Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne

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14.07.2013 Views

Associations de la Chine recommandations, et malheureusement ces recommandations, dans l'empire du Milieu, se paient trop cher pour la bourse de ceux qui en ont besoin. A Péking, et dans toutes les capitales de provinces, on rencontre des centaines de stagiaires sans rétribution, partant, sans moyens d'existence, qui, malgré leurs talents et leur science, végètent dans l'oubli et la misère. Pour prendre leur degré de bachelier, de licencié ou de docteur, pour obtenir un brevet de magistrat surnuméraire, ils ont dépensé jusqu'à leur dernier sou, et peut-être contracté d'énormes dettes, dont ils ne peuvent pas même payer les intérêts. Qui se ressemble, s'assemble, dit le proverbe. Ces étudiants en droit, ces mandarins sans portefeuille voyant que leurs cheveux commencent à blanchir et leurs écus à s'épuiser, se réunissent en Société et, après s'être donné solennellement le nom de Frères, se décident à choisir parmi eux un candidat que la Société tout entière tâchera de faire sortir des surnuméraires. Ordinairement, c'est le sort qui désigne l'aspirant. Cette élection faite, les Frères de l'avancement étreignent fortement les reins de leur coffre, et tâchent d'en faire sortir la somme fixée pour chaque souscripteur. C'est alors que commence l'opération de la promotion. Le p.252 candidat dispose de quinze cents taëls ; c'est autant qu'il en faut pour faire les démarches, graisser la main à celui-ci et à celui-là, et, finalement, obtenir un diplôme de sous-préfet. Inutile de dire qu'à peine en charge, son premier soin sera de battre monnaie pour travailler à une nouvelle promotion. Toutefois, l'expérience a appris au peuple que les mandarins parvenus, promptement et sans efforts, aux charges publiques, 202

Associations de la Chine ne sont pas toujours plus capables ni moins cupides que ces lettrés sans fortune. Parmi ceux qui ont traité des institutions de la Chine, de son gouvernement, de sa magistrature, quelques-uns l'ont fait avec une admiration qui a trouvé des désapprobateurs. D'autres, au contraire, réservant exclusivement pour la civilisation européenne leurs sympathies et leur enthousiasme, ont, en passant, jeté un regard de dédain sur ce qu'ils nomment le vieux gouvernement de la Chine. C'est surtout quand il est question des magistrats, qu'ils donnent libre champ à leur belle humeur. Les mandarins sont des « Ogres » qui mangent, dévorent leurs administrés. Bref, avec de tels maîtres, le peuple chinois est le plus à plaindre de tous les peuples de la terre... Assurément, je n'ai pas la prétention de me faire l'avocat de la magistrature chinoise, pour laquelle je n'ai professé, jusqu'ici, qu'un culte p.253 fort modeste. Pourtant, un simple et rapide exposé que je vous donnerai ici, au vol de ma plume, vous mettra peut-être à même de dégager un peu la responsabilité des mandarins subalternes dans une désorganisation dont le gouvernement seul est justiciable devant l'opinion publique. Chaque sous-préfet relève de six grands tribunaux, sans compter les ministres de la capitale ; et, comme il est le seul qui puisse communiquer directement avec le peuple, qu'il cumule, d'ailleurs, les fonctions de magistrat, de percepteur des tailles... qu'il est enfin seul en état de faire de l'argent, c'est aussi à lui que revient l'honneur de suppléer à l'insuffisance des honoraires assignés à ses supérieurs par le budget des finances. S'il paie bien, il sera considéré, peut-être promu à une charge plus élevée, ou, du moins, maintenu dans celle qu'il accepte. 203

<strong>Associations</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong><br />

ne sont pas toujours plus capables ni moins cupi<strong>de</strong>s que ces<br />

lettrés sans fortune.<br />

Parmi ceux qui ont traité <strong>de</strong>s institutions <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong>, <strong>de</strong> son<br />

gouvernement, <strong>de</strong> sa magistrature, quelques-uns l'ont fait avec<br />

une admiration qui a trouvé <strong>de</strong>s désapprobateurs. D'autres, au<br />

contraire, réservant exclusivement pour <strong>la</strong> civilisation européenne<br />

leurs sympathies et leur enthousiasme, ont, en passant, jeté un<br />

regard <strong>de</strong> dédain sur ce qu'ils nomment le vieux gouvernement<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong>. C'est surtout quand il est question <strong>de</strong>s magistrats,<br />

qu'ils donnent libre champ à leur belle humeur. Les mandarins<br />

sont <strong>de</strong>s « Ogres » qui mangent, dévorent leurs administrés.<br />

Bref, avec <strong>de</strong> tels maîtres, le peuple chinois est le plus à p<strong>la</strong>indre<br />

<strong>de</strong> tous les peuples <strong>de</strong> <strong>la</strong> terre...<br />

Assurément, je n'ai pas <strong>la</strong> prétention <strong>de</strong> me faire l'avocat <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

magistrature chinoise, pour <strong>la</strong>quelle je n'ai professé, jusqu'ici,<br />

qu'un culte p.253 fort mo<strong>de</strong>ste. Pourtant, un simple et rapi<strong>de</strong><br />

exposé que je vous donnerai ici, au vol <strong>de</strong> ma plume, vous<br />

mettra peut-être à même <strong>de</strong> dégager un peu <strong>la</strong> responsabilité <strong>de</strong>s<br />

mandarins subalternes dans une désorganisation dont le<br />

gouvernement seul est justiciable <strong>de</strong>vant l'opinion publique.<br />

Chaque sous-préfet relève <strong>de</strong> six grands tribunaux, sans<br />

compter les ministres <strong>de</strong> <strong>la</strong> capitale ; et, comme il est le seul qui<br />

puisse communiquer directement avec le peuple, qu'il cumule,<br />

d'ailleurs, les fonctions <strong>de</strong> magistrat, <strong>de</strong> percepteur <strong>de</strong>s tailles...<br />

qu'il est enfin seul en état <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> l'argent, c'est aussi à lui<br />

que revient l'honneur <strong>de</strong> suppléer à l'insuffisance <strong>de</strong>s honoraires<br />

assignés à ses supérieurs par le budget <strong>de</strong>s finances.<br />

S'il paie bien, il sera considéré, peut-être promu à une charge<br />

plus élevée, ou, <strong>du</strong> moins, maintenu dans celle qu'il accepte.<br />

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