Les visages du cauch.. - Free

-Misquamacus, je veux toucher ta main.
Je tournai la tête et, durant un instant, je vis Singing Rock
qui marchait à mes côtés, paré des plumes, des perles et
des plus beaux atours d’un faiseur de prodiges qualifié.
Mais dès que je regardai, il disparut, et lorsque je tournai
de nouveau la tête, je ne m’avançais plus à travers la
prairie, je marchais parmi les étoiles, enfoncé jusqu’aux
genoux… tout là-haut dans le ciel, sur la Route Suspendue,
où les esprits m’accompagnaient.
J’entendis un crépitement électrique. J’ouvris les yeux.
Karen et Lucy fermaient les yeux à présent, et elles
continuaient de psalmodier, doucement et de façon
monotone, comme si elles étaient hypnotisées. Les
ombres projetées par la veilleuse japonaise s’inclinaient et
tremblotaient, semblables à des fantômes en train de
danser. J’entendis le crépitement de nouveau, plus fort
cette fois, et je sentis l’odeur d’ozone âcre d’un puissant
court-circuit électrique. L’air autour de Lucy commença à
ondoyer et à se défor-mer, comme des ondes de chaleur
sur un trottoir au coeur de l’été.
Karen ouvrit les yeux brusquement. Elle jeta un regard à
Lucy et vit ce que je voyais également. Une silhouette
énorme, voûtée, formée d’ombre et de lumière réfractée,
presque invisible à l’oeil nu. Cette forme changeait et se
transformait continuellement, mais sa présence était si
intense que Karen et moi ne pouvions nous méprendre sur