histoire - Consistoire de Paris

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ISRAËL Il eut été plus prudent pour Tsipi Livni de ne pas associer le sort des Arabes israéliens au destin de l'Etat palestinien. Cependant, cette réserve mise à part, il faut bien convenir que ses propos sont frappés du sceau de l'évidence. Tout d'abord, en tenant l'Etat palestinien pour la solution nationale offerte à tout Palestinien quel qu'il soit, où qu'il soit, - et ce point n'a été souligné par personne au cours de la polémique - Tsipi Livni a admis l'unité du peuple palestinien à travers le monde, quels que soient les avatars politiques et les cadres étatiques qui sont les siens actuellement. Elle a, en quelque sorte, appliqué au peuple palestinien la même grille d'analyse qui vaut pour le peuple juif: dispersé de facto, mais disposant d'un centre politique et national qui est le coeur de la nation. Si la Palestine indépendante est la solution nationale pour les Palestiniens, elle entendait signifier par là qu'Israël ne l'est pas et ne le sera jamais. Les Palestiniens doivent l'admettre quand bien même il n'échappe à personne que Nazareth, Jaffa, Ramlé, Beer-Sheva sur lesquelles Israël est souveraine font partie dans la conscience d'un Palestinien d'Israël de la patrie palestinienne - historiquement, culturellement, affectivement - mais non politiquement; de même que Naplouse, Hébron et Jéricho font partie d'Eretz Israël dans la conscience juive, historique, culturelle, affective, à l'exclusion du politique. Deux options Un Arabe israélien qui choisira de rester en Israël le fera d'abord et avant tout parce que la ville ou le village où il réside fait partie de sa Palestine historique. Or, cet attachement à la terre natale ne va pas sans sacrifice, a tenu à rappeler Livni: celui de la convergence entre la terre, la nation, la patrie et l'Etat. Si en tant qu'Etat juif et démocratique, Israël doit accorder droits politiques, civiques, civils et sociaux aux Arabes israéliens, à leur langue, leur religion et à leur culture, Israël ne répond pas et ne répondra pas à leurs aspirations nationales, lesquelles se traduisent par une hégémonie symbolique et effective. Qui parmi les Arabes Israéliens souhaite une telle adéquation rejoindra la Palestine arabe, ce qui implique en contrepartie le sacrifice de sa résidence en sa ville ou son village natals. Tsipi Livni aurait été bien inspirée de souligner que si les deux options existent, les Arabes Israéliens déclarent rester des citoyens israéliens, trouvant dans la création d'un Etat palestinien à côté d'Israël la satisfaction de leur revendication historique. Satisfaction maximale? Non, soyons lucides, c'est là pour eux une solution optimale, le bien qui est l'ennemi du mieux. Cette polémique doit être mise en rapport avec le débat non moins vif autour de l'exigence adressée aux Palestiniens de reconnaître non seulement le fait politique israélien mais le droit des Juifs à une patrie que reflète le caractère juif de l'Etat d'Israël. Comment interpréter cette exigence? Elle est assurément la leçon de la seconde Intifada qui a ébranlé chez les Israéliens le sentiment que les Palestiniens avaient consenti, bon gré mal gré, au partage. D'une manière générale, le débat sur cette question n'a pas tourné sur le fond mais sur l'opportunité: on est globalement d'accord pour que cette reconnaissance soit explicitement inscrite dans un traité de paix, mais alors que certains en font 16 INFORMATION JUIVE Décembre 2007 La Conférence d’Annapolis un préalable (pour empêcher le démarrage de la négociation), les autres, plus pragmatiques acceptent que la discussion soit repoussée à plus tard pourvu que la mention apparaisse au final. Le refus palestinien est à la fois compréhensible et simultanément étrange: compréhensible dans la mesure où ni l'Egypte ni la Jordanie n'ont eu à signer une clause de ce type; compréhensible dans la mesure où en acquiesçant à une telle définition, l'Etat palestinien coupe l'herbe sous les pieds des Arabes israéliens qui oeuvrent avec les moyens du politique pour aménager une définition moins exclusive de l'Etat d'Israël. Cependant, le refus palestinien est tout aussi étrange: l'O.L.P. prétend avoir reconnu depuis 1988 la résolution 181 de l'O.N.U., le fameux plan de partage du 29 novembre 1947 rejeté à l'époque par la direction politique palestinienne. Or, cette résolution stipule bien, et en toutes lettres, la création d'un Etat juif (a jewish state) et d'un Etat arabe. Autrement dit, cette précision qu'ils entendent refuser aujourd'hui, ils l'ont déjà acceptée. Cette exigence israélienne est légitime. A quoi répond-elle? A la crainte que l'ambiguïté sur cette question de la reconnaissance d'un Etat juif ne pave la voie à un irrédentisme interne (celui des Arabes israéliens) et externe (celui de la Palestine). Si on ne peut sonder les intentions secrètes présentes et futures des gens, on peut au moins, faire en sorte que si cet irrédentisme se concrétise, comme beaucoup de Juifs le redoutent, il apparaisse au moins comme une violation explicite de la lettre et de l'esprit du traité de paix, ce qui placera ainsi Israël en état de légitime défense. Mais cette ambiguïté peut être également imputée à Israël vis-vis de la Judée-Samarie qu'elle aura cédée à l'Etat palestinien. Aussi le traité de paix devrait inclure cette double reconnaissance: la Palestine comme territoire exclusif de l'Etat-nation du peuple arabe palestinien et Israël comme territoire exclusif de l'Etat-nation du peuple juif. Pour faciliter le consentement palestinien à la revendication israélienne, une épithète de plus me paraît indispensable: que l'Etat d'Israël soit explicitement reconnu comme "juif et démocratique". Ainsi les dispositions constitutionnelles envers les Arabes d'Israël ne seraient pas conditionnelles ou facultatives, mais pleinement assumées et obligatoires. Le plan de partage dont on célèbre aujourd'hui le soixantième anniversaire le prévoyait également. D.C

