UNIVERSITÀ CATTOLICA DEL SACRO CUORE MILANO Dottorato ...

erum » 179 (« les noms sont la conséquence des choses ») : l’existence d’un mot implique
également l’existence de la chose.
Essayons de mieux expliquer notre point de vue par d’autres exemples.
autoferrotranvieri s.m.pl.
salariés des transports publics urbains. [SL]
alberghièri n.m.pl.
le personnel hôtelier. [G]
Dans le cas de ces deux entrées, l’existence du mot en Italien peut favoriser la
représentation de ces travailleurs comme constituant une ‘catégorie’.
Examinons cette autre triade.
aziendalista s.m./f.
(persona totalmente dedicata all’azienda) personne f. totalement dévouée à l’entreprise. [SL]
aziendalistico agg.
(totalmente dedicato all’azienda) totalement dévoué à l’entreprise. [SL]
aziendalìsmo n.m.
dévouement total à l’entreprise. [G]
Quelle peut être la valeur culturelle de ces écarts (plus précisément, du mot aziendalismo et
de ses deux dérivés) ? Des positions comme celles de STEINER (1995), qui étudie
l’importance du champ sémantique de la prostitution et de l’alcool en français et en fait
dériver, par voie de conséquence, l’importance de ces deux thèmes dans la culture
française, nous semblent déterministes et difficilement acceptables : en poussant trop loin
l’analogie langue-culture on risque de voir l’une comme un simple miroir de l’autre, alors
que nous croyons que leur relation est plus compliquée que cela. Affirmer que la présence
(massive) des signifiants renvoie sans faute à la présence (large) d’un référent dans la culture
dont il est question nous paraît hardi, tout au moins. Une prolifération des signifiants peut
en effet pallier un rapport conflictuel avec ce qui est signifié, ou quand-même en donner
l’illusion. C’est aussi ce que fait remarquer KASTBERG SJÖBLOM (2003 : 200) : « Une
abondance de mots d’un champ sémantique spécifique, répertoriés dans un dictionnaire
bilingue, peut entraîner la transmission d’une image parfois exagérée ou fausse d’un peuple
et d’une culture ». Et, plus radicalement, CLAS-ROBERTS (2003 : 238) : « Les mots [...] ne
peuvent pas créer la réalité à laquelle ils réfèrent et ne peuvent ainsi avoir de sens que si la
réalité de référence a déjà été repérée auparavant ».
179 JUSTINIEN, Institutiones, livre II, 7, 3.
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