Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne
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Associations de la Chine Le système du monopole sur le sel, en Chine, demanderait ici des explications et des développements qui sortent de mon sujet : il suffit de dire que les magasins centraux, aussi bien que les dépôts et entrepôts établis dans les chefs-lieux de sous- préfecture et dans les bourgades où se tiennent régulièrement des foires et des marchés, sont exécrés du peuple 1 . Les sociétaires du Yen-Lue-tze le savent bien ; aussi se passe-t-il peu d'années sans que plusieurs districts des provinces septentrionales, et celle du Tché-Ly surtout, reçoivent leur visite et leurs marchands. Pour établir leur commerce, les « associés des ânes » n'ont pas grands frais à faire. Chacun se procure, soit à prix d'argent, soit au moyen de quelque industrie, communément p.291 pratiquée dans leur pays, deux ânes et quatre sacs de toile d'emballage ; on se réunit alors, et le magasin de sel le plus voisin est pris d'assaut. S'opposer aux envahisseurs, personne n'y pense ; où trouver des bras ?... Les commis de la maison n'ont rien à gagner dans une tentative de résistance. S'ils filent doux, se montrent polis, on se contentera de les garder à vue. Si, au contraire, ils semblaient vouloir faire mauvaise mine, on leur allonge quelques douzaines de coups de fouet, tout en les attachant aux colonnes de la vérandah ou bien aux arbres qui sont les plus rapprochés de la porte du magasin. Les paniers et les sacs du Yen-Pou, dépôt de sel, sont-ils vides et les ânes chargés, cette masse compacte de gens et de 1 Quand on connaît les abus qui, grâce à l'incurie, à l'insouciance du gouvernement, se sont introduits dans le commerce du sel, et deviennent chaque jour plus criants, on est tenté de pardonner à ce peuple des campagnes, si pauvre, d'ailleurs si fidèle aux lois de son pays. Nous devons ajouter, à sa décharge, que, généralement, les mandarins les plus intègres, gardent une attitude fort indifférente, presque approbative, et se tiennent renfermés au fond de leurs palais, quand on leur signale la présence des Yen-Lue-tze dans leurs districts. Aussi, le peuple se regarde-t-il comme autorisé à profiter du bon marché qui lui est offert. 232
Associations de la Chine quadrupèdes, les uns criant, les autres poussant des braiements qui s'entendent de dix lys à la ronde, se met en mouvement et va, dans les villages voisins, offrir du sel aux amateurs... Un enfant, occupé à jouer dans la campagne, a-t-il aperçu de loin cette longue file d'individus armés de lances et d'ânes chargés de sel, il court aussitôt à la maison, sautant, gambadant et criant : — Voilà les ânes ! En un instant, tout le village est sur pied, les hommes se précipitent au devant de la troupe, lui faisant signe d'avancer et de venir chez eux. C'est une fureur ! Les femmes, le p.292 visage radieux, sont déjà, elles aussi, sur la place, ou aux abords du hameau, tenant d'une main leurs énormes salières en bois ou en carton, et de l'autre, quelques centaines de sapèques. Les ânes arrivent : on les acclame ; on les appelle les amis, les sauveurs du pauvre peuple. C'est une fête, un vrai triomphe, qui doit flatter le cœur des négociants en sel et faire dresser les oreilles à leurs auxiliaires. Comme le sel n'a pas coûté cher à ces industriels, ils leur est aisé de le céder à bon compte, et de donner forte mesure ; ils y sont, d'ailleurs, intéressés ; car, les particuliers feront ainsi une provision plus considérable, et, les sacs étant promptement débarrassés, il sera permis aux ânes de passer plus tôt à un deuxième, puis à un troisième magasin pour y procéder comme on l'a fait au premier. Il y a quinze jours à peine, près de six cents de ces braves commis-voyageurs sillonnaient, en long et en large, le territoire de Ou-Kiâo, pillaient, comme par enchantement, sept ou huit des plus riches dépôts de sel, et passaient solennellement sous les murs de la ville, sans que personne prît la peine de vérifier leur patente. Les habitants de la cité se pressaient en foule sur les 233
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— Voilà les ânes !<br />
En un instant, tout le vil<strong>la</strong>ge est sur pied, les hommes se<br />
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arrivent : on les acc<strong>la</strong>me ; on les appelle les amis, les sauveurs<br />
<strong>du</strong> pauvre peuple. C'est une fête, un vrai triomphe, qui doit<br />
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Il y a quinze jours à peine, près <strong>de</strong> six cents <strong>de</strong> ces braves<br />
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