UN ENTRETIEN AVEC YEHOUDA LANCRY * “La bonne nouvelle c'est la reprise du dialogue israélo-palestinien” IJ : Comment jugez-vous les négociations actuelles entre Israël et les Palestiniens ? Yehouda Lancry : La bonne nouvelle c'est que le Premier ministre qui jusqu'à présent poursuivait la politique unilatérale calamiteuse de son prédécesseur Ariel Sharon semble désormais avoir trouvé la voie du dialogue avec les Palestiniens. Et je considère personnellement que sans ce dialogue entre les deux par- ties, il n'y a point de salut. Je considère donc comme une chose éminemment positive le fait que l'on dialogue depuis quelques mois avec les responsables palestiniens. La conférence d'Annapolis souhaitée par Bush et son administration était inévitable. De plus, elle redonne un cadre à ce dialogue voulu par les uns et les autres. Les résultats que l'on attend de cette conférence internationale sont plutôt réduits, modestes. Pourquoi ? Parce que les deux protagonistes sont marqués par une grande faiblesse. Chacun sait que le schisme palestinien ampute gravement la capacité d'action de Mahmoud Abbas. Celui-ci, après son élection, avait entamé une marche assez laborieuse pour asseoir son autorité. Depuis l'émergence du Hamas, cette autorité est très nettement amoindrie. J'ajoute que nous Israéliens, avons une certaine responsabilité dans cette émergence. En effet, Ariel Sharon tenait à sa politique unilatérale et il avait contribué à diminuer le rôle de leader d'Abou Mazen : cela a sans doute suscité l'émergence du Hamas. D'un autre côté, Ehoud Olmert a certes une coalition qui en surface est certes confortable mais elle est extrêmement hétéroclite sur les plans idéologique et politique. De sorte que sa marge de manœuvre est considérablement réduite, sans compter qu'il traîne désormais un certain nombre de casseroles sur le plan judiciaire. Il reste certes impopulaire mais je considère que la majorité du peuple israélien souhaite une solution. Encore faut-il qu'il y ait une capacité réelle des deux parties à mettre cette solution en application. Cette conférence d'Annapolis donnera sans doute lieu à une déclaration de principes comparable à celle d'Oslo. Peut-être Aussi longtemps que le Hamas n'est pas rattrapé par les accords d'Oslo qui fondent la reconnaissance mutuelle, ce sera difficile. mettra-t-elle en exergue les étapes qui devraient suivre comme la mise en application de la feuille de route laquelle prévoit du côté palestinien non seulement une réforme institutionnelle politique mais également sécuritaire. Ce qui signifie la mise au pas des groupes terroristes palestiniens. Mahmoud Abbas est-il en mesure d'assurer cela en prenant les résolutions nécessaires ? La question se pose. Mais on peut s'interroger également sur la capacité du gouvernement israélien à démanteler les implantations sauvages et à réduire l'expansion de celles qui existent. Tous ces éléments me semblent suffisamment lourds pour pouvoir imaginer une réussite exceptionnelle de cette conférence. Cela étant, je me félicite tout de même que cette conférence ait pu exister : nous sortons enfin d'une période d'effacement du processus de paix. IJ : Un certain nombre d'intellectuels et d'écrivains israéliens ont demandé au gouvernement de prendre l'initiative de dialoguer avec le Hamas. Qu'en pensezvous ? Y.L : C'est évidemment une demande raisonnable à la seule condition que les responsables du Hamas le veuillent également. ISRAËL Yehouda Lancry Aussi longtemps que le Hamas n'est pas rattrapé par les accords d'Oslo qui fondent la reconnaissance mutuelle, ce sera difficile. Je ne doute pas personnellement qu'une fois que le Hamas acceptera la reconnaissance de l'Etat d'Israël les choses pourront avancer plus facilement. IJ : Y a-t-il aujourd'hui en Israël une majorité disposée à faire des concessions aux Palestiniens ? Y.L : Il faut d'abord dire qu'il y a une majorité qui se dégage très clairement, de façon stable, durable et constante sur la validité d'un Etat palestinien coexistant dans la paix aux côtés de l'Etat d'Israël. A propos des concessions qu'il convient de faire, les attitudes changent d'un camp à l'autre. Je rappelle qu'en l'an 2000 , lorsque Barak avait conçu son plan de paix - il avait alors évoque la possibilité d'un retrait territorial de 95 % avec quelques rectifications de frontière mineures -, l'opinion publique semblait soutenir majoritairement ce projet. On sait que c'est l'intifada qui a ruiné ces espérances. *Ancien ambassadeur d'Israël en France et aux Nations Unies. Ehud Olmert, Geoges Bush et Mahmoud Abbas INFORMATION JUIVE Décembre 2007 17

