digestion et absorption des nutriments - Laboratoires Ysonut
digestion et absorption des nutriments - Laboratoires Ysonut
digestion et absorption des nutriments - Laboratoires Ysonut
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
dossier enseignement<br />
dossier enseignement<br />
DIGESTION ET ABSORPTION DES NUTRIMENTS<br />
La <strong>digestion</strong> <strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong> s’effectuent<br />
dans le tube digestif. L’intestin grêle est le siège principal<br />
de ces deux étapes. Sa longueur (4 à 6 mètres) <strong>et</strong> sa surface<br />
d’<strong>absorption</strong>, amplifiée par les villosités <strong>et</strong> les microvillosités<br />
formant <strong>des</strong> replis à la surface <strong>des</strong> entérocytes,<br />
perm<strong>et</strong>tent un contact prolongé avec les <strong>nutriments</strong> <strong>et</strong> les<br />
sécrétions gastriques, biliaires, intestinales <strong>et</strong> surtout pancréatiques,<br />
qui vont toutes contribuer à la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong><br />
<strong>nutriments</strong>.<br />
La <strong>digestion</strong> <strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong> diffèrent selon<br />
leur nature. Ainsi, les gluci<strong>des</strong>, les protéines <strong>et</strong> les lipi<strong>des</strong><br />
sont digérés puis absorbés suivant <strong>des</strong> mécanismes spécifiques<br />
nécessitant <strong>des</strong> enzymes <strong>et</strong> <strong>des</strong> systèmes de transport<br />
dédiés. Après l’<strong>absorption</strong>, qui est principalement le<br />
fait du duodénum-jéjunum, à l’exception <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires<br />
<strong>et</strong> de la vitamine B12 qui sont absorbés uniquement<br />
Service d’Hépato-Gastroentérologie <strong>et</strong> Nutrition, CHU Rouen Charles-Nicolle,<br />
Laboratoire ADEN EA 3234, 1, rue de Germont, 76031 Rouen Cedex.<br />
Correspondance : Stéphane Lecleire, à l’adresse ci-<strong>des</strong>sus.<br />
Email : stephane.lecleire@chu-rouen.fr<br />
Stéphane LECLEIRE<br />
Les <strong>nutriments</strong> fournissent à l’organisme l’énergie <strong>et</strong> le matériel dont il a<br />
besoin pour couvrir ses dépenses quotidiennes <strong>et</strong> assurer le renouvellement<br />
cellulaire <strong>et</strong> protéique. Les gran<strong>des</strong> classes de <strong>nutriments</strong> sont au nombre de<br />
trois : les gluci<strong>des</strong> ou hydrates de carbone, les protéines, <strong>et</strong> les lipi<strong>des</strong> ou<br />
graisses. Ces trois types de <strong>nutriments</strong> sont indispensables au bon fonctionnement<br />
de l’organisme <strong>et</strong> remplissent <strong>des</strong> rôles différents. Les gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong> les<br />
lipi<strong>des</strong> ont pour fonction principale de fournir de l’énergie, tandis que les<br />
protéines jouent un rôle capital dans la fabrication du « soi » ou anabolisme.<br />
Les principaux <strong>nutriments</strong> se trouvent dans l’alimentation sous forme de<br />
macromolécules qui nécessitent une fragmentation en p<strong>et</strong>ites molécules afin<br />
de pouvoir être assimilées par l’organisme : c’est la <strong>digestion</strong>. Ainsi, les gluci<strong>des</strong><br />
sont clivés en oligosacchari<strong>des</strong> <strong>et</strong> en oses simples, les protéines en<br />
oligopepti<strong>des</strong> <strong>et</strong> en aci<strong>des</strong> aminés, <strong>et</strong> les lipi<strong>des</strong> en aci<strong>des</strong> gras <strong>et</strong> en cholestérol.<br />
Ces p<strong>et</strong>ites molécules devront ensuite être absorbées pour être utilisées<br />
par l’organisme soit sous forme d’énergie immédiate ou plus souvent après<br />
un stockage provisoire (gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong> lipi<strong>des</strong>), soit pour fabriquer de nouvelles<br />
protéines du « soi » (protéines). C<strong>et</strong>te étape constitue l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong>.<br />
au niveau de l’iléon terminal, les produits de la <strong>digestion</strong><br />
ou <strong>nutriments</strong> passent dans les systèmes porte (oses <strong>et</strong> aci<strong>des</strong><br />
aminés) ou lymphatique (aci<strong>des</strong> gras) avant d’être distribués<br />
dans l’organisme.<br />
Nous allons détailler spécifiquement la <strong>digestion</strong> <strong>et</strong><br />
l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong>, <strong>des</strong> protéines <strong>et</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong>, à<br />
l’exclusion <strong>des</strong> micro<strong>nutriments</strong> <strong>et</strong> <strong>des</strong> vitamines.<br />
Digestion <strong>et</strong> <strong>absorption</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong><br />
En France, la majorité <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> est ingérée sous forme<br />
d’amidon (pain, pâtes, 50 à 60 % <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> pour 200<br />
à 300 g/j –1 ) <strong>et</strong> de saccharose (sucre de table, 30 à 40 %<br />
<strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> pour 80 à 100 g/j –1 ), associés à une plus<br />
faible quantité de lactose (produits laitiers) <strong>et</strong> de fructose<br />
(fruits, miel). Les celluloses, constituants <strong>des</strong> fibres alimentaires,<br />
sont également <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong>.<br />
Digestion <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong><br />
La <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> est relativement simple, à<br />
l’exception de l’amidon qui nécessite une première étape<br />
Cah. Nutr. Diét., 43, 1, 2008 45
de <strong>digestion</strong> intraluminale. Les produits de c<strong>et</strong>te <strong>digestion</strong><br />
