Talons aiguilles et peinture fraîche (Harlequin Red Dress Ink) - Free

— Tracey, mon Dieu, reprends-toi ! dit Mary Beth, pensant évidemment que je gémis au sujet de ma
mère. Je suis certaine que tout ira bien.
— Vraiment ?
— Vraiment.
— Il faut que je vienne.
Maintenant le papier adhésif est collé à ma manche.
— Bonne idée. Viens le week-end prochain. En ce moment…
— Le week-end prochain ! Je pensais que si nous partions maintenant, Jack et moi pourrions être là
au matin.
— Tracey, il ne s’agit pas d’une urgence.
— Elle est hospitalisée aux urgences. Comment ne serait-ce pas une urgence ?
— J’ai pensé que tu devais être au courant mais je ne voulais pas t’inquiéter…
Bien sûr que si. Quand on ne veut pas inquiéter les gens, on ne les appelle que si on a des détails
concrets à leur fournir. Or il semble que maman est allongée sur une civière et pourrait bien vivre ses
derniers instants.
— Je ne crois pas que tu devrais venir si subitement, en urgence. Maman va être effrayée. Elle va
croire qu’elle est en train de mourir et que personne ne veut le lui dire.
— Est-elle en train de mourir et personne ne le lui dit ?
Et à moi non plus.
— Non ! Je viens de te le dire, je suis certaine que tout ira bien. Je pense qu’il ne s’agissait que
d’une bouffée de chaleur. Je ne cesse de lui répéter qu’il faut qu’elle fasse surveiller son dosage
hormonal.
Ai-je précisé que Mary Beth n’est pas gynécologue ?
— Qui d’autre se trouve à l’hôpital avec toi ? dis-je, espérant parler avec l’un de mes frères.
— Juste papa et Stefania.
Stefania est là ? Pourquoi ?
Je combats la vague déraisonnable de jalousie qui me submerge et me rappelle que le problème
n’est pas que Stefania prenne ma place dans la famille. Le problème, c’est ma mère, qui est à l’hôpital.
J’ouvre la bouche. Un sanglot s’en échappe.
— Tracey, ne t’inquiète pas. Elle va bien, je n’aurais pas dû t’appeler.
Je renifle.
— Non, je suis heureuse que tu l’aies fait.
— Ecoute, il faut que je retourne auprès d’elle.
— Tu me donneras le résultat des examens, d’accord ? Promis ?
Mary Beth promet, et nous raccrochons.
J’erre, solitaire, dans la maison vide, cherchant le réconfort d’un endroit familier sans en trouver
aucun. Au diable, la nouvelle maison et le nouveau départ !
Tout ce que je veux, c’est rentrer chez moi. Chez moi à Brookside.
Je veux ma maman.
* * *
Lundi, je ne ferme pas l’œil de la nuit.
Mary Beth a rappelé. Les résultats des tests n’étant pas significatifs, maman va en subir d’autres.
Mais elle a été autorisée à sortir de l’hôpital. Je me suis retenue de l’appeler sur-le-champ.
— Elle ne sait pas que tu es au courant, m’a répété Mary Beth. Elle ne voulait pas qu’on te
prévienne.