en France.<br />

A la suite de El Hadji Yanda Diop, des Sénégalais ont débuté le commerce estival<br />

dans d’autres villes françaises. Parmi ceux-ci il y a Amady Sow qui débuta ses<br />

activités en 1966 à Marseille où il distribuait des objets d’art sculptés par des<br />

artisans laobé établis dans l’atelier familial. C’est à partir de l’été 1967 qu’il<br />

commence à être accompagné par deux de ses frères pour sillonner la cité<br />

phocéenne et ses environs.<br />

Amady Sow noua alors des liens avec d’autres personnes et s’introduisait dans des<br />

réseaux plus vastes pour mieux développer son commerce. Au fil des années, il<br />

étendit, toujours accompagné de ses frères, son espace marchand mais dont<br />

Marseille reste le point d’ancrage. C’est, donc, à partir de Marseille que les<br />

membres de la famille Sow s’établirent dans de nombreuses villes dont Le Havre et<br />

Tours (Salem, 1981).<br />

Comme les commerçants circulants estivaux venus après lui, ils se sont appuyés sur<br />

d’anciens navigateurs et marins avec du quartier marseillais de Belsunce<br />

(Bertoncello et Bredeloup 2004).<br />

C’est à partir de la Goutte d’Or à Paris et de Belsunce à Marseille que les réseaux<br />

des deux pionniers du commerce sénégalais en France se sont élargis pour<br />

conquérir d’autres territoires français et les villes frontalières comme Strasbourg<br />

où le réseau est structuré autour de Yatou Sall qui est originaire du Djambour<br />

(région de Louga). C’est à partir des villes frontalières que les commerçants<br />

sénégalais ont entamé leurs incursions dans d’autres pays européens comme<br />

l’Allemagne, les pays du Bénélux, l’Italie, la Suisse, l’Espagne, etc. (Salem, 1981).<br />

Les « individus centraux » ou « nœuds » autour desquels sont structurés les réseaux<br />

(Degenne et Forsé 2004) exerçaient un pouvoir sur les autres commerçants grâce à<br />

leur position dans les échanges marchands, dans les réseaux migratoires, familiaux<br />

et/ou confrériques. Leurs activités conjuguaient des liens confrériques, des<br />

stratégies personnelles, la solidarité et l’entraide à l’égard des nouveaux arrivants.<br />

Le système commercial se caractérise aussi par les rapports de domination, de<br />

pouvoir et de reconnaissance.<br />

À côté de ces acteurs clés, existaient d’autres figures emblématiques du commerce<br />

sénégalais en France que G. Salem a bien identifié et décrit à la faveur des<br />

déplacements de marabouts mourides.<br />

Avec le commerce d’autres foyers et réseaux se sont créés et ont abouti au<br />

maillage du territoire français mais aussi à la conquête de villes et de pays<br />

européens. Ces réseaux favorisèrent l’arrivée de nouveaux commerçants mais aussi<br />

leur l’hébergement, leur insertion professionnelle et leurs circulations<br />

commerciales estivales.<br />

L’expansion commerciale sénégalaise s’est faite sur fond d’augmentation du<br />

nombre de commerçants wolofs, laobés mais aussi de d’autres groupes ethniques,<br />

confrériques.<br />

18


Ainsi, malgré l’omniprésence des membres de la confrérie mourides dans les<br />

réseaux de commerçants, il est plus judicieux de parler de réseaux sénégalais.<br />

Ainsi que le souligne G. Salem les Mourides n’étaient pas forcément majoritaires<br />

même si leurs formes d’organisation, de travail et de vie les rendaient et les<br />

rendent encore aujourd’hui, plus visibles que les commerçants provenant d’autres<br />

confréries ou de groupes ethniques non wolof.<br />

L’arrivée de nouveaux commerçants et la conquête de nouveaux espaces de vente<br />

et d’implantation ont favorisé l’élargissement du système commercial sénégalais.<br />

Mais l’investissement du territoire européen s’est fait de façon différenciée selon<br />

l’origine géographique des circulants, leurs points d’ancrage, leurs groupes<br />

d’appartenance, etc. De même, l’élargissement des points d’installation et/ou de<br />

commerce s’est fait au gré des opportunités et des difficultés, de la rentabilité de<br />

tel ou tel endroit, des alliances nouées sur place, du lieu d’approvisionnement,<br />

etc. Cette situation révèle la capacité d’adaptation des marchands sénégalais à<br />

l’environnement, aux contraintes structurelles et à l’évolution du marché<br />

(Bertoncello et Bredeloup, 2004).<br />

Mais, si au début, les activités des marchands étaient essentiellement faites de<br />

circulations commerciales estivales, ces derniers commencèrent à s’installer en<br />

France à partir des années 70 plus précisément après la fermeture des frontières et<br />

l’instauration, à partir de 1986, du visa d’entrée.<br />

Ce sont donc les commerçants circulants et les antiquaires qui constituent les<br />

précurseurs de la migration des commerçants sénégalais en France et en Europe.<br />

Au fil des années et des restrictions aux frontières, certains se sont<br />

progressivement installés en France et ont été rejoints par d’autres commerçants.<br />

Les uns pratiquent le commerce à la sauvette et le colportage instaurés par les<br />

« Anciens » tandis que d’autres ont ouvert des magasins ou se sont lancés dans le<br />

commerce forain.<br />

En définitive, c’est à la suite des antiquaires et autres ambulants estivaux que les<br />

commerçants sénégalais ont commencé à s’installer en France à partir du milieu<br />

des années 70 et surtout des années 80. Ainsi, à l’instar des mouvements des<br />

travailleurs salariés originaires de la vallée du fleuve Sénégal, la fermeture des<br />

frontières et le durcissement des conditions d’entrée et de séjour en France n’ont<br />

pas mis fin aux arrivées et installations de commerçants sénégalais. Cependant, ils<br />

ont largement modifié leurs pratiques migratoires et surtout l’organisation des<br />

départs et les conditions d’entrée dans ce pays. Car devant leur désir de partir,<br />

renforcé par les difficultés économiques que rencontre le Sénégal, comme d’autres<br />

pays africains, de nombreux candidats au départ n’ont pas hésité de braver<br />

l’interdiction de passer les frontières françaises et à recourir aux réseaux de<br />

passeurs ou à emprunter des voies dangereuses pour entrer légalement ou<br />

illégalement dans ce pays. Ces difficultés ont été successivement renforcées par la<br />

sécheresse des années 70 qui a engendré une crise agricole, les politiques<br />

d’ajustement structurel des années 80 et la dévaluation du Franc CFA des années<br />

1990. Les réseaux familiaux, confrériques et/ou d’origine géographique<br />

commencèrent, ainsi, à remplacer anciennes filières de recrutement,<br />

d’organisation du départ, d’accueil et d’insertion.<br />

19


On retiendra que si l’arrivée et l’installation des « gens de la vallée », des<br />

Mandjaks et des Diolas s’inscrit dans l’appel à la main-d’œuvre étrangère par l’État<br />

français à partir de 1945, celle des commerçants répondait à d’autres logiques. Ces<br />

derniers ne venaient pas pour s’insérer dans le secteur salarié mais pour mener des<br />

activités indépendantes. À la différence des travailleurs salariés dont l’essentiel de<br />

la vie migratoire se déroulait, au moins jusqu’avant l’arrivée de leur famille, entre<br />

les usines et les foyers, les commerçants ambulants et colporteurs qui<br />

fréquentaient les sites touristiques et les marchés avaient des rapports différents<br />

avec la société d’accueil et étaient plus visibles.<br />

Il importe de souligner qu’avant l’arrivée des commerçants wolof et des<br />

travailleurs salariés originaires de la vallée du Sénégal ou de la Casamance, les<br />

étudiants sénégalais étaient déjà présents en France.<br />

La fermeture des frontières françaises à la migration de travail a aussi favorisé la<br />

féminisation des mouvements migratoires sénégalais. L’installation durable qui s’en<br />

est suivie a poussé quelques migrants à faire venir les membres de leur famille.<br />

Les autres destinations européennes<br />

L’Italie : le nouvel eldorado<br />

L’Italie est une destination privilégiée avec, en 1995, près de 35% des migrants<br />

sénégalais. Talon d’Achille de l’espace Schengen, elle constitue, en dépit de la<br />

fragilité des statistiques, la quatrième terre d’immigration sénégalaise. Par le<br />

volume des flux migratoires qu’elle a drainé ces dernières années et la place<br />

qu’elle occupe dans l’imaginaire de nombreux candidats à l’émigration, la<br />

péninsule italienne constitue l’archétype idéal à l’analyse du processus de<br />

conquête et de consolidation de ce qu’il convient d’appeler, désormais, les<br />

nouveaux champs migratoires du Nord 16 .<br />

Objet de curiosité au début des années quatre-vingts, la « petite communauté »<br />

sénégalaise est composée d’une quarantaine d’étudiants des Universités de Pérouse<br />

ou de Bologne 17 et de « professionnels » du commerce d’objets d’artisanat africain<br />

(Schmidt di Friedberg 1993). Cette dernière catégorie est essentiellement<br />

constituée de Laobé qui sillonnent les plages et les villes de la péninsule à partir de<br />

leur base parisienne ou marseillaise (Salem 1983 ; Sané 1993). Parallèlement aux<br />

mouvements de courte durée, s’est développée, entre 1981 et 1984, une migration<br />

de travail inédite qui concerne essentiellement des personnes ayant déjà une<br />

expérience acquise dans des foyers traditionnels d’émigration (Mottura 1992).<br />

Cette première vague va ouvrir la voie aux commerçants ambulants, directement<br />

16 La musique sénégalaise évoque, de manière récurrente, le thème de la migration. On citera à<br />

titre d’exemples : Youssou Ndour « Immigré », « Solidarité »; Thione Seck « France »; Ouza Diallo<br />

« Modou-Modou »; Alioune Kassé « Modou-Modou »; Assane Mboup « Warefi tukki »; Omar Pène<br />

« Rèr »; Groupe Djubo « Dan Dolé »; Dial Mbaye « Touki »; Ismaïla Lô « Baol-Baol »; Cheikh Lô<br />

« Doxandème ». On notera également qu’une chaîne de radio privée diffuse, chaque semaine, une<br />

émission radiophonique intitulée « Kaddu Modu-Modu » (la Voix des immigrés).<br />

17 Entretien avec C. B. L., ancienne étudiante à Bologne, Dakar, septembre 1997. Cet accueil<br />

d’étudiants sénégalais est le résultat d’une politique initiée par le Centre culturel italien de Dakar<br />

mais « elle ne concerne que des individus issus des classes aisées » (Barile 1994).<br />

20


venus du Sénégal, qui séjournent périodiquement en Italie le temps d’écouler une<br />

marchandise amenée de Dakar avant de s’approvisionner en produits manufacturés<br />

qui sont redistribués, par les réseaux commerciaux informels, dans les grandes<br />

villes du Sénégal et d’Afrique. Au fil des années, certains commerçants saisonniers<br />

vont finir par s’installer (Khouma 1990) : ce sont les vuccumpra 18 ou macaroni 19 qui<br />

parcourent les centres-villes faisant découvrir à la population italienne les charmes<br />

et l’agressivité du commerce de proximité qu’ils ont longuement pratiqué dans les<br />

marchés dakarois, notamment à Sandaga.<br />

Figure 3. Migration sénégalaise légale vers l'Italie (1987-1995)<br />

35000<br />

30000<br />

25000<br />

20000<br />

15000<br />

10000<br />

5000<br />

0<br />

5719<br />

8191<br />

25268<br />

27527 27592<br />

26368<br />

24615<br />

32953<br />

1987 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995<br />

Source: Fall 1998<br />

Les différentes vagues migratoires vers l’Italie ont rendu importante une<br />

destination jadis marginale dans l’univers migratoire sénégalais. En effet, la<br />

réussite des pionniers de la migration qui se traduit par l’envoi régulier d’argent<br />

pour l’entretien des familles restées au pays, l’acquisition de parcelles et la<br />

construction de logements de qualité ont eu pour principal effet d’attirer de plus<br />

en plus de candidats.<br />

Officiellement forte de 33 000 membres (Caritas di Roma 1996), la communauté<br />

sénégalaise se classe au onzième rang des étrangers 20 présents sur le territoire<br />

italien. Devancés au classement par les Marocains (94 237) et les Tunisiens (40<br />

454), les Sénégalais occupaient, en 1996, la première place chez les « neri<br />

africane » loin devant les Somaliens (17 389), les Ghanéens (12 550) et les<br />

Éthiopiens (9 895). Estimée à 3 % de la population résidente non autochtone,<br />

depuis le début des années quatre-vingt-dix, la présence sénégalaise en terre<br />

18 Mot à mot : « Tu achètes ? ». La grande majorité de ces migrants provient des écoles coraniques<br />

(daara) ; elle ne sait ni lire ni écrire l’italien dont elle n’a glané que quelques rudiments.<br />

19 Vendeurs de pacotille que l’on rencontre surtout le soir dans les cafés et restaurants. La valeur<br />

totale de leurs marchandises, qui tient dans une caisse en carton, ne dépasse guère 20 000 lires<br />

(environ 7000 francs CFA). Cette activité, réservée aux débutants, est assimilée à de la mendicité<br />

(yalwaan )<br />

20 Derrière le Maroc, les États-Unis, l’ex-Yougoslavie, les Philippines, la Tunisie, l’Allemagne,<br />

l’Albanie, la Grande-Bretagne et la Roumanie.<br />

21


italienne reste largement sous-évaluée par les statistiques officielles. Celles-ci ne<br />

prennent pas en compte les migrants irréguliers 21 que les estimations les plus<br />

prudentes évaluent à 30 % des migrants titulaires de permis de séjour pour<br />

l’ensemble des communautés étrangères. Le pourcentage d’irréguliers chez les<br />

Sénégalais serait de l’ordre de 50 % sinon plus 22 . En retenant l’hypothèse moyenne,<br />

on peut estimer la population sénégalaise à 35 000 voire 40 000 migrants qui sont<br />

inégalement répartis sur le territoire italien.<br />

La dynamique migratoire en cours depuis les années 1970 23 a gagné des aires<br />

linguistiques naguère peu fréquentées et dont la spécificité tient à l’origine des<br />

pionniers engagés dans la migration ainsi que l’illustrent les trois exemples<br />

suivants:<br />

La conquête de l’Espagne (Suarez- Navaz 1995, Sow 1999; Rosanders 2005) est le<br />

fait de corps de métiers comme les antiquaires et les artisans regroupés en<br />

associations. Le mouvement s’est d’abord étendu aux populations vivant le long de<br />

la frontière sénégalo-gambienne 24 avant de gagner toutes les régions du Sénégal;<br />

L’Allemagne accueille principalement des artistes et des sportifs (Marfaing, 2003).<br />

Estimés à 2660 individus, les migrants sénégalais installés dans ce pays viennent<br />

des régions touristiques notamment de la Petite-Côte. En 2000, Berlin, Cologne,<br />

Hambourg, Munich et Brême constituent leurs principales villes d’implantation ;<br />

3.2.4 – La migration vers l’Amérique du Nord<br />

Après avoir suscité beaucoup d’interrogations au début des années 80 25 , la<br />

présence sénégalaise aux États-Unis d’Amérique est aujourd’hui une réalité bien<br />

établie (Kane- Mbaye 1998). De 666 migrants entre 1972 et 1986, le nombre de<br />

21 Le terme « irrégulier » est préféré à celui de « clandestin » d’autant qu’en Italie, contrairement à<br />

la France par exemple, aucune présence policière n’empêche le migrant illégal de se déplacer. Cf.<br />

à ce sujet les explications de Ottavia Schimdt di Friedberg « Burkinabè et Sénégalais dans le<br />

contexte de l’immigration ouest-africaine en Italie », Mondes en Développement, tome 23, n° 91,<br />

1995, pp. 67-80.<br />

22 Sur la base des statistiques consulaires, le Ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de<br />

l’extérieur, évalue la présence sénégalaise en Italie à 41 561 (document non diffusé en date du<br />

21/1/97) alors que l’Ambassade d’Italie à Dakar situe le nombre à 150 000 migrants! (Entretiens, G.<br />

M., Dakar, août 1997).<br />

23 C’est au début des années soixante-dix que les populations mourides du Baol notamment celles<br />

des villages polarisés par Lambaye s’engagent dans la migration internationale vers l’Europe, en<br />

particulier en direction de la France.<br />

24 La Gambie fournit, depuis une vingtaine d’années, d’importants contingents d’ouvriers agricoles à<br />

la péninsule ibérique.<br />

25 L’impression d’invasion de Noël 1982 rapportée par Victoria Ebin & Rose Lake, « Camelots à New<br />

York : les pionniers de l'immigration sénégalaise », Hommes et Migrations 1160, 1992, pp. 32-37,<br />

semble avoir progressivement cédé le pas à la sympathie dans les écrits récents. Voir notamment:<br />

Peter Blaumer, “Out of Africa: The Senegalese Peddlers of New York ”, New York Times, February<br />

16, 1987: 43 ; Deborah Sontag, “ Unlicensed Peddlers, Unfettered Dreams, New York Times, June<br />

14, 1993: 1 ; Marianne Boruch, “ The Talk of the Town”, The New Yorker, July 3, 1989: 25-36 ; Neil<br />

Savishinsky, “The Baye Faal of Senegambia. Muslim Rastas in the Promised Land? ” Africa 64 (2),<br />

1994: 211-220; Donna L. Perry, "Rural Ideologies and Urban Imagining: Wolof Immigrants in New<br />

York City”, Africa Today 44 (2), 1997: 229-260.<br />

22


Sénégalais est passé de 10 000 en 1990 à environ 20 000 en 1997. New York City,<br />

Atlanta et Houston sont aujourd’hui les principaux senegalese villages 26 dont la<br />

population est majoritairement constituée de la jeunesse scolarisée issue des<br />

grands centres urbains sénégalais en particulier de jeunes filles.<br />

Le Canada n’est pas en reste en ce qui concerne l’extension du champ migratoire<br />

sénégalais en raison de choix porté sur ce pays par de nombreux étudiants.<br />

4 - Causes et conséquences de la migration<br />

Parmi les principales causes de la migration on peut citer l’appauvrissement du<br />

monde rurale et la crise de l’emploi en milieu urbain.<br />

Appauvrissement du monde rural<br />

A l’instar de la plupart des pays d’Afrique Sahélienne, certaines régions du Sénégal<br />

(la Vallée du Fleuve, en premier), selon plusieurs études ont connu une profonde<br />

crise économique et sociale au début des années 70. Celle-ci s’est généralisée dans<br />

les années quatre vingt et quatre vingt dix (Kane et Lericollais 1975 ; Findley<br />

