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<strong>Le</strong> maire et les baigna<strong>des</strong> en eau douce<br />
En matière de baigna<strong>des</strong>, les pouvoirs du maire<br />
se situent à plusieurs niveaux. Dans certains cas,<br />
leur méconnaissance peut entrainer une mise en<br />
cause de sa responsabilité. Explications.<br />
L’article L. 1332-2 du Code de la santé publique (CSP) définit<br />
comme eau de baignade toute partie <strong>des</strong> eaux de surface<br />
dans laquelle la commune s’attend à ce qu’un grand nombre<br />
de personnes se baignent et dans laquelle l’autorité compétente<br />
n’a pas interdit la baignade de façon permanente.<br />
Ne sont pas considérés comme eau de baignade :<br />
> les bassins de natation et de cure ;<br />
> les eaux captives soumises à un traitement ou utilisées à<br />
<strong>des</strong> fins thérapeutiques ;<br />
> les eaux captives artificielles séparées <strong>des</strong> eaux de surface<br />
et <strong>des</strong> eaux souterraines.<br />
En pratique, il convient de distinguer selon que la baignade<br />
est ou non aménagée.<br />
1. <strong>Le</strong>s baigna<strong>des</strong> aménagées<br />
A. Définition<br />
La définition <strong>des</strong> baigna<strong>des</strong> aménagées résulte de l’article<br />
D. 1332-39 du CSP. Ce texte dispose : « Une baignade aménagée<br />
comprend une portion de terrain contiguë à une eau<br />
de baignade sur laquelle <strong>des</strong> aménagements ont été réalisés<br />
afin de favoriser la pratique de la baignade ».<br />
Ainsi, la baignade aménagée se caractérise par le biais<br />
d’un faisceau d’indices. Elle comprend une ou plusieurs<br />
zones dans lesquelles les activités de bain ou de natation<br />
sont expressément autorisées, et, d’autre part, une portion<br />
de terrain contiguë ayant fait l’objet de travaux d’aménagement<br />
particuliers dans le but de faciliter la baignade<br />
ou les activités nautiques.<br />
A titre d’exemples, peuvent constituer de tels aménagements<br />
: la délimitation d’une zone de baignade, <strong>des</strong> aménagements<br />
spécifiques sur la berge immédiate (plage de<br />
sable, plongeoirs…), la présence de douches, d’un poste<br />
de secours ou encore d’un personnel de surveillance…<br />
B. Obligations et pouvoirs du maire<br />
Un arrêté municipal doit réglementer l’accès à la pratique<br />
de la baignade, de la natation et <strong>des</strong> activités aquatiques,<br />
et être assorti de mesures d’informations adéquates (affichage…).<br />
Concrètement, le maire est chargé :<br />
> De définir par arrêté les zones surveillées présentant les<br />
garanties de sécurité suffisantes pour l’exercice <strong>des</strong> activités<br />
de baignade, ainsi que les pério<strong>des</strong> (dates et horaires)<br />
de surveillance. En dehors de ces zones ou de ces pério<strong>des</strong>,<br />
les activités s’exercent aux risques et périls <strong>des</strong> intéressés ;<br />
> D’organiser la surveillance sur les zones déterminées<br />
(balisage de la zone, recrutement d’un surveillant titulaire<br />
du Brevet national de sécurité et de sauvetage<br />
aquatique…) à l’intérieur <strong>des</strong>quelles il doit prendre tou-<br />
POLICE<br />
tes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité <strong>des</strong><br />
usagers pendant les pério<strong>des</strong> de surveillance. Toute baignade<br />
aménagée, ouverte gratuitement au public et<br />
réglementairement autorisée, doit être surveillée ;<br />
> De signaler les dangers inhabituels, anormaux, non<br />
apparents pouvant surprendre un nageur normalement<br />
prudent ;<br />
> De recenser les baigna<strong>des</strong> et, le cas échéant, adopter un<br />
arrêté municipal pour créer ces baigna<strong>des</strong> et en informer<br />
les services de l’Etat ;<br />
> De recevoir et traiter les déclarations <strong>des</strong> exploitants de<br />
baigna<strong>des</strong> aménagées. L’article L. 1332-1 du CSP dispose<br />
: « Toute personne qui procède (…) à l’aménagement<br />
d’une baignade, publique ou privée à usage collectif,<br />
doit en faire, avant l’ouverture, la déclaration à la mairie<br />
du lieu de son implantation. Cette déclaration, accompagnée<br />
d’un dossier justificatif, comporte l’engagement<br />
que (…) l’aménagement de la baignade satisfait aux normes<br />
d’hygiène et de sécurité fixées par les décrets mentionnés<br />
aux articles L. 1332-7 et L. 1332-8 » ;<br />
> D’aménager la baignade et d’équiper le poste de secours<br />
