Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne
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Associations de la Chine me rappelèrent le proverbe de leur pays : Ne laissez jamais passer l'occasion de faire un compliment ; il vous sera rendu. Le lendemain, je me présentais, en tenue de visite officielle, au p.107 palais de la préfecture. A peine en avais-je franchi le seuil, que le magistrat criait, du fond de ses appartements : — Que vous êtes heureux vous autres missionnaires, de n'avoir jamais maille à partir avec les diables ! Pour nous c'est autre chose ; nous devons veiller jour et nuit pour éviter ou déjouer leurs maléfices, et encore ne réussissons-nous pas toujours à nous y soustraire. Le peuple, qui n'a pas reçu la puissance de mettre les diables aux fers, célébrera, demain, la mémoire d'un grand homme qui poussa l'abnégation de lui-même et la fidélité du dévoûment jusqu'à l'héroïsme. L'empereur Suien-Wang (huit cent vingt-sept ans avant l'ère chrétienne) s'était déchargé du soin des affaires sur un prince du sang, nommé Tsing-Wen-Kong. Cette faveur fit des jaloux et suscita des calomniateurs à celui qui en était l'objet. Tsing-Wen- Kong, destitué de son rang de prince et de sa charge de ministre, abandonné de tous ceux qu'il avait comblés de bienfaits, prit tristement le chemin de l'exil : un seul serviteur, Kié-Tché-Tsuei lui était demeuré fidèle. Un jour, dit la légende, les racines et les herbes qui faisaient la nourriture des deux exilés, leur manquèrent. Une bise glaciale avait desséché les montagnes et détruit tout ce qui pouvait les empêcher de mourir de faim. Le prince épuisé déjà par de p.108 longues privations allait succomber, quand son serviteur prit subitement une résolution. Il se retire à l'écart, s'arme d'un instrument tranchant, et détache courageusement de sa jambe gauche le morceau charnu que les Chinois nomment Tuei-Tou-Tze (ventre du tibia), et que nous 94
Associations de la Chine appelons, plus simplement : le mollet. Le prince, qui ne soupçonnait rien de ce qui s'était passé, se sentit revivre, se souleva et, saisissant avec une ardeur fébrile ce morceau de chair si inespéré, le dévora à belles dents, sans attendre même que le feu qui devait le rôtir, fût allumé. Ce fut, dit-on, l'origine de l'abstinence annuelle appelée : Journée des aliments froids. Un livre d'anecdotes, assez apprécié des lettrés, explique autrement l'usage traditionnel du Han-ché. L'innocence du prince Tsing-Wen-Kong ayant été reconnue, l'empereur, honteux d'avoir soupçonné d'infidélité son ministre le plus dévoué et le plus intègre, le rappela de l'exil, et lui rendit toutes ses bonnes grâces. Mais l'ingrat Tsing-Wen-Kong, revenu au faîte des honneurs, oublia que, sans le repas froid qu'il avait pris aux dépens du mollet de Kié-Tché-Tsuei, les envoyés de l'empereur l'auraient trouvé mort. En proie au plus violent désespoir, en se voyant si lâchement abandonné sur la terre de l'exil, son fidèle compagnon et son sauveur résolut d'en p.109 finir avec la vie et se traîna au fond des montagnes, dans la caverne la plus cachée, décidé à y mourir de faim. Ce fut là que Tsing-Wen-Kong, qui venait d'être proclamé empereur, le fit chercher. Ses envoyés battirent les montagnes et les vallées, demandèrent Kié-Tché-Tsuei à tous les échos, mais ce fut en vain ; l'exilé demeura au fond de sa caverne, plus résolu que jamais à la mort. L'empereur, l'âme bourrelée de remords, se transporta lui-même sur les bords du fleuve Jaune, gravît à pied les montagnes, appelant son fidèle serviteur. Tout fut inutile. Alors, le souverain ordonna de mettre le feu aux herbes, et bientôt les montagnes et les vallées présentèrent l'aspect d'un immense incendie, mais Kié-Tché- Tsuei ne parut point ; on trouva son cadavre à l'entrée de la caverne. 95
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Le peuple, qui n'a pas reçu <strong>la</strong> puissance <strong>de</strong> mettre les diables<br />
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L'empereur Suien-Wang (huit cent vingt-sept ans avant l'ère<br />
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