Les visages du cauch.. - Free

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14.07.2013 Views

que ses mains s’étaient rétrécies en des serres décharnées, aux doigts semblables à des bâtonnets et aux veines saillantes. Glenys lança à David un regard effrayé, mais David porta son index à ses lèvres, pour lui dire de se taire et de ne pas s’inquiéter. Le séjour fut inondé de la lumière du soleil, l’une des journées les plus ensoleillées depuis des semaines. Le menton d’Ellis tomba sur sa poitrine, puis sa poitrine s’affaissa à l’intérieur de son gilet, comme une cage d’oiseau en bambou pourrie, et les jambes de son pantalon semblèrent se vider comme si elles contenaient seulement des os. Sous leurs yeux, Ellis Morgan s’effrita littéralement, et tomba en morceaux. Durant un moment, son visage eut une expression de béatitude, le visage d’un saint celtique, lisse, parfait, et martyrisé. -Que Dieu te bénisse et se souvienne de toi, Ellis ! dit David. Puis le visage disparut. Il se brisa comme de l’argile sèche et glissa doucement dans le col de sa chemise. Lorsque le soleil illumina finalement son fauteuil, il ne restait que de vieux vêtements pliés et de la poussière. Glenys se tenait près de la porte du séjour, sa main pla-

quée sur sa bouche; ses yeux brillaient de douleur. David la rejoignit et passa son bras autour de ses épaules. -Nous l’avons vu, dit-il, il était vraiment ici. Et je suis sûr que tous les autres étaient, eux aussi, auprès de leurs familles, cette nuit, tous sans exception. Glenys hocha la tête mais elle était incapable de parler. La pendule sur la tablette de la cheminée sonna sept heures. Cet après-midi-là, David et le vieux Glyn Bachelor s’avançaient parmi les jardins ouvriers où flottait une odeur prononcée de choux de Bruxelles et de poussière de charbon. Les nuages bas ressemblaient à des draps mis à sécher. Nye courut le long des rangées de pommes de terre trop grosses, et aboya après un rat d’eau. La Rhymney s’écoulait doucement et murmurait sur les pierres. Ce fut Nye qui trouva l’endroit où les hommes de Maes-y-Dderwen étaient remontés vers la lumière. C’était un trou de mine saturé d’eau, à moitié écroulé, au bord de la rivière, recouvert de feuilles de patience et d’orties. -Bravo, Nye, dit le vieux Glyn Bachelor. David se pencha et chercha à percer l’obscurité.

quée sur sa bouche; ses yeux brillaient de douleur. David la<br />

rejoignit et passa son bras autour de ses épaules.<br />

-Nous l’avons vu, dit-il, il était vraiment ici. Et je suis sûr<br />

que tous les autres étaient, eux aussi, auprès de leurs<br />

familles, cette nuit, tous sans exception.<br />

Glenys hocha la tête mais elle était incapable de parler.<br />

La pen<strong>du</strong>le sur la tablette de la cheminée sonna sept<br />

heures.<br />

Cet après-midi-là, David et le vieux Glyn Bachelor<br />

s’avançaient parmi les jardins ouvriers où flottait une odeur<br />

prononcée de choux de Bruxelles et de poussière de<br />

charbon. <strong>Les</strong> nuages bas ressemblaient à des draps mis à<br />

sécher. Nye courut le long des rangées de pommes de<br />

terre trop grosses, et aboya après un rat d’eau.<br />

La Rhymney s’écoulait doucement et murmurait sur les<br />

pierres. Ce fut Nye qui trouva l’endroit où les hommes de<br />

Maes-y-Dderwen étaient remontés vers la lumière. C’était<br />

un trou de mine saturé d’eau, à moitié écroulé, au bord de<br />

la rivière, recouvert de feuilles de patience et d’orties.<br />

-Bravo, Nye, dit le vieux Glyn Bachelor.<br />

David se pencha et chercha à percer l’obscurité.

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