L'école, un terrain d'expérimentation
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VI DOSSIER El Watan ÉCONOMIE - Du 4 février au 10 février 2013<br />
PHOTO : EL WATAN<br />
L’Université et les nouvelles attentes du marché du travail<br />
par<br />
Mohamed<br />
Naïli<br />
Des diplômes par milliers et<br />
la compétence fait défaut<br />
Suite de la page I<br />
Une série de conférences et des ateliers<br />
de travail ont été organisés la<br />
semaine dernière à l’ENSA (Ecole<br />
supérieure agronomique) d’Alger par <strong>un</strong>e<br />
délégation de la Faculté de l’agriculture<br />
et de l’alimentation (FSAA) de l’Université<br />
Laval du Québec, dans le cadre d’<strong>un</strong>e<br />
convention qui lie les deux établissements<br />
d’enseignement supérieur. Les thématiques<br />
débattues à cette occasion sont directement<br />
liées aux attentes réelles et concrètes du<br />
secteur agricole et des industries agroalimentaires.<br />
Dans le même cadre, des sorties<br />
de <strong>terrain</strong> ont été organisées auprès des instituts<br />
techniques spécialisés en agriculture<br />
et au complexe de Cevital Food à Béjaïa.<br />
Des éléments de partenariat pertinents ont<br />
été mis en avant en matière de formation<br />
et de recherche, notamment pour le coencadrement<br />
des doctorants et la mobilité<br />
des étudiants pour des stages scientifi ques<br />
dans le cadre du système LMD. Dance ce<br />
cadre, le professeur Khaled Belkacemi,<br />
de l’<strong>un</strong>iversité Laval du Québec, a animé<br />
<strong>un</strong>e conférence sur la «nanotechnologie<br />
et les possibilités de révolutionner l’agriculture<br />
et l’industrie agroalimentaire». Il a<br />
ainsi mis en exergue les principaux progrès<br />
scientifi ques enregistrés au niveau mondial<br />
en matière de recherche sur les nanoparticules,<br />
ainsi que le potentiel d’application<br />
de celles-ci au niveau de différents secteurs<br />
économiques. Dans son exposé, le profes-<br />
ENSA<br />
Une école centenaire face<br />
au défi de l’excellence<br />
Créée en 1905, l’Ecole nationale supérieure<br />
agronomique d’Alger (ENSA ou ex-INA), a été<br />
promue depuis 2009 au rang de grande école<br />
d’excellence. La direction de l’école a défi ni <strong>un</strong>e<br />
stratégie de réforme des enseignements avec <strong>un</strong>e<br />
mise à niveau des infrastructures de recherche<br />
et de formation adossée sur <strong>un</strong>e construction<br />
de partenariats nationaux et internationaux.<br />
Cette stratégie est mise en œuvre par <strong>un</strong> plan<br />
de développement pluriannuel de l’école, qui se<br />
décline en plusieurs axes dont : la formation de<br />
l’ingénieur agronome de demain, la contribution<br />
effi cace à la souveraineté alimentaire du pays,<br />
donc intensifi er la production par l’intensifi cation<br />
du savoir, la mutualisation des compétences<br />
et des ressources à travers le projet Agropôle,<br />
seur a démontré comment «ces nanotechnologies<br />
offrent des possibilités avérées<br />
pour résoudre certaines problématiques<br />
cruciales qui se posent aujourd’hui, et<br />
certainement demain, dans les systèmes de<br />
production agricole, agroalimentaire et de<br />
l’environnement en Algérie. Par exemple,<br />
la salinité des sols dans différentes zones<br />
du pays, générée par les phénomènes climatiques<br />
et accentuées par des pratiques<br />
culturales inadaptées au niveau des systèmes<br />
de cultures et de productions agricoles,<br />
peut être réduite par l’application<br />
des nanotechnologies pour adoucir les<br />
eaux d’irrigation». C’est là <strong>un</strong>e illustration<br />
parfaite des avancées enregistrées dans<br />
le domaine de la recherche scientifi que,<br />
qui tente sans cesse de s’adapter aux<br />
attentes du <strong>terrain</strong>. Mais qu’en est-il de<br />
l’Algérie ? Le constat est peu réjouissant.<br />
Tel que le reconnaît Chérif Omari, enseignant-chercheur<br />
à l’ENSA, «le retard en<br />
matière de maîtrise et d’application des<br />
nanotechnologies dans l’agriculture et<br />
le génie agroalimentaire est immense.»<br />
Mais des efforts sont désormais consentis<br />
pour se mettre au diapason des nouveaux<br />
standards et des besoins exprimés. C’est,<br />
d’ailleurs, «ce type de partenariat avec<br />
l’<strong>un</strong>iversité Laval qui exprime la volonté<br />
