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convaincantes et variées 29 qu’il nous paraît à présent redondant d’en proposer à notre tour une réfutation par le menu. Toutefois, il peut être utile de voir quelques critiques significatives à cette théorie. TELIYA et al. (1998 : 56) nous rappelle tout d’abord que « Edward Sapir [...] was the first to postulate explicitly that language represents and conceptualizes reality in a cultural specific manner ». HUMBOLDT et BOAS ont en effet posé les bases d’une théorie que SAPIR a développé plus systématiquement. WEINRICH (1986), pour sa part, critique radicalement la méthodologie d’enquête sur la langue des Hopi mise en œuvre par WHORF, qui serait à son avis incapable de révéler quoi que ce soit sur sa structure syntaxique et grammaticale. Il critique également la Sprachinhaltsforschnung (linguistique du contenu) qui se réclamait de HUMBOLDT ; les représentants de ce dernier groupe 30 , fondé par L. WEISGERBER (1899-1985), croient que le monde a déjà été ‘mis-en-mots’, une fois pour toutes, par la langue de la communauté linguistique à laquelle on appartient (voici donc une autre version de la théorie de relativité linguistique). WEINRICH soutient par contre une idée universaliste, et insiste sur l’existence d’universaux présents dans toutes les langues 31 . REY (1991 : 2869) reconnaît que « malgré ses excès, l’hypothèse de Sapir et Whorf soustend de manière indispensable un examen des écarts sémioculturels inscrits dans les lexiques, et donc celui de leur traitement, très imparfait, dans les dictionnaires ». Voici donc un lien possible entre cette hypothèse (qui affirme que la pensée est influencée par la langue) et l’étude des écarts, que nous aborderons dans la deuxième partie et qui témoignent des différences ‘sémioculturelles’ entre deux langues mises en présence dans un DB. WIERZBICKA reconnaît que « the majority of traditional Whorfian writings on language and culture suffer [...] from arbitrariness, subjectivity and a tendency to fantasy unconstrained by any rigorous method » (1979 : 377); autant de limites qu’elle essaiera de pallier grâce à sa méthode MSN 32 . Cependant, GODDARD-WIERZBICKA croient que « Sapir was right when he said that ‘vocabulary is a very sensitive index of the culture of a people’ » (2002b : 267). Il s’agit donc plutôt de la méthode de WHORF qui est critiquée ; les fondements de sa théorie sont par contre valorisés comme prometteurs et avant-coureurs. Parmi les héritiers de la tradition de recherche du relativisme linguistique, nous pouvons compter LUCY (2000 : IX), qui distingue deux niveaux de relativité linguistique. Le premier est sémiotique : la capacité langagière de l’homme, à travers l’intégration d’un système symbolique, implique une transformation des fonctions intellectives. Quant au deuxième niveau, le niveau structurel, il concerne les « configurations morphosyntaxiques » (mais aussi 29 Cf. entre autres NISBET (2003), AMATI MEHLER et al. (2003), SCHLESINGER (1991), BRINK (1971). 30 Dont est issu entre autres E. WÜSTER. 31 Nous verrons plus bas comment cette tradition de recherche sera reprise par WIERZBICKA. 32 Cf. infra, I.7. 26

phonologiques et pragmatiques) différentes d’une langue à l’autre, et tout ce que cela peut impliquer au niveau de la pensée vis-à-vis de la réalité. Selon LUCY, les présupposés d’une théorie de la relativité linguistique sont les suivants : « (1) language embodies an interpretation of reality and (2) language can influence thought about that reality » (2000 : X). La conséquence serait que « each language involves a particular interpretation [de la réalité], not a common, universal one » (ibid.). Il s’agit donc d’une version faible du relativisme linguistique : les langues peuvent influencer la pensée, mais n’en déterminent pas les contours. La thèse relativiste peut être donc résumée en ces termes : « à la diversité des langues correspond une diversité des concepts qu’elles véhiculent » (RASTIER 1991 : 95). Sans être relativistes, de nombreux auteurs se sont penchés sur les rapports entre langue et culture. LEVI-STRAUSS, dans son Anthropologie structurale (1958), considérait la langue « comme faisant partie de la culture, produit de la culture et condition de la culture » 33. En plein structuralisme, pour JAKOBSON (1963 : 28), « le langage, c’est réellement les fondations mêmes de la culture ». HJELMSLEV (1968 : 149) revient sur des thèmes humboldtiens lorsqu’il affirme que « la langue nationale est le ‘symbole’ de la nation ». E. BENVENISTE (1974 : 24) note que « l’homme ne naît pas dans la nature, mais dans la culture ». Et encore, « aucune langue n’est séparable d’une fonction culturelle » (ibidem). Cependant pour BENVENISTE, comme le rappelle LARRIVEE, « le rapport essentiel entre langue et société est celui d’interprétant à interprété [...]. Cette relation asymétrique n’empêche pas l’interdépendance entre société et langage, puisque le langage suppose la représentation de l’autre et la société repose sur la médiation entre les individus » (2008 : 93). L’imbrication entre les langues et les communautés est bien mise en valeur par ces auteurs : loin de constituer un simple outil, les langues ont une fonction identitaire et de cohésion de l’imaginaire qui ne peut pas être négligée. I.1.2 Développements récents Plus récemment, TELIYA et al. (1998 : 56) ont fait évoluer le concept de relativité linguistique : « The notion of linguistic relativity can be reformulated as linguistic-cultural relativity : language is the means of representing and reproducing culture ». Dans leur 33 Cité par GUILLEN DIAZ (2003 : 40). 27

