Quatre lettres d'un professeur - L'Affaire Corneille-Molière
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L’inflation de l’adjectif "illustre" (clin d’œil<br />
à Plutarque), la date et le titre de la dernière<br />
pièce en cours de rédaction au moment de la<br />
fondation de "l’Illustre Théâtre" amènent<br />
logiquement à penser que la compagnie tire<br />
son nom de cet auteur. Cela paraît logique.<br />
Exit ici à mes yeux la référence au grand<br />
Pierre <strong>Corneille</strong>.<br />
33<br />
Pas si vite… La muse Thalie avait adressé<br />
un signe à la nouvelle compagnie<br />
puisqu’un éditeur préparait une édition,<br />
sous le titre L’Illustre Théâtre (Leyde,<br />
1644, édition elzévirienne), de cinq pièces<br />
de Pierre <strong>Corneille</strong> : Le Cid, Horace,<br />
Cinna, Polyeucte et la toute récente Mort<br />
de Pompée. Certaines étaient déjà parues<br />
en cours d’année. L’on peut donc<br />
supposer que les compagnons de<br />
Madeleine Béjart étant tous de fervents<br />
admirateurs du grand homme, le choix<br />
de L’Illustre Théâtre comme nom de<br />
guerre dut se faire à l’unanimité, d’autant<br />
que la formule est à la mode et sonne<br />
comme une victoire. Le moliériste Paul<br />
Lacroix concluait : « Il est bien certain<br />
que l’Illustre Théâtre ne jouait que la<br />
tragédie et la tragi-comédie. L’Illustre<br />
Théâtre de M. <strong>Corneille</strong>, dont on ne<br />
connaît que l’édition elzevirienne suivant<br />
la copie imprimée à Paris en 1644,<br />
renfermait seulement Le Cid, Horace,<br />
Cinna, Pompée et Polyeucte ; on y ajouta<br />
depuis Héraclius et Rodogune ; c’étaient là<br />
les pièces que la troupe des Béjart avait<br />
d’abord représentées. » Il faut aussi<br />
prendre en compte que la famille de<br />
Madeleine Béjart travaillait pour le duc<br />
de Guise qui était alors le protecteur de<br />
<strong>Corneille</strong>. Donc, si la tradition dit vrai en<br />
donnant à la jeune Madeleine un rôle de<br />
figurante dans Le Cid, nous en déduisons<br />
que Madeleine connaissait Pierre<br />
<strong>Corneille</strong> bien avant le séjour de sa troupe<br />
à Rouen en 1643. On sait par ailleurs que<br />
<strong>Corneille</strong> a toujours recherché la<br />
compagnie des jeunes filles... C’est sur de<br />
tels rapprochements probables que doit<br />
s’appuyer votre analyse du « cas<br />
<strong>Molière</strong> ». Sans Madeleine Béjart il n’y<br />
aurait jamais eu de <strong>Molière</strong>, comme il n’y<br />
aurait jamais eu Le Misanthrope sans