intraluminale sont ensuite traités comme les disacchari<strong>des</strong><br />
naturels (lactose, saccharose) au niveau de la bordure en<br />
brosse <strong>des</strong> entérocytes où ils sont clivés en monosacchari<strong>des</strong><br />
puis absorbés. Les celluloses ne sont pas digérées<br />
dans l’intestin grêle. Elles sont en eff<strong>et</strong> insensibles à<br />
l’action <strong>des</strong> enzymes perm<strong>et</strong>tant la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong><br />
<strong>et</strong> parviennent intactes dans le côlon, expliquant leur eff<strong>et</strong><br />
laxatif.<br />
Digestion intraluminale de l’amidon : les α−amylases<br />
salivaire <strong>et</strong> pancréatique<br />
La <strong>digestion</strong> de l’amidon commence dès la mastication<br />
sous l’influence de l’α−amylase salivaire. L’importance de<br />
c<strong>et</strong>te enzyme n’est pas bien connue, car son activité est<br />
très vite inhibée par l’acidité du suc gastrique après la<br />
déglutition. La <strong>digestion</strong> de l’amidon est donc essentiellement<br />
effectuée par l’α−amylase pancréatique, enzyme<br />
majeure du suc pancréatique, qui clive l’amidon au niveau<br />
<strong>des</strong> liaisons β 1-4 glucosidiques pour donner <strong>des</strong> oligosacchari<strong>des</strong><br />
<strong>et</strong> <strong>des</strong> disacchari<strong>des</strong>. L’activité de c<strong>et</strong>te<br />
enzyme dans la lumière duodénale est si importante que<br />
l’amidon est majoritairement transformé dès les premières<br />
anses jéjunales, perm<strong>et</strong>tant aux enzymes de la bordure en<br />
brosse <strong>des</strong> entérocytes de poursuivre très tôt la <strong>digestion</strong><br />
<strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> [1].<br />
Digestion intestinale <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> :<br />
les oligosaccharidases de l’entérocyte<br />
Les disacchari<strong>des</strong> <strong>et</strong> oligosacchari<strong>des</strong> de l’alimentation <strong>et</strong><br />
ceux obtenus après action <strong>des</strong> α−amylases vont ensuite se<br />
présenter devant la bordure en brosse <strong>des</strong> entérocytes.<br />
Celle-ci présente de nombreuses enzymes souvent<br />
appelées disaccharidases ou oligosaccharidases qui vont<br />
hydrolyser les sacchari<strong>des</strong>. Ce sont de volumineuses glycoprotéines<br />
enchâssées dans la membrane entérocytaire<br />
<strong>et</strong> faisant saillie dans la lumière. On en distingue deux<br />
familles :<br />
– les α-glucosidases, comprenant la saccharase-isomaltase,<br />
la glucoamylase <strong>et</strong> la tréhalase. Les deux premières<br />
hydrolysent le saccharose, le maltose <strong>et</strong> les oligosacchari<strong>des</strong><br />
provenant de l’action de l’α-amylase sur l’amidon, la dernière<br />
hydrolyse le tréhalose.<br />
– une β-galactosidase unique, la lactase, qui hydrolyse le<br />
lactose en galactose <strong>et</strong> en glucose. C<strong>et</strong>te dernière enzyme<br />
est la seule à ne pas être inductible. Dans la population<br />
européenne, un pourcentage important bien que non clairement<br />
défini <strong>des</strong> adultes ne disposent plus de c<strong>et</strong>te<br />
enzyme. Ces suj<strong>et</strong>s vont développer une intolérance au<br />
lactose, étant dans l’incapacité de digérer c<strong>et</strong>te molécule.<br />
Ceci va se traduire par <strong>des</strong> troubles digestifs variés après<br />
l’ingestion de produits laitiers (ballonnements, dyspepsie,<br />
diarrhée intermittente), conduisant à une éviction spontanée<br />
du lactose de l’alimentation. Un test simple perm<strong>et</strong> de<br />
diagnostiquer c<strong>et</strong>te intolérance au lactose, le breath-test à<br />
l’hydrogène.<br />
L’enzyme principale de la bordure en brosse intestinale<br />
pour la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> est la saccharase-isomaltase,<br />
qui effectue à elle seule toute la <strong>digestion</strong> du saccharose<br />
<strong>et</strong> de l’isomaltose <strong>et</strong> 75 % de la <strong>digestion</strong> du maltose. Son<br />
activité est maximale dans les premières anses jéjunales <strong>et</strong><br />
décroît par la suite. La glucoamylase rend compte de la<br />
<strong>digestion</strong> <strong>des</strong> oligosacchari<strong>des</strong> de 4 ou plus résidus de glucose<br />
provenant de la <strong>digestion</strong> de l’amidon, ainsi que de<br />
dossier enseignement<br />
25 % de la <strong>digestion</strong> du maltose. Son activité croît tout au<br />
long de l’intestin grêle pour être maximale dans l’iléon [2].<br />
Au terme de l’action <strong>des</strong> α-amylases <strong>et</strong> <strong>des</strong> enzymes de la<br />
bordure en brosse entérocytaire, les gluci<strong>des</strong> sont réduits<br />
à leur forme la plus simple, leurs trois monosacchari<strong>des</strong><br />
constitutifs : le glucose (80 %), le galactose <strong>et</strong> le fructose.<br />
C’est uniquement sous c<strong>et</strong>te forme qu’ils pourront être<br />
absorbés par l’intestin. C<strong>et</strong>te <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> est<br />
quasiment complète dès le jéjunum moyen en situation<br />
physiologique.<br />
Absorption <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong><br />
Les gluci<strong>des</strong>, réduits en monosacchari<strong>des</strong> par la <strong>digestion</strong>,<br />
vont être absorbés au niveau <strong>des</strong> entérocytes selon <strong>des</strong><br />
mécanismes différents <strong>et</strong> spécifiques. Étant <strong>des</strong> molécules<br />
très hydrophiles, les monosacchari<strong>des</strong> ne peuvent traverser<br />
seuls les phases lipidiques <strong>des</strong> membranes cellulaires.<br />
Leur diamètre de 0,7 à 1 nm ne leur perm<strong>et</strong> pas par<br />
