Quatre lettres d'un professeur - L'Affaire Corneille-Molière
Quatre lettres d'un professeur - L'Affaire Corneille-Molière
Quatre lettres d'un professeur - L'Affaire Corneille-Molière
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
ici de l’association <strong>Corneille</strong>-<strong>Molière</strong> que<br />
tout le monde sait, y compris ses lecteurs et<br />
dont personne n’a parlé explicitement, ou<br />
alors à ses yeux l’auteur des pièces de<br />
<strong>Molière</strong> et l’acteur qui les joue ne font<br />
qu’une seule et même personne. Vous<br />
choisirez, mais je crois que la lecture du<br />
contexte permet de lever l’ambiguïté et à<br />
mes yeux, il n’y en a pas.<br />
Par contre, pour aller dans votre direction,<br />
en faisant de la pièce un pur divertissement<br />
sans enseignement, en peignant la réaction<br />
du roi et de la reine, il fait du jeu de <strong>Molière</strong><br />
le jeu d’un Bouffon du Roi sans ambiguïté.<br />
En juin 1663, lors de la représentation de La<br />
Critique de l’Ecole des Femmes, ce même<br />
Loret écrit :<br />
« Sans doute que très bien des Gens<br />
De la voir seront diligents<br />
Etant, dit-on, fort singulière<br />
Et venant du rare <strong>Molière</strong><br />
C’est-à-dire de bonne main ».<br />
Nul doute qu’on peut lui prêter un double<br />
sens, surtout après vous avoir lu, mais le<br />
pauvre Loret n’en témoigne nulle part<br />
15<br />
A propos d’ambiguïté voulue ou non<br />
voulue, connaissez-vous la chronique de<br />
Robinet du 22 novembre 1670 ? Voici ce<br />
qu’écrit ce successeur de Loret à propos<br />
de <strong>Corneille</strong> :<br />
« […] ce poème de <strong>Corneille</strong><br />
Sa Bérénice non-pareille<br />
Se donnera, pour le certain,<br />
Le jour de vendredi prochain,<br />
Sur le théâtre de <strong>Molière</strong><br />
Et que, par grâce singulière<br />
Mardi, l’on y donne au public<br />
De bout en bout, et ric à ric,<br />
Son charmant Bourgeois Gentilhomme<br />
[…] ».<br />
Robinet était un grand ami de <strong>Corneille</strong> ;<br />
a-t-il voulu en se servant du laxisme<br />
syntaxique propre au style versifié<br />
suggérer ce qui ne doit pas l’être ? A<br />
rapprocher de la Préface du Festin de<br />
Pierre où le poète Thomas <strong>Corneille</strong>, au<br />
lieu d’écrire tout simplement « <strong>Molière</strong> »<br />
(mais, précisément, cela ne lui est pas si<br />
facile), préfère utiliser la lourde<br />
périphrase ce « célèbre auteur sous le nom<br />
duquel la pièce est toujours représentée ».