1991 ; Guilmoto 1991, 1997).<br />

Longtemps considérés comme le poumon de l’économie arachidière du Sénégal, les<br />

régions centrales durement éprouvées par la crise agricole. Celle-ci est marquée<br />

par les aléas pluviométriques, l’appauvrissement des sols, la difficulté à constituer<br />

un stock de semences de qualité en période de soudure, la disparition du cheptel.<br />

Le passage d’une stabilité et d’une prospérité économiques à la situation de crises<br />

récurrentes a bouleversé le régime migratoire des populations du basin arachidier.<br />

La crise de l’emploi en milieu urbain<br />

Les données fournies en 1998 par la Direction de la Prévision et de la Statistique<br />

(devenue Agence nationale de la Statistique et de la Démographie), ont montré que<br />

l’agglomération dakaroise qui abritait environ 54% de la population urbaine et 21%<br />

de la population totale du pays a été fortement touché par la crise. Il en a résulté<br />

une sévère crise de l’emploi avec un taux de global de chômage estimé à 24%. La<br />

tranche d’âge 20-24 ans fut la plus touchée avec 35% pour les hommes et 44% pour<br />

les femmes (DPS, 1991). En 1989, le nombre de jeunes en quête d’un premier<br />

emploi est particulièrement important : 67% du total des chômeurs pour les<br />

hommes et 52% pour les femmes. Les chômeurs n’ayant jamais travaillé<br />

représentent 14% de la main-d’oeuvre masculine disponible sur le marché de<br />

l’emploi dakarois et 6,5% de la main-d’oeuvre féminine (Antoine et al., 1995).<br />

Cette situation a eu pour conséquence l’augmentation des charges qui incombent<br />

aux chefs de ménage en proie à une pauvreté chronique.<br />

Les courants migratoires internes qui étaient jadis saisonniers ont alors choisi de se<br />

fixer définitivement dans les villes. Les potentialités d’emploi qu’offraient les<br />

centres urbains déjà affectés par le chômage ont abouti au développement du<br />

secteur informel. En plus du croît naturel, le nombre de ruraux qui s’installent en<br />

ville va augmenter de façon exponentielle le nombre d’actifs qui arrivent<br />

annuellement sur le marché du travail.<br />

26 Voir: Janet Allon, “A little Africa Emerges Along 2 Harlem Blocks”, The New York Times,<br />

December 13, 1995 ; Joel Macmillan, “ From Dakar to Detroit ”, Forbes, September 26, 1994.<br />

23


On imagine alors que les ménages qui vivent une précarité économique sans<br />

précédent voient dans la migration internationale une alternative à leurs<br />

inquiétudes. En effet, la crise a favorisé le développement de courants migratoires<br />

internationaux de grande envergure (Ndione et Lalou 2004 ; ESAM 2 2004).<br />

La migration internationale n’était plus un ajustement économique des seules<br />

populations rurales en proie à une agriculture soumise aux aléas climatiques et<br />

pluviométriques. Elle joue depuis, le milieu des années quatre-vingts, le rôle<br />

d’amortisseur dans la crise économique sanctionnée par une baisse du pouvoir<br />

d’achat et une forte contraction du marché de l’emploi formel et informel (Lalou<br />

et Ndione 2003).<br />

Les conséquences de la migration<br />

L’émigration comporte aussi bien des avantages que des inconvénients. Elle permet<br />

une amélioration des conditions de vie des familles de migrants, le développement<br />

économique des territoires et un impact considérable sur la situation sociale de la<br />

femmes.<br />

Amélioration des conditions de vie<br />

Les migrants jouent un rôle important en matière d’organisation des populations<br />

locales, de transferts financiers et d’investissements privés (bâtiments, élevage,<br />

commerce, irrigation) et collectifs (école, mosquée, poste de santé, point d’eau,<br />

bureau de poste, électrification) contribuant ainsi à l’accès aux services sociaux de<br />

base et à réduire la pauvreté par le développement participatif.<br />

Une bonne partie des flux monétaires est destinée à la prise en charge des besoins<br />

de base de la famille d’origine (alimentation, cérémonies, santé, logement) par le<br />

migrant, ce qui constitue une fonction primordiale des transferts d’argent et se<br />

justifie même par la nature collective de la migration qui, selon plusieurs auteurs,<br />

répond à un arrangement économique tacite entre les membres du ménage A cet<br />

égard, les dons réalisés par les migrants peuvent être analysés comme une réponse<br />

aux besoins de survie du ménage, traduisant la contrepartie proportionnelle et<br />

équilibrée d’un premier don : l’appui du ménage au départ du migrant.<br />

Les actions de solidarité envers la communauté d’origine du migrant constituent un<br />

autre domaine de financement, l’entourage social du migrant absorbant une partie<br />

assez importante des envois de fonds<br />

Des études récentes ont souligné que les régions de Louga, Matam, St-louis et<br />

Dakar, du fait des importants transferts financiers, présentent des taux d’incidence<br />

de la pauvreté plus faibles alors que des régions sans tradition migratoire mais<br />

dotées de plus de potentialités naturelles sont plus affectées par le dénuement.<br />

Situation des femmes<br />

En l’absence du mari, la femme assume le rôle de chef de ménage en ce sens<br />

qu’elle participe à l’approvisionnement vivrier à l’aide de ses activités<br />

économiques tout en subvenant aux besoins de sa progéniture. Sa responsabilité<br />

dans la gestion du foyer lui confère une place non négligeable dans l’unité familiale<br />

où elle est une productrice indépendante. Elle participe financièrement à<br />

l’édification d’équipements communautaires comme « le creusement » d’un puits,<br />

à la construction d’une mosquée ou à l’achat d’un moulin à mil.<br />

L’émigration a, de manière générale, accrue les responsabilités des femmes qui<br />

jouent un rôle économique important dans la gestion des affaires privées et<br />

publiques. Pour faire face à l’absence de leurs conjoints, elles ont développés des<br />

24


activités économiques telles que l’agriculture, le commerce et l’élevage. Elles ont<br />

noué des mécanismes d’entraide et des réseaux de solidarité qui par conséquent<br />

assurent une sécurité matérielle et morale aux membres, en permettant, par<br />

exemple, l’accès au crédit.<br />

Beaucoup de femmes soutiennent qu’elles contribuent aux dépenses quotidiennes<br />

du ménage sans que cela puisse être correctement apprécié. Les épouses de<br />

migrants ne bénéficient cependant pas d’une importante marge de manœuvre<br />

puisque leur vie de couple est gérée à distance par une tierce personne le beau<br />

père en l’occurrence.<br />

En dépit de leur importante contribution à la gestion de la famille et des affaires<br />

communautaires, le statut de la femme n’a pas considérablement changé. En effet,<br />

si la migration internationale modifie l’image de la femme il n’en est pas de même<br />

en ce qui concerne le statut en particulier dans les sociétés où le patriarcat reste<br />

la référence.<br />

Moustapha Mbacké MBENGUE 27 a montré que la migration de la population<br />

masculine a contribué à améliorer le mode de vie des femmes mariées qui, à<br />

travers des stratégies mises en œuvre pour accéder à des conditions de vie<br />

meilleures ont vu leur statut changer.<br />

Transformation des rapports de genre<br />

En arrière plan de la quasi-totalité des études sur la migration internationale, le<br />

sort des femmes a souvent été analysé à l’aune des changements sociaux liés à la<br />

migration avec, en particulier, la mise en perspective des rapports de genre ( Bâ<br />

1996 ; Dramé 1993).<br />

Dans sa thèse de doctorat, Cheikh Oumar BA 28 a analysé l’incidence de la migration<br />

sur les relations de genre et les rapports jeunes/vieux. Il a également souligné que<br />

l’évolution du fait migratoire a entraîné des changements dans les relations<br />

sociales notamment dans les rapports hommes/femmes.<br />

Quelques travaux ont relevé, de manière fort pertinente, que quand les hommes ne<br />

sont pas là, la femme ne devient pas ipso facto le chef de ménage (Fall 2004). En<br />

effet, ce rôle est souvent assumé, sur fond de tensions récurrentes, par un proche<br />

parent du migrant : son père, sa mère, son frère, etc.<br />

Mais les auteurs comme Abdou Khadre SANO 29 ont montré l’impact de la migration<br />

internationale sur la promotion sociale des femmes. L’acquisition des capitaux à la<br />

faveur de la migration entraîne non seulement leur mobilité mais aussi la<br />

recomposition des rôles au sein du foyer.<br />

Conséquences sociales des migrations sur les femmes<br />

L’émigration a des conséquences insuffisamment analysées en ce qui concerne les<br />

femmes. Parmi celle-ci on retiendra le vide affectif, le retard dans la procréation,<br />

27 Moustapha Mbacké MBENGUE, 2004-2005, Les femmes mariées du département de Nioro face à<br />

l’émigration, Mémoire de DEA, Département de Sociologie, UCAD.<br />

28 Cheikh Omar BA, 1996, Dynamiques migratoires et changements sociaux au sein des relations de<br />

genre et des rapports jeunes/vieux des originaires de la moyenne vallée du fleuve Sénégal, Thèse<br />

de troisième cycle, UCAD de Dakar.<br />

29 Khadre SANO, 2005, Stratégies mises en œuvre par les femmes émigrées et les épouses d’émigrés<br />

de Kébémer pour une promotion sociale, département sociologie, université Gaston berger de saint<br />

louis.<br />

25


les conflits avec la belle famille, les grossesses hors mariage, la transmission du VIH<br />

Sida, etc.<br />

Un autre aspect timidement abordé au sujet des femmes engagées dans la<br />

migration en qualité d’accompagnatrices est le thème des conflits au sein des<br />

ménages. Ceux-ci sont essentiellement liés au choc des cultures né des<br />

changements inhérents au rapport de genre dans le pays d’accueil notamment au<br />

sujet de la répartition des tâches et à la gestion de la famille (Quiminal 1991 ;<br />

Nicollet 1992).<br />

5 - Profil des migrants/ou profil migratoire<br />

Les premières vagues migratoires des années 70 sont composées d'hommes seuls qui<br />

vivent dans les foyers de travailleurs notamment en France.<br />

Dans les années 80 on est passé de la migration individuelle au regroupement<br />

familial.<br />

A partir des années 90 le phénomène concerne de nouveaux groupes ethniques<br />

avec la participation accrue des Wolofs (Tall, 2002; Lalou et Ndione, 2004 ; ESAM-II<br />

2004) qui appartiennent à des confréries religieuses ou de réseaux 30 qui facilitent<br />

leur départ et leur insertion dans les pays d’accueil.<br />

La forte organisation communautaire qui s’étend de l’entraide pour le départ, à<br />

l’accueil et à la constitution d’un stock de marchandises pour les nouveaux arrivés,<br />

ont permis au groupe wolof/mouride de réussir le projet migratoire et de<br />

s’affirmer comme le principal levier de l’expatriation qui suscite beaucoup d’envie<br />

chez les jeunes sénégalais.<br />

Les statistiques migratoires<br />

Si on connaît les caractéristiques spatiales et sociales de la migration, la taille de<br />

la population installée à l’extérieur n’est pas encore totalement maîtrisée comme<br />

en témoigne le projet OIM en cours sur le Recensement des migrants internationaux<br />

sénégalais qui est coordonné par Mme Siga Sarr Diouf.<br />

Les estimations chiffrées les plus courantes se réfèrent aux données censitaires des pays de<br />

l’UE. En Afrique de l’ouest, les données disponibles sur les migrations internationales sont<br />

rares et fragmentées. En outre, il est communément admis que le recensement n’est pas<br />

directement conçu, et tout particulièrement dans les pays du sud, pour réaliser une mesure et<br />

une analyse fine des migrations.<br />

Les statistiques officielles disponibles sur la période 2003 /2004, qui estiment à<br />

environ 648.600 répartis comme suit selon les grandes zones de destination:<br />

Population immatriculée dans les Services consulaires en 1996<br />

Zones Nombre d’immatriculés Effectifs<br />

Afrique 77 536 410 000<br />

Europe 125 436 190 000<br />

Amérique 6 696 43 200<br />

Asie 5 151 5 400<br />

Totaux 214 819 648 600<br />

Source : MSE/DSE<br />

30<br />

Facteurs d’attraction et de répulsion à l’origine des flux migratoires internationaux - Rapport<br />

national Sénégal – IRD Nov 1999.<br />

- Etude Micro-finance et transfert d’argent au Sénégal - Bannock Août 03<br />

26


Ces chiffres sont sous-estimés, car les Missions diplomatiques et consulaires qui les<br />

élaborent ne disposent pas d’informations complètes.<br />

Les inscriptions sur le fichier électoral, qui traduisent une volonté de maintenir une<br />

attache citoyenne avec le pays, se sont révélées être une source additionnelle<br />

d’information pour une meilleure maîtrise du flux migratoire. Ainsi, le ministère<br />

des Sénégalais de l’extérieur estime en 2007 à plus de deux millions (2 000 000) de<br />

personnes le nombre de Sénégalais vivant à l’étranger.<br />

Tableau 2 : Répartition des émigrés sénégalais selon le sexe et l’âge<br />

Groupes d'âges<br />

Hommes Femmes Total<br />

Effectif % Effectif % Effectif %<br />

moins de 15 4 515 3,2 2 094 7,8 6 608 3,9<br />

15-34 94 753 66,6 19 820 74,2 114 573 67,8<br />

35-54 40 089 28,2 4 317 16,2 44 406 26,3<br />

55-74 2 384 1,7 259 1 2 642 1,6<br />

75 et plus 106 0,1 0 0 106 0,1<br />

ND 391 0,3 227 0,8 618 0,4<br />

Total 142 238 100,0 26 716 100,0 168 953 100,0<br />

Source : DPS/2004, p.194<br />

Les migrants sénégalais sont en majorité des hommes (18 à 35 ans) qui partent en<br />

tant que célibataires ou sans leurs conjoints s’ils sont mariés. Ils sont généralement<br />

peu ou pas du tout instruits même si on constate, ces dernières années, une<br />

participation plus importante des intellectuels à la migration.<br />

Le profil ethnique des migrants a considérablement évolué dans la mesure où les<br />

Wolof constituent désormais le groupe dominant de la migration internationale.<br />

Groupe ethnique %<br />

Wolof - Lébou 46,7<br />

Halpulaar 28<br />

Sérère 5,8<br />

Diola 3,8<br />

Manding - Socé 3,4<br />

Soninké 3,7<br />

Autres sénégalais 5,9<br />

Africains 2,4<br />

Autres étrangers 0,3<br />

6 - Femmes et migration internationale<br />

Selon des études récentes, la présence des femmes dans les flux migratoires<br />

internationaux est devenue plus importante au cours des dernières années. A<br />

l’échelle mondiale, environ 47,5% des migrants internationaux sont de sexe féminin<br />

(OIM, 2000). Au Sénégal, elles représentent, selon ESAM 2 (DPS, 2004), 16% de la<br />

population migrante recensée entre 1992 et 1997 et ont pour principale<br />

27


caractéristique d’être plus jeunes que les hommes au moment du départ (74% des<br />

migrantes ont entre 15 et 34 ans) 31 .<br />

Jusqu’à une date récente, la société sénégalaise ne favorisait pas la migration à<br />

l’étranger des femmes non accompagnées, surtout lorsque cette migration<br />

s’effectue sur de longues distances et en l’absence de membre de la famille ou<br />

d’un proche dans le pays d’accueil. Les flux migratoires féminins étaient naguère<br />

dominés par les étudiantes et les femmes parties rejoindre leurs conjoints déjà<br />

établis de façon durable.<br />

Aujourd’hui, une émigration de femmes seules, actives et autonomes, à la<br />

recherche d’un meilleur statut économique et social est une réalité observable à<br />

l’échelle du pays. On sait par exemple d’après la récente enquête ESAM qu’il y a<br />

relativement plus de femmes que d’hommes parmi les sénégalais récemment partis<br />

aux États-Unis et au Canada (9% contre 7%.)<br />

La présence croissante des femmes est l’une des caractéristiques montantes des<br />

dynamiques migratoires internationales actuelles. Aux flux migratoires<br />

relativement bien connus, il faut ajouter les déplacements des réfugiés et des<br />

victimes du trafic illicite qui touche essentiellement sur les femmes et les enfants.<br />

Une visibilité accrue des femmes sur le terrain de la migration internationale<br />

Les travaux consacrés à la place et au rôle de la femme sénégalaise dans la<br />

migration internationale révèlent une visibilité accrue des femmes.<br />

Les études opposent deux catégories de femmes chez celles qui participent<br />

effectivement à la mobilité internationale :<br />

- la femme qui prend part au mouvement en qualité d’actrice principale ;<br />

- les femmes qui sont impliquées dans le déplacement par leur statut de<br />

dépendant fondé sur le mariage, la parenté, etc. Celles-ci sont regroupées<br />

sous le terme générique d’accompagnatrices.<br />

Une autre catégorie des femmes mérite une attention particulière. Ce sont les<br />

femmes qui vivent la migration « à distance ». Elles ne sont pas engagées dans le<br />

processus migratoire puisqu’elles ne se déplacent pas comme l’indique<br />

l’appellation « migrantes dites immobiles » qui s’applique essentiellement aux<br />

épouses et les mères de migrants.<br />

1) Les ‘’migrantes immobiles’’<br />

Elles constituent une catégorie dont la place dans la migration a fait l’objet d’une<br />

attention toute particulière au cours des dix dernières années. En effet, il a<br />

tardivement été pris conscience de l’implication à distance des femmes dans la<br />

migration.<br />

La non participation au mouvement migratoire n’empêche pas les parents de<br />

migrants de jouer un rôle primordial dans la conduite du processus : financement<br />

du départ, gestion du patrimoine du migrant absent, etc.<br />

2) La femme actrice principale de la migration est celle qui prend l’initiative de<br />

s’engager dans l’exode de longue distance.<br />

31 Voir en annexe les principaux résultats relatifs à la participation féminine aux migrations<br />

internationales.<br />

28


Il importe de signaler que les pesanteurs sociaux ont naguère constitué un facteur<br />

limitant jusqu’à ce que les crises économiques chroniques des Etats africains<br />

libèrent les femmes.<br />

L’augmentation en volume de la migration féminine est intrinsèquement liée à la<br />

paupérisation et/ou à la dégradation des conditions environnementales (Eurostat<br />

2000). Cette tendance qui a été observée à l’échelle de tout le continent africain<br />