ailleurs de diffuser à travers les jonctions intercellulaires<br />
qui laissent passer les molécules d’eau <strong>et</strong> les électrolytes<br />
dont le diamètre est inférieur à 0,3 nm.<br />
Absorption du glucose <strong>et</strong> du galactose<br />
L’<strong>absorption</strong> du glucose <strong>et</strong> du galactose m<strong>et</strong> en jeu la<br />
pompe Na+–K+–ATPase. C’est le mécanisme prépondérant<br />
de l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> puisqu’il perm<strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong><br />
de plus de 80 % <strong>des</strong> monosacchari<strong>des</strong>, seul le<br />
fructose étant exclu de ce mécanisme. C’est un processus<br />
actif <strong>et</strong> saturable, consommateur d’énergie (ATP), qui perm<strong>et</strong><br />
l’<strong>absorption</strong> dans l’entérocyte d’une molécule de<br />
glucose parallèlement à deux ions Na+. La pompe Na+–<br />
K+–ATPase est un homotétramère constitué de quatre<br />
sous-unités traversant la membrane entérocytaire. Le glucose<br />
<strong>et</strong> le Na+ se fixent au pôle apical de l’entérocyte sur<br />
un transporteur appelé SGLUT1. La pompe Na+–K+–<br />
ATPase perm<strong>et</strong> ensuite de maintenir un gradient de Na+<br />
dans la cellule en excrétant le Na+ dans la circulation sanguine<br />
par le pôle basolatéral. L’entérocyte est donc toujours<br />
maintenu en situation d’affinité pour le Na+. Il a été<br />
démontré qu’en l’absence de Na+, le glucose ne se lie pas<br />
à son transporteur <strong>et</strong> n’est donc pas absorbé [3]. En présence<br />
de Na+, SGLUT1 se déforme pour laisser passer le<br />
glucose <strong>et</strong> le galactose. Le principe actif de ce transport<br />
de glucose est le gradient de Na+ maintenu au pôle basolatéral<br />
de l’entérocyte par la pompe Na+–K+–ATPase.<br />
L’<strong>absorption</strong> couplée du glucose <strong>et</strong> du sodium explique<br />
l’intérêt d’un apport conjoint de glucose <strong>et</strong> de sodium<br />
dans les solutés de réhydratation type OMS <strong>et</strong> dans les<br />
mélanges de nutrition entérale, afin d’optimiser les capacités<br />
de ré<strong>absorption</strong> de l’intestin grêle.<br />
Absorption du fructose<br />
Le fructose possède un transporteur spécifique sur la<br />
membrane apicale de l’entérocyte, appelé GLUT5 [4].<br />
Son affinité pour le fructose est assez faible, <strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong><br />
du fructose n’est pas dépendante d’un mécanisme<br />
conjoint avec le sodium.<br />
Mécanismes de sortie de l’entérocyte du glucose<br />
<strong>et</strong> du fructose<br />
Le glucose quitte l’entérocyte pour passer dans la circulation<br />
sanguine (système porte) par un mécanisme de diffusion<br />
facilitée, localisé dans la membrane basolatérale,<br />
indépendant du sodium, <strong>et</strong> saturable pour une concentration<br />
de glucose supérieure à 50 mmol/L –1 . C<strong>et</strong>te diffusion<br />
46 Cah. Nutr. Diét., 43, 1, 2008
dans la circulation est effectuée par un transporteur spécifique<br />
appelé GLUT2.<br />
Le fructose quitte l’entérocyte pour passer dans la circulation<br />
sanguine par le même transporteur que le glucose,<br />
GLUT2, situé sur le pôle basolatéral de l’entérocyte.<br />
Digestion <strong>et</strong> <strong>absorption</strong> <strong>des</strong> protéines<br />
Les protéines présentes dans la lumière intestinale ont<br />
une double origine : d’une part les protéines alimentaires,<br />
les plus nombreuses, 60-70 à 100 g/j –1 en France pour<br />
une alimentation variée (vian<strong>des</strong>, poissons, œufs, lait) ; <strong>et</strong><br />
d’autre part les protéines endogènes, représentées par les<br />
enzymes de la <strong>digestion</strong> (35 g/j –1 ) <strong>et</strong> par les produits du<br />
renouvellement cellulaire (30 g/j –1 ).<br />
Digestion <strong>des</strong> protéines<br />
Comme pour les gluci<strong>des</strong>, la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines est<br />
commencée lors d’une phase intraluminale au cours de<br />
laquelle les protéines sont changées en oligopepti<strong>des</strong>, puis<br />
la <strong>digestion</strong> est achevée par <strong>des</strong> peptidases présentes sur<br />
la bordure en brosse entérocytaire, perm<strong>et</strong>tant leur<br />
<strong>absorption</strong> par les entérocytes.<br />
Digestion intraluminale <strong>des</strong> protéines<br />
– Digestion intragastrique : après la mastication, qui perm<strong>et</strong><br />
la dilacération <strong>des</strong> protéines, la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines<br />
débute dans l’estomac. Il est démontré que l’acide chlorhydrique<br />
sécrété par les cellules pariétales de l’estomac<br />
perm<strong>et</strong> la dénaturation grossière <strong>des</strong> protéines. Il perm<strong>et</strong><br />
également d’atteindre un pH compris entre 2 <strong>et</strong> 4, pH<br />
pour lequel les pepsinogènes sécrétés par l’estomac sont<br />
transformés en enzymes protéolytiques actives appelées<br />
pepsines. Ces pepsines ont une activité de protéolyse<br />
connue, mais compte tenu de leur activité élective en<br />
milieu acide <strong>et</strong> du pouvoir tampon <strong>des</strong> repas (pH intragastrique<br />
mesuré supérieur à 5), il est peu probable<br />
qu’elles jouent un grand rôle dans la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines.<br />
Elles ne font sans doute que l’initier.<br />
– Digestion par les protéases pancréatiques : à l’inverse,<br />
les protéases pancréatiques ont un rôle majeur dans la<br />
<strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines. Elles comportent <strong>des</strong> endopeptidases<br />
(trypsine, chymotrypsine <strong>et</strong> élastase) <strong>et</strong> <strong>des</strong> exopeptidases<br />
(carboxypeptidases A <strong>et</strong> B). Ces enzymes,<br />
