Les visages du cauch.. - Free

Je vis Karen s’élancer vers les rails, prendre Lucy dans
ses bras et tomber de côté sur le remblai. Je vis mon
propre corps, debout devant le train, qui était moi. Derrière
moi, je voyais la plus noire des ombres tourbillonnantes,
qui était Misquamacus. Ses bras étaient levés, et son
visage grouillait de serpents. C’était ce qu’il était, le
serviteur des Grands Anciens, il n’était plus un faiseur de
prodiges mais un moyen par lequel les esprits très anciens
et malfaisants de l’Amérique pourraient trouver leur chemin
de retour vers la réalité, et nous détruire tous.
Il commença à se soulever en vagues et à ondoyer vers
mon corps abandonné, telle une couverture de soie noire
jetée sur un lit. Mais je me dis: je préfere le tuer plutôt que
de le laisser faire ça. Et parce que j’avais l’esprit d’un train
et le poids d’un train, je court-circuitai les contrôles de
vitesse et le train commença à reprendre de la vitesse, de
plus en plus. Bientôt il fonçait à plus de 100 km/h vers mon
corps qui titubait.
L’ombre noire de l’esprit de Misquamacus s’engouffra
dans mon corps comme de la fumée dans un tuyau. Je
chancelai et me tournai vers le train qui arrivait.
Mais il était trop tard. A l’intérieur des ordinateurs du
train, mon esprit se répandait comme du feu liquide à
travers chaque contrôle de vitesse, à travers chaque
commande de freinage, et rien sur cette terre n’aurait pu
stopper ce monstre d’acier ni l’empêcher de me heurter de