(Zlotnik 2004) est particulièrement significative en Afrique de l’ouest.<br />

L’ampleur et la profondeur de la pauvreté sont telles que les stratégies familiales<br />

naguère fondées sur l’homme ont subi de profondes mutations en ce qui concerne<br />

notamment la distribution des rôles au sein du ménage.<br />

3) La femme accompagnatrice<br />

La participation des femmes à la migration est parfois liée à leur statut<br />

matrimonial. Parmi les résultats les plus significatifs au sujet de la participation<br />

des femmes en qualité de dépendante ou d’accompagnatrice (Fall 2001) Dans le cas<br />

des ménages polygames, les différentes épouses migrent à tour de rôle (Bâ &<br />

Bredeloup 1997).<br />

B. La féminisation des mobilités sénégalaises en France.<br />

Selon Cathérine Quiminal, le début de la présence féminine sénégalaise en France<br />

remonte aux années 60. En effet, d’après l’auteur, on comptait en France près de<br />

400 jeunes femmes sénégalaises qui venaient en France pour poursuivre leurs<br />

études. Il s’agissait essentiellement d’étudiantes issues des milieux favorisés et<br />

dont la présence en France n’avait rien à avoir avec celle des migrantes venues<br />

rejoindre leurs conjoints et/ou pour travailler. En effet, l’arrêt de la migration de<br />

travail et l’installation progressive des travailleurs sénégalais en France les ont<br />

amené à faire venir leurs familles (Fall, 2002). Ceci engendra un bouleversement<br />

des modes de vie mais non une rupture avec la communauté restée au pays<br />

d’origine. Autrement dit, le regroupement familial n’a été qu’un signe de rupture<br />

par rapport au projet migratoire initial mais non avec la terroir d’origine. Cette<br />

nouvelle donne a poussé les Sénégalais à quitter les foyers et à trouver des<br />

logements dans les cités ouvrières.<br />

La littérature existante aborde différentes problématiques relatives à la migration<br />

des femmes sénégalaises en France :<br />

- Le droit à la vie familiale également appelé regroupement familial (Wihtol de<br />

Wenden 1999) a largement favorisé la féminisation de la migration sénégalaise en<br />

France, surtout en région parisienne.<br />

Les premières épouses de migrants sénégalais en France sont des Mandjacks<br />

(Barou, 1993). Contrairement aux « gens de la vallée » qui étaient majoritaires<br />

dans les contingents des Trente glorieuses, les Mandjacks n’ont pas attendu la<br />

fermeture des frontières en 1974 pour faire venir leurs épouses. Généralement,<br />

plus instruits, de confession catholique et donc monogames, ils ont procédé au<br />

regroupement familial au début des années 50 bien avant leurs compatriotes<br />

Halpulaar et soninkés.<br />

Contrairement aux travailleurs salariés, les commerçants sénégalais sont très peu<br />

concernés par le regroupement familial. Une des explications à cette situation est<br />

que les commerçants avaient et ont encore aujourd’hui plus de mal à remplir les<br />

29


conditions exigées. Leurs activités faites de circulations entre différents territoires<br />

ne favorisent guère la vie de famille.<br />

On observe par exemple que des femmes sénégalaises sont présentes à Marseille<br />

depuis les années 70 (Bertoncello et Bredeloup 2004 ; Bava 2002). La plupart<br />

d’entre elles étaient des épouses de marins et navigateurs. Elles exerçaient de<br />

petites activités comme la vente de noix de cola, de cacahuètes, etc. ou<br />

travaillaient comme cuisinière et/ou serveuses, etc.<br />

L’arrivée des familles des migrants bouleversa les modes d’organisation et rapports<br />

avec la société française. Car naguère inscrit dans la société française sous le seul<br />

angle de leur utilité économique et presque invisibles, l’arrivée des familles va<br />

modifier les rapports avec la société d’accueil.<br />

De nouvelles relations vont se développer entre ces populations et les institutions<br />

scolaires, médicales et sociales. On sait par exemple qu’en raison de leur<br />

apparence physique et leurs pratiques culturelles, les familles africaines étaient<br />

stigmatisées et, ainsi, un bouc émissaire. Elles sont jugées, par beaucoup de<br />

Français et une partie de leurs dirigeants politiques difficilement intégrables<br />

(Poiret 1996). À l’époque comme aujourd’hui d’ailleurs, les familles subsahariennes<br />

représentaient sont l’expression vivante de l’altérité la plus radicale. C’est ainsi<br />

qu’à partir des années 80, on assiste à leur forte médiatisation. En effet, la<br />

présence misérable et discrète des hommes des années 60 au début des années 70<br />

a, aux yeux des médias et de l’opinion publique, cédé la place à une inquiétante<br />

invasion. L’image de l’étranger de passage et/ou simple agent économique<br />

commença à s’estomper pour laisser la place à celle d’une minorité culturelle<br />

sommée de se soumettre à un processus politique d’assimilation (Poiret 1996).<br />

Le débat politique se déplaça alors et subordonna la question de la migration à<br />

celle de l’intégration. C’est à partir de cette date que la question de la migration<br />

commença à être présentée comme « un problème » à résoudre. La montée du<br />

Front National, à partir de 1983, n’a pas arrangé la situation. C’est ainsi que les<br />

gouvernements de Gauche comme de Droite qui se sont succédés en France depuis<br />

1981, ont recherché et cherchent toujours des solutions au « problème ». C’est<br />

justement pour remédier à l’inquiétude née de la présence étrangère que le thème<br />

de l’intégration des migrants dont les prémisses remontent aux Trente Glorieuses,<br />

a commencé à prendre corps dans le débat politique et dans la recherche<br />

universitaire.<br />

Si les études consacrée à la première génération d’épouses de migrants sont<br />

conduites dans une perspective intégrationniste et évolutionniste, les approches,<br />

scientifiques récentes ont, de leur côté, adopté le paradigme de la mobilité et la<br />

perspective transnationale.<br />

L’essentiel des études ont montré que les premières épouses de migrants<br />

sénégalais arrivées en France ont eu des parcours différents. En effet, selon<br />

Jacques Barou (1993) l’origine et l’appartenance ethnique, les femmes<br />

sénégalaises ont eu des parcours différents et vécu de façon variée leur arrivée en<br />

France même si la plupart d’entre elles étaient d’origine rurale, peu ou pas<br />

instruites. L’auteur montre que dans la société mandjack confère une marge de<br />

manœuvre qui permet aux femmes de jouer un rôle économique important. De<br />

même, la société d’origine, bien que rurale, a toujours favorisé le départ des<br />

30


femmes et l’exercice d’un emploi indépendant. De ce fait, une fois arrivées en<br />

France, Les femmes mandjack ont commencé à vendre des plats cuisinés dans les<br />

foyers avant de diversifier leurs activités en s’inscrivant dans le tissu<br />

socioéconomique français. Leurs capacités d’intégration sont largement mises en<br />

avant mais, elles sont, comparativement aux femmes originaires de la vallée du<br />

Sénégal, peu présentes dans les études sur les mobilités féminines africaines.<br />

En ce qui concerne les femmes Halpulaar et soninkés, les études se sont davantage<br />

attelées à relever leurs handicaps culturels et/ou cultuels qui freinent leur<br />

intégration et à souligner leur isolement social et professionnel au moins durant les<br />

premières années de vie en migration. En effet, toujours selon J. Barou, comparées<br />

aux femmes mandjaks la situation a été tout autre pour les femmes soninkés et<br />

Halpulaar, originaires de sociétés fondées sur un mode d’organisation<br />

communautaire qui laisse peu de marge aux individus. De ce fait, à leur arrivée,<br />

elles se sont retrouvées dans une situation de dépaysement, d’isolement social et<br />

professionnel et sous la coupe de leurs époux qui, souvent, refusaient de les laisser<br />

travailler.<br />

En plus du poids des traditions et de handicaps culturels et cultuels, les travaux<br />

montrent que leur analphabétisme, leur méconnaissance de la langue et des codes<br />

culturels de la France justifiaient aussi leur inactivité et leur dépendance<br />

économique vis-à-vis de leur conjoint. Cette situation renforça leur mise à l’écart<br />

de la société française et leur sentiment de solitude (Quiminal & Azoulay 2002).<br />

D’ailleurs, selon ces auteurs, la solitude a été telle que certaines femmes ont<br />

connue des périodes de grande dépression.<br />

Aux facteurs culturels genrés ou autres, considérés par les études comme ayant<br />

engendré l’isolement des femmes, il faut ajouter les conséquences des politiques<br />

migratoires qui oublient bien souvent les femmes. En effet, les principes du droit<br />

au regroupement familial ne leur donnent aucun statut et renforcent leur<br />

dépendance vis-à-vis des hommes. Ce d’autant plus qu’elles peuvent perdre leurs<br />

titres de séjour en cas de divorce ou de séparation (Wihtol de Wenden 1999).<br />

Les zones d’habitation et les types de logements occupés par les familles de<br />

migrants avaient aussi contribué à l’isolement des femmes. En effet, des stratégies<br />

de sélection, conduisaient les pouvoirs publics à placer les familles dans les vieilles<br />

cités désertées par les Français. Cette sélection entraîna une ségrégation<br />

résidentielle et, surtout, une surconcentration des populations étrangères dans les<br />

mêmes zones. C’est le début de la ghettoïsation et de toutes les conséquences que<br />

cela a engendré et engendre encore aujourd’hui. En plus d’être parquées dans des<br />

espaces réduits, les familles immigrées étaient confrontées à d’innombrables<br />

difficultés socioéconomiques, sanitaires et éducatives. Ceci n’a pas facilité leur<br />

épanouissement personnel et la fin de l’isolement dans lequel elles étaient<br />

confinées.<br />

Les migrantes sénégalaises ont longtemps été étudiées sous l’angle familial.<br />

Essentiellement d’origines rurales et analphabètes, ce sont les problématiques<br />

liées à leur identité culturelle qui ont fait davantage l’objet d’étude au moins<br />

jusqu’aux années 80, voire au-delà. Cette identité était, selon Chaïb (1997),<br />

souvent présentée comme un handicap à l’origine de leur isolement, de leur<br />

inactivité et de leur « incapacité » à s’intégrer. Cette approche s’attachait<br />

31


davantage donc à démontrer leurs difficultés d’adaptation à la société<br />

d’installation et les enfermaient dans leurs rôles traditionnels, dans un cadre<br />

immuable et statique et dans une migration passive, subie et d’accompagnement.<br />

Il faut relever qu’en étudiant les femmes dans la sphère privée et les hommes dans<br />

la sphère publique, les études s’inscrivaient dans l’opposition paradigmatique entre<br />

tradition et modernité (Catarino et Morokvasic, 2005). Dans une tette optique, les<br />

femmes étaient ainsi perçues comme des personnes à charge et de simples<br />

accompagnatrices. Quiminal (1997) disait à ce propos que « l’image très prégnante<br />

de ce qu’un immigré, était un homme seul, célibataire, une force de travail bon<br />

marché [a fait que] les chercheurs (…) ne se sont pas tellement intéressés aux<br />

femmes ».<br />

S’inscrivant dans la perspective des travaux qui appréhendent les femmes à partir<br />

de leur identité culturelle, A. Nicollet (1992) s’est aussi intéressée, dans on<br />

ouvrage intitulé « Femmes d’Afrique noire en France. La vie partagée » aux<br />

premières femmes originaires du Sénégal, du Mali et de la Mauritanie. Il analyse au<br />

sujet du passage d’une culture à une autre, d’un monde à un autre, les rapports<br />

entre époux, aux changements que peuvent engendrer cette situation, etc. Il<br />

montre aussi comment les femmes s’adonnent à un « bricolage culturel » sans<br />

forcément renier leurs traditions et arriver, ainsi, à vivre, en même temps, deux<br />

cultures.<br />

Dans cette optique, le dépaysement et l’isolement des femmes ont été<br />

particulièrement mis en avant dans plusieurs études parmi lesquelles, celle de<br />

Bonvincini (1992), qui, dans un ouvrage intitulé « Immigrer au féminin : les<br />

"femmes du lundi », présente divers témoignages de femmes dont des Sénégalaises<br />

originaires de la vallée, qui relatent leurs parcours migratoires, la solitude et le<br />

désoeuvrement en France.<br />

À travers la question de l’isolement, c’est non seulement la question du repli sur<br />

soi et de l’organisation communautaire comme entrave à l’intégration qui est<br />

abordée ainsi que la domination masculine si prégnante dans la société d’origine.<br />

Après avoir été pendant longtemps étudiées sous le seul angle des handicaps, les<br />

femmes ont commencé, à partir des années 80 et surtout 90, à être étudiées sous<br />

celui de leurs capacités d’initiative et de contournement des contraintes<br />

auxquelles elles font face. Bien que le regard sur les femmes ait évolué, elles sont<br />

essentiellement analysées à travers la problématique de l’intégration. C’est ainsi<br />

que de nombreux travaux montrent après une première période d’isolement et de<br />

soumission totale et complète à leur culture d’origine, aux membres de leurs<br />

communautés et à leurs époux, elles ont fini par se rebeller (Azoulay et Quiminal<br />

2002). Cette rébellion s’était traduite de diverses manières mais surtout par une<br />

volonté affichée d’autonomie : cours d’alphabétisation, créations d’associations de<br />

féminines, recherche d’emploi, etc.<br />

Les associations féminines sont présentées comme ayant permis à de nombreuses<br />

femmes de sortir de l’isolement. Selon C. Quiminal (2000a), elles constituent des<br />

lieux de conquête de l’espace local et d’investissement dans la sphère publique en<br />

vue de valoriser la migration. En effet, les associations étaient devenues des lieux<br />

32


d’acquisition de nouvelles connaissances, d’ouverture vers d’autres populations et<br />

d’élaboration de nouvelles formes de citoyenneté (Quiminal, 2000b). Elles ont eu<br />

pour effet de produire un changement de statut et une remise en question des<br />

pratiques et systèmes de pensée des cultures d’origine. C’est dans le sillage de<br />

cette perspective que des travaux de recherche ont commencé à présenter et à<br />

étudier les femmes comme des « agents d’intégration » de leur famille et, par<br />

extension, de leurs communautés.<br />

Les femmes « réveillées » ont alors commencé à s’engager dans le travail salarié<br />

hors de leurs foyers qui devint un nouvel angle d’analyse de l migration au féminin.<br />

Bien qu’elles abordent les femmes sous une perspective culturaliste, ces études<br />

n’en continuent pas moins d’adopter l’approche évolutionniste et intégrationniste.<br />

On alors une importante évolution des recherches avec le passage de la « femme<br />

handicap » ou de la « femme qui ne sait rien faire » à la « femme-novatrice » ou à<br />

« la femme qui sait tout faire » (Chaïb, 1997 : 117). S’ouvre alors une période<br />

durant laquelle les études s’attachèrent davantage à démontrer la sortie de<br />

l’isolement des femmes et leur capacité à contourner les contraintes culturelle et<br />

cultuelles, la méconnaissance de langue et des codes culturels de la société<br />

française, etc.<br />

Le genre dans les études portant sur les migrations féminines africaines<br />

La rébellion des femmes migrantes suscita l’inquiétude et la peur chez les hommes<br />

qui, selon Azoulay et Quiminal, voyaient leur pouvoir remis en question.<br />

De même, bien que le regard sur les femmes se soit relativement déplacé, les<br />

études portant sur les migrations féminines africaines peinent à passer à l’analyse<br />

de genre alors que c’est à partir des années 90 que s’est amorcée la tendance. En<br />

outre, les femmes sont encore souvent étudiées dans une perspective familiale.<br />

Malgré l’évolution, les thèmes culturalistes occupent encore une bonne place dans<br />

les études sur les femmes africaines en migration et/ou de leurs filles. De ce fait,<br />

nombreux sont encore des travaux relatifs à des thèmes comme les mariages forcés<br />

et/ou arrangés (Roques 2002), la polygamie (De La Chapelle 1997 ; Gaspard 1992),<br />

etc.<br />

Les épouses de migrant sont généralement étudiées dans une perspective bipolaire<br />

et dichotomique. Elles sont alors, tantôt catégorisées comme « femmes au foyer »,<br />

« soumises et analphabètes », sous l’emprise de leur culture et/ou tradition<br />

cultuelle tantôt présentées comme des « femmes occidentalisées », « modernes »<br />

et « émancipées ». Elles sont aussi analysées « dans une perspective linéaire et<br />

simplificatrice qui gomme toute notion de diversité » (Barison et Catarino 1997).<br />

Aussi, les femmes qui migrent dans le cadre du regroupement familial sont<br />

essentiellement présentées comme des « suiveuses » dont leur départ découle<br />

uniquement de la décision leur conjoint. Elles sont davantage présentées comme<br />

des personnes à charge que comme des actrices de la migration. Autrement dit, le<br />

regroupement familial est considéré et présenté comme une mobilité<br />

d’accompagnement, répondant essentiellement aux projets des hommes qui font<br />

migrer leurs épouses pour qu’elles assurent leur descendance et les tâches<br />

domestiques. De nombreux travaux oublient ainsi que depuis l’installation des<br />

primo-arrivantes mandjaks, Halpular et soninkés, les profils et caractéristiques des<br />

33


épouses de migrants sénégalais en France ainsi que leurs conditions de départ et<br />

d’arrivée se sont largement diversifiés.<br />

De ce fait, si l’on étudie de plus près les Sénégalaises qui partent aujourd’hui en<br />

migration, on peut se rendre compte que le regroupement familial est souvent une<br />

stratégie féminine. Ainsi, sans remettre totalement en cause l’idée selon laquelle<br />

certaines femmes ont davantage subi que voulu leur migration. O. K. Coulibaly-<br />

Tandian, adopte une nouvelle lecture du regroupement familial. Elle montre qu’au<br />

moment où le durcissement des lois migratoires rend difficile, voire impossible, le<br />

franchissement, dans la légalité, des frontières européennes et où la migration est<br />

perçue par la plupart des Sénégalais comme un des rares moyens de réussir, les<br />

femmes aussi tentent de trouver les moyens de partir. Elles bravent alors les lois et<br />

empruntent des voies clandestines et dangereuses, encouragées par leur famille ou<br />

instrumentalisent le regroupement familial (Coulibaly-Tandian 2005, 2007a, 2008).<br />

L’auteure adopte, ainsi, le postulat selon lequel, non seulement, les femmes<br />

peuvent être à la base du regroupement familial, c’est-à-dire pousser leur conjoint<br />

à l’effectuer. Le regroupement familial peut constituer, pour certaines femmes, un<br />

prétexte à la migration de travail. Cette approche a mis en exergue la complexité<br />

des mobilités féminines, liées au regroupement familial. Au moment où les femmes<br />

sénégalaises jouent un rôle économique de plus en plus important dans leur famille<br />

et aspirent à une réussite socioéconomique, comme les hommes, les motivations<br />

familiales et économiques sont indissociables des projets migratoires fondés sur le<br />

regroupement familial.<br />

L’instrumentalisation du regroupement familial n’est certes pas nouveau mais il a<br />