composant capital du suc pancréatique, clivent les protéines<br />
présentes dans la lumière intestinale dès le duodénum<br />
proximal, où se déverse le suc pancréatique. Les protéases<br />
pancréatiques sont tout d’abord libérées dans la<br />
lumière duodénale sous forme inactive ou zymogènes.<br />
Leur activation s’effectue en cascade, la première étape<br />
étant l’activation du trypsinogène en trypsine par l’entérokinase,<br />
une glycoprotéine synthétisée <strong>et</strong> libérée par les<br />
entérocytes du duodénum <strong>et</strong> du jéjunum proximal. Les<br />
endopeptidases <strong>et</strong> les carboxypeptidases ont une activité<br />
complémentaire. Ainsi, la trypsine clive les protéines <strong>et</strong><br />
produit <strong>des</strong> pepti<strong>des</strong> ayant à leur extrémité carboxyterminale<br />
un radical Arg ou Lys libéré dans un second<br />
temps par la carboxypeptidase B. La chymotrypsine <strong>et</strong><br />
l’élastase clivent quant à elles les protéines en pepti<strong>des</strong><br />
ayant à leur extrémité carboxy-terminale <strong>des</strong> radicaux<br />
respectivement aromatiques <strong>et</strong> aliphatiques, libérés secondairement<br />
par la carboxypeptidase A [5].<br />
dossier enseignement<br />
La <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines par les protéases pancréatiques<br />
est très rapide, aboutissant à un mélange d’aci<strong>des</strong> aminés<br />
<strong>et</strong> d’oligopepti<strong>des</strong> en moins de quinze minutes lors d’un<br />
repas d’épreuve [6]. La <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines se poursuit<br />
au niveau de la bordure en brosse <strong>des</strong> entérocytes.<br />
– Digestion par les peptidases entérocytaires : les peptidases<br />
entérocytaires sont localisées pour partie dans la<br />
bordure en brosse. Cependant, une grande partie d’entre<br />
elles sont situées en intracytoplasmique. En eff<strong>et</strong>, les pepti<strong>des</strong><br />
présentent la particularité par rapport aux gluci<strong>des</strong><br />
de pouvoir traverser la membrane apicale <strong>des</strong> entérocytes<br />
<strong>et</strong> d’être transformés en aci<strong>des</strong> aminés, produits finaux de<br />
la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> protéines, en intracytoplasmique.<br />
On connaît actuellement sept peptidases de la bordure en<br />
brosse : trois aminopeptidases (dont l’aminopeptidase<br />
neutre <strong>et</strong> l’aminopeptidase acide), libérant l’extrémité<br />
N-terminale <strong>des</strong> pepti<strong>des</strong>, deux carboxypeptidases libérant<br />
l’extrémité C-terminale <strong>des</strong> pepti<strong>des</strong>, une endopeptidase<br />
<strong>et</strong> la gamma-glutamyl-transpeptidase. Les plus actives<br />
sont l’aminopeptidase neutre <strong>et</strong> la dipeptidyl-peptidase IV.<br />
Ces peptidases de la bordure en brosse vont produire à<br />
partir <strong>des</strong> oligopepti<strong>des</strong> un mélange d’aci<strong>des</strong> aminés<br />
(60 %) <strong>et</strong> de di- <strong>et</strong> tripepti<strong>des</strong> (40 %).<br />
Les peptidases intracytoplasmiques sont responsables de<br />
90 % de l’activité peptidasique de l’entérocyte. Les principales<br />
sont la Gly-Leu dipeptidase, une prolidase <strong>et</strong> une<br />
aminotripeptidase. Seuls les di- <strong>et</strong> tripepti<strong>des</strong> peuvent traverser<br />
directement la membrane apicale de l’entérocyte.<br />
Le système de transfert <strong>des</strong> oligopepti<strong>des</strong> est très peu spécifique.<br />
C’est un système actif, dépendant d’un gradient<br />
H+ de part <strong>et</strong> d’autre de la membrane entérocytaire. Le<br />
transporteur <strong>des</strong> di- <strong>et</strong> tripepti<strong>des</strong> est appelé Pept-1 [7]. Il<br />
faut noter que ce transporteur n’a aucune affinité pour les<br />
aci<strong>des</strong> aminés. La possibilité pour les di <strong>et</strong> tripepti<strong>des</strong> de<br />
passer directement la membrane apicale <strong>des</strong> entérocytes<br />
pour être digérés en intracytoplasmique explique l’intérêt<br />
en cas de mal<strong>absorption</strong> sévère <strong>des</strong> solutés de nutrition<br />
entérale « semi-élémentaires » comprenant un grand<br />
nombre de protéines sous forme de di- <strong>et</strong> tripepti<strong>des</strong>.<br />
Absorption <strong>des</strong> protéines<br />
L’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> protéines par l’entérocyte se fait soit<br />
sous forme d’aci<strong>des</strong> aminés libres, soit sous forme de di<strong>et</strong><br />
tripepti<strong>des</strong> par le transporteur Pept-1. Il existe une<br />
vingtaine d’aci<strong>des</strong> aminés libres absorbés par l’entérocyte.<br />
On ne connaît pas spécifiquement toutes les voies<br />
d’<strong>absorption</strong> de ces différents aci<strong>des</strong> aminés. En revanche,<br />
on sait qu’ils font intervenir le gradient sodium, maintenu<br />
par la pompe Na+–K+–ATPase, comme pour le glucose.<br />
L’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> produits de dégradation <strong>des</strong> protéines<br />
est par conséquent un phénomène consommateur d’énergie,<br />
tout comme l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> produits de dégradation<br />
<strong>des</strong> sucres. Le taux de transfert <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> aminés est deux<br />
ions Na+ pour un acide aminé.<br />
Mécanismes de sortie de l’entérocyte <strong>des</strong> aci<strong>des</strong><br />
aminés<br />
Une part significative <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> aminés absorbés par<br />
l’entérocyte (10 %) est utilisée par l’épithélium intestinal<br />
pour son métabolisme <strong>et</strong> ses propres synthèses. La glutamine,<br />
