Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne
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Associations de la Chine remparts et contemplaient, avec calme, cette bruyante troupe de marchands sans capitaux. Le soir, ayant eu occasion de faire visite au sous-préfet, p.293 Che-Chiâo-kiai, un ami de vieille date, je l'entendis me dire les choses les plus curieuses sur le compte des Yen-Lue-tze. — Les marchands de sel, disait-il avec colère, sont de vraies sangsues qui s'engraissent de la substance du peuple. Grâce aux droits considérables qu'ils paient au gouvernement central, on peut dire que leur situation est, presque partout, indépendante de l'autorité locale. Ils ont leurs gardes, arrêtent et châtient, souvent sans l'aveu du représentant de l'autorité régulière, les malheureux ouvriers qui, tirant profit des efflorescences de nitre dont leur champ ou leur jardin est couvert, fabriquent une sorte de mauvais sel qui leur évite la peine d'aller au Yen-Pou. Leur arrogance est sans égale ; si le magistrat, informé que les poids et mesures de leurs magasins ne sont pas conformes à la justice, se hasarde à faire une observation, à prendre en main les intérêts de son peuple, le voilà, à partir de ce jour, devenu un ennemi, un adversaire dont il faut se débarrasser à tout prix. Ces bandes de musulmans qui les pillent, sont des bandits ; ils méritent la corde ; mais quels reproches voulez-vous faire à ce pauvre peuple qui achète leur sel ?... Patron et Fête patronale des Yen-Lue-tze. — Le saint que les âniers du sel se sont donné pour protecteur, est Kouang-Tchong, ministre du roi de Tsi qui régnait, environ sept cents p.294 ans avant notre ère. Voici, à peu près textuellement, la légende qui en fait, sinon un saint ou un dieu, au moins un homme célèbre. 234
Associations de la Chine Les trésors de la cour étaient épuisés ; le luxe et l'amour du plaisir, cependant, augmentaient de jour en jour ; que faire ? Le roi qui connaissait le génie et le dévoûment de son ministre, lui ordonna de décréter de nouveaux impôts qui, sans être trop à charge au peuple, pussent pourtant rétablir l'equilibre des finances royales. Jusque là, le sel n'avait pas payé de droit, moins encore était-il le monopole du gouvernement ou d'une société d'actionnaires. Kouang-Tchong l'imposa ; il préleva des taxes jusque sur le poisson, le bois de construction, les barques et les voitures. Ce fut là tout le mérite de ce grand homme ! Singulier renversement d'idées ! Ce sont les marchands et les monopoleurs qui devraient célébrer les bienfaits et la mémoire de Kouang-Tchong, puisque c'est lui qui le premier régularisa et taxa les salines et les entrepôts, ouvrant ainsi la porte aux abus et aux convoitises d'entrepreneurs et de marchands sans probité comme sans pudeur. Mais les Chinois, on l'assure du moins, ne sont pas habitués à penser comme tout le monde ; aussi leurs négociants en sel ont- ils mieux aimé se passer du patronage de Kouang-Tchong que d'en priver les Yen-Lue-tze, leurs p.295 associés ! Demandez à ces derniers pourquoi ils vénèrent la mémoire d'un ministre qui favorisa, au détriment du peuple, le commerce et le monopole du sel : ils vous répondent en riant : — Mais rien de plus simple que le motif de nos préférences : s'il n'y avait pas de taxe sur le sel, il ne serait pas libre à ceux qui en ont l'entreprise de le vendre dix fois plus qu'il ne leur a coûté : alors comment pourrions-nous en conscience piller leurs magasins ? 235
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marchands sans capitaux. Le soir, ayant eu occasion <strong>de</strong> faire<br />
visite au sous-préfet, p.293 Che-Chiâo-kiai, un ami <strong>de</strong> vieille date,<br />
je l'entendis me dire les choses les plus curieuses sur le compte<br />
<strong>de</strong>s Yen-Lue-tze.<br />
— Les marchands <strong>de</strong> sel, disait-il avec colère, sont <strong>de</strong><br />
vraies sangsues qui s'engraissent <strong>de</strong> <strong>la</strong> substance <strong>du</strong><br />
peuple. Grâce aux droits considérables qu'ils paient au<br />
gouvernement central, on peut dire que leur situation<br />
est, presque partout, indépendante <strong>de</strong> l'autorité locale.<br />
Ils ont leurs gar<strong>de</strong>s, arrêtent et châtient, souvent sans<br />
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malheureux ouvriers qui, tirant profit <strong>de</strong>s efflorescences<br />
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peine d'aller au Yen-Pou. Leur arrogance est sans égale ;<br />
si le magistrat, informé que les poids et mesures <strong>de</strong><br />
leurs magasins ne sont pas conformes à <strong>la</strong> justice, se<br />
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intérêts <strong>de</strong> son peuple, le voilà, à partir <strong>de</strong> ce jour,<br />
<strong>de</strong>venu un ennemi, un adversaire dont il faut se<br />
débarrasser à tout prix. Ces ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong> musulmans qui<br />
les pillent, sont <strong>de</strong>s bandits ; ils méritent <strong>la</strong> cor<strong>de</strong> ; mais<br />
quels reproches voulez-vous faire à ce pauvre peuple qui<br />
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Patron et Fête patronale <strong>de</strong>s Yen-Lue-tze. — Le saint que les<br />
âniers <strong>du</strong> sel se sont donné pour protecteur, est Kouang-Tchong,<br />
ministre <strong>du</strong> roi <strong>de</strong> Tsi qui régnait, environ sept cents p.294 ans<br />
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