Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne

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14.07.2013 Views

Associations de la Chine La fête de Kouang-Tchong se célèbre le dixième jour de la sixième lune, jour anniversaire de sa naissance. Si les âniers et leurs baudets sont en campagne, ils ont toujours la pieuse habitude de faire une abondante et gratuite distribution de sel à tous ceux qui se présentent, qu'ils soient riches ou pauvres, peu importe. J'ai eu l'heureuse fortune, il y a deux ou trois ans, de contempler, à mon aise, une troupe de ces revendeurs de sel fêtant leur patron, aux abords d'un village ami. Rien de curieux, comme ce spectacle. — Les uns pratiquent en terre des excavations destinées à recevoir le bois ou la paille qui doit cuire le riz, placent sur l'orifice un énorme coquemar de Houaî-Lou 1 , y versent de l'eau, allument le feu, jasent et fument leur pipe. D'autres reviennent du village, chargés de gros paquets p.296 de paille de maïs ou de sorgho ; il en est qui vont de porte en porte acheter des échalotes, des herbes salées, de l'huile, du vinaigre ; plusieurs sont occupés à crier ou à courir après les ânes qui, mécontents de la part qu'on leur donne à la fête, ont perdu patience et s'enfuient à travers champs. Une foule de petits marchands, de diseurs de bonne aventure, de badauds, surtout, accourus des quatre points cardinaux, brochent sur le tout. Ce jour-là les magasins de sel et ceux qui les font valoir ont congé. On ne pensera à eux que le lendemain matin. Les brigands, maraudeurs ou chevaliers d'industrie dont j'ai parlé, jusqu'ici, en gros ou en détail, sont surtout redoutables pour les riches capitalistes, les banques, les monts de piété et les entrepôts de sel. Les habitants de la campagne, les petits marchands, tous ceux enfin qui appartiennent à la classe peu aisée n'ont rien à redouter d'eux. Une autre association dont les gens du peuple ne se défient pas, dont ils ignorent même assez 1 Voir : Produits industriels du Tché-Ly. — Vie de Mgr Dubar, page 99 et suiv. 236

Associations de la Chine souvent l'existence, s'est chargée de remplir cette lacune et de compléter ainsi la collection si variée des bandits et des voleurs de l'Empire du Milieu. C'est la Société dite : des Escamoteurs en détail, Siâo-Lue. Elle existe et fonctionne dans tous les gros bourgs ; elle a ses succursales et ses correspondants dans les villages qui, sans être p.297 considérables, ont régulièrement de petits marchés, ou bien possèdent une pagode près de laquelle se tiennent annuellement des assemblées religieuses, ou des foires. La Société des Siâo-Lue n'admet dans ses rangs que des candidats intelligents, dont la physionomie n'ait rien de rebutant ni de crapuleux. Leur extérieur doit être avenant, leurs manières polies, leur tenue irréprochable, sans être uniforme toutefois. Si quelque membre du Siâo-Lue est pris la main dans les poches d'autrui, il ne verra pas voler à son secours, comme cela se pratique dans la société du Kan-tâo-Hoei, ses confrères et ses amis ; tous, au contraire, le désavouent. Ses collègues, et surtout les inspecteurs, qui se rencontrent partout pour surveiller les manœuvres de leurs subalternes, sont les premiers à crier : au voleur ! l'arrêtent et le conduisent au corps de garde ou le livrent à la police, pour lui faire administrer une correction dont il puisse se souvenir longtemps. Lorsque vous allez au marché, soyez convaincu d'avance que les agents du Siâo-Lue vous y attendent. Entrez-vous chez un pharmacien, un boulanger ou un passementier, gardez-vous bien de laisser votre besace à la porte : ne la déposez pas même auprès du comptoir. Le plus sûr est de la tenir sur votre épaule, serrant fortement, de la main, le bout p.298 du bissac où sont vos sapèques, votre pipe ou votre blague. Si vous faites un petit commerce sur le marché ou sur la rue, si vous vendez du grain à la halle, tâchez de ne pas avoir de 237

<strong>Associations</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong><br />

souvent l'existence, s'est chargée <strong>de</strong> remplir cette <strong>la</strong>cune et <strong>de</strong><br />

compléter ainsi <strong>la</strong> collection si variée <strong>de</strong>s bandits et <strong>de</strong>s voleurs<br />

<strong>de</strong> l'Empire <strong>du</strong> Milieu. C'est <strong>la</strong> Société dite : <strong>de</strong>s Escamoteurs en<br />

détail, Siâo-Lue. Elle existe et fonctionne dans tous les gros<br />

bourgs ; elle a ses succursales et ses correspondants dans les<br />

vil<strong>la</strong>ges qui, sans être p.297 considérables, ont régulièrement <strong>de</strong><br />

petits marchés, ou bien possè<strong>de</strong>nt une pago<strong>de</strong> près <strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle se<br />

tiennent annuellement <strong>de</strong>s assemblées religieuses, ou <strong>de</strong>s foires.<br />

La Société <strong>de</strong>s Siâo-Lue n'admet dans ses rangs que <strong>de</strong>s<br />

candidats intelligents, dont <strong>la</strong> physionomie n'ait rien <strong>de</strong> rebutant<br />

ni <strong>de</strong> crapuleux. Leur extérieur doit être avenant, leurs manières<br />

polies, leur tenue irréprochable, sans être uniforme toutefois.<br />

Si quelque membre <strong>du</strong> Siâo-Lue est pris <strong>la</strong> main dans les<br />

poches d'autrui, il ne verra pas voler à son secours, comme ce<strong>la</strong><br />

se pratique dans <strong>la</strong> société <strong>du</strong> Kan-tâo-Hoei, ses confrères et ses<br />

amis ; tous, au contraire, le désavouent. Ses collègues, et surtout<br />

les inspecteurs, qui se rencontrent partout pour surveiller les<br />

manœuvres <strong>de</strong> leurs subalternes, sont les premiers à crier : au<br />

voleur ! l'arrêtent et le con<strong>du</strong>isent au corps <strong>de</strong> gar<strong>de</strong> ou le livrent<br />

à <strong>la</strong> police, pour lui faire administrer une correction dont il puisse<br />

se souvenir longtemps.<br />

Lorsque vous allez au marché, soyez convaincu d'avance que<br />

les agents <strong>du</strong> Siâo-Lue vous y atten<strong>de</strong>nt. Entrez-vous chez un<br />

pharmacien, un bou<strong>la</strong>nger ou un passementier, gar<strong>de</strong>z-vous bien<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong>isser votre besace à <strong>la</strong> porte : ne <strong>la</strong> déposez pas même<br />

auprès <strong>du</strong> comptoir. Le plus sûr est <strong>de</strong> <strong>la</strong> tenir sur votre épaule,<br />

serrant fortement, <strong>de</strong> <strong>la</strong> main, le bout p.298 <strong>du</strong> bissac où sont vos<br />

sapèques, votre pipe ou votre b<strong>la</strong>gue.<br />

Si vous faites un petit commerce sur le marché ou sur <strong>la</strong> rue,<br />

si vous ven<strong>de</strong>z <strong>du</strong> grain à <strong>la</strong> halle, tâchez <strong>de</strong> ne pas avoir <strong>de</strong><br />

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