le glutamate <strong>et</strong> l’aspartate sont les aci<strong>des</strong> aminés les<br />
plus utilisés par l’intestin, couvrant 80 % <strong>des</strong> besoins de<br />
l’épithélium intestinal. Le passage <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> aminés dans<br />
la circulation sanguine est indépendant du sodium. Les<br />
Cah. Nutr. Diét., 43, 1, 2008 47
aci<strong>des</strong> aminés neutres <strong>et</strong> basiques sortent de l’entérocyte<br />
par le pôle basolatéral en empruntant <strong>des</strong> systèmes transporteurs<br />
spécifiques appelés respectivement système L <strong>et</strong><br />
système y + [8].<br />
Digestion <strong>et</strong> <strong>absorption</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong><br />
Les matières grasses ou lipi<strong>des</strong> représentent près de 50 %<br />
de l’énergie apportée par l’alimentation. Les lipi<strong>des</strong> sont<br />
présents dans l’alimentation dans le beurre, l’huile, les<br />
matières grasses, mais aussi le chocolat <strong>et</strong> bon nombre de<br />
produits manufacturés. Les lipi<strong>des</strong> ingérés sont constitués<br />
à 98 % de triglycéri<strong>des</strong>, le reste étant représenté par le<br />
cholestérol, les phospholipi<strong>des</strong> <strong>et</strong> les esters <strong>des</strong> vitamines<br />
liposolubles (A, D, E, K).<br />
La <strong>digestion</strong> <strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong> sont plus complexes<br />
que celles <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong> <strong>des</strong> protéines, du fait notamment<br />
du caractère hydrophobe <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong>. Elles nécessitent<br />
trois étapes bien distinctes :<br />
– la fragmentation <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> par les lipases salivaire,<br />
gastrique <strong>et</strong> pancréatique ;<br />
– l’<strong>absorption</strong> par le grêle <strong>des</strong> produits de la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong><br />
lipi<strong>des</strong> sous forme de micelles formées à partir <strong>des</strong> aci<strong>des</strong><br />
biliaires, perm<strong>et</strong>tant de transporter les molécules hydrophobes<br />
à travers la membrane entérocytaire ;<br />
– la resynthèse <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> en intra-entérocytaire<br />
avant la formation <strong>des</strong> chylomicrons <strong>et</strong> la sortie non pas<br />
dans le système porte mais dans les canaux lymphatiques.<br />
Digestion <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong><br />
La lipolyse prépancréatique<br />
La lipase salivaire est la première enzyme hydrolysant les<br />
lipi<strong>des</strong>. Elle est active en milieu acide, <strong>et</strong> donc dans l’estomac.<br />
Son rôle n’est probablement pas majeur.<br />
La lipase gastrique a été identifiée relativement récemment<br />
[9]. Elle est également active en milieu acide (pH<br />
autour de 5) <strong>et</strong> a une spécificité pour la position externe<br />
<strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong>. Il semble que son rôle soit assez important<br />
dans l’initiation de la lipolyse pancréatique.<br />
La lipolyse pancréatique<br />
Le pancréas exocrine est l’organe majeur impliqué dans la<br />
<strong>digestion</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong>. Le suc pancréatique contient trois<br />
enzymes lipolytiques différentes ayant chacune leur spécificité :<br />
– la lipase pancréatique est l’enzyme principale. Elle<br />
hydrolyse uniquement les triglycéri<strong>des</strong>, qui sont les lipi<strong>des</strong><br />
très largement majoritaires dans l’alimentation ;<br />
– la carboxyl ester lipase (CEL) qui hydrolyse les esters du<br />
cholestérol ;<br />
– la phospholipase A2 qui hydrolyse les phospholipi<strong>des</strong>.<br />
La lipase pancréatique libère à partir d’une molécule de<br />
triglycéri<strong>des</strong> deux aci<strong>des</strong> gras <strong>et</strong> une molécule de monoglycéride.<br />
Elle agit à l’interface huile-eau, <strong>et</strong> nécessite<br />
donc une émulsification préalable <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> afin de<br />
pouvoir être efficace. Son activité est alors multipliée par<br />
1 000 [10]. C<strong>et</strong>te émulsification est obtenue d’abord par<br />
la motricité antropylorique, puis de façon beaucoup plus<br />
fine par l’action <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires qui vont solubiliser les<br />
lipi<strong>des</strong> de l’alimentation. Outre la nécessité de l’émulsification<br />
par les sels biliaires, la lipase pancréatique requiert<br />
également l’action d’un cofacteur sécrété également par<br />
le pancréas, appelé colipase. La colipase forme avec les<br />
sels biliaires <strong>et</strong> la lipase un complexe ternaire dans lequel<br />
dossier enseignement<br />
la colipase ancre la lipase dans l’interface tapissé de sels<br />
biliaires, perm<strong>et</strong>tant à la lipase l’accès à son substrat, les<br />
triglycéri<strong>des</strong> [10]. Le pH optimal d’activité de la lipase est<br />
de 6, <strong>et</strong> de 8 en présence d’aci<strong>des</strong> biliaires. In vivo, on<br />
estime que la lipase pancréatique perm<strong>et</strong> d’hydrolyser<br />
70 % <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> de l’alimentation.<br />
La CEL n’agit pas à l’interface huile-eau mais sur <strong>des</strong><br />
substrats en solution. Elle a une action préférentielle sur<br />
les esters du cholestérol <strong>et</strong> les esters <strong>des</strong> vitamines A <strong>et</strong> E<br />
en présence d’aci<strong>des</strong> biliaires, mais peut également hydrolyser<br />
<strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> à chaîne longue [11]. En l’absence<br />
d’aci<strong>des</strong> biliaires, elle est très active sur les phospholipi<strong>des</strong><br />