de l’ENSA à œuvrer à la maîtrise de ces<br />
technologies de pointe, fondée sur la formation<br />
de la ressource humaine et l’acquisition<br />
des compétences scientifiques»,<br />
estime encore M. Omari.<br />
ou la construction de partenariats nationaux<br />
et internationaux pour le partage et le transfert<br />
de connaissances et de technologies. Pour<br />
appréhender les besoins dynamiques et complexes<br />
de l’environnement socio-économique,<br />
l’ENSA a lancé, en 2011, le projet Agropôle ou<br />
pôle de compétitivité avec l’appui du P r Hamid<br />
Bencharif de l’IAM de Montpellier. D’autres<br />
partenariats viennent d’être conclus également<br />
avec le Pôle foncier de Montpellier pour l’organisation,<br />
à Alger, en mars prochain, <strong>un</strong> cours<br />
international sur le foncier ou la FAO, dont <strong>un</strong><br />
workshop international est envisagé au printemps<br />
sur la thématique de développement de<br />
l’écotourisme dans les pays du Maghreb.<br />
M. N.<br />
DÉCALAGE AVEC LES ATTENTES<br />
DE LA SOCIÉTÉ<br />
Consciente des mises à niveau qui doivent<br />
impérativement être opérées, la sphère<br />
<strong>un</strong>iversitaire est interpellée pour s’adapter<br />
davantage aux nouveaux défi s que pose le<br />
monde économique. En effet, à l’ombre<br />
des progrès technologiques impressionnants<br />
et effrénés que subissent les secteurs<br />
économiques, l’adaptation des programmes<br />
d’enseignement aux nouveaux<br />
besoins du marché du travail constitue<br />
<strong>un</strong> défi majeur. Telle que présentée par le<br />
professeur Youcef Berkane de la faculté<br />
d’économie et de gestion de l’<strong>un</strong>iversité de<br />
Sétif dans son étude intitulée «Ajustement,<br />
développement durable et enseignement<br />
supérieur au Maghreb», la problématique<br />
de la qualité de l’enseignement est étroitement<br />
liée aux réformes économiques opérées<br />
à l’orée de l’entrée dans l’économie<br />
de marché. Il soulignera : «Un des problèmes<br />
majeurs des pays du Maghreb est<br />
que de plus en plus de je<strong>un</strong>es sortent des<br />
établissements d’enseignement supérieur<br />
sans pouvoir trouver <strong>un</strong> emploi, alors qu’il<br />
y a quelques années ils avaient même le<br />
choix entre plusieurs emplois. L’Etat avait<br />
<strong>un</strong>e fonction prépondérante en matière<br />
d’accumulation et de redistribution et<br />
plus particulièrement dans le domaine de<br />
l’emploi et de la formation. Les systèmes<br />
d’enseignement supérieur sont en grande<br />
partie publics et préparent à <strong>un</strong> travail<br />
salarié et stable dans le secteur public. Or,<br />
nous constatons qu’avec l’adoption des<br />
programmes d’ajustement structurel, qui<br />
constituent <strong>un</strong>e composante essentielle des<br />
politiques d’intégration des économies nationales<br />
dans <strong>un</strong> système mondial, et au fur<br />
et à mesure de la privatisation des entreprises<br />
publiques et de la mise en œuvre des<br />
réformes économiques, le secteur étatique<br />
commence à se fermer aux diplômés de<br />
l’enseignement supérieur et joue de moins<br />
en moins son rôle régulateur du marché du<br />
travail.»<br />
C’est d’ailleurs pour échapper à cet engrenage<br />
que M me Rosa Issolah, directrice de<br />
l’ENSA, estime qu’«il est temps de recentrer<br />
les thématiques de recherche autour<br />
des questions pertinentes avec des travaux<br />
qui intéresseraient le monde de l’entreprise<br />
et le secteur économique dans son<br />
ensemble.»<br />
Cette démarche se veut <strong>un</strong>e orientation<br />
vers «la recherche utile». Du coup, elle<br />
invitera les 28 doctorants actuellement<br />
inscrits à l’ENSA à multiplier les efforts<br />
pour mettre en valeur les résultats de leurs<br />
travaux de recherche à travers des publications<br />
dans des revues scientifi ques, car, le<br />
jour de la soutenance, les nouveaux docteurs<br />
seront évalués sur la base de leurs<br />
productions, ou publications. Toutefois,<br />
elle n’a pas omis d’ouvrir <strong>un</strong>e brèche sur<br />
<strong>un</strong>e autre lac<strong>un</strong>e non moins importante et<br />
qui est liée au «décalage entre les publications<br />
scientifi ques existantes et les attentes<br />
de la société». M. N.