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annibal en gaule - L'Histoire antique des pays et des hommes de la ...

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tout. Le caractère <strong>de</strong> l'homme <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> l'œuvre sont plus faits <strong>en</strong>core pour<br />

nous rassurer : Une justesse d'esprit peu commune dans son siècle <strong>et</strong> dans son<br />

<strong>pays</strong>, dit Gibbon, réunie à une sécheresse d'imagination qui y était <strong>en</strong>core plus<br />

rare, lui faisait facilem<strong>en</strong>t préférer le vrai, qu'il connaissait â fond, aux agrém<strong>en</strong>ts<br />

qu'il méprisait d'autant plus qu'il <strong>en</strong> était incapable.... Dans Polybe, tout est<br />

raisonné, tout est simple <strong>et</strong> sans parure1.<br />

L'imagination est-elle aussi pauvre chez Polybe que Gibbon nous l'affirme ? Il a<br />

une véritable faculté <strong>de</strong> reconstitution <strong><strong>de</strong>s</strong> scènes réelles dont il trouve<br />

l'indication brève ou faussée chez d'autres écrivains ; mais ce qui lui manque,<br />

incontestablem<strong>en</strong>t, c'est l'imagination créatrice. Il n'y a pas <strong>de</strong> grec moins apte<br />

que lui à être poète ou romancier.<br />

Son mépris <strong><strong>de</strong>s</strong> agrém<strong>en</strong>ts est extrême. Il faut voir comme il traite Phy<strong>la</strong>rque,<br />

chroniqueur fort apprécié <strong>de</strong> son temps, mais qui n'om<strong>et</strong> ri<strong>en</strong> pour exciter <strong>la</strong><br />

compassion du lecteur ; parle <strong>de</strong> femmes qui s'embrass<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> cheveux<br />

arrachés, <strong>de</strong> seins découverts ; représ<strong>en</strong>te les pleurs, les sanglots <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>hommes</strong>,<br />

femmes, <strong>en</strong>fants <strong>et</strong> vieil<strong>la</strong>rds, <strong>en</strong>levés pêle-mêle, <strong>et</strong>c. ; tout ce mélodrame, c<strong>et</strong>te<br />

émotion <strong>de</strong> pacotille, Polybe ne peut les souffrir. C'est, selon lui, une manière<br />

basse, efféminée, qu'il faut mépriser pour s'attacher exclusivem<strong>en</strong>t à ce qui<br />

constitue l'histoire <strong>et</strong> <strong>en</strong> fait toute l'utilité.... Il ne faut pas non plus qu'un<br />

histori<strong>en</strong> ait recours au merveilleux pour émouvoir ses lecteurs, ni qu'il imagine<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> discours qu'on a pu t<strong>en</strong>ir. Il faut <strong>la</strong>isser tout ce<strong>la</strong> aux poètes tragiques, <strong>et</strong><br />

borner à ce qui s'est vraim<strong>en</strong>t dit <strong>et</strong> fait, si maigre que ce soit <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce. La<br />

tragédie <strong>et</strong> l'histoire ont chacune leur but, <strong>et</strong> ces buts sont très différ<strong>en</strong>ts, La<br />

tragédie doit provoquer l'admiration <strong><strong>de</strong>s</strong> spectateurs, leur procurer <strong>de</strong>'<br />

impressions agréable ? par <strong><strong>de</strong>s</strong> discours qui donn<strong>en</strong>t le plus possible l'illusion <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> vie ; l'histoire, au contraire, n'a qu'à instruire <strong>et</strong> à démontrer par <strong><strong>de</strong>s</strong> discours<br />

<strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> re<strong>la</strong>tions véridiques. La tragédie ne visant qu'à divertir le spectateur,<br />

emploie’ le faux sans scrupule, pourvu qu'il reste vraisemb<strong>la</strong>ble ; mais, dans<br />

l'histoire, il s'agit d'être vrai (II, 56).<br />

Polybe se montre plus farouche <strong>en</strong>core, lorsqu'il reproche à Zénon <strong>de</strong> s'être<br />

beaucoup moins attaché à <strong>la</strong> recherche <strong>et</strong> à <strong>la</strong> filiation <strong><strong>de</strong>s</strong> événem<strong>en</strong>ts qu'à<br />

l'élégance <strong>et</strong> à <strong>la</strong> richesse du style.... Pour moi, ajoute-t-il, je crois qu'il faut<br />

s'efforcer <strong>de</strong> donner à l'histoire tous les ornem<strong>en</strong>ts qui lui convi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t, <strong>et</strong> qui <strong>la</strong><br />

r<strong>en</strong>dront plus utile <strong>en</strong> <strong>la</strong> faisant plus intéressante ; mais un homme s<strong>en</strong>sé ne doit<br />

pas faire <strong>de</strong> ce<strong>la</strong> son obj<strong>et</strong> principal, son premier but. Il y a, dans l'histoire,<br />

d'autres parties plus dignes d'att<strong>en</strong>tion, <strong>et</strong> où il est plus glorieux d'exceller. C'est<br />

du moins ainsi qu'<strong>en</strong> jugeront les écrivains compét<strong>en</strong>ts dans les questions<br />

politiques....<br />

.... Il faut faire ses efforts pour réussir dans toutes les parties <strong>de</strong> l'histoire ;<br />

maie, si l'on ne peut pas, c'est d'abord aux plus importantes <strong>et</strong> aux plus<br />

nécessaires qu'il faut s'appliquer. Si je fais c<strong>et</strong>te observation, c'est que dans les<br />

autres arts <strong>et</strong> dans les sci<strong>en</strong>ces comme <strong>en</strong> histoire, on néglige le vrai <strong>et</strong> l'utile<br />

pour rechercher ce qui brille <strong>et</strong> frappe l'imagination (XVI, 7).<br />

Ainsi, les détails émouvants, les anecdotes piquantes, les ornem<strong>en</strong>ts du style ne<br />

contribueront pas à écarter Polybe du droit chemin <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> stricte vérité. La<br />

superstition, les s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts religieux ne l'influ<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t pas davantage. C'est un<br />

esprit libre, comme le fait remarquer Val<strong>et</strong>on, <strong>et</strong> <strong>en</strong> outre, selon l'expression<br />

1 GIBBON, Mémoires, traduction française, Paris, an V, t. II, p. 18.

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