à chaîne courte.<br />
La phospholipase A2 est sécrétée sous forme de proenzyme,<br />
<strong>et</strong> est activée dans le duodénum par la trypsine.<br />
Tout comme la lipase pancréatique, elle requiert l’interface<br />
huile-eau pour être active, <strong>et</strong> est donc dépendante de<br />
l’action préalable <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires. Elle catalyse spécifiquement<br />
l’hydrolyse de la liaison ester d’acide gras située<br />
en position 2 (interne) sur la molécule de phosphoglycéride<br />
[12].<br />
La lipase pancréatique est très spécifique <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong><br />
<strong>et</strong> elle est très active in vivo. Il faut une <strong>des</strong>truction ou une<br />
amputation de plus de 80 % du pancréas pour voir apparaître<br />
une stéatorrhée par mal<strong>digestion</strong> <strong>des</strong> graisses.<br />
Absorption <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong><br />
Le rôle <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires : les micelles<br />
Les aci<strong>des</strong> biliaires jouent un rôle capital dans la <strong>digestion</strong><br />
<strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong>. C’est sous leur action que les<br />
lipi<strong>des</strong> alimentaires sont solubilisés en micelles, agrégats<br />
multimoléculaires formés autour <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires du fait<br />
de leur propriété très particulière : les aci<strong>des</strong> biliaires sont<br />
en eff<strong>et</strong> <strong>des</strong> molécules amphipathes, c’est-à-dire qu’elles<br />
sont à la fois hydrophobes <strong>et</strong> hydrophiles. Les aci<strong>des</strong><br />
biliaires vont donc perm<strong>et</strong>tre la solubilisation <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong><br />
de l’alimentation en les m<strong>et</strong>tant en contact avec leur pôle<br />
hydrophobe. Ce complexe formé <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires <strong>et</strong><br />
<strong>des</strong> lipi<strong>des</strong> de l’alimentation situés au cœur du complexe<br />
constitue la micelle. C’est dans la micelle que la lipase<br />
pancréatique pourra digérer les triglycéri<strong>des</strong> à l’aide de la<br />
colipase. La formation micellaire commence dès que la<br />
concentration intraluminale <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires atteint la<br />
concentration micellaire critique. Le pôle hydrophile <strong>des</strong><br />
aci<strong>des</strong> biliaires perm<strong>et</strong> ensuite d’apporter les produits de<br />
la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong> au niveau de la bordure en brosse.<br />
La diffusion <strong>des</strong> produits de la lipolyse se fait alors de la<br />
micelle en intra-entérocytaire de façon passive.<br />
Toute perturbation du métabolisme <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> biliaires<br />
(cholestase, pullulation microbienne, <strong>et</strong>c.) aboutit à une<br />
mal<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> graisses, soulignant leur extrême<br />
importance dans la <strong>digestion</strong> <strong>et</strong> l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong>.<br />
Il a été suggéré récemment que l’<strong>absorption</strong> intestinale du<br />
cholestérol pourrait être contrôlée génétiquement. Ce<br />
contrôle génétique de l’<strong>absorption</strong> du cholestérol pourrait<br />
impliquer un mécanisme médié par <strong>des</strong> enzymes telles que<br />
la CEL [13], mais aussi la lipase pancréatique elle-même<br />
[14]. Une diminution <strong>des</strong> concentrations luminales de ces<br />
deux enzymes due à une mutation génétique pourrait m<strong>et</strong>tre<br />
à l’abri à l’échelon individuel d’une obésité induite par un<br />
régime riche en graisses [13]. En eff<strong>et</strong>, l’absence de stimulation<br />
directe de l’<strong>absorption</strong> intestinale du cholestérol par<br />
la CEL <strong>et</strong> la lipase pancréatique entraînent une diminution<br />
majeure de l’<strong>absorption</strong> du cholestérol <strong>et</strong> dans une moin-<br />
48 Cah. Nutr. Diét., 43, 1, 2008
dre mesure <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> chez la souris [14]. Ces données<br />
récentes méritent d’être explorées chez l’Homme du<br />
fait de l’importance de leurs implications dans la compréhension<br />
<strong>et</strong> le traitement de l’obésité.<br />
Formation <strong>des</strong> chylomicrons<br />
– Resynthèse <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> : les aci<strong>des</strong> gras libres sont<br />
pris en charge dès leur entrée dans l’entérocyte par deux<br />
protéines spécifiques liant les aci<strong>des</strong> gras appelées liverfatty<br />
acid binding protein (L-FABP) <strong>et</strong> intestine-fatty<br />
acid binding protein (I-FABP). La I-FABP assure le transport<br />
intra-entréocytaire <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> gras libres de plus de<br />
12 C. La L-FABP sert de « réservoir » d’aci<strong>des</strong> gras libres<br />
en attendant leur transport. Les aci<strong>des</strong> gras libres de plus<br />
de 12 C sont réestérifiés en triglycéri<strong>des</strong> dans le réticulum<br />
endoplasmique par l’acyl-CoA-synthétase. Les aci<strong>des</strong> gras<br />
libres de moins de 12 C diffusent directement dans l’entérocyte<br />
pour rejoindre le système porte.<br />
– Formation <strong>des</strong> chylomicrons <strong>et</strong> sortie de l’entérocyte :<br />
les triglycéri<strong>des</strong> resynthétisés sont rejoints par les phospholipi<strong>des</strong><br />
<strong>et</strong> par les apoprotéines, ces dernières étant<br />
synthétisées par l’entérocyte. Les chylomicrons sont <strong>des</strong><br />
amas de triglycéri<strong>des</strong> recouverts pour 80 % de phospholipi<strong>des</strong><br />
