Essai sur la Musique ancienne et moderne - National Library of ...

48 ESSAI
candeur , qu'on eft bien tenté de les lui pardoner. Doux , tranquille ,'
gai, modefte, il rendait heureux tout ce qui l'entourait, n'infultait jamais
1 ignorante limplicité , & les traits de fa fatyre ne tombaient jamais que fur les
faux favans, dont fon fiecle était inondé. Ami des grands , fans leur facrifier fa
liberté, il borna fon ambition à l'honeur de porter l'angufticlave &: l'anneau
de Chevalier Romain , ôc refula même la place de fecrécaire intime
d'Augufte. Il eft douteux qu'il eût jamais écrit, au nom de fon maître,
une lettre aufli admirable que l'Epître qu'il adrefla à Augufte lui-même, &
qui eft un des plus beaux morceaux de l'Antiquité.
Depuis ce tems, il ne nous refte que peu de détails de la vie d'Horace;
probablement il la paffa dans la retraite, «Se dans une fociété choifie dont il
faifait les délices. 11 mourut le 7 de Novembre , âgé de cinquante-fept ans (a)
environ un mois avant Mécène , l'an de Rome 746 , huit ans avant J. C.
quoiqu'on ait dit que Mécène , en mourant , l'avait recommandé à Augufte,
ôc par conféquent qu'il était mort avant Horace. Un fragment de Mé-
cène , où il déplore la mort d'Horace , nous a été confervé par 1 fidore } ÔC
prouve qu'Horace mourut avant lui.
Ce Poëte aimable mena la vie, en partie d'un philofophe &c en partie d'un
homme du monde, mais toujours la plus agréable & la plus délicieufe. Sa
maifon de Tivoli était pour lui l'afyle du bonheur. Il nous a apris lui-même
les principaux détails de fa vie} ôc c'eft par lui que nous favons qu'il avait
la vue fort délicate, ôc qu'il était d'une très faible conftitution. Il aimait
tous les arts , mais fur-tout la peinture , ôc s'y connaiffait bien. Il y a
grande aparence que fes odes étaient chantées , ôc qu'il avait pris cet ufage
de'Grecs , qui chantaient leurs poéfies lyriques. On dit qu'Horace fe fervit
pour faire chanter fes odes, de plufieurs chants de l'anciene Mimique des
Grecs , entre autres , d'un qui avait été fait fur plufieurs odes de Sapho
ôc qui eft parvenu jufqu'à nous. C'eft fur ce chant qu'Horace a fait fon
ode Jamfaits terris nivisj &zc. & que les Chrétiens ont fait ce qu'ils appelent
l'hymne de Saint Jearij commençant par Le queant Iaxis refonareJlbris , Sec.
(a) Ainfi finirent fes beaux jours
Évanouis dans la moleiïè;
Et fon nom, qui vivra fans çefle,
Fut dépofé par la parefTe
Pans les annales des Amours,
,
JuVENAI,