été jusque-là davantage étudié dans une perspective masculine. Et, quand il est<br />

abordé, c’est, généralement, pour parler des « mariages pour des papiers »<br />

(Etiemble 2001) dans lesquels, les hommes du « bled » épousent ou tentent<br />

d’épouser des filles de migrants maghrébins ou subsahariens, des femmes blanches,<br />

dans l’espoir de partir ensuite. L’intérêt de l’approche de Coulibaly-Tandian réside<br />

dans le fait d’envisager le regroupement familial dans une perspective des femmes<br />

du Sud qui désirent rejoindre l’Europe par le canal du mariage avec un migrant ou<br />

un Européen. Cette perspective permet ainsi de déconstruire les stéréotypes,<br />

empreints d’ethnocentrisme, qui collent à la migration féminine africaine, d’une<br />

façon générale et de mettre en exergue la capacité d’initiative des femmes et les<br />

motivations économiques qui sous-tendent les migrations familiales actuelles<br />

(Coulibaly-Tandian 2007a).<br />

Bien que les flux migratoires féminins restent largement motivés par les liens<br />

familiaux avec des migrants déjà installés (Coulibaly, 2002), la situation a évolué<br />

au fil des années. En effet, dans la migration des femmes africaines en général et<br />

des sénégalaises en particulier, le regroupement familial reste la forme dominante<br />

même si le travail et les études prennent de plus en plus de place dans la décision<br />

de migrer (Tribalat 1995). Ainsi, les femmes sénégalaises qui partent pour des<br />

raisons économiques sont de plus en plus nombreuses. Elles utilisent leurs propres<br />

ressources, partent avec leurs employeurs ou avec de l’aide d’un proche établi à<br />

l’étranger. Quelques femmes partent à l’aventure - au sens propre du terme - en<br />

s’appuyant sur des réseaux dont elles font la découverte en cours de parcours. Les<br />

femmes qui ont recours à la voie clandestine utilisent le plus souvent un visa<br />

touristique et se retrouvent dans la clandestinité à l’expiration de celui-ci.<br />

34


Pourtant, dans la littérature existante, le regroupement familial est considéré<br />

comme la principale sinon la seule condition d’entrée des femmes en migration.<br />

Cette situation découle, en grande partie, d’une conception des mouvements<br />

migratoires qui veut que les hommes migrent pour des raisons professionnelles et<br />

économiques tandis que les femmes le font pour des raisons familiales et<br />

conjugales (Moujoud 2003).<br />

Malgré les avancées considérables de l’approche de genre dans les études<br />

migratoires, les femmes qui migrent seules peinent à être réellement prises en<br />

compte. De même, quand les « aventurières » sont étudiées, c’est souvent dans le<br />

cadre de la prostitution où elles sont essentiellement présentées comme les<br />

victimes de réseaux mafieux (Coulibaly-Tandian 2008). Même si c’est le cas de<br />

beaucoup de femmes du Sud ou d’Europe de l’Est, les migrantes seules s’insèrent<br />

aussi dans des secteurs d’activités qui se ne résument pas au travail sexuel.<br />

Bien qu’elles occupent une place non négligeable dans les migrations sénégalaises<br />

en France, les « aventurières » se dirigent davantage vers l’Europe du Sud en raison<br />

notamment des restrictions aux frontières qui sont, d’une manière globale, plus<br />

sévères en France. Quelques unes parviennent quand même à s’installer en France<br />

au moyen d’un visa touristique ou d’études (Coulibaly-Tandian 2008).<br />

Quand aux femmes instruites et/ou qualifiées ainsi que les commerçantes<br />

internationales, elles constituent les oubliées de la migration dans la mesure où les<br />

études traitent plus des migrantes dépendantes, ancrées dans des rôles<br />

traditionnels d’épouses et de mères ou de main-d’œuvre non qualifiée et bon<br />

marché.<br />

Au moment où la problématique des « skilled migrations » se développe dans les<br />

études migratoires, les femmes africaines instruites et qualifiées ainsi que les<br />

entrepreneuses transnationales restent absentes des travaux de recherche.<br />

Aujourd’hui, de plus en plus d’études s’intéressent aux mobilités des qualifiées<br />

mais celles-ci s’intéressent aux peu Africains encore moins aux femmes diplômées.<br />

Les discours sur la « fuite des cerveaux » mettent l’accent soit la perte subie par le<br />

pays d’origine soit sur le gain qu’en tire le pays d’installation. On oublie très<br />

souvent de s’intéresser concrètement à la situation professionnelle et<br />

socioéconomique des personnes qualifiées dont la majorité est constituée<br />

d’étudiants qui sont restés en migration à la fin de leurs études.<br />

Bien que le parallèle entre migration qualifiée et précarité économique puisse<br />

paraître incongru, les travaux de Selly Baro (2005) et de O. K. Coulibaly-Tandian<br />

(2005, 2007a) consacrés aux Sénégalais qualifiés en France, en Espagne, au Canada<br />

et aux Etats-Unis montrent que cette catégorie de migrants se retrouvent souvent<br />

dans une situation de déqualification professionnelle et de déclassement social. Les<br />

femmes sont les plus touchées par ce phénomène puisqu’à diplôme ou niveau de<br />

compétences égal, elles ont davantage plus de difficultés à s’insérer dans leur<br />

domaine de formation. En effet, en plus de l’ethnicisation à laquelle les hommes<br />

sont aussi confrontés, les femmes sont victimes de la sexuation du marché du<br />

travail notamment en France (Coulibaly-Tandian 2008). Elles se retrouvent dans<br />

une situation d’inégalité située à « l’intersection des rapports sociaux de<br />

domination qui se jouent entre les sexes, les classes et les groupes ethniques »<br />

(Barison et Catarino 1997).<br />

Il est utile d’ajouter, qu’au moment où le paradigme de la mobilité prend le pas<br />

sur celui de l’intégration et où les études adoptant cette perspective parlent de<br />

35


circulations incessantes et montrent que les mouvements actuels révèlent de<br />

pratiques que seule la notion de migration au sens strict du terme ne peut prendre<br />

en charge, la mobilité est encore une qualité peu reconnue aux femmes. Pourtant,<br />

dans la configuration actuelle des migrations sénégalaises, les femmes s’inscrivent<br />

dans des formes de mobilité variées et complexes dont les raisons sont multiples.<br />

En effet, les pratiques féminines combinent à la fois des migrations familiales, de<br />

travail, d’études et de circulations commerciales. Les femmes ne se limitent alors<br />

plus à « suivre leurs conjoints» ni ne se cantonnent dans la sédentarité (Coulibaly-<br />

Tandian 2007b). A travers l’approche de la circulation migratoire et l’analyse de<br />

genre, l’auteure s’est intéressée aussi aux sénégalaises circulantes commerçantes<br />

numériquement minoritaire mais permettant une autre lecture des mobilités<br />

féminines. Celles-ci sont domiciliées au Sénégal et ne répondent pas à la demande<br />

du marché du travail des pays fréquentés. Leurs activités sont faites de va-et-vient<br />

entre le Sénégal et les pays africains, européens, asiatiques et/ou du Golfe.<br />

A côté des « femmes d’affaires », Coulibaly-Tandian a aussi établi une typologie<br />

des femmes commerçantes internationales qui présentent des profils variés. Elle<br />

oppose les « GP » aux « saisonnières ». Si les premières mènent essentiellement<br />

des activités entre Dakar et Paris, les secondes sillonnent, durant les trois mois de<br />

l’été, les sites touristiques et autres espaces marchands de France et d’Europe du<br />

Sud. Les premières voyagent plusieurs fois par an voire par mois pour convoyer des<br />

marchandises alors que les secondes circulent, selon une périodicité variable, afin<br />

de vendre et/ou de s’approvisionner en marchandises.<br />

À partir d’enquêtes approfondies, Eva Rosanders (1998) a exploré quelques aspects<br />

de la vie quotidienne de femmes sénégalaises mourides vivant au moins<br />

temporairement à Tenerife et aux Canaries (Espagne) comme négociantes,<br />

vendeuses ou coiffeuses. Ancrées dans le monde, ces femmes ne sont pas<br />

véritablement des émigrées, parce qu’elles ne cessent de voyager, tant entre le<br />

Sénégal et l’Espagne que vers le reste de l’Europe ou les autres continents. Elles<br />

n’épousent des idées et des pratiques cosmopolites que quand celles-ci coïncident<br />

avec leurs intérêts économiques. Véritables entrepreneurs disposant de talents<br />

culturels et sociaux, elles sont des voyageurs en transit perpétuel, des « locales<br />

cosmopolites », qui manœuvrent entre les perceptions mouvantes qu’elles ont<br />

d’elles-mêmes et les regards que des autres, en Espagne ou au pays.<br />

Notons enfin que des chercheurs comme Fatou Sarr (1999) se sont certes intéressés<br />

aux commerçantes internationales au détour de l’entreprenariat féminin et non<br />

dans le cadre de la reconfiguration des pratiques migratoires qui sont révélatrices<br />

d’un savoir-circuler féminin dont l’ambition est de faire fortune dans le commerce<br />

de longue distance.<br />

Il reste certes un long chemin à parcourir dans le domaine de l’analyse genre en ce<br />

qui concerne la mobilité mais les études menées ces dernières années commencent<br />

à aborder les femmes sous un angle autre que celui de la migration<br />

d’accompagnement pour s’inscrire dans une perspective circulatoire et<br />

transnationale. En effet, la migration féminine est de plus en plus analysée en<br />

rapport avec la réussite socioéconomique, l’individualisation et de la redéfinition<br />

des relations d’égalité et d’équité entre les hommes et les femmes.<br />

Si les études ont pendant longtemps considéré que les femmes n’avaient pas de<br />

projet migratoire, quelques travaux commencent à montrer que non seulement<br />

36


elles en ont mais que quelque soient les raisons du départ l’envie de réussir<br />

constitue la toile de fond de l’expatriation féminine. En réalité, même les femmes<br />

qui ont subi leur migration espèrent, une fois arrivées dans le pays d’accueil,<br />

valoriser leur séjour et en tirer le maximum de profit (Azoulay et Quiminal 2002).<br />

Hormis les estimations des organisations internationales, il n’existe pas d’études<br />

détaillées sur l’argent transféré par les migrants vers leur pays d’origine.<br />

L’importance de cette manne financière n’est cependant plus à démontrer ainsi<br />

que le souligne le Fonds monétaire international (FMI) qui observe que « les<br />

migrants sont la première source de financement extérieur des pays en<br />

développement » (Follorou 2006).<br />

On ne connaît cependant ni les montants réels des flux financiers selon les pays, en<br />

l’occurrence le Sénégal, ni la dimension genre du phénomène. En effet, la<br />

contribution des femmes migrantes au développement de leurs pays d’origine, leur<br />

part dans les flux monétaires et les domaines dans lesquels cet argent est investi<br />

restent peu étudiés. Il s’avère donc important de mesurer correctement les flux<br />

financiers injectés par les migrants dans les pays d’origine mais aussi par catégorie<br />

de migrants notamment selon le sexe.<br />

Femme et migration clandestine<br />

Une équipe de chercheurs s’est intéressée à la féminisation des migrations<br />

clandestines en Afrique noire 32 à partir de la non prise en compte des femmes dans<br />

le processus. D’après eux, « loin de se réduire à une affaire d’hommes, la<br />

migration clandestine est un processus complexe dans lequel les femmes jouent un<br />

rôle essentiel et spécifique ».<br />

Pour lesdits auteurs, l’irruption des femmes dans un phénomène qu’on croirait<br />

exclusivement masculin au vu de l’endurance qu’il exige montre leur détermination<br />

mais aussi l’aptitude des femmes à surmonter les obstacles inhérents à la quête<br />

d’un mieux être que le pays d’origine ne peut plus leur procurer.<br />

C’est la raison pour laquelle, elles sont de plus en plus les actrices d’une migration<br />

vers les pays développés ainsi que le rapportent, depuis quelques années, les<br />

dépêches d’agences et différents médias qui évoquent la présence féminine dans le<br />

flux clandestins subsahariens.<br />

Partout en Afrique sub-saharienne on note que l’évolution des normes sociales et<br />

culturelles a une incidence sur l’émigration féminine. C’est le cas au Sénégal dans<br />

la mesure où les mouvements autonomes des personnes de sexe féminin (mères,<br />

femmes, sœurs) sont de plus en plus tolérés voire acceptés ou même encouragés<br />

depuis que la crise des années 80 a détruit les équilibres sociaux et professionnels<br />

au sein des familles.<br />

On retiendra que la migration féminine clandestine est liée à un environnement<br />

global qu’il faut prendre en compte : la conjoncture des pays d’Afrique Subsaharienne,<br />

la faillite du processus démocratique, l’essoufflement de l’économie<br />

formelle, les crises interethniques, les guerres civiles, les programmes<br />

d’ajustement structurel, la globalisation, les mutations sociales, etc.<br />

Pour parler comme De Latour 2003 « la migration n’est pas seulement déterminée<br />

par la misère et le danger comme on le lit souvent, elle appartient aussi à une<br />

32 Honoré MIMCHE et al, « La féminisation des migrations clandestines en Afrique noire », in.<br />

Mobilités au féminin, Tanger, 15-19 novembre 2005, 22p.<br />

37


geste épique portée par des imaginaires collectifs qui font du Nord un lieu où les<br />

héros s’élèvent ».<br />

La migrante féminine n’est pas forcément une personne déshéritée fuyant sa<br />

condition mais un individu qui prend en charge son destin.<br />

Cependant, malgré tout, dans le récit des différentes expériences migratoires, la<br />

motivation des femmes est d’abord le désir d’accéder à de meilleures conditions<br />

de vie. Dans ce sens, l’Afrique noire « joue depuis quelques années un rôle de plus<br />

en plus répulsif sur une partie grandissante de sa population dont l’espoir d’une vie<br />

meilleure sur son milieu de naissance s’amenuise au fur à mesure que s’accroît la<br />

pauvreté et le « la mal de vivre » ambiants ».<br />

Notons au sujet de la migration clandestine que les femmes sont au centre<br />

d’enjeux masculins dans les rapports avec les autres migrants, les autorités<br />

policières ou les employeurs. Ainsi, quand elles ne sont pas obligées de se<br />

prostituer de leur propre gré à cause du manque de moyens financiers ou sous la<br />

contrainte beaucoup de femmes sont violées. Leur plus grande vulnérabilité<br />

s’explique par le fait qu’elles disposent le plus souvent de peu de moyens<br />

physiques ou économiques pour que soient respectés leurs droits humains.<br />

7 - Les protagonistes de la migration sénégalaise<br />

En raison de la conviction largement partagée par les autorités sénégalaises et les<br />

populations qui veut que la migration soit un facteur de développement, de<br />

nombreuses initiatives ont été prises au cours des vingt dernières années. Celles-ci<br />

concernent aussi bien les pouvoirs publics, le secteur privé que le mouvement<br />

associatif.<br />

a) Les organes gouvernementaux<br />

1. L’actuel Ministère des Sénégalais de l’Extérieur et du Tourisme est l’héritière<br />

de la Direction des Sénégalais de l’Extérieur naguère logée au Ministère des<br />

Affaires étrangères, des Sénégalais de l’Extérieur et de l’Union africaine. Il faut<br />

rappeler que c’est en 1993 que l’ex-Secrétariat d’Etat chargé de la gestion des<br />

citoyens qui résident à l’étranger fut érigé, en 1983, en Ministère des Emigrés alors<br />

dirigé par Mme Mata SY DIALLO. Cette décision historique a ensuite été suivie par<br />

de nombreux pays africains.<br />

Ce département qui a en charge les Sénégalais résidant à l’étranger dispose<br />

d’intéressantes informations comme les recensements de effectués sur la base de<br />

la demande de cartes consulaires et des données sur les associations de migrants.<br />

En matière de gestion de la migration, les principaux organes dudit ministère sont :<br />

- la Direction des Affaires sociales ;<br />

- la Direction de la Promotion de l’Habitat des Sénégalais de l’Extérieur ;<br />

- la Direction d’Appui à l’Investissement et aux Projets [Responsable : Mme<br />

Maïmouna SOW, 33 867 01 71].<br />

Dans un passé récent la Direction des Sénégalais de l’extérieur a eu à gérer les<br />

programmes de réinsertion des migrants de retour et d’aide au retour de migrants<br />

notamment à travers le Bureau d’accueil, d’orientation et de suivi des Sénégalais<br />

de l’extérieur (Baos).<br />

Au chapitre des innovations du Ministère on peut citer le Forum avec les émigrés<br />

qui en est à sa deuxième édition. Il s’agit d’un espace de rencontres et d’échanges<br />

entre les migrants et les autorités locales sur les affaires sociales, culturelles et<br />

économiques<br />

38


2. Le Ministère des Affaires étrangères et de l’Union africaine est chargé de la<br />

délivrance et de l’authentification des documents d’état civil des migrants et des<br />

membres de leurs familles notamment des expatriés en situation régulière qui<br />

sollicitent le regroupement familial<br />

Une attribution non négligeable du MAEUA est l’enregistrement et la délivrance des<br />

actes d’état civil aux sénégalais nés hors du territoire national.<br />

Ce département ministériel gère le programme TOKTEN dont la vocation est de<br />

disposer des compétences des nationaux expatriés ou originaires de d’autres pays<br />

et qui sont en mesure de contribuer au développement économique et social du<br />

pays demandeur.<br />

Avec l’appui de l’Organisation internationale du Travail, le MAEUA a mis en place,<br />

en avril 1997, un programme de soutien aux travailleurs migrants. Cette initiative<br />

n’a pas connu, pour de nombreuses raisons, le succès escompté.<br />

3. Le Ministère de l’Emploi et des Organisations professionnelles héberge la<br />

Direction de la Coopération internationale chargée de la négociation et du suivi<br />

des conventions et contrats bilatéraux concernant le recrutements des cadres et<br />

ouvriers sénégalais par des Etats.<br />

Une institution importante du MEOP est la Caisse de sécurité sociale. Elle est<br />

chargée, en vertu des accords signés par le Sénégal avec des pays comme la France<br />

ou la Mauritanie, de la gestion des allocations familiales et pensions de retraites<br />

des migrants.<br />

Créée en octobre 1956, la Caisse de sécurité sociale est la plus en vue des outils<br />

d’intervention en matière de gestion des droits des travailleurs migrants et des<br />

membres de leurs familles.<br />

À l’initiative de la Caisse de Sécurité sociale, le Gouvernement du Sénégal a signé,<br />

avec de nombreux pays, des accords de coopération dans le domaine de la sécurité<br />

sociale. Ces conventions visent les ressortissants des États signataires exerçant ou<br />

ayant exercé une activité professionnelle au Sénégal et les personnes ayant un<br />

statut de réfugié.<br />

Accord avec la France signé le 5 mars 1960 renégocie le 29 mars 1974 ratifiée par<br />

la loi n° 75-33 du 3/31975<br />

4. Naguère logée au Ministère de l’Emploi, du Travail et de la Formation<br />

professionnelle (actuel Ministère de l’Emploi, du Travail et des Organisations<br />

professionnelles) puis de la Primature, la Direction de l’Assistance technique est<br />

actuellement rattachée au Ministère de l'Aménagement du Territoire, du<br />

Commerce et de la Coopération décentralisée. Sa vocation essentielle est la<br />

gestion de la coopération internationale en matière d’exportation de maind’oeuvre<br />

