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intersections entre langue et culture, articulant de façon singulière le rapport linguistiqueextralinguistique. Notamment, nous nous concentrerons sur le phénomène des écarts, sur les exemples à fonction culturelle, sur les notes culturelles et sur les faux emprunts dans les DB de notre corpus. Selon A. REY (1970 : 179), « Les relations entre la langue d’une communauté humaine et sa culture – au sens anthropologique –, sa civilisation, sont particulièrement manifestes dans le lexique, dont les formes articulent en l’exprimant le contenu de l’expérience sociale ». Dans la deuxième partie nous essaierons justement de mettre à jour ces relations, telles qu’elles apparaissent dans ces répertoires lexicaux, sanctionnés socialement et historiquement, que sont les dictionnaires. Toujours en ce qui concerne les rapports entre langues et visions du monde, JIMENEZ HURTADO nous rappelle que pour COSERIU « las diferencias entre las lenguas son eminentemente léxicas, en que reflejan la cosmovisión representada por las distintas comunidades » (2001 : 14). Si on ne peut pas parler de domination de la langue sur la culture, cela ne signifie pas que ces deux réalités soient tout à fait indépendantes. Cette imbrication est soulignée par CLAS – ROBERTS (2003 : 141) : « Le lexique d’une langue est [...] le reflet de la complexité culturelle d’un groupe et correspond à son système symbolique ». Et MAHER (2006 : 207) : « Lexical differences between languages give us an insight into differences in cultural values and priorities ». A travers une étude du lexique, il serait donc possible d’entrevoir un reflet des structures et des valeurs inscrites dans une langue-culture. Mais quelle approche faut-il adopter ? A l’instar de CLAS-ROBERTS (2003 : 240), nous croyons qu’il est « extrêmement délicat de déduire des considérations psycho-sociologiques de faits de langue ». Après avoir évoqué la tentative de WANDRUSZKA 36 qui avait repéré des mots clés qui traduiraient le ‘tempérament’, la ‘mentalité’ ou encore la ‘sensibilité’ d’un peuple [...]. Pour le français, on aurait : ‘politesse’, ‘galanterie’, ‘coquetterie’, ‘esprit’, ‘goût’, ‘savoir-vivre’, ‘noblesse’, ‘finesse’, ‘raffinement’, ‘nuance’, ‘verve’ ; pour l’italien : ‘brio’, ‘dolce’, ‘farniente’. CLAS-ROBERTS affirment que ces mots ne cachent que des « traits littéraires des siècles passés, [ou] quelques clichés » (2003 : 241-242). Dans cette thèse nous n’essaierons évidemment pas de dégager le caractère essentiel du français ou de l’italien, pour la simple raison que nous ne croyons pas qu’il y en ait un 37 . RIVAROL, au XVIII e siècle, affirmait « Ce qui n’est pas clair n’est pas français ». Des tentatives pareils, qui définissent une identité a priori sont évidemment idéologiques et 36 Die Mehrsprachigkeit der Menschen, München : Piper, 1979. 37 C’est seulement des poètes, comme par exemple Y. BONNEFOY, qui peuvent parler de ‘métaphysiques contraires’ de l’anglais et de l’allemand, rejoignant en quelque sorte les considérations de VINAY et DARBELNET dans leur Stylistique comparée (1958). 30

cachent la réalité de phénomènes tout à fait français, nous pensons notamment à la « langue de bois ». Nous n’emploierons pas le mot génie, qui indique sans conteste une « notion extrêmement vague » (KASSAI 1994 : 511). SZENDE (1993 : 75) est l’un des derniers à utiliser encore ce mot (« Le génie des langues, c’est aussi des préférences, des silences ou des redondances »), pour indiquer des angles expressifs privilégiés 38 . Toujours SZENDE parle du génie de la langue comme d’une expression « a little vague but so full of imagery », qui se réfère au « vast world of usages and conventions » (SZENDE 1999 : 227). GALISSON (1987a: 138) à son tour définit le génie une « manière particulière de se représenter la réalité, par l’intermédiaire des signes qui la désignent » 39 . La linguistique a dépassé depuis longtemps une approche hypostasiante de la langue (en vogue surtout au XIX e ), ou essentialiste comme l’appelle FRATH (2008a) : le but est aujourd’hui celui d’appréhender la langue à travers les faits de discours. Dans une polémique avec des approches qui gardent une dimension essentialiste, FRATH (2008a : 12) soutient que « la linguistique gagnerait beaucoup à abandonner les chimères platoniciennes du code au profit de l’observation de l’usage ». Encore de nos jours, « trop de travaux consistent à rechercher la substance de la langue [...]. Il y aurait ainsi un code derrière la langue qu’il s’agirait de percer, une essence du langage que l’on devrait pouvoir atteindre » (2008a : 8). Ce qui implique, selon l’auteur, une approche dépassée, anachronique. Dans une typologie des approches possibles aux faits de langue, FRATH (2008b : 47) cite les « linguistiques de l’accumulation, [dont] l’attitude face à la théorie est essentiellement l’indifférence. Ce point de vue est à l’œuvre dans la compilation des dictionnaires », par exemple. Ces approches manquent d’une « vision d’ensemble qui produise un lien entre les observations, et qui leur donne sens ». Le point de vue de FRATH est « d’emblée communautaire et externaliste », en opposition aux linguistiques cartésiennes, « individuelles et internalistes » (ibid.). C’est donc une approche qui fait la part belle aux aspects communautaires et « externes », moyennant un lien solide avec la référence. Toutes ces contributions nous amènent à conclure que, si un relativisme déterministe est à exclure, il est par contre possible de prendre en examen l’hypothèse de l’existence de traits culturels dans les langues. Il se dessinerait donc un certain parallélisme entre les langues et leurs communautés de locuteurs. Nous avons choisi d’étudier ce parallélisme dans les DB, des ouvrages culturels par excellence. Notamment, ces affinités entre langues et cultures seront manifestes dans l’analyse des écarts. Paradoxalement, là où les langues divergent, l’unicité qui les distingue et le rapport qui les lie à leur culture de référence se font plus visible. 38 Cf. DAGUT 1981 ; BRINK 1971. 39 L’emploi du mot idiosyncrasie, que le PR11 définit comme « tempérament personnel », et de son adjectif idiosyncratique, lorsqu’on parle d’une langue, relèvent d’un anthropomorphisme assez flagrant. Nous considérons toutefois ce terme comme un pis-aller, certainement préférable à génie et à son goût suranné. 31

