Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne

Associations de la Chine
En 1861 et 1862, ayant eu occasion de vivre pendant plusieurs
mois au milieu des troupes impériales, chargées de combattre
l'insurrection du Nénuphar, il me fut aisé de remarquer les
sympathies des populations pour les rebelles 1 . Partout, à peu
près, quand nous n'étions pas assez nombreux pour intimider les
villages qui se trouvaient sur notre route, on refusait même
d'abreuver nos chevaux : si nous demandions à acheter une
mesure de millet, une livre de farine, un picotin d'avoine, ou bien
on nous répondait qu'il n'y en avait pas dans le village, ou bien
on nous tournait le dos en murmurant quelque malédiction.
Partout le vide se faisait autour de nous, tandis qu'à l'approche
des rebelles, la population tout entière, hommes, femmes et
enfants, se précipitait à leur rencontre, leur souhaitant la
bienvenue comme à de vieilles connaissances, à des amis. Cette
préférence venait-elle de ce que les milices du Céleste-Empire ont
la réputation, exagérée sans doute, de faire plus de mal au
peuple que p.030 les brigands et les rebelles ? On peut le croire,
mais il est à présumer qu'instinctivement et malgré les horreurs
qui signalent partout le passage de leurs coreligionnaires, ceux
qui se sont laissé enrôler dans cette association, dont ils
ignoraient les hontes et l'ignominie, lui donnent leurs sympathies,
sans scrupule et sans remords.
Des missionnaires ont dit que la Société secrète du Nénuphar
est l'ennemi le plus acharné, comme aussi le plus redoutable du
Catholicisme. Je suis loin de partager cet avis : les francs-maçons
de la Chine n'ont point, comme les nôtres, juré la mort des
honnêtes gens, bien moins encore la ruine des croyances
religieuses. Faire disparaître un gouvernement qui a fait tomber,
par milliers, les têtes de leurs frères, se saturer de débauches,
1 Voir l'ouvrage intitulé : Mgr Dubar et la Mission du Tché-Ly-Sud-Est. Wattelier, 5 rue
du Cherche-Midi, Paris, page 200.
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