;<br />

5. Le Ministère des Finances assure le suivi du Commodity Aids. Ce projet négocié<br />

auprès du Gouvernement italien consiste en la mise à disposition de matériel et<br />

d’équipement destiné à renforcer la capacité des migrants porteurs de projets de<br />

réinsertion et candidats volontaires au retour.<br />

39


6. Ministère des Infrastructures, des Transports terrestres, des<br />

Télécommunications et des Tics assure la tutelle de La Poste qui joue un rôle<br />

central dans les transferts vers le Sénégal de l’argent de la migration notamment<br />

vers les régions périphériques.<br />

1993 22.000.000.000<br />

1994 17.000.000.000<br />

2001 142.900.000.000<br />

2004 250.000.000.000<br />

Sources : POSTFINANCES<br />

7. La prise en compte des revendications des migrants internationaux et un souci<br />

louable de bonne gestion avait conduit, en 1995, à la création d’un organe<br />

consultatif: le Conseil Supérieur des Sénégalais de l’Extérieur 33 .<br />

Interlocuteur des autorités nationales, cette instance était constituée de 75<br />

délégués dont 60 sont élus par les cinq zones d’émigration que sont l’Afrique<br />

subsaharienne (30), l’Europe (16), l’Amérique (7), les pays arabes (6), et l’Asie (1)<br />

tandis que les 15 autres sont nommés par le Président de la République.<br />

Depuis l’alternance politique de 2000, les récriminations d’associations proches de<br />

la coalition au pouvoir – en l’occurrence du Parti Démocratique sénégalais - ont<br />

abouti à la suspension sine die du Conseil Supérieur des Sénégalais de l’Extérieur<br />

jugé trop favorable à l’«Ancien Régime». En lieu et place de ladite structure, la<br />

Présidence de la République a mis sur pied une cellule dirigée par un Conseiller<br />

spécial ayant rang d’Ambassadeur itinérant.<br />

b) Le Parlement et les Collectivités locales<br />

Pour être en phase avec l’État, les élus locaux ont créé le Réseau des<br />

parlementaires sur les migrations, les droits humains et le développement<br />

(RP/MDHD) dont l’action est orientée vers la mobilisation des associations<br />

d’émigrés au niveau communal, départemental et régional. Considérées comme<br />

des partenaires dans le développement local, ces associations apportent un<br />

précieux concours notamment dans la construction d’équipements sociaux (forages,<br />

écoles, centres de santé, etc.).<br />

Au niveau des collectivités locales dites de base (Conseil régional, Mairie, etc., de<br />

nombreuses missions de prospection ou été conduites dans le but de nouer, avec le<br />

soutien des migrants internationaux, un partenariat avec les autorités des pays<br />

d’accueil autour de projets de développement.<br />

c) Les acteurs du secteur privé : le système bancaire<br />

La BCEAO (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest) qui centralise la<br />

circulation des devises dispose de données concernant l’ensemble des transferts<br />

des migrants notamment deux qui empruntent les « couloirs » des agences de<br />

transferts rapides Western Union, Money Gram, Money Express, etc.<br />

33 Voir notamment le décret n° 95-154 du 9 février 1995 portant création du Conseil Supérieur des Sénégalais de l’Extérieur ; arrêté n° 4380/MAESE/DSE<br />

du 24 avril 1997 fixant la composition et le mode d’élection des délégués, l’organisation et le fonctionnement du Conseil Supérieur des Sénégalais de<br />

l’Extérieur ; loi organique n° 98-48 du 10 octobre 1998 relative à l’élection des [trois] sénateurs représentant les Sénégalais de l’Extérieur.<br />

40


Volume et répartition des transferts des émigrés sénégalais entre 1999 et 2003<br />

(en millions de francs CFA)<br />

1999 2000 2001 2002 2003<br />

(provisoire)<br />

1. Dépôts bancaires des émigrés 74 224,0 84 695,0 90 140,0 96 737,0 127 770,0<br />

2. Transferts bancaires (variation du<br />

1)<br />

3 970,0 10 471,0 5 445,0 6 597,0 31 033,0<br />

(Approvisionnement net des comptes des émigrés)<br />

3. Transferts postaux<br />

(mandats et virements)<br />

37 949,0 30 553,0 25 189,0 17 034,0 nd<br />

4. Transferts par réseaux rapides 58 950,0 92 900,5 142 168 211 897,1<br />

201,6 843,6<br />

dont Western Union 58 854,4 91 612,0 129 144 156 841,4<br />

233,6 912,5<br />

Money Gram 95,6 1 288,5 12 968,0 23 480,0 39 648,0<br />

Ria Envia 451,1 902,0<br />

Money express 1 301,0<br />

WorldWide Services 13 204,7<br />

TOTAL (2 + 3 + 4) 100<br />

869,0<br />

Source : BCEAO 2004.<br />

133<br />

924,5<br />

172<br />

835,6<br />

192<br />

474,6<br />

242 930,1<br />

On peut dire que toutes les banques ont pris des initiatives dans le domaine de la<br />

migration. Celles-ci vont de l’ouverture de comptes spéciaux, et une politique<br />

agressive d’incitation à l’épargne.<br />

En raison de sa spécialisation dans la construction immobilière, la Banque de<br />

l’habitat du Sénégal constitue un interlocuteur de taille pour les migrants qui<br />

souhaitent accéder à la propriété bâtie. Elle a participé à la quasi-totalité des<br />

missions gouvernementales destinées à informer les migrants sur les potentialités<br />

d’investissement au Sénégal.<br />

On notera que c’est en rapport avec l’émigration sénégalaise en France que les<br />

plus importantes initiatives de réinsertion des migrants de retour (Diatta &<br />

Mbow 1999; Mbaye A 2000). C’est ainsi que la SONAGA-SONABANQUE (Société<br />

nationale de garantie) puis la Caisse nationale du Crédit agricole du Sénégal<br />

(CNCAS) ont eu à gérer, en relation avec des institutions françaises comme l’Office<br />

nationale des migrations (ONI) devenu l’Office des migrations internationales<br />

(OMI), la Caisse française de développement (CFD), le Fonds d’Action sociale, la<br />

Caisse centrale de coopération économique (CCCE), les crédits destinés à la<br />

réinsertion des migrants candidats volontaires au retour.<br />

d) La coopération internationale ou les partenaires au développement<br />

À l’initiative de partenaires au développement comme les ONG basées à Dakar ou<br />

les institutions internationales, de nombreux programmes axés autour du<br />

renforcement des capacités des populations locales ont été conduits. Ceux-ci visent<br />

en particulier les actions tendant à limiter la propension des jeunes à migrer.<br />

41


Parmi les programmes les plus en vue, on retiendra :<br />

- le Programme MIDA (Migration pour le Développement en Afrique) qui est géré<br />

par l’Organisation internationale pour les Migrations est une ligne de crédit ouverte<br />

aux associations de migrants sénégalais d’Italie qui ambitionnent de contribuer, par<br />

le biais de projets locaux, au développement de leurs régions d’origine sur la base<br />

du savoir-faire acquis par la diaspora (Fall 2007).<br />

L’OIM est aussi un maillon incontournable du projet TOKTEN (voir plus haut).<br />

- la Coopération suisse mène de nombreuses actions dans le domaine du<br />

développement rural par le biais d’un soutien aux associations de producteurs.<br />

e) Les associations de migrants<br />

L’implication plus grande des migrants dans la construction des terroirs d’origine<br />

constitue une nouvelle donne dans la géographie de la coopération internationale<br />

tournée vers le développement durable. (Sarr & ali., 2006)<br />

Les exemples de contribution d’associations de migrants à l’équipement et/ou au<br />

développement des terroirs d’origine font légion mais on en retiendra quatre<br />

exemples qui sont expressifs des différences d’âge et de nature des formes de<br />

mobilisation communautaires:<br />

1. Dans le Nguénar, le recensement effectué aux alentours de la ville de Ouro Sogui<br />

indique que les premières infrastructures communautaires réalisées dans le cadre des<br />

associations de migrants internationaux datent de trente ans. Mais, contrairement à la<br />

dynamique nouvelle qui consiste à soutenir ou à encourager des activités productives dans<br />

un espace de concertation élargi et renforcé, les premiers investissements des migrants<br />

internationaux étaient essentiellement d’ordre symbolique : construction de mosquées ou<br />

du mur de clôture du cimetière villageois, appui à l’organisation de chants religieux<br />

annuels, etc.<br />

Sur le plan organisationnel, une innovation importante réside dans le fait que les migrants<br />

ne se substituent plus aux populations locales dans le choix des projets de développement.<br />

Cette dynamique a donné naissance à la création, dans les zones de départ, de branches<br />

locales des associations mises sur pied dans les pays d’accueil. La conjugaison des efforts<br />

et la concertation au sein d’une communauté éclatée entre des territoires distants mais<br />

liés par des flux de toutes natures (Rouse 1992 ; Riccio 2001) confèrent aux associations<br />

transnationales une dimension nouvelle dans la commune volonté de construire leur espace<br />

de référence ou lieu de convergence et de pallier l’absence d’État.<br />

Le souci de mettre en place des structures capables de répondre aux exigences des<br />

partenaires au développement constitue le principal vecteur de la restructuration du<br />

modèle associatif. Fondées sur le contexte multipartenarial d’aide au développement et<br />

les avancées de la décentralisation, deux évolutions significatives se sont dessinées au sein<br />

des associations de migrants :<br />

- l’élargissement de l’aire de recrutement des membres qui se traduit par le passage<br />

des associations villageoises aux associations intervillageoises et, plus récemment,<br />

à la constitution de fédérations regroupant plusieurs associations ;<br />

- le rapprochement avec les ONG et les institutions publiques du pays d’accueil.<br />

Dans sa forme actuelle, la structuration du mouvement associatif tourné vers le<br />

développement local peut être schématiquement décrite comme suit :<br />

- chaque village dispose d’une association–mère qui fédère les initiatives locales.<br />

Celle-ci fonctionne comme une superstructure regroupant toutes les formations<br />

associatives d’un village à l’image de l’ADS (Association pour le Développement de<br />

42


Sédo) qui regroupe les garçons organisés en ASC (associations sportives et<br />

culturelles), les Groupements féminins et les GIE (groupements d’intérêt<br />

économique) et d’autres organisations comme les dahira, les groupes d’âge, etc. ;<br />

- l’association villageoise ou association-mère est le répondant de l’organe de<br />

coordination des associations qui regroupent les migrants internationaux dans leurs<br />

pays d’accueil respectifs, à l’image de l’ARSRI (Association des ressortissants de<br />

Sédo résidant en Italie) ou de l’ARSRF (Association des ressortissants de Sédo<br />

résidant en France).<br />

Le dédoublement des structures associatives entre les deux pôles de la migration<br />

s’accompagne d’une répartition des rôles : les migrants installés dans un ou plusieurs pays<br />

réunissent les moyens matériels et financiers tandis que les populations restées au village<br />

apportent leur connaissance du milieu et leur force de travail qui est rémunérée à la<br />

hauteur des tâches dans l’exécution des projets collectifs. Le processus de prise de<br />

décision en matière de réalisations villageoises résulte d’un débat de plus en plus<br />

démocratique :<br />

- l’assemblée générale de l’association regroupant les différentes formations au<br />

niveau villageois entérine les projets portés à la connaissance des populations par<br />

les migrants ;<br />

- le président de l’association villageoise rapporte les délibérations de l’assemblée à<br />

la connaissance du responsable moral de l’association des migrants internationaux<br />

qui se charge de trouver les moyens nécessaires à la concrétisation du projet ;<br />

- une fois les moyens matériels réunis — avec ou sans l’aide des partenaires au<br />

développement — les populations restées au village se mobilisent pour l’exécution<br />

des travaux en apportant bénévolement leur force physique.<br />

2. Dans la région du Ndiambour, l’association Self Help And Dimbali Louga<br />

regroupe des migrants internationaux qui ont pour objectifs :<br />

- d’aider les structures sanitaires de la région en matériel médical, en<br />

médicaments et en équipement médical ;<br />

- de tisser des partenariats avec les communes ou vivent les immigrés ;<br />

- d’initier des projets de développement (agriculture, construction<br />

d’infrastructures de base, écoles, postes de santé, adduction d’eau, etc.)<br />

3. Regroupement de disciples éparpillés aux quatre coins de la planète, le Dahira<br />

Matlaboul Fawzeyni a mobilisé six milliards de francs CFA pour la construction de<br />

l’hôpital de Touba, la capitale de la confrérie soufie des mourides. On retiendra<br />

que les contributions des migrants à l’équipement de la ville sainte sont à la base<br />

de l’indépendance de la confrérie par rapport au pouvoir politique sénégalais.<br />

4. Par son implication de plus en plus grande dans la prise en charge du<br />

développement des villages d’origine, la diaspora soninké est devenue, à la faveur<br />

d’une redéfinition des liens avec le pays d’origine, un acteur incontournable de la<br />

société civile sénégalaise. En effet, l’entrée en scène des nouveaux responsables<br />

introduit une rupture dans la définition des liens avec le pays hôte et le pays<br />

d’origine. Elle marque également le début d’une démocratisation des organisations<br />

de migrants dont les signes les plus marquants sont la remise en cause du système<br />

des castes et la prééminence des aînés sur les cadets.<br />

La conjugaison des efforts et la concertation au sein d’une communauté éclatée<br />

entre des territoires distants mais liés par des flux de toutes natures (Rouse 1992 ;<br />

43


Riccio 2001) confère aux associations transnationales une dimension nouvelle dans<br />

la commune volonté de construire leur espace de référence ou lieu de convergence<br />

et de palier l’absence d’État.<br />

Au début des années quatre-vingt dix, plus de 400 associations de ressortissants de<br />

vallée du fleuve Sénégal étaient repérées sur le territoire français (Daum 1993).<br />

Loin de s’estomper, la dynamique associative s’est renforcée à la faveur d’une<br />

capitalisation de l’expérience acquise. Deux des mutations les plus significatives du<br />

mouvement associatif dans la vallée méritent d’être notées :<br />

- l’élargissement de l’aire de recrutement des membres des<br />

organisations avec le passage de l’association villageoise à<br />

l’association intervillageoise puis à la fédération ou réseau<br />

d’associations ;<br />

- l’ouverture envers les ONG et les institutions publiques du pays<br />

d’accueil.<br />

Cependant, les ressources et potentialités de la diaspora demeurent encore peu<br />

valorisées par les pays d’origine du fait de multiples contraintes parmi les quelles:<br />

- la réelle méconnaissance des caractéristiques sociogéographiques,<br />

socioprofessionnelles, socioéconomiques, etc. des migrants internationaux;<br />

- l’absence de complémentarité et de coordination des efforts des<br />

associations des ressortissants et des membres de confréries dans les pays<br />

d’accueil ;<br />

- le manque d’informations sur les structures, les procédures et les<br />

opportunités d’affaires.<br />

Quelle que soit 1'admiration que l'on peut avoir pour les associations de migrants,<br />

on ne doit pas perdre de vue qu'elles dépendent fortement de 1'emigration. Or le<br />

durcissement des politiques d'émigration dans les pays d'accueil et l'avènement<br />

d'une seconde génération qui ne doit presque rien au village auront, très<br />

certainement, un effet a long terme sur le dynamisme des caisses villageoises.<br />

f. Les ONG et les associations<br />

- L'Association pour le Codéveloppement (ASCODE) est une organisation créée en<br />

2002 pour servir de cadre de réflexion et d'action en vue de mobiliser l'effort de ses<br />

membres pour le développement du Sénégal. ASCODE est née pour apporter son<br />

appui aux populations sénégalaises tout en promouvant un effort de<br />

développement impliquant à la base, les émigrés sénégalais.<br />

L'association entend soutenir les efforts des pouvoirs publics en matière de<br />

développement rural et social notamment dans les domaines de la santé, de<br />

l'éducation, de la formation, de la culture, de l'environnement et du<br />

développement rural.<br />

44


- La Fédération des Mourides de France ou Jamiatou Tahouni Alla Taha Tilhi<br />

Wa Rassolihi. Elle a vu le jour en 1988, sur recommandation de Serigne Mourtada,<br />

fils cadet de Ahmadou BAMBA. Elle a pour mission de regrouper tous les disciples<br />

autour des enseignements du fondateur de la Mouridiya. La Jamia regroupe tous les<br />

dahira mouride de France et se fixe comme objectif de leur apporter le soutien<br />

nécessaire au plan religieux (éducation, instruction), social, économique et<br />

culturel.<br />

- Thilogne Association Développement impulse des actions de solidarité à une<br />

échelle résolument transnationale. Outre Thilogne qui est le village sénégalais<br />

d’origine, les « sections » de cette structure fédérative sont implantées en Afrique<br />

(à Dakar et au Gabon), en Europe (en France et en Italie), en Amérique du Nord<br />

(New York), et tentent de concourir au bien être des migrants, et plus encore du<br />

village et de la région d’origine. Les communautés d’émigrés ne sont plus<br />

aujourd’hui isolées mais dialoguent et s’entraident par-dessus les frontières. Elles<br />

ne se contentent plus de pratiquer une solidarité à double sens, entre le pays<br />

d’origine et un pays d’accueil. Leurs activités économiques et culturelles, leurs<br />

actions de solidarité sont faites d’allers-retours permanents, de croisements et<br />

d’interactions entre les diverses communautés.<br />

- Association de Liaison pour le Développement d'Agnam (ALDA) regroupe 12<br />

villages de la communauté rurale d’Agnam qui est située dans la Moyenne vallée du<br />

Sénégal. A l’image de tous les migrants de la vallée du fleuve, la diaspora a créé<br />

des sections sur plusieurs continents initiant un fonctionnement transnational dont<br />

les objectifs essentiels sont l'amélioration des conditions de vie à et le maintien du<br />

lien avec la communauté d'origine.<br />

g. Les centres et institutions de recherche<br />

- UR 013 de l’Institut de recherche pour le développement développe un<br />

programme de recherche axé sur la connaissance du fait migratoire ;<br />

- le REMIGRAF-IFAN est une structure de recherche, d’accueil et d’orientation<br />

de chercheurs sénégalais et étrangers qui travaillent sur différents aspects de la<br />

migration internationale des Sénégalais.<br />

- MAFE-PICRI ou Programme migration Afrique-Europe, Partenariat Institutions-<br />