<strong>et</strong> pour 20 % d’apoprotéines. Ils sont empaqu<strong>et</strong>és<br />
dans <strong>des</strong> vésicules qui vont fusionner avec la membrane<br />
entérocytaire au niveau du pôle basolatéral, avant d’être<br />
excrétés dans l’espace intercellulaire. Leur volume leur<br />
interdisant de traverser les fenestrations capillaires, ils<br />
vont pénétrer dans les lymphatiques intestinaux par les<br />
interstices séparant les cellules endothéliales. Ils rejoignent<br />
finalement la circulation générale par le canal thoracique.<br />
– Cas particulier <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> à chaîne moyenne<br />
(TCM) : les TCM diffèrent fortement <strong>des</strong> triglycéri<strong>des</strong> à<br />
chaîne longue (TCL). En eff<strong>et</strong>, ils sont beaucoup plus<br />
hydrosolubles que les TCL. Ils n’ont donc pas besoin <strong>des</strong><br />
aci<strong>des</strong> biliaires pour diffuser à travers la membrane entérocytaire,<br />
expliquant pourquoi ils peuvent être donnés en<br />
cas de mal<strong>absorption</strong> par carence en aci<strong>des</strong> biliaires. Ils<br />
sont par ailleurs hydrolysés beaucoup plus rapidement par<br />
la lipase pancréatique que les TCL.<br />
En intra-entérocytaire, les aci<strong>des</strong> gras à chaîne moyenne<br />
ne sont pas réestérifiés en triglycéri<strong>des</strong>, l’acyl-CoA-synthétase<br />
n’ayant pas d’affinité pour les aci<strong>des</strong> gras de moins<br />
de 12 C. Ils n’entrent pas dans la composition <strong>des</strong> chylomicrons<br />
<strong>et</strong> quittent l’entérocyte par le système porte.<br />
C<strong>et</strong>te dernière caractéristique explique que les TCM soient<br />
les seuls lipi<strong>des</strong> autorisés en nutrition orale ou entérale en<br />
cas de plaie du canal thoracique (chirurgie de l’aorte).<br />
Conclusion<br />
La <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong> fait intervenir <strong>des</strong> enzymes<br />
sécrétées de manière prépondérante par le pancréas, véritable<br />
chef d’orchestre de la fragmentation <strong>des</strong> aliments.<br />
Les enzymes pancréatiques perm<strong>et</strong>tent en eff<strong>et</strong> la <strong>digestion</strong><br />
<strong>des</strong> gluci<strong>des</strong>, <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong> <strong>et</strong> <strong>des</strong> protéines, le rôle <strong>des</strong><br />
autres enzymes de la <strong>digestion</strong> (gastriques, intestinales,<br />
biliaires), étant essentiellement de favoriser l’action <strong>des</strong><br />
principales enzymes pancréatiques (α-amylase pour les<br />
gluci<strong>des</strong>, trypsine pour les protéines <strong>et</strong> lipase pour les<br />
lipi<strong>des</strong>) ou de terminer la fragmentation initiée par les<br />
enzymes du suc pancréatique afin de perm<strong>et</strong>tre leur<br />
<strong>absorption</strong> par les entérocytes.<br />
dossier enseignement<br />
L’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong> au niveau de la bordure en<br />
brosse <strong>des</strong> entérocytes est un phénomène actif couplé au<br />
sodium pour les produits de la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong><br />
<strong>des</strong> protéines. En ce qui concerne les produits de la <strong>digestion</strong><br />
<strong>des</strong> lipi<strong>des</strong>, les aci<strong>des</strong> biliaires jouent un rôle central<br />
en perm<strong>et</strong>tant leur solubilisation grâce aux micelles qui perm<strong>et</strong>tent<br />
la diffusion passive <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> gras dans l’entérocyte.<br />
Les produits finaux de la dégradation <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong> <strong>des</strong><br />
protéines, les monosacchari<strong>des</strong> <strong>et</strong> les aci<strong>des</strong> aminés,<br />
rejoignent la circulation sanguine par le flux du tronc<br />
porte qui les véhicule jusqu’au foie. Les produits finaux de<br />
la dégradation <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong> sont les aci<strong>des</strong> gras libres, qui<br />
connaissent deux <strong>des</strong>tinations différentes. Les aci<strong>des</strong> gras<br />
à chaîne longue, majoritaires (plus de 12 C), sont resynthétisés<br />
en triglycéri<strong>des</strong> dans l’entérocyte <strong>et</strong> rejoignent la<br />
circulation lymphatique du fait de leur volumineuse taille.<br />
Les aci<strong>des</strong> gras à chaîne courte (moins de 12 C), rejoignent<br />
directement le flux porte à l’instar <strong>des</strong> monosacchari<strong>des</strong><br />
<strong>et</strong> <strong>des</strong> aci<strong>des</strong> aminés.<br />
Résumé<br />
La <strong>digestion</strong> commence dès l’ingestion <strong>des</strong> aliments. Elle<br />
se poursuit tout au long du tube digestif, par l’action <strong>des</strong><br />
principales enzymes salivaires, gastriques, pancréatiques,<br />
biliaires <strong>et</strong> intestinales. Le pancréas joue un rôle central<br />
dans la <strong>digestion</strong> puisqu’il sécrète les enzymes clés de la<br />
<strong>digestion</strong> <strong>des</strong> gluci<strong>des</strong> (α-amylase), <strong>des</strong> protéines (trypsine),<br />
<strong>et</strong> <strong>des</strong> lipi<strong>des</strong> (lipase) qui perm<strong>et</strong>tent de cliver les<br />
principaux aliments en <strong>nutriments</strong> sous forme de mono<br />
ou oligomères (oligosacchari<strong>des</strong> pour les gluci<strong>des</strong>, oligopepti<strong>des</strong><br />
pour les protéines, aci<strong>des</strong> gras pour les lipi<strong>des</strong>).<br />
Le principal site de la <strong>digestion</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong> est l’intestin<br />
grêle. C<strong>et</strong>te <strong>digestion</strong>, initiée par les enzymes pancréatiques<br />