intersections entre langue et culture, articulant de façon singulière le rapport linguistiqueextralinguistique.<br />

Notamment, nous nous concentrerons sur le phénomène des écarts, sur<br />

les exemples à fonction culturelle, sur les notes culturelles et sur les faux emprunts dans les<br />

DB de notre corpus.<br />

Selon A. REY (1970 : 179), « Les relations entre la langue d’une communauté humaine et sa<br />

culture – au sens anthropologique –, sa civilisation, sont particulièrement manifestes dans le<br />

lexique, dont les formes articulent en l’exprimant le contenu de l’expérience sociale ». Dans<br />

la deuxième partie nous essaierons justement de mettre à jour ces relations, telles qu’elles<br />

apparaissent dans ces répertoires lexicaux, sanctionnés socialement et historiquement, que<br />

sont les dictionnaires.<br />

Toujours en ce qui concerne les rapports entre langues et visions du monde, JIMENEZ<br />

HURTADO nous rappelle que pour COSERIU « las diferencias entre las lenguas son<br />

eminentemente léxicas, en que reflejan la cosmovisión representada por las distintas<br />

comunidades » (2001 : 14).<br />

Si on ne peut pas parler de domination de la langue sur la culture, cela ne signifie pas que<br />

ces deux réalités soient tout à fait indépendantes. Cette imbrication est soulignée par CLAS<br />

– ROBERTS (2003 : 141) : « Le lexique d’une langue est [...] le reflet de la complexité<br />

culturelle d’un groupe et correspond à son système symbolique ». Et MAHER (2006 : 207) :<br />

« Lexical differences between languages give us an insight into differences in cultural values<br />

and priorities ». A travers une étude du lexique, il serait donc possible d’entrevoir un reflet<br />

des structures et des valeurs inscrites dans une langue-culture.<br />

Mais quelle approche faut-il adopter ? A l’instar de CLAS-ROBERTS (2003 : 240), nous<br />

croyons qu’il est « extrêmement délicat de déduire des considérations psycho-sociologiques<br />

de faits de langue ». Après avoir évoqué la tentative de WANDRUSZKA 36 qui avait repéré des<br />

mots clés qui traduiraient le ‘tempérament’, la ‘mentalité’ ou encore la ‘sensibilité’ d’un<br />

peuple [...]. Pour le français, on aurait : ‘politesse’, ‘galanterie’, ‘coquetterie’, ‘esprit’, ‘goût’,<br />

‘savoir-vivre’, ‘noblesse’, ‘finesse’, ‘raffinement’, ‘nuance’, ‘verve’ ; pour l’italien : ‘brio’,<br />

‘dolce’, ‘farniente’.<br />

CLAS-ROBERTS affirment que ces mots ne cachent que des « traits littéraires des siècles<br />

passés, [ou] quelques clichés » (2003 : 241-242). Dans cette thèse nous n’essaierons<br />

évidemment pas de dégager le caractère essentiel du français ou de l’italien, pour la simple<br />

raison que nous ne croyons pas qu’il y en ait un 37 .<br />

RIVAROL, au XVIII e siècle, affirmait « Ce qui n’est pas clair n’est pas français ». Des<br />

tentatives pareils, qui définissent une identité a priori sont évidemment idéologiques et<br />

36 Die Mehrsprachigkeit der Menschen, München : Piper, 1979.<br />

37 C’est seulement des poètes, comme par exemple Y. BONNEFOY, qui peuvent parler de ‘métaphysiques<br />

contraires’ de l’anglais et de l’allemand, rejoignant en quelque sorte les considérations de VINAY et<br />

DARBELNET dans leur Stylistique comparée (1958).<br />

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