Essai sur la Musique ancienne et moderne - National Library of ...

SUR LA MUSIQUE. 69$
riciens , ce ferait trop dégrader non- feulement la théorie, mais la pratique
même de la Mufique , que de fonder un fyftème quelconque fur les idées
des Fadeurs d'inftrumens à touches , d'inftrumens dont les intonations ne
font pas muficales.
Une chofe alfez finguliere que nous remarquons encore dans ce plan de
fyftème propofé par M. Vandermonde , c'eft fa manière de voir le mode
mineur, qu'il croit être celle de tous les Muficiens.' Ce mode 3 dit-il, a
différentes efpeces. J'en admets quatre , comme font aujourd'hui plus ou
moins ouvertement tous les Muficiens , à ce qu'il me femble [a).
Ces modes font , félon lui , le mode mineur proprement dit , le mode
mineur en montant 3 le mode mineur en defcendant } 6c celui où l'on altère
la quarte } & il obferve que ce dernier mode n'a été introduit que depuis
une quarantaine d'années. Cette obfervation ne nous paraît pas jufte,
parce qu'il y a bien plus de quarante ans que , pour pafler d'un mode
(a) II paraît par ces derniers mots , que M. Vandermonde n'eft pas bien affiné de
l'opinion des Muficiens à cet égard ; au/fi croyons-nous lui faire plaifir de lui obferver
que c'eft précifement tous ceux qui ne font pas Muficiens qui admettent quatre ou
plufieurs modes mineurs , ainfi que plufieurs modes majeurs , en ce qu'ils prennent pour
autant de modes, les différentes tranfitions à d'autres modes; ou, en termes d'harmoniftes
, les différentes modulations qu'on peut faire dans un chant donné , une gamme
ou échelle , un air , une fonate , &c. Mais ces différentes modulations ne font pas
autant d'efpeces d'un même mode. Car fi cela était, M. Vandermonde devrait admettre art
moins cinq fortes de modes mineurs & plufieurs fortes de modes majeurs ; puifque dans
le mineur on pafTe fréquemment autïi au ton de fa quarte , en altérant la tierce. Alté-
ration qui devrait, félon lui, conftituer une cinquième efpece de mode mineur. Quant
au mode majeur , il eft confiant qu'on y
altère également la quarte , comme au mode
majeur, & dans les mêmes circonftances ; & non-feulement la quarte, mais encore la
quinte, comme font très fouvent les Italiens; & de plus, la feptieme, c'eft-à-dire, le fi
en ton d'ut, que les Plainchaniftes mêmes altèrent quelquefois, en le baillant d'un
demi-ton, pour adoucir, difent-ils , l'intervalle entre fa Se fi. Et il faut remarquer que
l'ufage de cette adoucïffement eft fort ancien, puifque Gui d'Arezzo, au chap. 8 de fon
Micrologue, appelle un fi, ainfi "baiffé, B-molle ( B-mol ) , par oppofition au fi non
baiffié , que les Italiens connaiffem encore aujourd'hui fous les noms de B-duro ou
B-quairo. «.
Les Harmoniftes expliquent un peu autrement! ces fortes d'adouciffëmens des fèptieme.s
notes, ainfi que les altérations que peuvent fubir les différens degrés d'un mode, d'une
gamme quelconque. Nous en donnerons des exemples, dont on trouvera l'explicatiom
à la fin de cet article. Voyez les exemples 1, i, 3 , 4, y.