Associations de la Chine, Lettres du P. Leboucq ... - Chine ancienne

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14.07.2013 Views

Associations de la Chine supplée à cette détresse financière, et se fait gloire de braver les caprices et les surprises de l'impitoyable moissonneuse. p.222 Quand un membre de l'association a perdu son père ou sa mère, il n'a rien de plus pressé, après avoir versé les larmes et fait entendre les cris de douleur requis par l'usage, que de songer aux préparatifs des funérailles. Il prend une pièce de toile et la coupe en autant de morceaux que l'association compte de confrères. Alors, la femme de la maison s'arme d'une aiguille et coud à grands points, ces morceaux de toile, en leur donnant la forme d'un chapeau de gendarme. Ce travail achevé, les amis et les proches du défunt se partagent les bonnets, et se dispersent pour aller les porter aux membres de la société du Pei-Hoei. A peine ces derniers ont-ils reçu cette lettre de faire-part, qu'ils ouvrent leur coffre, en tirent dix ou douze mille sapèques et vont eux-mêmes les porter à la maison mortuaire. En général, ces contributions fraternelles, toutes dépourvues de charité qu'elles sont, ne laissent pas pourtant de rendre les plus grands services aux familles peu aisées, en leur évitant un emprunt ruineux. Patron de la Société du Pei-Hoei. — La nouvelle confrérie du Blanc, qui n'est tout simplement qu'une association d'agio, se contente d'implorer l'assistance de ce fameux prédicateur de la Métempsycose que vous connaissez déjà, Mou-lien-seng, celui qui pénétra dans les Enfers, malgré Pluton, et valut la p.223 liberté à tant de milliers d'âmes ! Les anciens fondateurs du Pei-Hoei, au contraire, auraient rougi de prendre, pour leur patron, un bonze dont ils méprisaient les stupides aventures. Leur maître, et leur protecteur, est un lettré qui vivait dans le royaume de Tsi (trois cent cinquante ans avant JÉSUS-CHRIST), et s'appelait Fong-Nan. Quoique fort érudit et capable d'occuper les plus grandes 180

Associations de la Chine charges, Fong-Nan, comme tant d'autres, eut le malheur d'être longtemps oublié et méconnu. Un soir, pendant qu'il était occupé à composer des vers sur les souffrances et les privations de la pauvreté, un page vint lui annoncer que le roi avait à lui parler. A cette nouvelle, Fong-Nan abandonne la poésie, se lève gravement, et, sans prendre la peine de changer d'habits, suit l'envoyé du prince... En entrant au palais, il voit tous les regards des courtisans attachés sur lui. On rit, on chuchote à la vue du poète en haillons. Fong-Nan demeure impassible ; il considère avec un sourire de mépris les brillantes toilettes des officiers de la cour, et, bientôt, franchit la porte des appartements royaux. Ses études et ses méditations lui ont appris que la pauvreté n'est ni un crime, ni un déshonneur. Et qui sait si ce n'est pas à Fong-Nan que nous devons le proverbe : L'habit ne fait pas le moine ? — Dix-huit districts de mes États sont en retard p.224 pour le paiement de leurs impôts, lui dit le roi, et les fonctionnaires locaux, malgré leurs édits et leurs poursuites, demeurent impuissants à se faire payer. Seriez-vous homme, vous, Fong-Nan, à remplir avec succès la haute charge de collecteur royal ? Déjà dix- sept officiers sont partis ; vous serez le dix-huitième ; et, pour juger si ce que l'on dit de vous est vrai, je vous charge du district le plus opiniâtre et le plus rebelle. Si les contribuables ne peuvent payer leurs redevances en espèces, vous les toucherez en nature. Amenez-moi des chevaux ou des mulets, des bœufs ou des ânes, apportez des grains ou des étoffes. Peu importe ; partez, et soyez impitoyable. 181

<strong>Associations</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong><br />

supplée à cette détresse financière, et se fait gloire <strong>de</strong> braver les<br />

caprices et les surprises <strong>de</strong> l'impitoyable moissonneuse.<br />

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Quand un membre <strong>de</strong> l'association a per<strong>du</strong> son père ou sa<br />

mère, il n'a rien <strong>de</strong> plus pressé, après avoir versé les <strong>la</strong>rmes et<br />

fait entendre les cris <strong>de</strong> douleur requis par l'usage, que <strong>de</strong> songer<br />

aux préparatifs <strong>de</strong>s funérailles. Il prend une pièce <strong>de</strong> toile et <strong>la</strong><br />

coupe en autant <strong>de</strong> morceaux que l'association compte <strong>de</strong><br />

confrères. Alors, <strong>la</strong> femme <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison s'arme d'une aiguille et<br />

coud à grands points, ces morceaux <strong>de</strong> toile, en leur donnant <strong>la</strong><br />

forme d'un chapeau <strong>de</strong> gendarme. Ce travail achevé, les amis et<br />

les proches <strong>du</strong> défunt se partagent les bonnets, et se dispersent<br />

pour aller les porter aux membres <strong>de</strong> <strong>la</strong> société <strong>du</strong> Pei-Hoei. A<br />

peine ces <strong>de</strong>rniers ont-ils reçu cette lettre <strong>de</strong> faire-part, qu'ils<br />

ouvrent leur coffre, en tirent dix ou douze mille sapèques et vont<br />

eux-mêmes les porter à <strong>la</strong> maison mortuaire. En général, ces<br />

contributions fraternelles, toutes dépourvues <strong>de</strong> charité qu'elles<br />

sont, ne <strong>la</strong>issent pas pourtant <strong>de</strong> rendre les plus grands services<br />

aux familles peu aisées, en leur évitant un emprunt ruineux.<br />

Patron <strong>de</strong> <strong>la</strong> Société <strong>du</strong> Pei-Hoei. — La nouvelle confrérie <strong>du</strong><br />

B<strong>la</strong>nc, qui n'est tout simplement qu'une association d'agio, se<br />

contente d'implorer l'assistance <strong>de</strong> ce fameux prédicateur <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Métempsycose que vous connaissez déjà, Mou-lien-seng, celui qui<br />

pénétra dans les Enfers, malgré Pluton, et valut <strong>la</strong> p.223 liberté à<br />

tant <strong>de</strong> milliers d'âmes ! Les anciens fondateurs <strong>du</strong> Pei-Hoei, au<br />

contraire, auraient rougi <strong>de</strong> prendre, pour leur patron, un bonze<br />

dont ils méprisaient les stupi<strong>de</strong>s aventures. Leur maître, et leur<br />

protecteur, est un lettré qui vivait dans le royaume <strong>de</strong> Tsi (trois<br />

cent cinquante ans avant JÉSUS-CHRIST), et s'appe<strong>la</strong>it Fong-Nan.<br />

Quoique fort érudit et capable d'occuper les plus gran<strong>de</strong>s<br />

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