de manière adéquate, situé à proximité directe <strong>des</strong> plages<br />
(art. D 1332-41 du CSP), ainsi que d’au moins deux<br />
cabinets de toilettes, dont l’emplacement est signalé ;<br />
> De s’assurer du respect par les personnes responsables<br />
<strong>des</strong> eaux de baignade autres que la commune <strong>des</strong> obligations<br />
légales qui leur incombent.<br />
A noter :<br />
<strong>fiche</strong>s techniques<br />
Selon la jurisprudence, « il incombe aux communes qui ont aménagé<br />
sur leur territoire <strong>des</strong> plans d’eau <strong>des</strong>tinés à la baignade et aux<br />
sports nautiques (...) de prendre les mesures appropriées en vue<br />
d’assurer la sécurité <strong>des</strong> usagers et plus particulièrement <strong>des</strong> baigneurs<br />
(...) » (Conseil d’Etat, 14 octobre 1977, Commune de Catus).<br />
En vertu de ses pouvoirs de police, le maire peut en outre :<br />
> interdire une ou plusieurs activités si la configuration <strong>des</strong><br />
lieux rend sa pratique dangereuse ;<br />
> aménager les lieux en différentes zones d’activités ;<br />
Toutes ces mesures doivent faire l’objet d’un affichage sur<br />
place mais également en mairie.<br />
Enfin, l’article L. 1332-3 du CSP précise : « Est considéré comme<br />
personne responsable d’une eau de baignade le déclarant<br />
de la baignade (…) ou, à défaut de déclarant, la commune ou<br />
le groupement de collectivités territoriales compétent sur le<br />
territoire duquel se situe l’eau de baignade ».<br />
C. Conséquences pratiques<br />
Tout aménagement spécial constituant une incitation à la<br />
baignade nécessite la mise en œuvre <strong>des</strong> moyens de surveillance<br />
nécessaires à la sécurité du public.<br />
<strong>Le</strong> maire doit informer le public de la réglementation et de<br />
l’organisation de la baignade et <strong>des</strong> activités nautiques, du<br />
dispositif de secours en place, ainsi que <strong>des</strong> résultats <strong>des</strong><br />
contrôles de la qualité <strong>des</strong> eaux de baigna<strong>des</strong>, par une publi-<br />
suite page 58 ><br />
www.journal<strong>des</strong>maires.com – mars 2009 – <strong>Journal</strong> <strong>des</strong> <strong>Maires</strong> – 57
<strong>fiche</strong>s techniques<br />
> suite de la page 57<br />
cité appropriée en mairie et sur les lieux de baigna<strong>des</strong>.<br />
La signalisation <strong>des</strong> zones surveillées ainsi que la matérialisation<br />
et le balisage <strong>des</strong> lieux de baigna<strong>des</strong> doivent être<br />
assurés par <strong>des</strong> moyens techniques particuliers (bouées,<br />
drapeaux…). De même, le poste de secours doit être équipé<br />
<strong>des</strong> matériels de secours nécessaires.<br />
Enfin, il importe de souscrire une assurance dès lors que la<br />
baignade est surveillée. Celle-ci devra notamment couvrir<br />
les risques liés à la pratique <strong>des</strong> activités nautiques et aquatiques<br />
en dehors <strong>des</strong> heures de surveillance.<br />
2. <strong>Le</strong>s baigna<strong>des</strong> non aménagées<br />
A. Définition<br />
<strong>Le</strong>s baigna<strong>des</strong> non aménagées sont <strong>des</strong> emplacements qui<br />
ne font pas l’objet d’une interdiction de baignade et<br />
dépourvus d’aménagements particuliers. Toute personne<br />
qui se baigne dans les cours d’eau, les lacs, les étangs et<br />
en général tous les plans d’eau dont l’accès est libre et qui<br />
n’ont fait l’objet d’aucune organisation particulière, le fait<br />
à ses risques et périls.<br />
B. Obligations et pouvoirs du maire<br />
Il revient au maire d’assurer la sécurité <strong>des</strong> lieux de baignade,<br />
même non aménagés, dès lors que ceux-ci font<br />
l’objet d’une fréquentation régulière et importante.<br />
En pratique, le maire est chargé :<br />
> de mettre en place un recensement de ces lieux de baigna<strong>des</strong><br />
(article L. 1332-1 du CSP). En cas de fréquentation<br />
suffisante, les dispositions doivent être prises en<br />
vue d’une information optimale <strong>des</strong> usagers ;<br />
> de signaler, au moyen de panneaux ou de pancartes placés<br />
aux abords du lieu de baignade, que dans le cas <strong>des</strong><br />
lieux de baignade non aménagés la baignade est libre<br />
mais pratiquée aux risques et périls <strong>des</strong> usagers ;<br />
> d’identifier et de prévenir les risques éventuels, excédant<br />
