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UNIVERSITÀ CATTOLICA DEL SACRO CUORE MILANO Dottorato ...

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nous croyons, que l’emploi de l’emprunt grandeur en italien s’est affirmé, surtout dans le<br />

domaine politique.<br />

Pour résumer : nous avons donc deux langues, parlées dans deux communautés<br />

linguistiques parfois géographiquement non homogènes (c’est le cas notamment du<br />

français) et deux réalités qui ne se superposent pas toujours. Admettons toutefois que les<br />

réalités vécues par ces deux groupes de locuteurs coïncident parfaitement : on aura quandmême<br />

un découpage de la réalité idiosyncratique dans chaque langue. Le cas de rivière » vs<br />

fleuve, deux mots désignant des cours d’eau, dont seulement le deuxième se jette à la mer,<br />

est emblématique : en italien en fait on a un seul mot, fiume, pour indiquer ces deux<br />

réalités 104 . Il n’y a pas donc de nécessité qui préside au découpage sémantique, nous l’avons<br />

déjà vu, et cette asymétrie est connue sous le nom d’anisomorphisme. SZENDE (1993 : 74)<br />

pose la question dans les termes suivants : « Il n’y a pas de découpage originel et immuable<br />

de la réalité linguistique qui préexisterait au langage et lui imposerait sa structure. C’est au<br />

contraire le langage qui structure la ‘réalité’, qui est à priori un continuum ».<br />

Abordons ensuite le thème des registres. En français, la richesse du registre familier fait en<br />

sorte qu’il y a plusieurs mots pour dire travail (boulot, taf...), ou dire cigarette (clope, sèche...). Or,<br />

si on veut trouver des équivalents en italien pour ces termes familiers, soit on se trouve<br />

vraiment sans ressources (c’est le cas de boulot et de taf, qui n’ont pas de véritables<br />

équivalents) soit il faut recourir à des variantes régionales (c’est la cas de clope), qui risquent<br />

sérieusement de n’être pas comprises par beaucoup de locuteurs. Nous connaissons des<br />

équivalents pour clope qui fonctionnent à Milan mais pas ailleurs ; una cicca, variante<br />

milanaise standard pour un chewing-gum, serait plutôt compris comme une cigarette à Rome,<br />

par exemple.<br />

Nous pouvons donc affirmer qu’il est souvent impossible de dire ‘objectivement’ qu’un<br />

mot x d’une langue source correspond à y dans une langue cible. La variation diaphasique<br />

et diatopique représente un premier obstacle, comme on l’a vu. Bien entendu, les<br />

lexicographes, lorsqu’ils rédigent leurs dictionnaires, ont des techniques pour pallier à ces<br />

décalages. Les marques métalinguistiques, ou étiquettes (comme fam., région.), comptent<br />

parmi les plus fréquentes. Mais il est évident qu’une langue n’est pas un système algébrique,<br />

et il ne suffit pas d’apparier fam. et lavoro (travail) pour dire la même chose dans une langue<br />

qui n’a pas de terme équivalent à boulot. Il s’agit donc de mettre en œuvre des stratégies<br />

d’approximation, qui marquent une « approche » vers une langue autre, dans le but de<br />

décrire objectivement les équivalences et surtout les non équivalences. Comme l’évoque le titre<br />

d’un article de D. BERNOT (2000), la lexicographie bilingue est bien un « chemin semé<br />

d’embûches ».<br />

104 En suivant une hypothèse ‘culturaliste’, BIDAUD (2003: 67) se demande : « la plus forte densité du réseau<br />

fluvial français peut-elle justifier un découpage plus précis et une ‘richesse’ lexicale majeure ? ». Voici une<br />

question de difficile solution ; nous essaierons de répondre à ce questionnement au cours de la deuxième<br />

partie.<br />

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