notamment, est terminée pour les gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong> les<br />
protéines par les enzymes de la bordure en brosse <strong>des</strong><br />
entérocytes (oses <strong>et</strong> aci<strong>des</strong> aminés). L’intestin grêle<br />
constitue également avec ses 4 mètres de longueur le site<br />
privilégié de l’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong> <strong>nutriments</strong>. L’<strong>absorption</strong> <strong>des</strong><br />
<strong>nutriments</strong> est un phénomène actif pour les gluci<strong>des</strong> <strong>et</strong> les<br />
protéines, dont le transport dans l’entérocyte est couplé<br />
au sodium. Pour les lipi<strong>des</strong>, la solubilisation en micelles<br />
par les aci<strong>des</strong> biliaires est nécessaire à leur <strong>absorption</strong>, qui<br />
se fait par diffusion passive. Les aci<strong>des</strong> aminés <strong>et</strong> les oses<br />
passent ensuite dans la circulation générale par le système<br />
porte, tandis que les aci<strong>des</strong> gras sont resynthétisés en<br />
triglycéri<strong>des</strong> dans l’entérocyte avant de passer dans le<br />
système lymphatique sous forme de chylomicrons.<br />
Mots-clés : Nutriments – Digestion – Absorption.<br />
Abstract<br />
Digestion is initiated as soon as the aliments are ingested.<br />
Then it is pursued in the digestive tract, by the<br />
action of the main enzymes of saliva, gastric juice, pancreatic<br />
juice, bile and intestine. Pancreas plays a major<br />
role in <strong>digestion</strong> since it produces the key enzymes of<br />
sugars (α-amylase), proteins (trypsin) and lipids (lipase),<br />
which change the main aliments in oligosacchari<strong>des</strong>,<br />
oligopepti<strong>des</strong> and fatty acids. The principal site of<br />
<strong>digestion</strong> is the small intestine. Digestion is initiated by<br />
enzymes from pancreatic juice, and finished by the bor-<br />
Cah. Nutr. Diét., 43, 1, 2008 49
der brush enzymes for proteins and sugars to give<br />
amino acids and glucose. Small intestine is also the<br />
main site of nutrients <strong>absorption</strong>, which is facilitated<br />
by its 4 m<strong>et</strong>ers length. Nutrients <strong>absorption</strong> is an active<br />
phenomenon for glucose and amino acids with a cotransport<br />
associated to the sodium. Lipids require a<br />
previous solubilization by the biliary acids, which allow<br />
a passive diffusion of lipids in the enterocyte after a<br />
micelle solubilization. Amino acids and sugars can then<br />
pass in the portal vein, whereas fatty acids are changed<br />
in triglyceri<strong>des</strong> before their passage in the lymphatic<br />
system.<br />
Key-words: Nutrients – Digestion – Absorption.<br />
Bibliographie<br />
[1] Fogel M.R., Gray G.M. – Starch hydrolysis in man: an<br />
intra-luminal process not requiring membrane <strong>digestion</strong>. J<br />
Appl Physiol, 1973, 35, 263-267.<br />
[2] Triadou N., Bataille J., Schmitz J. – Longitudinal study of<br />
the human intestinal brush border membrane proteins.<br />
Distribution of the main disaccharidases and peptidases.<br />
Gastroenterology, 1983, 85, 1326-1332.<br />
[3] Wright E.M., Hirayama B.A., Loo D.D. <strong>et</strong> al. – Intestinal<br />
sugar transport. In: “Physiology of the gastrointestinal<br />
tract”, Johnson L.R. 3 rd Ed., Raven Press, New-York,<br />
1994, 1751-1758.<br />
[4] Burant C.F., Takeda J., Brot-Laroche E. <strong>et</strong> al. – Fructose<br />
transporter in human spermatozoa and small intestine is<br />
GLUT5. J Biol Chem, 1992, 267, 14523-14526.<br />
[5] Gray G.M., Cooper H.L. – Protein <strong>digestion</strong> and <strong>absorption</strong>.<br />
Gastroenterology, 1971, 61, 535-544.<br />
dossier enseignement<br />
[6] Nixon S.E., Mawer G.E. – The <strong>digestion</strong> and <strong>absorption</strong><br />
of protein in man. The site of absorprion. Br J Nutr,<br />
1970, 24, 227-240.<br />
[7] Adibi S.A. – The oligopeptide transporter (Pept-1) in<br />
human intestine: biology and function. Gastroenterology,<br />
1997, 113, 332-340.<br />
[8] Stevens B.R., Kaunitz J.D., Wright E.M. – Intestinal transport<br />
of amino acids and sugars: advances using membrane<br />
vesicles. Ann Rev Physiol, 1984, 46, 417-433.<br />
[9] Moreau H., Laugier R., Gargouri Y. <strong>et</strong> al. – Human preduodenal<br />
lipase is entirely of gastric fundic origine. Gastroenterology,<br />
1988, 95, 1221-1226.<br />
[10] Van Tilbeurgh H., Sarda L., Verger R. <strong>et</strong> al. – Structure<br />
of the pancreatic lipase-procolipase complex. Nature,<br />
1992, 359, 159-162.<br />
[11] Lombardo D., Guy O. – Studies of the substrate specificity<br />
of a carboxyl ester hydrolase from human pancreatic<br />
juice. Action on cholesterol-esters and lipid-soluble viatmine-esters.<br />
Biochem Biophys Acta, 1980, 611, 147-<br />
155.<br />
[12] Grataroli R., Dijkman R., Dutilh C.E. <strong>et</strong> al. – Studies on<br />
phospholipase A2 and its enzyme from human pancreatic<br />
juice. Catalytic properties and sequence of the N-terminal<br />
region. Eur J Biochem, 1982, 122, 111-117.<br />
[13] Gilham D., Labonté E.D., Rojas J.C. <strong>et</strong> al. – Carboxyl<br />
ester lipase deficiency exacerbates di<strong>et</strong>ary lipid <strong>absorption</strong><br />
abnormalities and resistance to di<strong>et</strong>-induced obesity in<br />
pancreatic triglyceride lipase knockout mice. J Biol<br />
Chem, 2007, 282, 24642-24649.<br />
[14] Huggins K.W., Camarota L.M., Howles P.N. <strong>et</strong> al. – Pancreatic<br />
triglyceride lipase deficiency minimally affects di<strong>et</strong>ary<br />
fat <strong>absorption</strong> but dramatically decreases di<strong>et</strong>ary<br />
cholesterol <strong>absorption</strong> in mice. J Biol Chem, 2003, 278,<br />
42899-42905.<br />
50 Cah. Nutr. Diét., 43, 1, 2008