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histoire - Consistoire de Paris

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ISRAËL<br />

La question <strong>de</strong><br />

la double reconnaissance<br />

PAR DENIS CHARBIT<br />

Au cours <strong>de</strong> la conférence <strong>de</strong> presse organisée en<br />

l'honneur du ministre français <strong>de</strong>s affaires<br />

étrangères, Bernard Kouchner, son homologue<br />

israélien, Mme Tsipi Livni, a réitéré la ligne du<br />

gouvernement israélien favorable à la création d'un<br />

Etat palestinien. Le propos n'est pas neuf: mis à<br />

part Benjamin Netanyahou et les partis situés à la droite du<br />

Likoud, la majorité <strong>de</strong> la classe politique s'est rangée à cette<br />

idée inéluctable. Cette conversion au principe <strong>de</strong> "<strong>de</strong>ux Etats<br />

pour <strong>de</strong>ux peuples" est l'aboutissement d'un long processus <strong>de</strong><br />

maturation politique au terme duquel les Israéliens ont fini par<br />

consentir, avec la bénédiction <strong>de</strong> Georges W. Bush qui l'a repris<br />

lui aussi à son compte, à ce qui était, il convient <strong>de</strong> le rappeler,<br />

le slogan officiel du parti communiste israélien <strong>de</strong>puis 1976.<br />

C'est dire le chemin parcouru. Certes, on n'est pas parvenu à<br />

cette conclusion par souci égalitaire d'accor<strong>de</strong>r aux Palestiniens<br />

le droit à l'autodétermination que le peuple juif a revendiqué<br />

et réalisé pour sa part <strong>de</strong>puis 1948. Pragmatisme et réalisme<br />

ont dicté ce changement: l'occupation coûte cher en termes <strong>de</strong><br />

vies humaines, elle a un prix économique et social dont les<br />

Israéliens pâtissent, enfin elle affecte lour<strong>de</strong>ment le prestige<br />

moral d'Israël dans le mon<strong>de</strong>, son "image" comme on dit<br />

aujourd'hui. Les Israéliens souhaitent foncièrement la paix, et<br />

ils se résignent bon gré, mal gré, au retrait global sinon total<br />

<strong>de</strong>s territoires occupés, requis par la communauté inter-nationale<br />

et le mon<strong>de</strong> arabe pour mettre fin au conflit une bonne fois pour<br />

toutes. Perspicacité politique <strong>de</strong> notre part? Sans doute, si ce<br />

n'est que cinq ans, dix ans, n'ont pas suffi pour en arriver là: il<br />

Tsipi Livni, ministre <strong>de</strong>s Affaires étrangères<br />

14 INFORMATION JUIVE Décembre 2007<br />

aura fallu attendre pas moins <strong>de</strong> vingt ans <strong>de</strong>puis la première<br />

Intifada, et quarante ans - plus d'une génération - <strong>de</strong>puis la<br />

guerre <strong>de</strong>s Six jours. On ne peut vraiment pas dire que<br />

l'adhésion israélienne à la solution la plus réaliste politiquement<br />

et la plus juste moralement ait été précipitée et instantanée.<br />

Ayant souvent la mémoire courte et l'intelligence politique<br />

rétrospective, la plupart <strong>de</strong>s Israéliens qui soutiennent<br />

aujourd'hui la création d'un Etat palestinien sont persuadés d'y<br />

avoir toujours été favorables alors qu'il y a vingt encore, lors du<br />

premier soulèvement palestinien déclenché en décembre 1987,<br />

cette revendication n'était seulement partagée que par 10 % <strong>de</strong>s<br />

Israéliens d'origine juive. Mieux encore, elle apparaissait alors<br />

aux yeux <strong>de</strong> la majorité non comme une option possible mais<br />

déclinée pour diverses raisons, mais bien comme une "solution<br />

finale", illégitime, révolutionnaire, la catastrophe qui précipitera<br />

la fin d'Israël. Ce refus israélien n'était pas sans motif: le<br />

mouvement national palestinien visant ouvertement la<br />

<strong>de</strong>struction <strong>de</strong> l'Etat d'Israël, les Juifs d'Israël estimaient juste<br />

et justifié d'adopter une condamnation symétrique, sans toujours<br />

percevoir la différence qu'il y a entre l'aspiration à détruire un<br />

Etat qui existe bel et bien et la volonté d'empêcher la création<br />

d'un Etat qui n'existe toujours pas.<br />

Si la négation palestinienne d'Israël a pu être une aubaine et<br />

un alibi pour poursuivre les objectifs d'expansion territoriale,<br />

l'opposition à une Palestine indépendante était, pour nombre<br />

d'Israéliens, un refus conditionnel et, <strong>de</strong> fait, conditionné par<br />

la reconnaissance préalable d'Israël par les Palestiniens et son<br />

représentant politique, l'O.L.P.<br />

L'écart et la marge<br />

La gauche israélienne pourrait se réjouir <strong>de</strong> voir accomplie<br />

par d'autres l'œuvre qu'elle aurait dû réaliser elle-même si elle<br />

avait eu plus <strong>de</strong> courage politique. Si elle ne pavoise pas, c'est<br />

que ce consentement à un Etat palestinien n'est pas irréversible.<br />

C'est qu'entre les déclarations et le passage à l'acte, entre les<br />

intentions et la réalité, l'écart est encore substantiel, la marge<br />

encore trop gran<strong>de</strong>. Un paradoxe mérite d'être souligné: au fur<br />

et à mesure qu'on a reconnu la légitimité d'un Etat palestinien,<br />

on a parallèlement exclu la possibilité d'y parvenir à brève<br />

échéance. Un pas en avant, <strong>de</strong>ux pas en arrière, en quelque<br />

sorte. C'est l'affaire <strong>de</strong> dix, quinze ou vingt ans, entend-on<br />

souvent. La paix n'est pas pour notre génération, ce sera le lot<br />

<strong>de</strong> nos enfants, voire <strong>de</strong> nos petits-enfants. La paix, <strong>de</strong>main<br />

peut-être, après-<strong>de</strong>main sans doute, mais certes pas la paix<br />

maintenant. On comprend dès lors pourquoi les partisans du<br />

"Grand Israël" ne désarment pas puisque la paix pourrait aussi<br />

bien être remise aux calendres grecques ou à l'ère messianique.<br />

Tsipi Livni ne s'est pas contenté <strong>de</strong> réitérer ce leitmotiv.<br />

Précisant ses convictions profon<strong>de</strong>s, elle a ajouté que le futur<br />

Etat palestinien constituera une "solution nationale" pour tous<br />

les Palestiniens - ceux qui rési<strong>de</strong>nt en Cisjordanie et à Gaza, et<br />

les réfugiés qui croupissent encore dans les camps au Liban et<br />

en Jordanie et réintègreraient ainsi la patrie palestinienne (mais<br />

non les villes et villages qu'ont dû abandonner leurs parents en<br />

1948). Enfin, créant la surprise sinon le scandale, elle a ajouté<br />

que l'Etat palestinien sera également une solution nationale<br />

pour les Arabes israéliens. L'indignation et la protestation <strong>de</strong>s<br />

députés arabes à la Knesset furent <strong>de</strong>s plus vives, d'autant que<br />

Tsipi Livni n'a pas cru bon <strong>de</strong> dissiper les malentendus suscités<br />

par ses propos. Pour le député Mohamed Baraké, elle a révélé

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