Essai sur la Musique ancienne et moderne - National Library of ...

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ESSAI
» l'exacte Géométrie , l'audacieufe Aitronomie , la profonde Algèbre ?
» Sciences trop indifférentes qui donnent tout à la fpéculation , peu au fen-
» ciment, rien à l'homme. Que fert aux mœurs l'étude de la grammaire 8c
» des langues , ou plutôt la feience des fyllabes ? Science fuperficielle 8c
w beaucoup trop puérile , qui nous apprend à nommer les vertus , fans
» nous apprendre à les acquérir ?
» Que fert aux mœurs l'étude tant vantée de l'Hiftoire? (enfuite vien-
nent tous les lieux communs dont on fe fert dans les amplifications de
Rhétorique) ».
» Que fert aux mœurs ce petit talent de thèfes 8c de fophifmes , qui
n fe donne le nom de Philofophie ? chimères furannés, fyftêmes vagues, &c.
» Et telles font pourtant les feiences prétendues dont on occupe nos plus
» beaux jours. O perte irréparable , perte trop peu regrettée ! 8cc. Toutes
» ces feiences font étrangères à l'homme , agréables peut-être à fon
» efprit , mais inutiles àfoncœurj l'harmonie feule jouit d'un pouvoir beau-
» coup plus perfonnel , & plus marqué fur ce cœur , elle en fait faire joues
» les reiforts les plus fecrets. . .Elle eft donc utile en particulier aux mœurs
» de chaque citoyen, 8c en général à la fécurité, 8c au bonheur du corps
» entier de la république politique ».
Nous ne nous étendrons pas davantage fur ce chef-d'œuvre du dé-
raifonnement, & nous n'aurions jamais cru qu'un pareil Difcours fût du
fage Grelïet , s'il n'était imprimé dans fes Œuvres.
Ne nous binons point aveugler par les charmes de fon ftyle , rendons
à la Mufique la juftice qu'on lui doit, honnorons les bons Compofiteurs s
fouvenons-nous avec reconnainance de ceux qui ne font plus , 8c encou-
rageons ceux qui ne font qu'à leur aurore, mais ne mettons jamais les
uns ni les autres au-deiTus du Géomètre, qui inftruit tous les arts utiles \
de YAjlronome qui guide nos vailfeaux dans des déferts immenfes de
vagues & de rochers } du Grammairien , qui nous apprend à exprimer
nos penfées; de X'HiJlorien , qui en nous apprenant ce qu'ont été les
hommes , nous infpire de l'horreur pour les médians, & le deiir d'imités
les bons } enfin , du Philofophe qui nous apprend à nous connaître , à
réprimer nos panions , a vaincre nos penchans dangereux } 8c qui nous
procure la feule :jouifiance defirable qu'il y ait en ce inonde, la connaïf-
fance de la vérité.