UNIVERSITÀ CATTOLICA DEL SACRO CUORE MILANO Dottorato ...

UNIVERSITÀ CATTOLICA DEL SACRO CUORE MILANO Dottorato ... UNIVERSITÀ CATTOLICA DEL SACRO CUORE MILANO Dottorato ...

tesionline.unicatt.it
from tesionline.unicatt.it More from this publisher
14.07.2013 Views

aveugle m. cieco, non vedente. [HP] anormal agg. sost. un anormal, un handicappato, un ritardato, un deviante. [B] Avec ces trois derniers exemples, nous touchons au phénomène du politiquement correct. L’équivalence agent de nettoyage = operatore ecologico est tout à fait satisfaisante ; le choix d’un deuxième équivalent (netturbino) relève sans doute du « réflexe de synonymisation » identifié par M. Kundera 203 , plutôt que d’un souci de complétude. Dans le cas du lemme aveugle, HP choisit, à la différence des autres DB, d’ajouter le traduisant non vedente. Effectivement le substantif cieco en italien est de plus en plus perçu comme indélicat, sans doute encore plus que aveugle, qui paraît avoir gardé une certaine neutralité ; la décision de HP semble bien répondre à cette tendance euphémique de la langue-culture italienne. Le dernier cas est assez problématique, voire gênant : sans contexte, il est difficile de savoir ce que un anormal peut signifier. B propose trois traduisants, qui désignent un déficit générique (un handicappato), cognitif (un ritardato) ou bien une personnalité antisociale (deviante) ; une traduction littérale (un anormale) n’est pas proposée, sans doute parce que la notion de norme et de normalité n’est plus conforme au Zeitgeist contemporain. Il s’agit d’un cas limite où le ‘politiquement incorrect’ est dans le texte source et la traduction essaie d’en pallier les effets. Les associations culturelles Comme l’affirme CELOTTI (2002 : 459), « les associations culturelles liées à la communauté de chacun que peut susciter un mot [constituent] un immense terrain vague encore à défricher, sûrement pour les langues en contact comme le français et l’italien ». Ces associations ne sont pas aisées à repérer, mais elles représentent un fonds important, où les langues et les cultures montrent leur indissolubilité. Abordons quelques cas qui nous paraissent significatifs. âme s. f. avoir l’âme chevillée au corps, essere duro a morire. [B] Cette expression française nous évoque immédiatement la conception dualiste cartésienne 204 ; il y a le risque que ce genre d’associations soient tout à fait individuelles, idiolectales, mais si, comme nous le croyons, la langue est jonchée de ces échos culturels, chaque locuteur entendra ceux qui entrent mieux en résonance avec lui. 203 Les testaments trahis, Paris, Gallimard, 1993 : 130. 204 Cf. FRATH (2008b). 134