UN ENTRETIEN AVEC YEHOUDA LANCRY *<br />

“La bonne nouvelle<br />

c'est la reprise du dialogue<br />

israélo-palestinien”<br />

IJ : Comment jugez-vous les négociations<br />

actuelles entre Israël et les Palestiniens<br />

?<br />

Yehouda Lancry : La bonne nouvelle<br />

c'est que le Premier ministre qui jusqu'à<br />

présent poursuivait la politique unilatérale<br />

calamiteuse <strong>de</strong> son prédécesseur<br />

Ariel Sharon semble désormais avoir<br />

trouvé la voie du dialogue avec les Palestiniens.<br />

Et je considère personnellement<br />

que sans ce dialogue entre les <strong>de</strong>ux par-<br />

ties, il n'y a point <strong>de</strong> salut. Je considère<br />

donc comme une chose éminemment<br />

positive le fait que l'on dialogue <strong>de</strong>puis<br />

quelques mois avec les responsables<br />

palestiniens. La conférence d'Annapolis<br />

souhaitée par Bush et son administration<br />

était inévitable. De plus, elle redonne un<br />

cadre à ce dialogue voulu par les uns et<br />

les autres. Les résultats que l'on attend<br />

<strong>de</strong> cette conférence internationale sont<br />

plutôt réduits, mo<strong>de</strong>stes. Pourquoi ? Parce<br />

que les <strong>de</strong>ux protagonistes sont marqués<br />

par une gran<strong>de</strong> faiblesse. Chacun sait que<br />

le schisme palestinien ampute gravement<br />

la capacité d'action <strong>de</strong> Mahmoud Abbas.<br />

Celui-ci, après son élection, avait entamé<br />

une marche assez laborieuse pour asseoir<br />

son autorité. Depuis l'émergence du<br />

Hamas, cette autorité est très nettement<br />

amoindrie. J'ajoute que nous Israéliens,<br />

avons une certaine responsabilité dans<br />

cette émergence. En effet, Ariel Sharon<br />

tenait à sa politique unilatérale et il avait<br />

contribué à diminuer le rôle <strong>de</strong> lea<strong>de</strong>r<br />

d'Abou Mazen : cela a sans doute suscité<br />

l'émergence du Hamas.<br />

D'un autre côté, Ehoud Olmert a certes<br />

une coalition qui en surface est certes<br />

confortable mais elle est extrêmement<br />

hétéroclite sur les plans idéologique et<br />

politique. De sorte que sa marge <strong>de</strong><br />

manœuvre est considérablement réduite,<br />

sans compter qu'il traîne désormais un<br />

certain nombre <strong>de</strong> casseroles sur le plan<br />

judiciaire. Il reste certes impopulaire mais<br />

je considère que la majorité du peuple<br />

israélien souhaite une solution. Encore<br />

faut-il qu'il y ait une capacité réelle <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux parties à mettre cette solution en<br />

