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Talons aiguilles et peinture fraîche (Harlequin Red Dress Ink) - Free

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devenu.<br />

— Bien sûr que si. C<strong>et</strong>te semaine, en tout cas. Tu as été hanté par le fantôme d’Anna Nicole, tu as<br />

trois psys <strong>et</strong> une peur aiguë des chevaux.<br />

Je me penche par-dessus la table <strong>et</strong> lui prends la main, sentant que ce n’est pas le moment de<br />

plaisanter.<br />

— Raphael, je te connaîtrai toujours, je t’aimerai toujours <strong>et</strong> je serai toujours ton amie.<br />

— Tu m’as abandonné.<br />

— Je suis là aujourd’hui, non ?<br />

— Parce que tu t’es sentie obligée d’être là. Tu ne voulais pas vraiment venir.<br />

— Bien sûr que si.<br />

D’accord, pas vraiment. Je voulais surtout échapper au spectacle des jumelles.<br />

Mais maintenant que je me trouve ici, avec lui, je suis contente. Je l’adore. Je trouve simplement<br />

qu’il exagère. C’est un ami exclusif <strong>et</strong>, c<strong>et</strong>te semaine, je suis trop épuisée pour gérer les amis exclusifs.<br />

— Je te garantis que tu ne vas pas faire longtemps des allers-r<strong>et</strong>ours à New York, Tracey. Dans peu<br />

de temps, tu seras une mère au foyer. C’est ce qui est arrivé à toutes les femmes avec qui j’ai travaillé.<br />

Elles s’évanouissent toutes, une par une, dans les banlieues.<br />

Mon Dieu. A l’entendre, c’est sinistre.<br />

— Je ne suis même pas encore mère, fais-je remarquer. Alors ne t’inquiète pas de ça.<br />

— Mais tu le deviendras un jour, Tracey. Non ?<br />

Je reste silencieuse. Je sais où il veut en venir. Que puis-je répondre d’autre que :<br />

— Si.<br />

— C’est ce que je veux dire. Tu feras ta vie là-bas, auras des bébés, <strong>et</strong> je ne te verrai plus jamais.<br />

Quelque part au fin fond de mon esprit, je ressens un pincement doux-amer. Il a peut-être raison.<br />

Bien sûr qu’il a raison. Regardez Brenda. Regardez chacune de mes amies qui a eu un bébé <strong>et</strong> quitté<br />

Manhattan.<br />

Pourtant, je rassure Raphael :<br />

— Ça n’arrivera pas.<br />

— C’est ça. Tout comme Lilly Pullitzer ne dessinera rien en rose <strong>et</strong> vert pour la collection de<br />

printemps.<br />

— Hein ?<br />

— Ça ne serait jamais arrivé si tu n’avais pas décidé de déménager.<br />

Je soupire.<br />

— Raphael, s’il te plaît, essaie de comprendre. Jack <strong>et</strong> moi avions besoin de davantage d’espace.<br />

— Je t’ai accordé quantité d’espace, Tracey. N’ai-je pas accepté de laisser tomber Suds’n Suds<br />

quand tu t’es mariée ?<br />

Suds’n Suds. Je ne peux r<strong>et</strong>enir un sourire. Raphael <strong>et</strong> moi avions ce rendez-vous hebdomadaire à la<br />

laverie automatique, où nous partagions un pack de bière en regardant nos vêtements tournoyer dans les<br />

machines à laver.<br />

— Ce n’est pas le genre d’espace dont nous avions besoin, Raphael, je parle d’espace au sens<br />

littéral. Notre appartement était devenu trop p<strong>et</strong>it. Nous voulions une maison.<br />

— On trouve des maisons ici même à New York.<br />

— Bien sûr, les anciennes remises à calèches qui coûtent plus de vingt millions. A propos, tu ne<br />

trouves pas ironique de désirer vivre dans une ex-remise à chevaux alors que tu souffres de<br />

chevalophobie ?<br />

— Hippophobie, <strong>et</strong> ce n’est pas du tout ironique. Tout est lié, d’après Soosan. Pour en revenir à<br />

toi…<br />

— N’en revenons pas à moi. Parlons d’autre chose.

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