apothicaire s. m. nella loc. comptes d’apothicaire, conti lunghi e complessi (spec. fatti apposta perché non ci si raccapezzi). [B] Le lexicographe ne nous dit pas qu’apothicaire est le vieux nom du pharmacien. En fait, ce mot n’apparaît aujourd’hui que dans l’expression figurée comptes d’apothicaire, donc aucune critique à faire à B au point de vue métalexicographique. Cependant, l’association originelle française entre la figure de l’apothicaire et son attitude vers les calculs se perd dans l’équivalence. On n’y peut sans doute rien dans un DB, mais c’est une association culturelle que nous croyons intéressant de souligner ici. argentier s. m. nella loc. (fam., scherz.) le grand argentier, il ministro delle finanze. [B] Encore une fois, il y a ici une association qui se perd: le grand argentier était historiquement, comme l’écrit PR11, « le surintendant des finances ». Il y a donc un sens ancien, dont B ne rend pas compte, qui s’est élargi et qui désigne aujourd’hui le ministre des finances. Un lecteur non avisé ne pourrait pas saisir la référence, par plaisanterie, à l’histoire. En outre, l’équivalent proposé (ministro delle finanze) n’est pas du même registre que l’expressionsource, mais nous n’allons pas revenir sur ce thème, déjà abordé plus haut. Arlésien n.m. (fig.): jouer l’Arlésienne, non farsi vedere; c’est l’Arlésienne, è l’Araba fenice. [G] Pour rendre compte de l’origine de cette expression, qui se réfère à un opéra de Bizet, G (et B aussi) ajoutent une note culturelle. Ce qui est tout à fait licite et représente une stratégie de véhiculer les associations culturelles que nous analyserons plus bas 205 . art s. m. le septième art, la settima arte, il cinema. le huitième art, la televisione. le neuvième art, i fumetti. [B] Ces expressions françaises déclenchent à notre avis l’association suivante : la série des arts, dont la classification a évolué considérablement dans l’histoire de l’humanité, est une série ouverte, qui a accueilli récemment des formes modernes, telles que la télévision et la bande dessinée. L’italien, sans doute plus conservateur, ne paraît pas, du moins selon Boch, avoir retenu ces dénominations nobles pour ces formes d’art contemporains. 205 Infra, II.2.1. 135

aveugle m.<br />

cieco, non vedente. [HP]<br />

anormal agg. sost.<br />

un anormal, un handicappato, un ritardato, un deviante. [B]<br />

Avec ces trois derniers exemples, nous touchons au phénomène du politiquement correct.<br />

L’équivalence agent de nettoyage = operatore ecologico est tout à fait satisfaisante ; le choix d’un<br />

deuxième équivalent (netturbino) relève sans doute du « réflexe de synonymisation » identifié<br />

par M. Kundera 203 , plutôt que d’un souci de complétude. Dans le cas du lemme aveugle, HP<br />

choisit, à la différence des autres DB, d’ajouter le traduisant non vedente. Effectivement le<br />

substantif cieco en italien est de plus en plus perçu comme indélicat, sans doute encore plus<br />

que aveugle, qui paraît avoir gardé une certaine neutralité ; la décision de HP semble bien<br />

répondre à cette tendance euphémique de la langue-culture italienne. Le dernier cas est<br />

assez problématique, voire gênant : sans contexte, il est difficile de savoir ce que un anormal<br />

peut signifier. B propose trois traduisants, qui désignent un déficit générique (un<br />

handicappato), cognitif (un ritardato) ou bien une personnalité antisociale (deviante) ; une<br />

traduction littérale (un anormale) n’est pas proposée, sans doute parce que la notion de norme<br />

et de normalité n’est plus conforme au Zeitgeist contemporain. Il s’agit d’un cas limite où le<br />

‘politiquement incorrect’ est dans le texte source et la traduction essaie d’en pallier les<br />

effets.<br />

Les associations culturelles<br />

Comme l’affirme CELOTTI (2002 : 459), « les associations culturelles liées à la communauté<br />

de chacun que peut susciter un mot [constituent] un immense terrain vague encore à<br />

défricher, sûrement pour les langues en contact comme le français et l’italien ». Ces<br />

associations ne sont pas aisées à repérer, mais elles représentent un fonds important, où les<br />

langues et les cultures montrent leur indissolubilité. Abordons quelques cas qui nous<br />

paraissent significatifs.<br />

âme s. f.<br />

avoir l’âme chevillée au corps, essere duro a morire. [B]<br />

Cette expression française nous évoque immédiatement la conception dualiste<br />

cartésienne 204 ; il y a le risque que ce genre d’associations soient tout à fait individuelles,<br />

idiolectales, mais si, comme nous le croyons, la langue est jonchée de ces échos culturels,<br />

chaque locuteur entendra ceux qui entrent mieux en résonance avec lui.<br />

203 Les testaments trahis, Paris, Gallimard, 1993 : 130.<br />

204 Cf. FRATH (2008b).<br />

134

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!