Citoyens pour la Recherche et l'Innovation, un instrument mis en oeuvre dans le<br />

cadre d'un partenariat entre l'Institut national d'étude démographique de France,<br />

l'Institut Population Développement de la Santé de la Reproduction de l'Université<br />

Cheikh Anta Diop et Enda Dialogue Politique, tente d'apporter des réponses, ou à<br />

défaut, d'ébaucher des pistes de réflexion dans la domaine d’une gestion optimale<br />

de la migration.<br />

Les programmes de retour des émigrés<br />

Concernant les retours, l’Etude de faisabilité sur la gestion, la protection et la<br />

promotion des Sénégalais de l’Extérieur réalisée par le Cabinet TDC Sénégal à la<br />

demande du Ministère des Emigrés dans les zones d’émigration a révélé des cas de<br />

retour d’émigrés en situation régulière, de retraités de la vallée du Fleuve et de<br />

jeunes encore actifs dans la zone de Touba.<br />

45


Le retour de la diaspora scientifique et/ou hautement qualifiée reste marginal.<br />

Celle-ci prétend ne pas trouver, au Sénégal, un environnement professionnel<br />

suffisamment incitatif pour favoriser le retour au pays. Les reproches formulées<br />

sont: les mauvaises conditions de travail, le faible niveau de rémunération,<br />

l’impossibilité pour leurs enfants d’accéder à un enseignement de qualité.<br />

La difficulté d’étudier l’émigration pour bien maîtriser les flux est certes réelle<br />

chez les autorités politiques. En ce qui concerne les candidats au départ, il est<br />

impossible de les dénombrer. Pour ce qui est des candidats au retour ou les<br />

émigrés installés dans un pays disposant d’une Mission Diplomatique ou Consulaire<br />

du Sénégal, l’on ne dispose que des registres d’immatriculation pour en estimer le<br />

nombre. Or tous les SE n’ont pas de réflexes d’aller se faire immatriculer.<br />

8 - Flux monétaires<br />

- un transfert de fonds plus systématique<br />

Si une bonne partie des revenus du migrant est affectée à l’entretien des familles<br />

restées au Sénégal (Quiminal 1990 ; Parrot 1993), le migrant désormais préoccupé<br />

par le prestige lié à la propriété immobilière (Salem 1983 ; Ma Mung 1996) s’oriente<br />

de plus en plus vers l’amélioration qualitative de son habitat : téléphone, eau,<br />

électricité, mobiliers, etc. La perte de biens enregistrée par certains migrants lors<br />

d’expulsions inattendues pousse les Sénégalais à envisager avec les banques de leur<br />

pays d’origine, des systèmes de transfert de fonds plus sûrs à l’image de Kara<br />

International (Tall 1995) mais une bonne partie des envois emprunte les circuits<br />

parallèles qui sont l’expression du dynamisme et l’ingéniosité des migrants (Dieng<br />

1999).<br />

Le faible niveau d’instruction et/ou la situation de migrants irréguliers que la<br />

plupart d’entre eux ont connue au cours de l’expérience migratoire ont conduit les<br />

Modou- Modou à mettre en place, un « système bancaire » qui n’a rien à envier<br />

aux systèmes modernes. Où qu’il se trouve dans le monde, le migrant peut, dans de<br />

brefs délais, envoyer à sa famille un mandat permettant de faire face aux dépenses<br />

quotidiennes ou exceptionnelles (décès, baptême, mariage, etc.).<br />

Dans le Nord de l’Italie, le plus connu des “ banquiers d’occasion ” appartient à<br />

une grande famille maraboutique. Sa position sociale constitue certes un gage de<br />

confiance mais des migrants « ordinaires » accomplissent cette tâche avec une<br />

égale dextérité.<br />

Le schéma est presque toujours le même: il suffit au mandataire (X) de déposer<br />

l’argent chez le « banquier » de son choix (Y). Y consigne la somme sur un carnet<br />

et remet à X un numéro de code. Pendant que Y communique la transaction, au<br />

téléphone, à son représentant au Sénégal, X en fait autant avec sa famille.<br />

Nos investigations, dans la seule région de Dakar, nous ont permis d’identifier<br />

quatorze points de retrait d’argent : six sont tenus par des commerçants opérant<br />

sur des marchés populaires, cinq sont logés dans des bureaux, trois ont élu domicile<br />

dans des maisons. La consultation du carnet des transactions réalisées par le<br />

marabout cité plus haut nous éclaire sur le volume des flux financiers empruntant<br />

les circuits informels. Pour le seul mois de décembre 1996, le correspondant dudit<br />

marabout, un maître d’école coranique, a distribué la somme de 1 132 000 francs<br />

CFA qui ont rapporté à son mandataire 72 000 F CFA.<br />

46


Par leur diligence, les systèmes informels pallient les insuffisances des circuits<br />

officiels de transfert d’argent en l’occurrence celui de La Poste qui a pendant<br />

longtemps été confrontée à des problèmes de trésorerie consécutifs aux retards<br />

notés dans les compensations (Le Soleil 27-28/1/90).<br />

- Diversité des formes de transfert et volume des remises<br />

Les mouvements migratoires internationaux se traduisent en retour par des flux de<br />

transferts monétaires. On estime à plus de 100 milliards de dollars US les flux<br />

annuels de transferts financiers des travailleurs migrants résidant dans les pays<br />

industrialisés vers les pays en développement (World Bank, 2003). Selon le Fonds<br />

monétaire international (FMI), près de 60 milliards de Fcfa (92,5millions de dollars<br />

US) ont été rapatriés par les travailleurs sénégalais résidant à l’étranger en 1997<br />

(Tall, 2002) et 242 milliards en 2003.<br />

Les transferts financiers qui empruntent les canaux officiels sont évalués à plus de<br />

300 milliards de francs CFA et représenteraient 15 à 65% du revenu du migrant et,<br />

selon les zones, 30 à 80 % du budget des familles restées au Sénégal.<br />

Plusieurs études s’accordent à dire que les estimations faites à partir du système<br />

bancaire international sous-évaluent considérablement l’ampleur de ces<br />

mouvements financiers puisqu’une part importante des envois de fonds des émigrés<br />

emprunte encore des circuits informels variés et ingénieux.<br />

Dans bien des cas le migrant transporte l’argent lui-même lors de sa visite ou de<br />

son retour ou le confie à une personne de son entourage. Le «dépôt téléphonique»<br />

reste une des méthodes les plus utilisées.<br />

Le recours aux systèmes informels empêche de mesurer avec exactitude le volume<br />

de flux financiers injectés au Sénégal par les migrants internationaux. Mais, en<br />

dépit de la difficulté à mesurer les transferts informels, il est incontestable que<br />

l’ensemble des transferts effectués par les migrants constitue une substantielle<br />

source de devises et une manne financière importante pour les communautés<br />

d’origine.<br />

Dépense annuelle des ménages %<br />

moins de 60 000 7,2<br />

60 - 100 000 28<br />

100 - 150 000 32<br />

150 - 225 000 21,6<br />

225 - 350 000 8,4<br />

350 - 600 000 2,2<br />

600 - 1 500 000 0,5<br />

1500000 et plus 0,1<br />

Esam 2004<br />

A côté des transferts financiers, les migrations sont aussi à l’origine de<br />

l’introduction de biens matériels et de savoir-faire dans es pays d’origine. C’est<br />

aussi un moyen saisi par la diaspora pour contribuer au développement de<br />

l’économie.<br />

En effet, les opportunités offertes par la migration ont conduit à s’interroger sur<br />

des questions essentielles mais spécifiques. C’est ainsi que Serigne Mansour Tall<br />

(2001) pose la question de savoir : comment les membres de la confrérie religieuse<br />

47


des Mourides s’appuient sur leur réseau de solidarité pour transférer les revenus de<br />

la migration internationale en vue du financement d’activités productives ?<br />

Dans le sillage des « banquiers d’occasion », les circuits formels de transfert rapide<br />

de fonds se sont multipliés notamment dans les régions à fort taux d’émigration. Il<br />

en résulte que la multiplication des guichets Western Union, Money Gram, Money<br />

Express, etc. est devenue au fil des années un bon indicateur du penchant<br />

migratoire des Sénégalais.<br />

- Femmes et argent de la migration<br />

Les travaux consacrés à l’argent de la migration ont davantage mis l’accent sur<br />

l’importance croissante de la manne financière injectée par la migration au<br />

Sénégal et les systèmes de transfert formels et informels (Sanders & Barro 2000 ;<br />

Jettinger 2005, Tall 2004) mais aussi sur la contribution des mandats à l’entretien<br />

des familles restées au pays.<br />

L’une des conclusions majeures des premiers travaux sur les remises d’argent est<br />

que celles–ci sont essentiellement orientées vers des secteurs non productifs<br />

comme la consommation des ménages et ne contribuent nullement au<br />

développement des zones des destination. Si la propension des migrants à subvenir<br />

aux besoins vitaux de leurs familles fait que celles-ci supportent mieux le poids de<br />

la crise économique que les familles qui ne comptent pas de migrants, des réserves<br />

ont souvent été émises sur la dépendance trop grande des bassins migratoires vis-àvis<br />

des transferts financiers des migrants (Daum 1993; Fall 2005 ; Quiminal 1994)<br />

Les recherches ont cependant rarement mis l’accent sur les destinataires des<br />

mandats c’est-à-dire de l’argent envoyé à la famille par le migrant ?<br />

Elles n’en soulignent pas moins la familiarisation des femmes avec les institutions<br />

financières comme les sociétés de transfert rapide d’argent, les mutuelles<br />

d’épargne et de crédit.<br />

Sans établir de façon précise l’usage que les femmes font de l’argent reçu, des<br />

observations empiriques ont permis de relever que les transferts leur permettent<br />

de participer aux tontines et au système de dons et contre-dons lors des<br />

cérémonies familiales. Enviées et/ou victimes de la jalousie de la belle famille en<br />

particulier des belles-sœurs, l’épouse de migrant doit agir discrètement voire<br />

accepter de partager les sommes reçues avec la famille voire les voisins (Fall<br />

2004).<br />

Plus récemment, des recherches de bonne facture ont tenté de relever les<br />

possibilités offertes aux migrants de contribuer au développement national par le<br />

biais d’investissements dans des secteurs productifs comme la construction<br />

immobilière (Tall 2004, Riccio 2004, Barro 2004).<br />

9 –Relever le défi migratoire<br />

L’émigration constitue un défi dont les autorités sénégalaises semblent avoir saisi<br />

la pleine mesure. C’est dans cet esprit, qu’au plan gouvernemental et associatif<br />

mais aussi au sein du secteur privé, de nombreuses initiatives ont été prises dans le<br />

sens de tirer profit des retombées de la migration (Ndione & Broekhuis 2006).<br />

Les documents politiques s’articulent autour de la gestion des flux, la protection<br />

sociale juridique et sanitaire des émigrés, la promotion des Sénégalais de<br />

l’extérieur par un appui institutionnel tourné vers la protection et la promotion<br />

des Sénégalais de l’extérieur.<br />

48


Le plan d’opérationnalisation qui est annexé à la lettre de politique générale vise<br />

des objectifs spécifiques d’information, de sensibilisation, d’écoute et de<br />

communication. Ces objectifs se sont traduis par d’importantes actions au profit<br />

des Sénégalais de la diaspora.<br />

Cependant, les problèmes de gestion de la migration internationale s’analysent<br />

essentiellement à travers les avatars de la mesure et /ou de la gestion des flux<br />

migratoires, la protection des migrants dans leur pays d’accueil et les contraintes<br />

liées à leur promotion économique.<br />

Il est communément admis qu’une gestion harmonieuse de la migration doit se<br />

fonder sur un diagnostic susceptible d’identifier un programme d’appui<br />

institutionnel ou accompagnement des migrants par l’Etat à partir d’une politique<br />

dont l’objectif est la protection et la promotion des migrants.<br />

Accords politiques en matière de migration<br />

Au niveau bilatéral, le Sénégal a signé des accords avec des pays comme:<br />

La France : en raison des relations privilégiées qui existent entre le Sénégal et la<br />

France, divers accords sont signés entre ces deux pays. A cet égard, on peut citer,<br />

entre autres, la convention fiscale visant à éviter la double imposition de<br />

revenus et une convention relative à la circulation et au séjour des personnes. Il ne<br />

faut pas non plus oublier la convention de sécurité sociale qui apparaît aujourd’hui<br />

comme le dispositif juridique le plus global signé entre le Sénégal et un pays<br />

d’accueil de nos compatriotes expatriés.<br />

9.1- La politique sénégalaise de gestion de la migration<br />

La problématique de l’émigration concerne plusieurs centaines de milliers de<br />

Sénégalais installés depuis longtemps à l’étranger et confrontés à de<br />

nombreuses difficultés dans leurs relations avec leur pays d’origine (situation<br />

administrative, familiale, opportunités d’affaires…) ou avec leur pays d’accueil<br />

(conditions de séjour, lois et règlements en vigueur, regroupement familial …).<br />

La politique définie par l’Etat sénégalais ambitionne de prendre en compte le<br />

phénomène de l’émigration dans ses composantes essentielle: le départ, le<br />

séjour à l’extérieur et le retour volontaire ou forcé.<br />

Dans cette perspective, plusieurs projets ou programmes ont été initiés par le<br />

Sénégal soit de façon autonome soit dans le cadre d’un partenariat bilatéral au<br />

multilatéral.<br />

Ces actions constituent les signes de solidarité et d'entraide cimentées autour d'une<br />

perception de la zone d'origine comme entité transcendant les appartenances<br />

individuelles et familiales. Elles s’articulent autour du concept de "développement<br />

intégré" des localités de départ pris en charge par les associations de migrants.<br />

Cette forme de solidarité collective impulse une réelle dynamique de changement<br />

social et de transformation de l’espace local (Ndione et Lombard, 2004).<br />

49


Une fraction importante des transferts de fonds émigrés est susceptible d’être<br />

affectée à des investissements productifs, notamment par la création de microprojets<br />

générateurs d’emplois directs.<br />

Tout le monde s’accorde cependant à reconnaître que les envois de fonds<br />

consacrés aux investissements économiquement productifs sont faibles, l’entretien<br />

de la famille et les investissements communautaires mobilisant l’essentiel de<br />

l’épargne des émigrés. Pour inverser cette tendance, plusieurs stratégies destiner à<br />

orienter l’épargne des émigrés vers des activités génératrices de revenus ont été<br />

initiées au Sénégal.<br />

A côté de la sensibilisation des candidats potentiels à la l’émigration et la lutte<br />

contre les réseaux mafieux, le gouvernement « encourage le retour des émigrés et<br />

leur insertion économique ». Les recettes destinées à stimuler les migrants sont :<br />

les avantages fiscaux sur l’investissement, l’octroi de crédits à faible taux<br />

d’intérêt, les programmes TOKTEN et REVA et la participation des migrants aux<br />

scrutins nationaux.<br />

Dans l’optique d’une bonne gestion de la migration, le gouvernement sénégalais a<br />

pris part à plusieurs de conférences et négociations organisées par des structures<br />

sous-régionales comme l’UEMOA et la CEDEAO.<br />

La vision de la CEDEAO en matière de migration est de « favoriser la libre<br />

circulation des personnes, notamment la migration de main-d’œuvre ».<br />

Le Sénégal a signé des accords destinés à promouvoir la circulation des<br />

compétences : Contrat de Coopération Technique avec Djibouti, accords avec la<br />

France relatif à la protection sociale des travailleurs migrants (Ammassari 2004),<br />

Convention de 1990 sur la protection des droits des travailleurs migrants et des<br />

membres de leurs familles qui est entrée en vigueur en 2003 (Ammassari 2004).<br />

Pour répondre aux problèmes et défis soulevés par les questions de migration<br />

internationale et de développement, plusieurs initiatives sont envisagées au<br />

Sénégal tant à l’échelle ouest africaine que mondiale.<br />

Gestion des flux migratoires : débats politiques et projets spécifiques<br />

La gestion des flux migratoires a fait l’objet de plusieurs discussions entre les États<br />

ouest africains mais aussi entre les pays africains et les pays du nord.<br />

1. Conférence ministérielle interrégionale sur la participation des migrants au<br />

développement de leur pays d’origine. Le Sénégal a abrité en 2000, sous l’égide de<br />

l’Organisation Internationale pour les Migrations, une conférence ministérielle<br />

interrégionale sur la participation des migrants au développement de leur pays<br />

d’origine durant laquelle les questions liées à la gestion des flux migratoires ont<br />

été longuement débattues. A l’issue de cette rencontre les gouvernements des pays<br />

ouest-africains se sont engagés à « Favoriser, conformément aux conditions et aux<br />

besoins de chaque pays, l’octroi d’opportunités d’entrée au bénéfice des<br />

populations désireuses d’émigrer, en vue de stabiliser les flux migratoires et<br />

d’assurer que ces mouvements soient ordonnés ». Ils se sont aussi engagés à «<br />

Encourager l’harmonisation, la coordination et l’intégration des politiques<br />

migratoires au niveau de la région ouest-africaine, dans le but de renforcer la<br />

50


coopération en matière de migration et de développement avec les pays de l’Union<br />

européenne et de l’Amérique du nord dans un cadre cohérent et global ».<br />

Durant la même année, s’est tenue à Cotonou, le 23 juin, la Conférence des pays<br />

ACP qui ont signé une série d’accords avec l’UE. L’article 13 de ces accords stipule<br />

que chaque État ACP accepte de reprendre ses ressortissants en situation illégale<br />

dans les pays de l’UE et d’assurer leur réadmission sans contrepartie.<br />

2. C’est en 2001 qu’a été organisé à Dakar, par le Programme International sur la<br />

Politique des Migrations (PIM) et l’Organisation Internationale pour les Migrations<br />

(OIM), le séminaire international sur la Politique des Migrations en Afrique de<br />

l’Ouest. Ce séminaire constitue un premier pas dans la mise en oeuvre de la<br />

Déclaration de Dakar et des Propositions de suivi de la Déclaration de Dakar de<br />

