Projets de Réformes - western armenia

— .275 —
quartier
à aucun Arménien, les assommant froidement et s'acharnant sur des cadavres.
Des officiers connus de nous tous encourageaient le meurtre et le
piEage des
magasins
et pas plus la troupe que la police ne songeaient à arrêter ces scènes de
sauvagerie.
Nous nous sommes trouvés de nouveau en présence du système inauguré lors des
massacres du 3o septembre 1895; déchaîner la lie de la populace, et s'en faire, après
les troupes,
un
rempart et un
appui,
en laissant fibre cours à ses passions fanatiques
et sanguinaires.
Je ne pourrais citer à Votre ExceEence la série interminable des faits qui prouvent
jusqu'à
l'évidence que c'est le Sultan lui-même qui arme les bras de ces assommeurs
et leur enjoint de courir sus à tout ce
qui
est Arménien. E est avéré que la police
avait averti d'avance toute cette canaille, distribuant les gourdins, indiquant les bons
endroits, et c'est
presque ouvertement que les Turcs avouent la « nécessité » où ils
se sont trouvés de déchaîner cette
effroyable police irrégulière, du moment que le
Sidtan retenait auprès de sa
personne toute la
garnison de Constantinople.
Là était le plus grave danger de la situation, et on ne
pouvait sans frémir songer
aux excès d'une populace maîtresse de la viEe, tandis
que
la
police
se bornait à
compter les coups
et à enlever les cadavres.
Pendant ce
temps-là, M. Auboyneau, après avoir obtenu l'assurance que la troupe
ne tenterait rien
pour
délivrer la
Banque jusqu'à son retour du Palais, se rendait à
Yldiz et
y apportait les détails encore inconnus sur les événements de la Banque. H
eut quelque peine à fixer l'attention du Grand Vizir sur la nécessité de prendre les
mesures
propres à assurer la sécurité de la Banque et de ses employés. HalE Rifaat
Pacha paraissait se désintéresser du sort du grand établissement financier et plutôt
désireux de laisser les choses en venir à un
point qui justifiât les excès de colère des
Musulmans contre les Arméniens.
M. Auboyneau dut représenter énergiquement au Palais rà nécessité de se placer
à un point de vue plus sérieux.
Mais le Sultan ne voulait
pas
entendre parler-des concessions politiques qu'exigeait
le Comité révolutionnaire arménien.
Après une longue discussion à laqueEe prirent part Sir Edgar Vincent et M. Maximow,
premier drogman de l'Ambassade de Russie, qui se trouvait à cette heure au Palais, le
Sultan consentit à accorder la vie sauve aux vingt-cinq arméniens envahisseurs de
la Banque. Aucune force ne serait employée contre eux. Es sortiraient de la Banque
sous la sauvegarde de la police et des délégués de la Banque et seraient transportés à
bord du yacht de Sir Edgar Vincent, en attendant d'être embarqués sur le premier
paquebot en partance pour l'Europe. E ne fut pas facEe de faire accepter cette solution
par les Arméniens. Es s'y refusèrent pendant plusieurs heures et M. Auboyneau
se loue grandement de l'assistance que lui a prêtée l'habile éloquence de M. Ma-
ximow. Enfin, à trois heures et demie du matin, les insurgés acceptaient les conditions
qui leur étaient faites, évacuaient la Banque, rendant ainsi la liberté aux cent vingt
employés retenus depuis quatorze heures dans de crueEes angoisses.
A la suite d'une réunion tenue chez le baron de Calice, les Représentants des
Grandes Puissances consentirent à donner leur assistance à l'exécution de l'arrange-
ment.
35.