Quatre lettres d'un professeur - L'Affaire Corneille-Molière
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La proximité des deux œuvres montre à mes<br />
yeux que la seconde (celle de <strong>Molière</strong>) tire<br />
son existence de la première. Je ne franchis<br />
pas pour l’instant le pas en identifiant la<br />
main cachée derrière ces deux œuvres<br />
comme étant la même.<br />
Par exemple, l’usage du terme "honneur"<br />
chez <strong>Corneille</strong> et <strong>Molière</strong> me semble<br />
diverger grammaticalement. Dans les<br />
grandes lignes, l’honneur chez <strong>Corneille</strong> est<br />
une valeur absolue qui implique qu’il se<br />
dispense presque toujours d’adjectifs (il n’a<br />
pas besoin d’être grand, beau...) ce qui se<br />
conçoit aisément. Il est à plus de 90%<br />
précédé d’un déterminant possessif seul<br />
(mon/ton/son...) ou d’un article. Chez<br />
<strong>Molière</strong> (et j’observe que le terme est<br />
déplacé dans le cadre d’une comédie mais<br />
on en relève plus de 50 occurrences), il peut<br />
être précédé ou suivi d’un adjectif, ce qui<br />
est en contradiction avec l’usage qu’en fait<br />
<strong>Corneille</strong>.<br />
20<br />
questions anciennes de point d’honneur,<br />
de « molinisme » ou de « grâce<br />
irrésistible », jusqu’au tic cornélien de<br />
recycler d’anciens vers, et tout ceci sans<br />
que jamais un contemporain ne l’ait vu<br />
préoccupé par des problèmes de<br />
versification ou des soucis d’inspiration…<br />
et sans que l’on n’ait jamais trouvé la<br />
moindre page de sa main !<br />
Suivez ce conseil : faites deux colonnes ;<br />
dans la première, inscrivez<br />
méthodiquement tout ce qui tend à<br />
prouver en <strong>Molière</strong> un écrivain ; dans la<br />
seconde, tout ce qui tend à établir qu’il n’a<br />
jamais été autre chose qu’un comédienpoète,<br />
donc un prête-nom ; puis faites le<br />
compte des deux colonnes. La<br />
comparaison est instructive car en raison<br />
du long conditionnement idéologique que<br />
nous avons subi, nous avons tendance à<br />
minimiser, sinon occulter, tous les<br />
arguments qui s’opposent à nos idées<br />
toutes faites ou patiemment inculquées.