2000 en particulier celles relatives au renforcement des capacités des États ouest<br />

africains en matière de politique migratoire et de gestion des migrations, de<br />

dialogue et de coopération inter-étatiques, de dynamiques migratoires et de<br />

déplacements de populations dans la région. La réunion a été centrée sur des<br />

thèmes relatifs aux migrations internationales, aux flux de réfugiés et aux<br />

personnes déplacées vers, au départ ou traversant l’Afrique de l’ouest. Au vu des<br />

expériences échangées, il a été recommandé que les États membres de la CEDEAO<br />

puissent légiférer en vue de la mise en place d'une politique appropriée en matière<br />

de migration, en tenant compte des avis des migrants, des réfugiés et des<br />

personnes déplacées ; qu’ils puissent engager, avec l’aide et l’appui de la CEDEAO,<br />

des programmes de formation à tous les niveaux.<br />

3. La CEDEAO et de l’OIM ont organisé, à Dakar, du 30 septembre au 4 octobre<br />

2002, un atelier sur les « Migrations Internationales en Afrique de l’Ouest :<br />

Concepts, Collecte et Valorisation des Données, Législations ». Les objectifs<br />

spécifiques poursuivis par cet atelier était l’adoption d’une terminologie commune<br />

en matière de migration, la normalisation des processus de collecte, la formulation<br />

d’un cadre législatif en matière de migration conforme au Protocole de la CEDEAO<br />

sur la Libre Circulation des Personnes et devant servir de base à la poursuite du<br />

processus de consultation régional et l’élaboration d’outils conceptuels,<br />

statistiques et d’informations pour l’amélioration de la gestion des migrations<br />

internationales.<br />

A l’issue des discussions, les recommandations suivantes ont été formulées :<br />

- Procéder à un inventaire des législations dans tous les États membres de la<br />

CEDEAO;<br />

- Faire l’état des lieux et une analyse comparative des textes et de leur<br />

application aux niveaux national et régional en matière législative ;<br />

- Dresser l’inventaire des données et une étude comparative des statistiques<br />

produites en matière de collecte de données ;<br />

- Organiser un séminaire de restitution sur la base des études précédentes ;<br />

- Adopter un vocabulaire commun sur la base d’un lexique ;<br />

- Définir les catégories législatives et statistiques nécessaires pour la collecte des<br />

données ;<br />

- Identifier et appuyer un point focal pour les questions liées aux migrations dans<br />

la sous région.<br />

4. Projet Migration internationale de main-d’oeuvre pour le développement et<br />

l’intégration en Afrique<br />

51


L’Organisation internationale du travail a mis en oeuvre un projet sous régional<br />

intitulé « Migration international de main-d’oeuvre pour le développement et<br />

l’intégration en Afrique » avec le soutien financier de l’Union européenne.<br />

Ce projet constitue le volet ouest africain d’un projet plus large ciblant trois sous<br />

régions du continent : le Maghreb, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est.<br />

Ces espaces sont traversés par des initiatives d’intégration régionale (Union du<br />

Maghreb Arabe, Processus Euro-Med, Communauté Économique des États de<br />

l’Afrique de l’Ouest, Communauté Économique de l’Afrique de l’Est).<br />

Le but du projet était d’assister les pays africains et les partenaires sociaux à<br />

définir, élaborer et mettre en place une administration et une réglementation<br />

efficace dans le cadre de la migration de main-d’œuvre par le biais d’une politique<br />

basée sur des normes encadrée par l’emploi, le marché du travail, les conditions<br />

sociales et économiques et les besoins et définie par le dialogue social et destinée<br />

à renforcer le travail décent et la protection sociale. Il s’agissait aussi et surtout<br />

d’élaborer et de mettre en oeuvre des mesures visant l’amélioration des<br />

contributions des travailleurs migrants pour le développement et l’intégration<br />

économique et social de la région plus particulièrement dans le contexte de<br />

l’initiative EUROMED, le NEPAD et les initiatives sous régionales de la CEDEAO et de<br />

la CEAE. Dans sa composante liée au renforcement des capacités, le projet<br />

comprend le dialogue social, l’assistance technique et la conduite d’études<br />

notamment sur les statistiques et sur la législation en matière de migration.<br />

Malheureusement, ce projet a été gelé, faute de financement.<br />

L’enseignement général qu’on peut tirer de ces débats, c’est qu’il y a souvent une<br />

absence de dispositions pratiques pour traduire dans la réalité les engagements et<br />

les accords signés notamment par les pays de départ. Par ailleurs, les candidats à<br />

l’émigration internationale semblent lancer un défi aux États quant aux obstacles<br />

et barrières lors du franchissement des frontières des pays d’accueil.<br />

Un signal fort est la détermination des individus à rendre concret, par tous les<br />

moyens, leur désir de partir, de circuler d’un pays à un autre. Pour beaucoup de<br />

jeunes africains subsahariens, « l’enfer est chez soi et le paradis ailleurs ». Le<br />

message fort envoyé aux gouvernements des pays d’origine et d’accueil est qu’ils<br />

se lanceront toujours désespérément dans des stratégies de contournement des<br />

politiques migratoires et de franchissement des frontières.<br />

L’échec des politiques de retour/réinsertion des migrants sénégalais<br />

Pour tirer le maximum de profit du séjour des Sénégalais à l’étranger notamment<br />

dans l’optique de leur contribution au développement, les pouvoirs publics ont mis<br />

en place diverses institutions et développé des stratégies destinées à encourager le<br />

retour et la réinsertion des migrants 34 .<br />

La réinsertion dans le pays d’origine constitue pour beaucoup de migrants une<br />

étape importante du processus migratoire international. Il s’inscrit souvent dans le<br />

projet initial du migrant et est étroitement lié à une réinstallation réussie, ellemême<br />

subordonnée à une réinsertion économique productive durable. Il s’agit pour<br />

l’individu de mettre en oeuvre un projet économique rentable qui lui permette, lui<br />

et sa famille, d’assurer leur bien-être, afin qu’à l’avenir, il (ou sa famille) ne<br />

34 Mbaye A., 2000, Soubassements théoriques de la décision d'émigrer et incidence de la migration<br />

de retour sur le développement du pays d'origine : le cas du Sénégal. UCAD de Dakar: Faculté des<br />

sciences économiques et de gestion [Thèse de doctorat d’État ès Sciences économiques]<br />

52


essente plus la nécessité d’émigrer à nouveau. Le retour peut être autonome, à<br />

l’initiative du migrant et sans aucun soutien des bailleurs de fonds ou être opéré<br />

dans le cadre de programmes d’aide, développés soit par les organisations<br />

internationales, soit par le biais d’accords bilatéraux établis entre le pays d’accueil<br />

et le pays d’origine. Dans les deux cas, la mise en oeuvre du projet détermine<br />

souvent le retour du migrant dans son pays d’origine.<br />

Mise en place d’institutions publiques de gestion, de promotion et de protection<br />

des Sénégalais de l’extérieur<br />

En 1983, un Ministère délégué auprès du Président de la République est créée pour<br />

aider, orienter et coordonner l’action de l’État en vue de faciliter la réinsertion<br />

économique et sociale des émigrés sénégalais désireux de retourner dans le pays.<br />

La création de ce ministère fait suite à la volonté de la France de mettre en oeuvre<br />

une politique de formation retour/réinsertion dans les pays d’origine des migrants<br />

établis dans l’hexagone. Une convention est signée entre les deux gouvernements,<br />

au terme de laquelle des lignes de crédits ont été mises à la disposition du Sénégal<br />

pour le financement des projets de réinsertion dans les secteurs d’activités<br />

économiques.<br />

Les lignes de crédit mises à la disposition du Sénégal par la France, en 1987 ont<br />

abouti à la création du Bureau d’Accueil, d’Orientation et de Suivi au sein du<br />

Ministère délégué auprès du Président de la République. Le BAOS sera chargé de<br />

donner aux émigrés toutes les informations utiles relatives aux conditions leur<br />

réinsertion au retour, d’assurer la mise en oeuvre et le suivi du cadre incitatif en<br />

vue d’une meilleure intégration dans les divers secteurs de production, d’appliquer<br />

la politique de promotion, de mobilisation et de transfert de l’épargne des<br />

émigrés, de faciliter le montage technique et financier des projets individuels et<br />

collectifs de réinsertion, en collaboration avec les institutions publiques et privées<br />

et les services techniques et financières compétents, d’assurer le suivi-conseil de<br />

la gestion technique des projets.<br />

Avec la suppression du Ministère délégué chargé des émigrés, un remaniement<br />

ministériel intervenu le 02 juin 1993 procédera à l’élargissement des compétences<br />

du Ministère des Affaires étrangères devenu Ministère des Affaires étrangères et<br />

des Sénégalais de l’extérieur jusqu’en 2003. A cet effet, pour disposer d’un cadre<br />

adapté capable d’assurer la nouvelle mission, sera créé la Direction des Sénégalais<br />

de l’Extérieur. Depuis 2003, un ministère spécifique est consacré aux émigrés : le<br />

Ministère des Sénégalais de l’Extérieur.<br />

Retour/réinsertion à travers les lignes de crédit de la Caisse centrale de<br />

coopération économique (CCCE) de la France<br />

La première ligne de crédit d’un montant de 150 millions de francs CFA (environ<br />

228000 euros) est accordée par la France le 23 novembre 1983 à travers la CCCE.<br />

Cette somme est déposée à la Banque nationale de développement du Sénégal<br />

(BNDS) choisie comme agence d’exécution de cette ligne de crédit. Dans ce cadre,<br />

un contrat de rétrocession est signé entre l’État du Sénégal et la BNDS. Ce contrat<br />

définit les modalités pratiques d’application des termes de la convention<br />

Gouvernement du Sénégal – Caisse centrale de coopération économique (CCCE). Les<br />

conditions d’octroi de crédit se déclinent en apport personnel de 10% du prêt, une<br />

53


durée d’amortissement du prêt de 9 ans, un délai de grâce de 2 ans, un taux<br />

d’intérêt de 4%, une commission de la BNDS de 2%, une domiciliation des recettes<br />

d’exploitation du projet à la BNDS et une souscription d’assurance vie.<br />

Cette ligne de crédit n’a pu financer que 10 projets pour un montant global de<br />

147.700 francs CFA dans les secteurs dits prioritaires de l’époque : agriculture,<br />

pêche, élevage et service. Le reliquat de 3,3 millions devait être utilisé pour<br />

financer des missions d’évaluation de cette ligne de crédit.<br />

Le 27 juillet 1987, fut signée avec la CCCE une deuxième ligne de crédit d’un<br />

montant de 500 millions de francs CFA, destinée toujours à financer de nouveaux<br />

projets des émigrés régulièrement établis en France et qui souhaitent rentrer<br />

définitivement au Sénégal. Pour corriger les lacunes rencontrées dans l’exécution<br />

de la première ligne de crédit, une partie du fonds d’un montant de 12,5 millions<br />

est réservée pour le financement des études de faisabilité; 7,2 millions pour<br />

constituer un fonds de garantie ; 25,5 millions destinés à assurer le fonctionnement<br />

du BAOS ; 30 millions pour constituer un solde non affecté destiné en priorité à<br />

compléter le budget d’investissement et de fonctionnement du BAOS, 360 millions<br />

pour financer les projets présentés par les émigrés.<br />

Cette ligne de crédit a été rétrocédée dans un premier temps à la Sonaga-<br />

Sonabanque qui bénéficiait d’une certaine expérience dans le domaine de la<br />

réinsertion à travers l’opération « des maîtrisards », pour être par la suite cédée à<br />

la Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal après la restructuration du<br />

système bancaire au Sénégal. Cette deuxième ligne de crédit a permis de financer<br />

une trentaine de projets dans l’agriculture et l’embouche bovine ; l’automobile,<br />

l’entretien et le transport ; la pêche et le mareyage ; le commerce et les services.<br />

Toutefois, le remboursement des crédits accordés par la CCCE a posé d’énormes<br />

difficultés. Une évaluation de l’exécution de ces deux lignes de crédits, réalisée<br />

par un cabinet d’expert, a mis l’accent sur les difficultés nées notamment de la<br />

longueur excessive des procédures de mise en place effective des financements et<br />

de la mauvaise estimation des coûts réels des projets. Ces problèmes ont engendré<br />

l’insolvabilité de plusieurs promoteurs entraînant un très faible taux de<br />

remboursement des crédits octroyés. Sur un capital prêté de 562.754.852 FCFA,<br />

seulement 56.714.372 FCFA ont été remboursés.<br />

Beaucoup de migrants bénéficiaires de crédit se sont retrouvés dans l’impossibilité<br />

d’honorer les échéances bancaires. Certains d’entre eux sont repartis à l’aventure<br />

tandis que d’autres sont en cession d’activité faute de fonds de roulement pour<br />

faire marcher leurs entreprises.<br />

La réinsertion par la voie de crédits CCCE n’a pas eu l’effet escompté, mais a<br />

permis de souligner les vrais problèmes de la réinsertion des émigrés. Les<br />

conclusions tirées de ces expériences montrent qu’à l’avenir, les projets de<br />

réinsertions devront tenir compte de la situation familiale de l’émigré et de<br />

l’environnement socio-psychologique et culturel de l’espace de réalisation du<br />

projet.<br />

Réinsertion par la voie des aides publiques françaises<br />

Les financements par la voie des aides publiques du gouvernement français sont<br />

destinés aux immigrés détenteurs de carte de séjour qui sont soit au chômage soit<br />

54


travaillent dans des entreprises en difficulté notamment dans l’industrie de<br />

l’automobile. Les bénéficiaires de ces financements sont des volontaires au retour<br />

définitif dans leur pays d’origine. Pour être éligible à ces aides, il faut accepter de<br />

restituer sa carte de séjour avant de quitter le territoire français. Environ 600<br />

Sénégalais ont bénéficié de ce programme.<br />

Le Programme Développement Local Migration (PDLM) :<br />

Le PDLM a deux objectifs :<br />

- assurer la réinsertion des migrants revenus de France en les aidant à<br />

financer dans leur pays des microprojets économiques et en leur offrant un<br />

suivi rapproché pendant un an ;<br />

- d’autre part, participer à l’émergence de secteurs porteurs de<br />

développement local.<br />

Chaque micro-projet fait l’objet d’une étude préalable par le biais des structures<br />

d’appui locales conventionnées qui assurent ensuite leur mise en oeuvre, puis le<br />

suivi pendant une année : 20 micro-projets ont été financés au Sénégal entre 1994<br />

et 1999.<br />

Le Contrat de Réinsertion dans le Pays d’Origine (CRPO) :<br />

Le CRPO est une variante du PDLM par le fait qu’elle associe une formation avant<br />

et après retour dans le pays d’origine. Dans ce cadre, 11 Sénégalais ont bénéficié<br />

d’une formation générale et technique en France et au Sénégal pour la mise en<br />

oeuvre d’un projet de réinsertion économique. Les projets financés concernent<br />

essentiellement les secteurs du transport, du commerce alimentaire et de la<br />

restauration.<br />

Sont éligibles à ces deux programmes les immigrés en situation irrégulière en<br />

France qui acceptent volontairement de renter dans leur pays d’origine. Le<br />

montant moyen du financement d’un projet dans le cadre du PDLM ou du CRPO est<br />

de 2.250.000 FCFA.<br />

La réinsertion par la voie des ONG<br />

Certaines ONG se sont spécialisées dans l’aide au retour-réinsertion des émigrés et<br />

apportent leur concours dans la préparation des projets, la formation des<br />

promoteurs et la recherche des financements, notamment de crédits, de dons ou<br />

de subventions. On peut apprécier leurs modes d’intervention à travers les<br />

quelques exemples suivants.<br />

9.2 – La politique migratoire de la France<br />

Selon Patrick WEIL 35 , la France a une politique de l’immigration produite par son<br />

histoire et qui la singularise parmi les principaux partenaires occidentaux du<br />

Sénégal. Elle s’est certes dotée de règles précises s’agissant de l’entrée, du séjour,<br />

éventuellement du retour des immigrés qui n’ont pas été définies au hasard, mais<br />

au croisement des nécessités économiques et sociales et des principes<br />

fondamentaux de la République. Mais, aussi surprenant que cela puisse paraître,<br />

cette politique est consensuelle et ne date pas d’aujourd’hui. Elle n’a pas été<br />

définie par une classe politique qui, sous les coups de boutoir de l’extrême droite,<br />

aurait décidé subitement qu’elle ne pouvait accueillir toute la misère du monde et<br />

35 Patrick WEIL, 1991, La France et ses étrangers : l’aventure d’une politique de l’immigration<br />

1938-1991, Paris, Calmann-Lévy.<br />

55


aurait mis en place les instruments que la France attentait depuis tant d’années.<br />

Selon lui, cette politique s’est progressivement constituée à partir de la fin des<br />

années 30, autour de choix décisifs, qui seront finalement arrêtés à la Libération :<br />

- Faut-il distinguer en droit les réfugiés politiques des immigrés économiques ?<br />

- Faut-il sélectionner les immigrés sur des critères ethniques, ou au contraire<br />

refuser, au nom du principe d’égalité, toute discrimination nationale à<br />

l’entrée ?<br />

- Faut-il maintenir les immigrés dans une précarité juridique qui confère<br />

nécessairement à leur présence un caractère provisoire, ou au contraire les<br />

stabiliser pour les intégrer, et les intégrer pour les stabiliser ?<br />

Ces débats ont été tranchés, en vertu d’une éthique Républicaine.<br />

Cependant, d’après l’auteur, toutes ces recettes miracles qu’on nous présente<br />

aujourd’hui comme inédites ont été appliquées et abandonnées faut d’être<br />

adaptées.<br />

L’étude de Patrick WEIL revêt un grand apport dans la définition des politiques<br />

d’immigration. L’intérêt de son analyse est d’avoir souligné que les politiques<br />

d’immigration se définssent seulement dans les pays d’accueil mais pas dans les<br />

pays d’origine. Les pays d’accueil fixent des mesures draconiennes mais ne<br />

collaborent pas avec ceux du sud des solutions pour retenir, pour fixer cette masse<br />

qui ne trouve d’autres alternatives l’émigration. Son ouvrage bien qu’intéressante<br />

n’a pas abordé notre problème de recherche dans la mesure où dans les politique<br />

de migration manière générale seul le migrant est prise en compte.<br />

9.3- Les politiques migratoires internationales<br />

L’internationalisation des flux migratoires et l’accélération de la circulation des<br />

personnes constituent une des préoccupations majeures des États et de la<br />

communauté internationale.<br />

Sous l’effet conjugué de la crise économique devenue structurelle dans les pays de<br />

départ et de la volonté affirmée de fermeture des frontières par les pays d’accueil,<br />

la mise en place des réseaux et des systèmes migratoires s’est davantage<br />

complexifiée. Au regard de cette situation, seule une gestion méthodique et<br />

concertée des flux migratoires peu profiter aux pays d’origine, de transit et<br />

d’accueil.<br />

A cet effet, un souci d’harmonisation des méthodes et politiques à adopter a<br />

nécessité la création de cadre de concertation pour les pays de l’Afrique de<br />

l’ouest, mais également entre eux et les autres pays, notamment ceux de l’Union<br />

