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alimentaire offre les contre-arguments d'une imitation maladroite ou attardée du goût alimentaire dominant. Originellement, il sort des entrailles du mode alimentaire populaire né des contraintes liées aux limitations du revenu. Ce courant alimentaire est tellement fort dans le contexte abidjanais qu'il a infléchi l'''intolérance esthétique" de la classe dominante qui a fini par en récupérer une partie pour en faire un espace alimentaire culturellement hybride plus conforme à ses besoins de consomma­ tion. Cette conformité aux aspirations alimentaires vient du fait que les pratiques alimentaires informelles ainsi "récupé­ rées" par la classe dominante font la synthèse entre les habi­ tudes alimentaires (menu africain) et les codes et normes (ma­ nières de table) qu'imposent aux membres de cette classe leurs "titres de noblesse culturelle". Puisque les goûts alimentaires semblent ici modelés par les différences de pouvoir d'achat, on comprend dès lors que la subordination de la fonction à la forme ou la mise entre parenthèse des fins pratiques de l'alimentation a un prix à payer. Cette économie des pratiques alimentaires pourrait constituer un facteur explicatif des différences de prix observa­ bles pour un même produit dans deux structures identiques de l'informel alimentaire. BI Pratiques du crédit et rapports à la clientèle Quelle que soit la structure, la pratique du crédit semble être une institution commerciale regissant les rapports 197

consommateurs-restaurateurs. Il semblerait même que l'informel alimentaire en lui-même ne saurait exister sans elle. 72,5 % des micro-négociants ont exprimé, au cours de nos enquêtes, la néces- sité de faire crédit à leurs clients malgré les conflits que peuvent entraîner les irrégularités dans le remboursement. On pourrait résumer leurs propos sur la question par cette formule : "sans crédit, pas de commerce d'aliments". La pratique du crédit est si généralisée que les micro-négociants qui, dès les premiers jours ont voulu y échapper, ont été "contraints" de s'y rallier ensuite pour conserver leur clientèle. En quoi consiste donc cette pratique? Faute de revenu régulier et surtout à cause de la fluctuation du pouvoir d'achat, nombreux sont les consommateurs qui n'arrivent pas à payer comptant les repas pris au dehors. La pratique consiste alors .. a différer le paiement des consommations quotidiennes à la fin du mois en cours. Dans l'I.A. environ 35 % des plats sont vendus à cré- dit. Le contrat tacite de consommation à crédit est passé au bout de trois mois environ de régularité du client. Il n'existe aucun autre moyen de contrainte pour assurer le remboursement que les pressions personnelles, le rapport de confiance et l'engagement de la réputation du client qui, avec le temps peut passer de la fidélité à la "trahison" (1). En l'absence de toute contrainte institutionnelle, la stratégie des micro-négociants consiste à renforcer l'obligation morale inscrite dans le rapport de confiance, soit en rappelant souvent au client agréé l'honneur du (1) M. Le Pape, Cl. Vidal, Espace abidjanais. Sociographie de la mobilité in L'Espace géographique, nO 3, 1986; p. 194. 198

consommateurs-restaurateurs. Il semblerait même que l'informel<br />

alimentaire en lui-même ne saurait exister sans elle. 72,5 % des<br />

micro-négociants ont exprimé, au cours de nos enquêtes, la néces-<br />

sité de faire crédit à leurs clients malgré les conflits que<br />

peuvent entraîner les irrégularités dans le remboursement. On<br />

pourrait résumer leurs propos sur la question par cette formule :<br />

"sans crédit, pas de commerce d'aliments". La pratique du crédit<br />

est si généralisée que les micro-négociants qui, dès les premiers<br />

jours ont voulu y échapper, ont été "contraints" de s'y rallier<br />

ensuite pour conserver leur clientèle.<br />

En quoi consiste donc cette pratique? Faute de revenu<br />

régulier et surtout à cause de la fluctuation du pouvoir d'achat,<br />

nombreux sont les consommateurs qui n'arrivent pas à payer comptant<br />

les repas pris au dehors. La pratique consiste alors ..<br />

a<br />

différer le paiement des consommations quotidiennes à la fin du<br />

mois en cours.<br />

Dans l'I.A. environ 35 % des plats sont vendus à cré-<br />

dit. Le contrat tacite de consommation à crédit est passé au bout<br />

de trois mois environ de régularité du client. Il n'existe aucun<br />

autre moyen de contrainte pour assurer le remboursement que les<br />

pressions personnelles, le rapport de confiance et l'engagement<br />

de la réputation du client qui, avec le temps peut passer de la<br />

fidélité à la "trahison" (1). En l'absence de toute contrainte<br />

institutionnelle, la stratégie des micro-négociants consiste à<br />

renforcer l'obligation morale inscrite dans le rapport de<br />

confiance, soit en rappelant souvent au client agréé l'honneur du<br />

(1) M. Le Pape, Cl. Vidal, Espace abidjanais. Sociographie de la<br />

mobilité in L'Espace géographique, nO 3, 1986; p. 194.<br />

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