Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne

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14.07.2013 Views

Associations de la Chine flammes que de sauver leur vie en perdant leur honneur. Elles ne poussèrent pas un cri, pas un soupir qui pût les trahir. A Wei-Tsuen, une des chrétientés les plus considérables du Tché-Ly-Sud-Est, vingt-cinq ou trente jeunes filles sortaient du village au moment où quelques cavaliers lancés en éclaireurs y entraient. Ceux-ci leur barrent le passage, et les somment de rentrer chez elles. Alors commence une lutte acharnée. Les cavaliers lancent leurs chevaux sur elles. Elles vont être écrasées ou massacrées... Aussitôt, saisissant des briques, des galets, des morceaux de bois, tout ce qui leur tombe sous la main, quelques- unes d'entre elles attaquent vigoureusement l'ennemi, pendant que les autres lancent à la tête des chevaux des flots de sable et de poussière qui les font reculer... Chevaux et cavaliers font volte face, et nos intrépides chrétiennes peuvent s'enfuir et se réfugier dans un village voisin, fortifié et défendu par plusieurs milliers de paysans. Les Nénuphariens, jusqu'à la dix-huitième p.022 année du règne de Kia-King, avaient espéré qu'une propagande intelligente et active faite par les Hâo-ché et les Fà-ché serait un moyen suffisant pour attirer les cœurs et gagner les dévouements ; l'expérience montra qu'à l'heure de la lutte, au moment où il fallait des bras, les fidèles et les braves devenaient rares ; partout des déserteurs et des lâches. Parmi les simples agrégés surtout, presque tous laboureurs, on ne rencontrait même plus que des sympathies équivoques. Ces pauvres gens, un moment trompés par des promesses qui ne se réalisaient jamais, se dégoûtaient insensiblement d'une association qui, en les grevant de charges, les exposait aux plus grands dangers, à la mort ou à l'exil, sans leur procurer le moindre avantage matériel. On décida, en grand conseil, qu'il était indispensable désormais, de 30

Associations de la Chine donner aux affaires politiques une couleur religieuse pour éblouir et fanatiser des adeptes découragés. J'imagine que vos nouveaux maîtres, en France, s'il veulent garder leur sceptre et leurs émoluments, se verront forcés, un jour ou l'autre, d'imiter le génie des Pei-lien-Kiâo du Céleste-Empire. Restait à choisir une divinité. La prendre parmi les dieux déjà connus et vénérés, c'était, de prime abord, enlever au nouveau dogme tout son prestige et tous ses charmes : il fallait une divinité toute neuve... Elle fut trouvée p.023 et se nomma Ou- Chem-Laô-Mou (la vieille mère sans origine). Cette découverte qui, d'ailleurs, est infiniment moins absurde que toutes celles qui ont été faites en pareille matière, soit par les francs-maçons de l'empire du Milieu, soit même par nos révolutionnaires français, aurait pu donner lieu à un dogme, à une morale, à des pratiques ou à des expériences capables de toucher et d'entraîner les honnêtes ignorants : mais ce trait de lumière suffisait à une Société dont le but unique était de retenir sous sa main des cœurs et surtout des bras qui lui échappaient. Voici, en gros et en détail, toute la religion que la Vieille Mère sans origine, Créatrice du ciel et de la terre, a donnée à ses croyants. Je la traduis mot à mot d'un manuscrit chinois, le seul qui ait été composé, ou du moins qui ait été, jusqu'à présent, communiqué aux simples frères des campagnes. Dogme. — Nous ne reconnaissons pas d'autre Dieu que la Mère antique qui n'eut jamais d'origine. C'est elle qui nous a donné le corps dont nous nous servons pour le travail, l'intelligence qui nous élève au-dessus de tous les êtres créés, l'âme dont la beauté est si grande qu'elle ressemble aux esprits célestes. 31

<strong>Associations</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong><br />

f<strong>la</strong>mmes que <strong>de</strong> sauver leur vie en perdant leur honneur. Elles ne<br />

poussèrent pas un cri, pas un soupir qui pût les trahir.<br />

A Wei-Tsuen, une <strong>de</strong>s chrétientés les plus considérables <strong>du</strong><br />

Tché-Ly-Sud-Est, vingt-cinq ou trente jeunes filles sortaient <strong>du</strong><br />

vil<strong>la</strong>ge au moment où quelques cavaliers <strong>la</strong>ncés en éc<strong>la</strong>ireurs y<br />

entraient. Ceux-ci leur barrent le passage, et les somment <strong>de</strong><br />

rentrer chez elles. Alors commence une lutte acharnée. Les<br />

cavaliers <strong>la</strong>ncent leurs chevaux sur elles. Elles vont être écrasées<br />

ou massacrées... Aussitôt, saisissant <strong>de</strong>s briques, <strong>de</strong>s galets, <strong>de</strong>s<br />

morceaux <strong>de</strong> bois, tout ce qui leur tombe sous <strong>la</strong> main, quelques-<br />

unes d'entre elles attaquent vigoureusement l'ennemi, pendant<br />

que les autres <strong>la</strong>ncent à <strong>la</strong> tête <strong>de</strong>s chevaux <strong>de</strong>s flots <strong>de</strong> sable et<br />

<strong>de</strong> poussière qui les font reculer... Chevaux et cavaliers font volte<br />

face, et nos intrépi<strong>de</strong>s chrétiennes peuvent s'enfuir et se réfugier<br />

dans un vil<strong>la</strong>ge voisin, fortifié et défen<strong>du</strong> par plusieurs milliers <strong>de</strong><br />

paysans.<br />

Les Nénuphariens, jusqu'à <strong>la</strong> dix-huitième p.022 année <strong>du</strong> règne<br />

<strong>de</strong> Kia-King, avaient espéré qu'une propagan<strong>de</strong> intelligente et<br />

active faite par les Hâo-ché et les Fà-ché serait un moyen<br />

suffisant pour attirer les cœurs et gagner les dévouements ;<br />

l'expérience montra qu'à l'heure <strong>de</strong> <strong>la</strong> lutte, au moment où il<br />

fal<strong>la</strong>it <strong>de</strong>s bras, les fidèles et les braves <strong>de</strong>venaient rares ;<br />

partout <strong>de</strong>s déserteurs et <strong>de</strong>s lâches. Parmi les simples agrégés<br />

surtout, presque tous <strong>la</strong>boureurs, on ne rencontrait même plus<br />

que <strong>de</strong>s sympathies équivoques. Ces pauvres gens, un moment<br />

trompés par <strong>de</strong>s promesses qui ne se réalisaient jamais, se<br />

dégoûtaient insensiblement d'une association qui, en les grevant<br />

<strong>de</strong> charges, les exposait aux plus grands dangers, à <strong>la</strong> mort ou à<br />

l'exil, sans leur procurer le moindre avantage matériel. On<br />

décida, en grand conseil, qu'il était indispensable désormais, <strong>de</strong><br />

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