convaincantes et variées 29 qu’il nous paraît à présent redondant d’en proposer à notre tour<br />

une réfutation par le menu.<br />

Toutefois, il peut être utile de voir quelques critiques significatives à cette théorie.<br />

TELIYA et al. (1998 : 56) nous rappelle tout d’abord que « Edward Sapir [...] was the first to<br />

postulate explicitly that language represents and conceptualizes reality in a cultural specific<br />

manner ». HUMBOLDT et BOAS ont en effet posé les bases d’une théorie que SAPIR a<br />

développé plus systématiquement.<br />

WEINRICH (1986), pour sa part, critique radicalement la méthodologie d’enquête sur la<br />

langue des Hopi mise en œuvre par WHORF, qui serait à son avis incapable de révéler quoi<br />

que ce soit sur sa structure syntaxique et grammaticale. Il critique également la<br />

Sprachinhaltsforschnung (linguistique du contenu) qui se réclamait de HUMBOLDT ; les<br />

représentants de ce dernier groupe 30 , fondé par L. WEISGERBER (1899-1985), croient que le<br />

monde a déjà été ‘mis-en-mots’, une fois pour toutes, par la langue de la communauté<br />

linguistique à laquelle on appartient (voici donc une autre version de la théorie de relativité<br />

linguistique). WEINRICH soutient par contre une idée universaliste, et insiste sur l’existence<br />

d’universaux présents dans toutes les langues 31 .<br />

REY (1991 : 2869) reconnaît que « malgré ses excès, l’hypothèse de Sapir et Whorf soustend<br />

de manière indispensable un examen des écarts sémioculturels inscrits dans les<br />

lexiques, et donc celui de leur traitement, très imparfait, dans les dictionnaires ». Voici donc<br />

un lien possible entre cette hypothèse (qui affirme que la pensée est influencée par la<br />

langue) et l’étude des écarts, que nous aborderons dans la deuxième partie et qui<br />

témoignent des différences ‘sémioculturelles’ entre deux langues mises en présence dans un<br />

DB.<br />

WIERZBICKA reconnaît que « the majority of traditional Whorfian writings on language and<br />

culture suffer [...] from arbitrariness, subjectivity and a tendency to fantasy unconstrained<br />

by any rigorous method » (1979 : 377); autant de limites qu’elle essaiera de pallier grâce à sa<br />

méthode MSN 32 . Cependant, GODDARD-WIERZBICKA croient que « Sapir was right when<br />

he said that ‘vocabulary is a very sensitive index of the culture of a people’ » (2002b : 267).<br />

Il s’agit donc plutôt de la méthode de WHORF qui est critiquée ; les fondements de sa<br />

théorie sont par contre valorisés comme prometteurs et avant-coureurs.<br />

Parmi les héritiers de la tradition de recherche du relativisme linguistique, nous pouvons<br />

compter LUCY (2000 : IX), qui distingue deux niveaux de relativité linguistique. Le premier<br />

est sémiotique : la capacité langagière de l’homme, à travers l’intégration d’un système<br />

symbolique, implique une transformation des fonctions intellectives. Quant au deuxième<br />

niveau, le niveau structurel, il concerne les « configurations morphosyntaxiques » (mais aussi<br />

29 Cf. entre autres NISBET (2003), AMATI MEHLER et al. (2003), SCHLESINGER (1991), BRINK (1971).<br />

30 Dont est issu entre autres E. WÜSTER.<br />

31 Nous verrons plus bas comment cette tradition de recherche sera reprise par WIERZBICKA.<br />

32 Cf. infra, I.7.<br />

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