application.<br />

Cette conférence d'Annapolis donnera<br />

sans doute lieu à une déclaration <strong>de</strong> principes<br />

comparable à celle d'Oslo. Peut-être<br />

Aussi longtemps que le Hamas n'est pas rattrapé<br />

par les accords d'Oslo qui fon<strong>de</strong>nt la<br />

reconnaissance mutuelle, ce sera difficile.<br />

mettra-t-elle en exergue les étapes qui<br />

<strong>de</strong>vraient suivre comme la mise en application<br />

<strong>de</strong> la feuille <strong>de</strong> route laquelle prévoit<br />

du côté palestinien non seulement<br />

une réforme institutionnelle politique<br />

mais également sécuritaire. Ce qui signifie<br />

la mise au pas <strong>de</strong>s groupes terroristes<br />

palestiniens. Mahmoud Abbas est-il en<br />

mesure d'assurer cela en prenant les résolutions<br />

nécessaires ? La question se pose.<br />

Mais on peut s'interroger également<br />

sur la capacité du gouvernement israélien<br />

à démanteler les implantations<br />

sauvages et à réduire l'expansion <strong>de</strong><br />

celles qui existent. Tous ces éléments<br />

me semblent suffisamment<br />

lourds pour pouvoir imaginer une<br />

réussite exceptionnelle <strong>de</strong> cette<br />

conférence. Cela étant, je me félicite<br />

tout <strong>de</strong> même que cette conférence<br />

ait pu exister : nous sortons<br />

enfin d'une pério<strong>de</strong> d'effacement du<br />

processus <strong>de</strong> paix.<br />

IJ : Un certain nombre d'intellectuels<br />

et d'écrivains israéliens ont <strong>de</strong>mandé au<br />

gouvernement <strong>de</strong> prendre l'initiative <strong>de</strong><br />

dialoguer avec le Hamas. Qu'en pensezvous<br />

?<br />

Y.L : C'est évi<strong>de</strong>mment une<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> raisonnable à la seule<br />

condition que les responsables du<br />

Hamas le veuillent également.<br />

ISRAËL<br />

Yehouda Lancry<br />

Aussi longtemps que le Hamas n'est pas<br />

rattrapé par les accords d'Oslo qui fon<strong>de</strong>nt<br />

la reconnaissance mutuelle, ce sera<br />

difficile. Je ne doute pas personnellement<br />

qu'une fois que le Hamas acceptera la<br />

reconnaissance <strong>de</strong> l'Etat d'Israël les<br />

choses pourront avancer plus facilement.<br />

IJ : Y a-t-il aujourd'hui en Israël une majorité<br />

disposée à faire <strong>de</strong>s concessions aux<br />

Palestiniens ?<br />

Y.L : Il faut d'abord dire qu'il y a une<br />

majorité qui se dégage très clairement,<br />

<strong>de</strong> façon stable, durable et constante sur<br />

la validité d'un Etat palestinien coexistant<br />

dans la paix aux côtés <strong>de</strong> l'Etat d'Israël.<br />

A propos <strong>de</strong>s concessions qu'il convient<br />

<strong>de</strong> faire, les attitu<strong>de</strong>s changent d'un camp<br />

à l'autre. Je rappelle qu'en l'an 2000 ,<br />

lorsque Barak avait conçu son plan <strong>de</strong><br />

paix - il avait alors évoque la possibilité<br />

d'un retrait territorial <strong>de</strong> 95 % avec<br />

quelques rectifications <strong>de</strong> frontière<br />

mineures -, l'opinion publique semblait<br />

soutenir majoritairement ce projet. On<br />

sait que c'est l'intifada qui a ruiné ces<br />

espérances.<br />

*Ancien ambassa<strong>de</strong>ur d'Israël en<br />

France et aux Nations Unies.<br />

Ehud Olmert, Geoges Bush et Mahmoud Abbas<br />

INFORMATION JUIVE Décembre 2007 17

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