Talons aiguilles et peinture fraîche (Harlequin Red Dress Ink) - Free

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Pour commencer, l’extérieur est sans conteste séduisant.
Volets noirs, larges rebords de fenêtres, cheminée de briques rouges. Sur le côté, un auvent dont le
toit descend assez bas, soutenu par quatre gros piliers carrés. Aucun fauteuil à bascule, mais on peut
facilement les imaginer.
Et aussi nous imaginer ici.
En train de nous détendre dans le salon avec le journal du dimanche ou de recevoir la famille dans
la salle à manger avec buffet incorporé dans l’angle du mur. Ou encore de border nos enfants dans les
deux chambres du haut, sous les combles.
Vous vous souvenez que dans la maison du défunt régnait une atmosphère morbide ?
Ici, c’est l’inverse. Une aura de tendresse, de bonheur.
Pas étonnant.
— Les propriétaires actuels, nous informe Verna, Hank et Marge…
Hank et Marge. Vous ne trouvez pas ça adorable ? Moi qui parlais de délicieusement démodé !
— … vivent ici depuis leur mariage en 1950.
— 1950 ? dis-je en écho, tout en ouvrant et fermant les portes du petit placard qui encadre la
cheminée de briques dans le salon.
Les étagères sont chargées de douzaines et de douzaines de romans à l’eau de rose en édition de
poche.
— Oui, et ils y ont élevé leurs six enfants. Maintenant Hank souffre d’emphysème, et ils ne peuvent
plus entretenir la maison. Ils vont déménager dans un appartement afin de se rapprocher de leur fille et
leur gendre dans le Duchess County.
Un bref instant, un sentiment doux-amer me traverse. Je nous imagine, Jack et moi, mariés depuis
presque soixante ans, lui souffrant d’emphysème, incapable d’entretenir notre maison, moi ployant sous
des piles de romans à l’eau de rose — nous serions obligés de déménager dans un appartement du
Duchess County près de notre fille, Daisy ou Lily, pas encore née, et de notre gendre.
A moins que ce ne soit moi qui souffre d’emphysème. J’ai fumé autrefois. Plus je vieillis, plus j’ai
du mal à croire que j’aie passé ces années à tirer sur une cigarette sans m’inquiéter outre mesure des
dommages mortels infligés à mon corps.
Peut-être me suis-je inquiétée. Mais vaguement. Pas assez pour arrêter. Quelle idiote.
Maintenant, tout ce que je désire, c’est vivre bien vieille auprès de mon mari.
Oh, l’autre chose que je désire, tout aussi désespérément ? Cette maison du catalogue Sears.
Soyons clairs : tout n’est pas idyllique.
La maison pue le tabac froid et est tapissée de papier peint, de panneaux bruns et d’une moquette