ceux d’une baignade dite « normale » : faire disparaître<br />
les dangers identifiés, ou, à défaut, les signaler (par<br />
exemple : rupture de pente importante près du bord,<br />
passage de bateaux ou canoës, présence d’un courant…) ;<br />
> d’organiser et installer à proximité un dispositif d’alerte<br />
<strong>des</strong>tiné au public pour une intervention rapide <strong>des</strong><br />
secours en cas d’accident (au minimum : installation d’un<br />
poste téléphonique et mise à disposition de bouées de<br />
secours auprès <strong>des</strong> baigneurs). La responsabilité d’une<br />
commune a ainsi été reconnue suite au décès d’un jeune<br />
homme pour lequel les soins de secours n’avaient pu<br />
être dispensés à temps, le téléphone le plus proche étant<br />
situé à 5 km du lieu de l’accident (Conseil d’Etat, 13 mars<br />
1983, <strong>Le</strong>febvre, n° 30538) ;<br />
> de mettre en place une surveillance analytique de la<br />
qualité de l’eau pour ces lieux de baignade « sauvage ».<br />
3. Responsabilité de l’autorité de police<br />
A. Responsabilité administrative<br />
Selon la loi, une faute commise par le maire agissant comme<br />
représentant de la commune engage la responsabilité<br />
58 – <strong>Journal</strong> <strong>des</strong> <strong>Maires</strong> – mars 2009 – www.journal<strong>des</strong>maires.com<br />
POLICE<br />
<strong>Le</strong>s baigna<strong>des</strong> interdites<br />
Si le danger le justifie, le maire peut interdire la baignade<br />
par un arrêté motivé (référence à un danger réel et<br />
indiquer sa nature), matérialisé sur place par une signalisation<br />
appropriée (panneaux rappelant la nature du<br />
danger, ceci de la manière la plus explicite possible, avec<br />
un affichage de l’arrêté). Mais attention, une interdiction<br />
générale de la baignade sur l’ensemble du territoire de<br />
la commune peut encourir un risque d’annulation devant<br />
le juge. Il importe donc de ne procéder à de telles interdictions<br />
qu’au cas par cas.<br />
de <strong>cette</strong> dernière, conformément à l’article L. 2216-2 du<br />
Code général <strong>des</strong> collectivités territoriales (CGCT).<br />
Par ailleurs, l’article L. 2123-34 du CGCT prévoit que le maire<br />
ne peut être condamné « pour <strong>des</strong> faits non intentionnels<br />
commis dans l’exercice de ses fonctions que s’il est établi<br />
qu’il n’a pas accompli les diligences normales compte<br />
tenu de ses compétences, du pouvoir et <strong>des</strong> moyens dont<br />
il disposait ainsi que <strong>des</strong> difficultés propres aux missions<br />
que la loi lui confie ». Cet article précise que « la commune<br />
est tenue d’accorder sa protection au maire (…) lorsque<br />
celui-ci fait l’objet de poursuites pénales à l’occasion de<br />
faits qui n’ont pas le caractère de faute détachable de<br />
l’exercice de ses fonctions ».<br />
B. Responsabilité pénale<br />
La responsabilité pénale du maire peut être engagée si la<br />
violation d’une disposition légale visant la sécurité <strong>des</strong><br />
personnes pratiquant <strong>des</strong> activités de baignade est à l’origine<br />
de dommages corporels ou d’une mise en danger<br />
délibérée d’autrui.<br />
Toutefois, depuis la loi « Fauchon » du 10 juillet 2000, la<br />
responsabilité pénale d’une personne physique qui n’a pas<br />
causé directement le dommage peut être retenue s’il est<br />
établi que <strong>cette</strong> personne a « soit violé de façon manifestement<br />
délibérée une obligation particulière de prudence<br />
ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit<br />
commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un<br />
risque d’une particulière gravité qu’elle ne pouvait ignorer<br />
» (article 121-3 du Code pénal).<br />
Ainsi, en matière de baigna<strong>des</strong>, la responsabilité pénale du<br />
maire pourra être engagée s’il est établi qu’il n’a pas accompli<br />
les diligences normales, compte tenu de ses compétences,<br />
du pouvoir et <strong>des</strong> moyens dont il disposait. Tel peut être<br />
notamment le cas s’il s’abstient de prendre les mesures<br />
nécessaires à la sécurité <strong>des</strong> personnes (interdiction de la baignade<br />
en cas de danger avéré, absence de panneau signalant<br />
les dangers excédant ceux d’une baignade normale,<br />
carence de moyens d’alerte et de secours appropriés…).<br />
Celia Mayonove<br />
Juriste<br />
Association <strong>des</strong> maires et élus du Lot