Quatre lettres d'un professeur - L'Affaire Corneille-Molière
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ailleurs. C’est sans doute une source dont<br />
vous, qui êtes plus habilité que moi, tirerez<br />
profit. Dernière remarque : une certaine<br />
critique du XIX e siècle s’est efforcée de<br />
retrouver les sources compilées, compulsées<br />
par <strong>Molière</strong>. Ce travail de recherches est<br />
aujourd’hui déconsidéré, sans doute à tort.<br />
Pour L’Ecole des Femmes (in Gustave<br />
Attinger, L’esprit de la commedia dell’arte<br />
dans le théâtre français), son rédacteur<br />
aurait puisé dans Les facétieuses Nuits de<br />
Strapole, dans La Précaution inutile de<br />
Scarron et dans une pièce italienne de<br />
Croce, Astute semplicità di Angiola (qui<br />
pose le thème de l’homme qui se réserve<br />
d’épouser une pupille qu’il tient enfermée).<br />
Comme très souvent, la critique<br />
moliéresque part du côté de sources<br />
italiennes, très certainement traduites en<br />
français au XVII e siècle mais il me semble<br />
étonnant que <strong>Corneille</strong>, qui puise à de<br />
nombreuses sources, mais principalement<br />
latines et espagnoles, ait changé de sources<br />
d’inspiration. Ce n’est pas impossible mais<br />
cela montrerait combien il conçoit ses deux<br />
activités comme nettement distinctes dans la<br />
phase préparatoire.<br />
16<br />
Il est probable que la plupart des sujets<br />
des pièces de <strong>Molière</strong> a été apportée par<br />
<strong>Molière</strong> ou Madeleine Béjart (sans oublier<br />
le conseiller technique Donneau de Visé,<br />
ami de Thomas <strong>Corneille</strong>) lesquels, en<br />
effet, étant formés à la commedia dell’arte,<br />
exploitaient surtout le répertoire italien.<br />
<strong>Molière</strong> était ce qu’on appelle dans le<br />
jardon théâtral un carcassier, c’est-à-dire<br />
celui (souvent un directeur de théâtre ou<br />
un chef de troupe) qui fournit l’idée<br />
générale (sans que cette idée soit<br />
forcément de lui), parfois le découpage de<br />
l’histoire (là aussi il peut emprunter). On<br />
est en droit de supposer que <strong>Corneille</strong>, qui<br />
lisait l’italien aussi bien que l’espagnol,<br />
adaptait et uniformisait les scènes<br />
originales disparates. Sans doute d’autres<br />
plumes ajoutaient-elles encore des lazzis<br />
car, semble-t-il, il n’y en avait jamais<br />
assez… tant et si bien qu’au final la pièce<br />
n’était de personne, mais elle appartenait<br />
à « Monsieur de <strong>Molière</strong> ». Ces mêmes<br />
pratiques ont continué avec le théâtre de