Européenne. Plusieurs rencontres se sont ainsi tenues à Dakar :<br />

- 2000 : Conférence ministérielle interrégionale sur la participation des<br />

migrants au développement de leur pays d’origine ;<br />

- 2001 : Séminaire International sur la Politique des Migrations en Afrique de<br />

l’Ouest<br />

- 2002 : Atelier régional sur les Migrations internationales en Afrique de<br />

l’Ouest : concepts, collectes et valorisation des données, législations<br />

A l’issue des discussions lors de cet atelier, les recommandations suivantes ont été<br />

formulées :<br />

- Procéder à un inventaire des législations dans tous les États membres de la<br />

CEDEAO ;<br />

56


- Faire l’état des lieux et une analyse comparative des textes et de leur<br />

application aux niveaux national et régional en matière législative ;<br />

- Faire l’inventaire des données et une étude comparative des statistiques<br />

produites en matière de collecte de données ;<br />

- Organiser un séminaire de restitution sur la base des études précédentes ;<br />

-Adopter un vocabulaire commun sur la base d’un lexique;<br />

- Définir les catégories législatives et statistiques nécessaires pour la collecte des<br />

données ;<br />

- Identifier et appuyer un point focal pour les questions liées aux migrations dans<br />

la sous région.<br />

Conclusion<br />

Il est donc avéré que depuis très longtemps, la migration sénégalaise en France<br />

n’est plus uniquement l’affaire des « gens de la vallée » car d’autres Sénégalais,<br />

originaires d’autres régions, d’autres ethnies et des membres d’autres confréries,<br />

etc., y sont aussi très présents. De même, leurs conditions d’entrée en France ainsi<br />

que leurs secteurs et modes d’insertion professionnelle se sont largement variés.<br />

Les commerçants et les « Gens de la Vallée » constituent les figures emblématiques<br />

de la migration sénégalaise en France et en Europe, d’une manière générale.<br />

Autrement dit, c’est avec l’arrivée des commerçants, ces anciens “aventuriers”<br />

aux longs parcours (Bredeloup 1998) ou nouveaux arrivants que les « Gens de la<br />

Vallée », les Mandjaks et Diolas de la Casamance commencèrent à partager le<br />

champ de la migration de travail des Sénégalais en France avec.<br />

Toutefois, déjà au début du XXe siècle, ces migrants peu ou pas instruits n’étaient<br />

pas les seuls Sénégalais résidant en France. Il y avait aussi les étudiants. En effet,<br />

les premiers étudiants sénégalais sont arrivés en France à partir des années 20 et<br />

précisément en 1929. Si au début et jusqu’à une période relativement récente, la<br />

recherche d’une meilleure formation et des diplômes de qualité constituait la<br />

motivation principale de ces étudiants, la donne a beaucoup évolué ces dernières<br />

décennies. Car à cette motivation estudiantine, il faut dorénavant ajouter des<br />

raisons économiques et socioculturelles pour justifier les départs des étudiants<br />

sénégalais vers la France et, surtout, de leur maintien en migration à la fin de leurs<br />

études. Comme nous l’avons déjà dit, Oumoul Khaïry Coulibaly-Tandian (2008) et<br />

Sokhna Selly Baro (2005) ont, entre autres chercheurs, analysé dans leur thèse de<br />

doctorat l’évolution de la migration des étudiants sénégalais en France. Elles<br />

montrent que, non seulement, ces départs rentrent aujourd'hui dans le cadre de la<br />

mondialisation du marché de l’emploi et de mobilisation de la main-d'œuvre<br />

originaire du Sud, mais aussi, et, surtout, comment et dans quelle mesure leur nonretour<br />

à la fin de leurs études fait qu'un grand nombre d’entre eux passe d’une<br />

catégorie de populations socialement et culturellement valorisées parce que<br />

diplômées à celle de migrants travailleurs précaires. Nombreux ont été ces<br />

dernières années, des études qui ont montré que, malgré certaines différences<br />

dans leurs caractéristiques avec leurs compatriotes peu ou pas qualifiés, ces<br />

diplômés se retrouvent souvent dans les mêmes situations qu’eux car exercent des<br />

emplois peu ou pas qualifiés rencontrent de nombreuses difficultés pour s’insérer<br />

dans leurs domaines de compétences.<br />

57


En somme, depuis l’arrivée des marins et navigateurs, à partir du XIXe siècle,<br />

jusqu’à aujourd’hui, les mouvements migratoires sénégalais vers la France ont<br />

connu des modifications importantes dans les projets initiaux des acteurs, leurs<br />

caractéristiques, profils, origines sociales, géographiques et confrériques, leur<br />

catégorie de sexe, etc. Ainsi, les migrations de travail, à l’origine tournantes et<br />

provisoires ainsi que les circulations commerciales estivales évoluent, pour certains<br />

acteurs, et tendent même vers une migration durable, les mobilités des étudiants<br />

deviennent des migrations de travail (Timéra 1997). De même, la migration<br />

d’hommes seuls laisse progressivement la place à une migration familiale et à la<br />

féminisation des mouvements migratoires. Et si depuis le début le regroupement<br />

familial constitue la principale condition d’entrée des femmes sénégalaises en<br />

France, leurs motivations se sont multipliées. Les raisons familiales se conjuguent,<br />

généralement, à d’autres que sont les études et la recherche d’un premier emploi<br />

ou d’un rendement salarial plus important. En outre, à la migration d’installation<br />

et bipolaire, il faut ajouter maintenant les circulations commerciales entre<br />

différents pays de la part de femmes qui restent domiciliées au Sénégal et qui, de<br />

ce fait, profitent des différentiels de richesse entre le Nord et le Sud sans vivre le<br />

déchirement de « l’exil ». Cela montre que les mobilités des femmes aussi<br />

témoignent des reconfigurations de plus en plus complexes et multiples.<br />

Ainsi, au fil des années, bien que nombreuses soient encore celles qui migrent en<br />

qualité de personnes à charge et/ou originaires des milieux ruraux et sont peu ou<br />

pas instruites, les citadines, instruites, migrant de façon individuelle pour travailler<br />

et/ou pour poursuivre leurs études, en qualité d’entités indépendantes occupent<br />

une part significative dans les mobilités féminines sénégalaises actuelles. Cette<br />

diversification des conditions d’entrée en migration, des caractéristiques et profils<br />

des femmes, de leurs motivations et la complexification de leurs pratiques<br />

apparaissent peu dans les travaux, mais n’en sont pas moins réelles.<br />

En nous basant sur la littérature existante, on peut constater que, quelles que<br />

soient leurs conditions de départ et d’arrivée et leurs motivations migratoires<br />

officielles, l’économique occupe une place importante dans les projets des femmes<br />

sénégalaises, surtout celles qui partent ces dernières années. De ce fait, bien que<br />

certaines continuent à rester inactives, la plupart des femmes migrantes<br />

sénégalaises exercent une activité dès leur arrivée ou après une première période<br />

d’inactivité. En outre, même si la majorité s’insère dans le salariat et exerce des<br />

activités précaires peu ou pas qualifiés, beaucoup de femmes se lancent dans<br />

l’entreprenariat et les activités indépendantes dans les secteurs comme la<br />

restauration, la coiffure, le commerce forain, etc. (Coulibaly-Tandian 2008).<br />

Ainsi, bien qu’elles aidaient, et continuent d’aider des membres de leur famille,<br />

surtout leur fils, à partir en migration, les femmes sénégalaises partent aussi pour<br />

elles-mêmes. Leur projet migratoire est, aujourd’hui, à la fois individuel et<br />

familial. De ce fait, une part importante de leurs gains sont rapatriés au Sénégal.<br />

Non seulement, elles aident leur famille restée au Sénégal à vivre ou survivre,<br />

financent entièrement ou en partie la migration de leur proche, mais aussi,<br />

investissent dans la pierre comme dans d’autres secteurs.<br />

Aussi, les travaux montrent que la migration d’installation ou les circulations<br />

commerciales qui ne nécessitent pas l’installation en France agissent diversement<br />

58


sur les rapports de genre et en fonction des catégories de femmes. Pour certaines,<br />

la mobilité, outre les ressources matérielles et immatérielles qu’elle offre, permet<br />

de renégocier les rapports sociaux de sexe ne serait-ce qu’au niveau de leur foyer.<br />

En renégociant, même de façon limitée, les rapports au sein du foyer, considéré<br />

comme le lieu, par excellence, d’«appropriation des femmes » selon Colette<br />

Guillaumin (1992), de « subordination des femmes aux hommes » d’après Christine<br />

Delphy (1998) et de « reproduction de la domination masculine » pour reprendre<br />

Bourdieu (1998), certaines femmes gagnent ainsi en autonomie et bousculent les<br />

hiérarchies statutaires entre hommes et femmes. Il en résulte que des femmes en<br />

mobilité parviennent à remplacer l’ordre social établi par un ordre social<br />

renégocié.<br />

Pour d’autres, en revanche, la vie migratoire agit peu sur les rapports de genre,<br />

voire tend à renforcer les inégalités entre les sexes.<br />

59


Bibliographie<br />

ADEPOJU A., 2001, “Foresting free movement of in West Africa: achievements, pitfalls and<br />

projects for intra-migration,” Paper presented at IUSSP Conference in Brazil, 18-24 August.<br />

ASSOULINE D & LALLAOUI M, 1996a, Un siècle d’immigration en France. De la mine au<br />

champ de bataille : de 1851 à 1918. Tome 1, Paris, Editions Syros, 135 p.<br />

ASSOULINE D. & LALLAOUI, M., 1996b, Un siècle d’immigration en France. De l’usine au<br />

maquis : deuxième période, 1919 à 1945. Tome 2, Paris, Editions Syros, 138 p.<br />

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64


ANNEXE 1<br />

Les acteurs de la migration sénégalaise<br />

a) Les organes gouvernementaux<br />

1. Ministère des Sénégalais de l’Extérieur et du Tourisme:<br />

- la Direction des Affaires sociales ;<br />

- la Direction de la Promotion de l’Habitat des Sénégalais de l’Extérieur ;<br />

- la Direction d’Appui à l’Investissement et aux Projets [Responsable : Mme Maïmouna<br />

SOW, 33 867 01 71].<br />

- le Bureau d’Accueil, d’Orientation et de Suivi des Sénégalais de l’extérieur.<br />

2. Ministère des Affaires étrangères et de l’Union africaine / Organisation internationale<br />

du Travail :<br />

- Programme TOKTEN<br />

3. Ministère de l’Emploi et des Organisations professionnelles :<br />

- la Direction de la Coopération internationale<br />

- la Caisse de Sécurité sociale.<br />

4. Ministère de l'Aménagement du Territoire, du Commerce et de la Coopération<br />

décentralisée :<br />

- la Direction de l’Assistance technique rattachée au<br />

5. Ministère de l’Economie et des Finances :<br />

- Commodity Aids<br />

6. Ministère des Infrastructures, des Transports terrestres, des Télécommunications et des<br />

Tics :<br />

- OPCE - Office des Postes et de la Caisse d'Epargne<br />

221 33 823 57 58<br />

221 33 823 62 41<br />

7. le Conseiller spécial du président de la République, l’Ambassadeur itinérant chargé<br />

des Sénégalais de l’Extérieur : Papa Saër GUEYE<br />

b) Le Réseau des Parlementaires sur les migrations, les droits humains et le<br />

développement (RP/MDHD)<br />

c) Les acteurs du secteur privé :<br />

1) le système bancaire<br />

- la BCEAO (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest)<br />

221 33 823 10 42<br />

221 33 823 93 35<br />

2) les Agences de transferts rapides:<br />

Western Union<br />

221 33 823 79 80<br />

221 33 823 20 05<br />

Money Gram,<br />

65


Money Express.<br />

- la Banque de l’Habitat du Sénégal<br />

- la Caisse nationale du Crédit agricole du Sénégal (CNCAS)<br />

221 33 822 23 00<br />

221 33 821 26 06<br />

d) La coopération internationale ou les partenaires au développement<br />

- le Programme MIDA (Migration pour le Développement en Afrique) de l’Organisation<br />

internationale pour les Migrations<br />

- la Coopération suisse<br />

- l’Agence française de développement (AFD) a été chargée par le Comité<br />

Interministériel pour la Coopération Internationale et le Développement du 19 juin<br />

2006, de mettre en œuvre un Observatoire des transferts financiers internationaux.<br />

- la Caisse centrale de coopération économique (CCCE)<br />

e. Les ONG et les associations 36<br />

- L'Association pour le Codéveloppement (ASCODE)<br />

Sicap Sacré Coeur 3 Villa n° 8897<br />

BP 10626 Dakar Liberté<br />

Tél.: (221) 33 867 23 94 Fax: (221) 33 867 23 02<br />

Email:ascode@sentoo.sn<br />

- Le Collectif des Mourides de France est la Fédération des 12 dahira Mourides de<br />

France ou Jamiatou Tahouni Alla Taha Tilhi Wa Rassolihi.<br />

Siège social : Keur Serigne Touba, Aulnay sous Bois, France<br />

- Dahira Matlaboul Fawzeyni<br />

Contact : Hopital de Touba<br />

ASSOCIATION POUR LA COOPERATION RURALE EN AFRIQUE ET EN<br />

AMERIQUE LATINE (ACRA)<br />

Coordonnateur : Dr Alberto DEL Giacco ; Sacré Coeur 3 villa N°10011 -<br />

BP 21000 Ponty Dakar<br />

Tel: 33827.64.13<br />

Fax: 33867.19.10<br />

Email : acradk@sentoo.sn<br />

AFRICA CONSULTANT INTERNATIONAL (ACI)<br />

Directrice : Lilian BEAR<br />

Sicap Baobab - BP 5270 Dakar - Fann<br />

Tel: 33825.36.37 / Fax : 33824.07.41<br />

Email : aci@enda.sn<br />

36 En France, l’officialisation des associations s’est faite pour la plupart après 1981, suite à l’abrogation des lois interdisant<br />

aux étrangers de créer leur propre association.<br />

66


AQUADEV WEST AFRICA (AWA)<br />

Coordination générale des activités de AWA en Afrique :<br />

Rue 2 X 2 Bis, point E - BP 21056 - Dakar, Sénégal<br />

Tel : 33825.28.29<br />

Fax : 33864.01.10<br />

Email : aquadev-wa@sentoo.sn<br />

OXFAM/Grande Bretagne<br />

Mermoz Pyrotechnie, villa n° 13 - BP 3476, Dakar<br />

Tel. : 33865 13 00<br />

Fax : 33824 58 98<br />

Email : warmc@oxfam.org.sn<br />

SOCIETE COOPERATIVE ETRE HUMAIN (CEU)<br />

BP 3247, Dakar<br />

Tél. : 33823 91 82<br />

Fax : 33882 03 09<br />

AFRICARE<br />

Avenue Cheikh Anta Diop, 1ére porte Mermoz - BP 2272, Dakar<br />

Tel: 33825 76 64<br />

Fax: 33825 0246<br />

CATHOLIC RELIEF SERVICES (CRS)<br />

72, Boulevard de la République - BP 11175, Dakar<br />

Tel: 33823 22 75 -33823 66 21<br />

CENTRE CANADIEN D'ETUDES ET DE COOPERATION INTERNATIONALE<br />

(CECI)<br />

Boulevard du sud, point E - BP 6112, Dakar<br />

Tel: 33825 64 14<br />

Fax: 33825 64 14<br />

CHURCH WORLD SERVICES (CWS)<br />

Point E Rue 3 bis<br />

Tel: 33825 07 61 / 824 99 21,<br />

12, rue Félix Faure<br />

Tél. : 33822 34 40<br />

Fax : 33824 99 23<br />

OXFAM A MERICA<br />

Sicap Amitié III, villa n° 4278 - BP 7200, Dakar<br />

Tél: 33869 02 99<br />

Fax: 33824 29 55<br />

ENVIRONNEMENT, DEVELOPPEMENT ET ACTION TIERS-MONDE (ENDAT.M.)<br />

Rue Kléber X Joseph Gomis, Dakar - BP : 3370<br />

67


Tél. : 33822 21 25 - 33822 42 29<br />

SECOURS CATHOLIC / CARITAS SENEGAL<br />

Km 11, route de Rufisque - BP : 439<br />

Tél. : 33834 00 20 - 33834 05 28<br />

Fax : 33834 4197 - 338238243<br />

A SSOCIATION FRANCAISE DES VOLONTAIRES DU PROGRES (AFVP)<br />

Délégué national : Karim Doumbia<br />

Villa n° 8908, sacré Coeur 3 - BP 1010 Dakar, Sénégal<br />

Tél. : 33827 40 75<br />

Fax : 33827 40 74<br />

Email : afvp@sentoo.sn<br />

Quelques associations de migrants de la vallée du Sénégal<br />

Département de PODOR :<br />

• Association des Ressortissants de Golléré et ses banlieues en Europe (ARGBE)<br />

Département de MATAM :<br />

• Association de liaison pour le développement des Agnam (ALDA)<br />

Samba Touré, Président de la section de France<br />

BP 21 - Agnam Civol - Sénégal<br />

tel : (00 221) 77 573 16 14 ou<br />

tel/fax : (00 221) 33 966 92 47<br />

• Association de développement et de solidarité des ressortissants de Dondou en<br />

France<br />

• Association internationale des ressortissants de Sédo Sébé (AIRS)<br />

• Thilogne Association de Développement (TAD), T.A.D/Bural<br />

Section de Dakar, Sénégal<br />

Secrétaire Général: Moussa Thiam<br />

• Association des Ressortissants de Kanel en France (ARKF)<br />

• Association des Ressortissants de Danthiaby en France (ARDF)<br />

Département de BAKEL<br />

• Association des Ressortissants de Ouro Himadou en France (AROF)<br />

• Comité de Rénovation de Diawara (COREDIA)<br />

• Association des Ressortissants de Tuabou en France<br />

• Association des Ressortissants du village de Sénédoubou en France<br />

g. Les centres et institutions de recherche<br />

- Unité de Recherche 013 de l’Institut de recherche pour le Développement.<br />

Responsable : Prof Rabia Bekkar-Lacoste<br />

- lRéseau d’Etude des Migrations internationales africaines (REMIGRAF). Responsable :<br />

Dr Papa Demba FALL, Email : defall@ucad.sn<br />

- Programme migration Afrique-Europe, Partenariat Institutions-Citoyens pour la<br />

Recherche et l'Innovation, partenariat entre l'Institut national d'étude démographique de<br />

France, l'Institut Population Développement de la Santé de la Reproduction de l'Université<br />

Cheikh Anta Diop (Responsable : Dr. Papa Sakho) et Enda Dialogue Politique<br />

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