4 I n t e r v i e w Monsieur CORNELY - Directeur <strong>de</strong>s Services Fiscaux d’Ille et Vi<strong>la</strong>ine Baro Avril 2005
I n t e r v i e w Monsieur CORNELY Directeur <strong>de</strong>s Services Fiscaux d’Ille et Vi<strong>la</strong>ine Baro Quel a été votre par<strong>cour</strong>s jusqu'<strong>à</strong> <strong>la</strong> tête <strong>de</strong>s services fiscaux d'Ille et Vi<strong>la</strong>ine ? M. CORNELY Mon par<strong>cour</strong>s certes atypique a commencé par le par<strong>cour</strong>s habituel : maîtrise <strong>de</strong> sciences économiques, con<strong>cour</strong>s d’entrée <strong>à</strong> l’école nationale <strong>de</strong>s impôts <strong>à</strong> <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s années 1960, inspecteur <strong>de</strong>s impôts, inspecteur <strong>de</strong> direction <strong>à</strong> Lyon, puis inspecteur principal par con<strong>cour</strong>s. J’ai donc très peu exercé sur le terrain. Ensuite avec <strong>de</strong>s procédures <strong>de</strong> sélection du type du secteur privé (interview, évaluation personnelle,…) je suis <strong>de</strong>venu directeur divisionnaire, puis départemental et enfin directeur <strong>de</strong>s services fiscaux. Le par<strong>cour</strong>s est atypique en ce qui me concerne parce que j’ai postulé pour le poste d’inspecteur principal, et avant même <strong>de</strong> connaître le résultat, je suis parti <strong>à</strong> Washington où j’ai passé 20 ans, ce qui n’a plus rien <strong>à</strong> voir avec le cursus administratif c<strong>la</strong>ssique. Je ne faisais pas <strong>de</strong> fiscalité mais <strong>de</strong>s finances publiques : budget, contrôle budgétaire, politique tarifaire, administration douanière, politique fiscale, administration fiscale. Cette accumu<strong>la</strong>tion d’expériences m’a conduit <strong>à</strong> aller <strong>à</strong> peu près partout dans le mon<strong>de</strong>. J’ai du mettre le pied, au moins une fois dans ma vie, dans 80 pays différents pour <strong>de</strong>s missions du type fonds monétaire. Baro Vous avez, <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s avocats, récemment défini <strong>la</strong> direction <strong>de</strong>s services fiscaux comme une entreprise <strong>de</strong> service public dans le traitement <strong>de</strong> l’information. N’est ce pas étonnant <strong>de</strong> parler d’entreprise <strong>à</strong> propos <strong>de</strong>s services fiscaux ? M. CORNELY Qu’est-ce qui nous différencierait d’une entreprise ? Nous sommes <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s femmes. Notre métier est <strong>de</strong> traiter <strong>de</strong> l’information qui vient <strong>de</strong> sources diverses et variées et en particulier <strong>de</strong> nos usagers clients, <strong>de</strong>s déc<strong>la</strong>rations. Notre métier est <strong>de</strong> transformer tout ce<strong>la</strong> en produit qui s’appelle l’impôt. C’est donc bien du traitement <strong>de</strong> l’information. Derrière, pour ce faire, nous avons <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s femmes, <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> l’informatique, du management, du contrôle <strong>de</strong> gestion, du contrôle budgétaire, tous les ingrédients que l’on trouve dans une entreprise <strong>de</strong> <strong>la</strong> même taille que cette direction qui est une grosse PME <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 900 personnes. La gran<strong>de</strong> différence est que nous ne sommes pas une entreprise du secteur compétitif du marché. Notre sanction n’est pas le marché. Mais dans une conception plus mo<strong>de</strong>rne, nous avons <strong>de</strong>ux clients : l’usager, qui a <strong>de</strong>s droits, qui attend <strong>de</strong> nous un service et l’Etat, qui nous confie <strong>la</strong> mission <strong>de</strong> faire payer l’impôt <strong>à</strong> nos concitoyens. La Déc<strong>la</strong>ration <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’Homme et du citoyen est le fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> notre action : chacun doit payer l’impôt en fonction <strong>de</strong> ses facultés. Ces <strong>de</strong>ux clients doivent être exigeants avec nous et pas forcément moins que le client d’une entreprise privée. La seule différence est que nos clients sont captifs. Ils ne peuvent pas choisir leur fournisseur d’informations traitées et transformées en impôts. C’est une raison supplémentaire pour s’attacher <strong>à</strong> <strong>la</strong> qualité <strong>de</strong>s services rendus. Baro Quel est le risque pour cette entreprise ? M. CORNELY La question qui se pose aujourd’hui est <strong>de</strong> savoir si un service public qui ne se légitime pas auprès <strong>de</strong> ses clients, usagers et Etat, peut ou non faire faillite ? Faire faillite, au sens traditionnel et juridique du terme, certainement pas. Par contre, perdre sa légitimité aux yeux <strong>de</strong> celui qui le paie et 5